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BOUND4

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Unies/ Bound

 

par Melissa Good

 

Traduction : Katell et Fryda

 

 

*****

Partie 4A

*********

 

Chapitre 31

 

Xena regardait le soleil se glisser de plus en plus bas dans le ciel, étirant des larges bandes de lumière rougissante sur la clairière où ils étaient assis. Elle leva les yeux au moment où Gabrielle revenait d'un tour à la rivière, portant un morceau de lin plié et une outre pleine d'eau.

 

" Donne-moi tes mains. " Dit le barde calmement en se rasseyant, et elle versa de l'eau sur le linge.

 

" Tu ne... " Xena commença à parler, puis s'arrêta, et bougea ses mains couvertes de sang de ses genoux vers sa partenaire au-dessus de l'herbe. Elle regarda en silence Gabrielle nettoyer tout le sang, s'assurant de passer entre les longs doigts de la guerrière, et en remontant le long des avant-bras musclés. " Merci. " Murmura-t-elle lorsque le barde eût fini, lui faisant un petit sourire. " Je me sens bien mieux. "

 

" Pas de problème. " Répondit Gabrielle, en lui tendant l'outre d'eau. " Tu as l'air d'avoir soif. " Elle attendit et reçut le regard amusé de la guerrière. " Ouais, ouais, je sais. Bois quand même. "

 

Xena rit doucement, et retirant le bouchon de l'outre, elle le fit. " Je suis contente que tu aies apporté ceci en revenant. " Commenta-t-elle après une longue gorgée.

 

Le barde sourit. " Les blessures requièrent la boîte médicale et de l'eau. Tu m'as appris ça, tu te souviens ? " Elle se réinstalla, collant son épaule contre celle de Xena, et elle regarda la scène en face d'elle avec un calme soupir. " Ce n'était pas la fin que j'espérais. "

 

Elaini avait placé les membres froissés d'Ereth et installait le garçon inconscient plus à l'aise. Elle avait convaincu Gennen de changer sa position ankylosée, pour une autre avec la tête de son Compagnon blottie sur ses genoux. Gennen avait les yeux fermés, et semblait murmurer à son compagnon tombé. " Est-ce qu'il est... " Murmura le barde, sachant que seule les oreilles aiguës de Xena saisiraient sa voix.

 

La guerrière soupira et installa un long bras autour des épaules de Gabrielle. " Je ne sais pas. " Elle murmura en mettant leurs têtes plus près l'une de l'autre. " Il a perdu beaucoup de sang. " Elle leva les yeux par-dessus la tête du barde. " Voilà le brancard. " Elle rit soudain. " Dieux... regarde-ça. "

 

Les êtres de la forêt traversaient la rivière, portant la civière, et perché dessus, ses petites pattes se tenant à cause du mouvement, se tenait Arès.

 

" Roo ! ! " Il grogna lorsque ses yeux tombèrent sur elles. " Roo ! ! ! " Il rampa pour descendre du brancard, et courut lourdement vers elles, trébuchant sur ses pattes dans sa précipitation.

 

" Salut, mon garçon. " Dit Xena, en ébouriffant sa fourrure. " Est-ce que nous t'avons laissé là-bas tout seul ? Désolée. " Il grimpa sur sa poitrine en rampant et mit son museau à côté de sa bouche. " Hé... arrête ça. "

 

" Grr. " Le loup protesta et commença à lui lécher le visage.

 

" Arès. " Xena soupira en roulant les yeux, pleinement consciente du barde qui ricanait à son côté. " Assez. " Elle le gronda et commença à se mettre debout, consciente de la soudaine pression de la prise ferme de Gabrielle sur son bras pour la soutenir.

 

Elle fut vraiment contente qu'elle l'ait fait lorsque le monde environnant s'assombrit abruptement lorsqu'elle se leva et que seul cette prise l'empêcha de s'écraser sur le sol. " Bon sang. " Murmura-t-elle entre ses dents, en fermant les yeux et en demandant à sa tête d'arrêter de tourner. Ça le fit après une minute, et elle rouvrit les yeux et les laissa se concentrer sur le visage très inquiet de Gabrielle. " OK. " Elle fit un petit mouvement de la tête, sentant un pincement dans sa nuque qui l'inquiéta. " C'est mieux. "

 

" Tu retournes au lit dès que nous rentrons au village. " Dit le barde en lui lançant un regard direct.

 

Xena sourit. " OK... tant que tu te joins à moi. " Avec un clin d'œil, ce qui lui valut un sourire grognon en retour de la part de Gabrielle. " C'est mieux. " Dit-elle en tapotant la joue du barde.

 

Les êtres de la forêt se dépêchèrent de charger Ereth avec précaution sur la civière et, Xena le remarqua avec intérêt, ils installèrent Gennen à côté de lui.

 

" Ils l'ont aussi fait pour nous. " Murmura Gabrielle dans son oreille, alors qu'elles suivaient la procession de retour vers le village.

 

" Je ne... " Commença à dire Xena, puis elle se tut pendant un moment. " Oh, attends. Oui. Je me souviens de m'être réveillée à un moment. " Elle sourit. " Je me souviens que tu étais là. "

 

Gabrielle sourit. " Ouais... ça c'est sûr ! " Elle lança un regard en coin à Xena. " Je présume que c'était mon tour de m'occuper de toi, pour changer. "

 

Xena haussa un sourcil et leva une main pour écarter doucement les mèches rebelles de cheveux dorés-roux de ses yeux. " Tu fais toujours du bon travail dans ce domaine, mon amour. "

 

" C'est vrai ? " Gabrielle soupira. " Ça n'en a jamais l'air. " Elle fronça les sourcils.

 

Xena s'arrêta en plein milieu du chemin, et attrapa le bras de Gabrielle, ce qui fit tourner le barde pour lui faire face. " Quoi ? " Dit la guerrière brusquement, lui lançant un regard direct. " Qu'est que c'est censé vouloir dire ? "

 

Gabrielle ferma les yeux. Bon sang, toi et ta grande gueule, Gabrielle. Pourquoi ne peux-tu pas apprendre à penser avant de parler ?" Rien... laisse tomber. Je n'étais pas... oublie. " Sachant parfaitement que ça n'arriverait pas. " Oublie... juste. "

 

Xena ne répondit pas, gardant simplement les yeux sur elle avec une douce tristesse.

 

" Je n'étais pas... " Gabrielle soupira, sans aucune défense contre ce regard. " Désolée... ce tour dans la montagne après que tu as été blessée cette dernière fois, me fait toujours... " Elle hésita. " J'aurais dû pouvoir en faire plus. " Et c'était un démon qu'elle n'avait pas complètement exorcisé, étant allée si loin, ayant donné tant d'effort, sans résultat.

 

Xena jeta un coup d'œil par-dessus l'épaule du barde, vers les êtres de la forêt qui s'éloignaient, et elle les chassa de ses pensées. " Ecoute, Gabrielle - ce n'était pas ta faute. Rien ne l'était... dieux, tu as passé des jours, toi-même blessée, à grimper cette montagne. Ce n'est pas ta faute si j'ai décidé de... " Juste là elle s'interrompit. " Dieux. " Ce n'est pas de ta faute si j'ai décidé d'abandonner. Pas de ta faute du tout.

 

" Tu aurais trouvé un moyen d'arranger les choses. " Murmura Gabrielle, regardant sans voir par-dessus l'épaule de la grande guerrière. " Tu le fais toujours. Je ne peux pas me mesurer à ça. " Elle leva des yeux vert océan et eût un contact tressaillant avec le regard intense de Xena. " Je suis si effrayée de faillir de nouveau. "

 

La guerrière entoura le visage de Gabrielle de ses mains, et la regarda simplement pendant un très long moment. " Gabrielle... " Dit-elle dans un souffle, laissant un faible sourire tordre ses lèvres. " Ne sais-tu donc pas que c'est aussi ma plus grande peur ? " Elle prit une inspiration. " Qu'un jour il y aura une flèche que je ne pourrai pas arrêter, une chute que je ne pourrais pas rattraper... que je serai diminuée à tes yeux ? " Elle se rapprocha et sentit les bras de Gabrielle se lever par réflexe, s'installer autour de sa taille. " Je pense que nous sommes toutes les deux en de bonnes mains. "

 

Un long silence suivit, pendant lequel Gabrielle remâcha cela, et pencha finalement la tête contre la poitrine de Xena, et elle respira l'odeur du tissu séché par le soleil. " C'est ce que tu penses, hein ? "

 

" Ouais, je le pense. " Répliqua Xena. " Je me sens très en sécurité dans les tiennes. "

 

Les yeux verts clignèrent vers elle avec un petit sourire. " Vraiment ? "

 

Xena hocha la tête et mit un baiser sur son front. " Vraiment. Tu es une personne de ressource, mon barde. Je mettrais ma confiance en toi n'importe quand. "

 

" Roo ! " Arès soupira, depuis sa position assise près de la botte gauche de Xena. Il mit son museau sur son mollet et tira sur un morceau de cuir. " Roo ? "

 

Elles regardèrent toutes les deux vers lui et rirent. " On t'ennuie, Arès ? " Demanda Xena, sans lâcher Gabrielle.

 

" Roo. " Le chiot grogna, s'installant sur son arrière-train pour mâchouiller un lacet de la botte de Xena.

 

" Ouais... " Gabrielle approuva doucement, sentant une chaleur surprenante couler en elle. Je sais que je me sentais un peu mal à l'aise... c'est drôle, après tout ce temps, je pensais que j'en avais fini avec ça... mais c'était très agréable de l'entendre dire ça... " Désolée d'avoir été si bête. Tout ce truc m'a un peu abasourdie. "

 

Xena rit doucement avec ironie. " Moi aussi. " Elle laissa ses avant-bras tomber sur les épaules de Gabrielle, et entrelaça ses doigts proprement derrière la tête du barde. " Allons-y... je ne sais pas pour toi, mais ça a été une journée plutôt longue pour moi. " Admettant finalement, en grognant, qu'elle était loin de sa condition physique habituelle.

 

Gabrielle se calma immédiatement, reconnaissant l'aveu pour ce qu'il était. " OK - ils nous ont mises à un endroit tranquille près de chez Jessan. A moins que tu ne doives retourner chez la guérisseuse. " La voix comportait une question.

 

" Nan. J'ai juste besoin d'un lit chaud, et de toi. "

 

" Oh vraiment ? " Gabrielle gloussa. " Est-ce que c'est une invitation ? "

 

" Oui, oui. " Répondit Xena, puis elle pencha la tête et captura les lèvres de Gabrielle dans un long baiser. " Intéressée ? " Demanda-t-elle lorsqu'elles s'interrompirent, et elle sentit la main du barde commencer à se balader sur son corps. " Je présume. " Elle rit légèrement, passant un doigt le long de la nuque de Gabrielle, et la sentant déglutir. Elle sentit le pouls battre plus vite sous ses doigts sensibles lorsqu'ils se posèrent sur la veine jugulaire.

 

Puis sa propre respiration s'arrêta lorsque les chaudes mains de Gabrielle glissèrent sous sa tunique et commencèrent à remonter le long de sa cage thoracique, les pouces glissant doucement sur les muscles tendus. " Gabrielle... "

 

" Mmm ? " Répondit le barde en se rapprochant.

 

" Une forêt entourée d'ennemis potentiels n'est pas le meilleur endroit auquel je penserais pour faire ça. " Lui rappela la guerrière avec un sourire bizarre.

 

" Hé ! " Gabrielle gloussa. " C'est toi qui as commencé. " Mais elle retira ses mains à contrecœur et mit un bras autour de la taille de Xena. " Mais je présume que tu as raison. "

 

Chapitre 32

 

" Il est sûr que c'était une patrouille de Sécan ? " Demanda Lestan avec un soupir. " Par les bottes d'Arès. " Il jeta un coup d'œil à son fils, qui était perché sur un coin de la table, les bras croisés sur sa poitrine couverte de fourrure dorée.

 

Jessan hocha la tête en la secouant. " Pauvres gamins. " Il se tourna lorsque Wennid entra dans la salle de conférence, portant un plateau avec de grandes tasses. " Merci maman. " Dit-il en prenant une tasse fumante.

 

Wennid tendit une tasse à Lestan, et prit la troisième. " Elaini dit qu'il a une chance de s'en sortir. " Elle les regarda. " Pas une bonne, mais une chance. " Elle s'étira avec lassitude. " Je vais passer quelque temps là-bas, au cas où. " Elle se tourna vers Jessan. " Elaini dit qu'il n'aurait pas eu cette chance sans Xena. Est-ce vrai ? "

 

Jessan sourit et pencha la tête. " Tu doutes de la parole d'Elaini ? " Contra-t-il, en levant un sourcil broussailleux. " Bien sûr que c'est vrai. "

 

Wennid s'assit sur la chaise du bout et posa son menton sur ses mains à la fourrure claire, lui jetant un regard en-dessous brillant. " Ecoute, je suis vraiment désolée d'avoir un problème pour concilier le boucher qui a brûlé un village dans la vallée d'à côté, avec la personne pour laquelle tu sembles avoir tant de tendresse, Jessan. " Elle prit une longue gorgée de cidre chaud, et fixa en ruminant les profondeurs restantes. " Mais je m'ajuste. Maintenant je dois me la représenter comme une guérisseuse. C'est un peu trop, mon chéri. "

 

Lestan grogna, et laissa tomber les mains sur ses épaules. " La vie n'est qu'une série d'ajustements, mon amour. " Il leva les yeux vers son fils. " Alors, est-ce qu'Elaini est une nouvelle convertie au culte de Xena ? "

 

Jessan sourit. " Je le pense. " Il rougit un peu. " Je lui ai appris à nager aujourd'hui. "

 

Lestan et Wennid échangèrent des regards. " C'était gentil de ta part, mon chéri. " Remarqua Wennid, en prenant une longue gorgée de cidre. " Nous avons entendu dire que vous étiez tous sortis pour un pique-nique. "

 

L'être de la forêt grommela. " Et c'était une bonne chose, ça, pour Ereth. " Il se souvint de sa Compagne.

 

Wennid soupira. " Je sais, je sais. " Elle leva les yeux vers les deux autres. " Très bien. " Elle prit une inspiration et regarda au fond de son cœur. Puis-je oublier ce que j'ai vu ?

 

C'était un matin froid et brumeux, et elle était cachée dans les arbres, regardant l'activité qui régnait dans le village humain. C'était d'abord une communauté d'éleveurs, riche de provisions et de maïs, mais pas grand-chose d'autre, et aucun commerce pour ainsi dire.

 

Tout à coup, il y eût une tonnerre de sabots, et les attaquants furent sur eux, frappant du pied et avec des battes, mettant le feu aux toits en chaume, et éparpillant à la fois les troupeaux d'hommes et d'animaux. Ça avait commencé comme un essai d'intimidation, mais la résistance obstinée des villageois avait mis les attaquants en colère, et les coups de poing et de pieds avaient dégénéré en une morsure sans merci et irréversible de l'acier nu.

 

La saignée avait été terrible, se souvint Wennid, alors qu'elle regardait au travers de la brume épaisse et noire des huttes fumantes, et elle vit les silhouettes qui couraient et qui criaient passer hors de sa vue, suivies par des attaquants rigolards, qui les traquaient comme des animaux.

 

Wennid avait eu un haut-le-cœur, et s'était retournée, mais pas avant d'avoir repéré une forme galopante qui approchait du village, et elle eut les yeux attirés par elle. Une femme, sur un cheval doré, mais armée et couverte d'armure autant que les attaquants. Elle chevauchait pour les rejoindre avec un rire sonore, qui résonnait encore dans les oreilles de Wennid, même après tout ce temps.

 

Elle n'avait jamais oublié ce rire, ni cette silhouette, ni ce sifflement d'acier vivant lorsqu'elle avait dégainé son épée et avait disparu dans les nuages de fumée noire. Mais Wennid avait entendu le hurlement qui avait suivi, et elle avait vu les ruines du village après ça.

 

Une longue marche dans la ville silencieuse et dans un brouillard mortel, en sécurité, parce qu'elle était sûre d'être la seule chose vivante à des lieues à la ronde. Sa Vue le lui avait dit. Les attaquants étaient partis depuis longtemps... elle était juste restée un moment, assez longtemps pour imprimer dans son esprit le sentiment dont elle savait qu'il durerait toute sa vie.

 

Et puis... au milieu du souvenir, des détails longtemps enfouis dans sa mémoire firent surface. Des cadavres, il y en avait, oui - mais des attaquants autant que des villageois, et les attaquants avaient été taillés en pièces aussi parfaitement que leurs victimes.

 

Elle s'interrogea. Des villageois avaient-ils été capables de prendre, peut-être, une épée capturée à un attaquant tombé et de causer ce genre de dommage ? Est-ce que les attaquants s'étaient retournés les uns contre les autres ?

 

Ou, lui montra son esprit logiquement, et brutalement... est-ce cette femme qui riait, et dont elle avait assumé qu'elle était leur chef, ne l'était en aucune sorte ? Et si... au lieu de ça... elle était un vengeur, chevauchant avec ce rire joyeux que les guerriers de sa sorte exhibaient lorsqu'ils allaient à la guerre... une mentalité qu'elle n'avait jamais comprise.

 

Et si ?

 

Et si j'avais eu tort pendant tout ce temps... bien que toutes les atrocités qu'elle avait commises ne puissent pas avoir été des erreurs. Elle a fait le mal. Elle l'a dit elle-même. Mais ils disent qu'elle a changé. Et si c'était vrai ?

 

" Je pense que je vais parler à votre parangon de vertu. " Dit Wennid d'un ton songeur, les surprenant tous les deux. Je pense que je veux regarder dans ces yeux étranges et clairs dans lesquels vous semblez tous trouver quelque chose de si fascinant, et voir quel genre de personne elle est réellement. Voir pourquoi les dieux semblent se moquer de notre don en le lui accordant. " Oui, je vais le faire. "

 

Lestan haussa les épaules et massa légèrement ses épaules. " Je voulais moi-même lui demander au sujet de Sécan... pourquoi ne pas m'accompagner ? "

 

Jessan se leva et tendit une main. " Non. "

 

Ils le regardèrent tous les deux comme s'il lui était poussé une queue. " Quoi ? " Bredouilla Lestan. " Tu... ce matin... je pensais... "

 

Son fils contourna rapidement la table et mit une main sur son bras. " Pas encore. "

 

" Et pourquoi donc ? " Demanda Lestan, d'un ton raisonnable. " Jessan, ça n'a pas de sens. "

 

" Je la connais. " Répondit Jessan doucement. " Elle souffre encore, beaucoup, père - et si tu lui parles de Sécan, elle va vouloir faire quelque chose. Et... tu as dit que nous avions encore quelques jours. Attends un peu. "

 

Lestan l'étudia en silence pendant un moment. " Je veux juste lui demander conseil, fils. Elle ne peut pas être mêlée à ça, et tu le sais bien. Pas qu'elle ne doive pas, elle ne peut pas. " Elle ne peut pas pour trois raisons, détailla son esprit. Elle ne faisait pas partie de son peuple. Elle n'était pas de son clan, et elle était, bien que beaucoup le niaient, la moitié d'un Lien. " Mais... si tu penses que je devrais, je vais attendre demain au moins... je sais qu'elle a pris de mauvaises blessures. "

 

Mais une partie de lui savait que Jessan avait raison. Une partie de lui savait qu'une fois qu'il l'aurait mêlée à ça, des choses pourraient arriver, sur lesquelles il n'aurait aucun contrôle. Parce qu'il n'avait aucun contrôle sur elle, et elle chassait suivant ses propres règles, elle épiait sa proie sans égard pour les traditions de quiconque. Une partie de lui avait peur de ça. Mais une partie plus grande ressentait le frisson sous la peau, qui faisait dresser partiellement sa fourrure et le faisait penser que les choses... étaient possibles. Elle en était la cause. Et c'était un sentiment enivrant.

 

Chapitre 33

 

Xena aimait beaucoup le petit chalet qu'on leur avait proposé. Il était dans un renforcement en retrait de la place principale, avec un espace vide tout autour, mais il était protégé de la plupart des affairements du village par un anneau de chênes paisibles qui bruissaient plaisamment dans la brise du soir. A l'intérieur, la maisonnette était simplement pourvue, mais avait de larges fenêtres, et les tissus sur les murs étaient teintés d'un bleu apaisant qui allait avec le couvre-lit, et le large divan bas qui faisait face à la fenêtre principale de l'espace de séjour.

 

" J'aime le bleu. " Commenta Xena, en s'extirpant de sa chemise couverte de sang, et une fois de plus humide, pour enfiler une chemise de nuit douce. Elle plia la tunique pour la nettoyer plus tard et s'assit sur le large divan, laissant sa tête retomber et reposer contre le dossier. Bon sang. Elle soupira pour elle-même. Les vertiges n'avaient pas diminué, et elle commençait à s'inquiéter à ce sujet. Le sang aurait dû être remplacé avant et… sa main toucha le point douloureux sur sa nuque, où elle pouvait sentir une tension légèrement gênante qu'elle avait remarquée ce matin.

 

Ça n'avait pas passé, et elle se demandait maintenant, alors qu'un frisson de froid la traversait, si elle ne s'était pas fait plus de dommages permanents qu'elle ne l'avait d'abord pensé. Les blessures de son dos l'effrayaient - elle n'en avait eu qu'une, une seule fois, et ça… avait mis plusieurs lunes à guérir, et encore plus pour retrouver l'usage complet de son corps. Ceci… n'était pas une bonne période pour renouveler la chose.

 

Le tissu bougea lorsque Gabrielle s'installa près d'elle et elle leva les yeux. " Salut. " Annonça le barde. " Je suis de retour. " De la cuisine du village où elle était allée rassembler quelques trucs pour dîner. " Tu as l'air lessivé. Tu veux bien rester simplement assise et me laisser te nourrir ? "

 

Xena leva un sourcil. " C'est plutôt décadent. N'est-ce pas ? " Mais elle souriait et repoussa tous ses soucis pour un moment, tout en se détendant et en permettant au barde d'installer un tranchoir entre elles, où étaient posés un énorme bol de ragoût fumant doucement et un morceau de pain fraîchement cuit.

 

Arès trotta vers elle et grimpa sur ses genoux, s'asseyant pour regarder d'un visage à l'autre en attente.

 

" Tu vois ce que tu as créé ? " Gabrielle la taquina gentiment, tout en se mettant au travail avec des bouchées passées alternativement à la guerrière et à elle-même. " Un monstre. "

 

" Mmm…Mmmm… " Xena hocha la tête en mâchant pensivement un morceau de viande de venaison " Terrible. " Elle avala et prit une gorgée du cidre parfumé que le barde avait apporté. " Ce n'est pas mauvais. " Elle fit un compliment vers la tasse et la leva vers la bouche de Gabrielle pour qu'elle essaie.

 

" Ooooh… " Le barde sirota avec appréciation. " Pas mauvais du tout. " Elle découpa un autre grand morceau de viande et l'offrit à sa partenaire. " Allons… il y en a encore beaucoup à finir. "

 

" Oui, oui. " Marmonna Xena en coupant le morceau avec les dents pour en donner une moitié à Arès. " Contente que tu en aies apporté beaucoup. " Elle sourit à l'expression du barde. " Hé… il doit manger aussi, tu sais. "

 

" Roo. " Arès approuva et se laissa tomber sur les genoux de Xena, serrant sa prise entre ses pattes qui devenaient de plus en plus grandes et mâcha, levant les yeux aussi souvent que possible pour voir s'il n'en venait pas plus.

 

Gabrielle maintint un flot régulier de papotage pendant qu'elles mangeaient, incluant les ragots du village qu'elle avait saisis en allant chercher le dîner. " Les rumeurs au sujet de Jess et d'Elaini vont déjà bon train. " Elle ricana, en beurrant la dernière tranche de pain et elle en mordit un morceau puis offrit la tranche à Xena.

 

La guerrière rit doucement et mâcha son pain, notant avec surprise qu'elles avaient presque fini cette énorme portion de ragoût à elles deux. " C'est vraiment bon. " Commenta-t-elle, puis elle prit le bol du tranchoir, et offrit le reste à Arès. " Tiens, mon garçon. "

 

Le loup se leva sur les genoux de Xena, et colla sa tête dans le bol, la queue battant avec enthousiasme ; il en finit le contenu, léchant le bol jusqu'au bout, puis transféra sa langue râpeuse vers la main de Xena, qui tenait toujours le récipient. " Hé… " La guerrière protesta. " Arrête ça. "

 

Gabrielle finit le pain et soupira joyeusement, mettant le tranchoir hors du chemin, pour venir se blottir dans les bras accueillants de Xena. " Je me sens bien mieux maintenant. " Admit-elle, en glissant les bras autour du corps de la guerrière, et en posant la tête sur l'épaule bien à propos.

 

" Moi aussi. " Xena approuva, et réfléchit au fait que c'était tout à fait vrai, en tout cas. Sauf la douleur dans sa nuque, tout le reste semblait s'être arrangé de lui-même, et elle ne souffrait plus d'aucune raideur après les activités de la journée. Alors c'était en quelque sorte OK. Et aussi longtemps qu'elle ne se levait pas… sa bouche se tordit un peu. Et bien… ça devrait être faisable… " Alors… " Dit-elle, en se penchant pour enlever les dernières miettes des lèvres de Gabrielle avec un talent de connaisseur. " Où en étions-nous ? "

 

Un rire profond de gorge sortit du barde, qui bougea ses mains sur la forme de Xena. " Et bien, j'étais juste là… " Elle sourit lorsqu'elle sentit Xena réagir à son toucher. " Et je pense que tu étais… " Une longue pause alors que les lèvres de Xena trouvaient leur place. " Oh oui. " Dit Gabrielle dans un souffle. " En plein dans le mille. " Elle ferma les yeux en sentant le sursaut sensuel provoqué par la pression du bout des doigts de la guerrière sur sa peau sensible. " C'est définitivement plus agréable que d'être dehors dans la forêt. " Marmonna-t-elle, puis elles laissa la chaude vague de passion la saisir.

 

Chapitre 34

 

Une longue habitude amenait Xena à se réveiller avant l'aube, et elle passait quelques minutes à écouter tranquillement les doux sons du village endormi, qui s'immisçaient par les larges fenêtres, en même temps que la senteur agréable des fleurs sauvages et l'odeur remarquable d'une légère pluie d'avant-aube.

 

Comme je souhaiterais me sentir aussi paisible que ce village. Elle baissa les yeux lorsque Gabrielle remua et resserra son étreinte, enfonçant sa tête avec plus de sécurité dans le creux de l'épaule de Xena. Dans l'obscurité, elle pouvait juste se faire une idée du profil du barde, et elle leva une main pour ôter doucement les cheveux de son visage, son toucher amenant un léger sourire aux lèvres de sa partenaire endormie.

 

La guerrière soupira et reposa sa tête contre la douce matière des coussins sur le large divan, où elles avaient décidé de simplement se blottir la nuit précédente, après avoir passé… Xena sourit pour elle-même. Pas mal de temps à éliminer le stress de la journée. Elle tressaillit lorsqu'elle sentit la tension qui rongeait toujours son épine dorsale, cependant, et elle essaya doucement de tourner son cou, s'arrêtant lorsqu'une douleur acérée la traversa brusquement.

 

Bon sang. Elle tourna les yeux vers le plafond sombre, et sortit une longue expiration. Cela ne signifiait rien d'autre que des problèmes, bien que d'une certaine façon, cela pourrait faciliter sa décision. Fondé sur sa dernière expérience d'une blessure au dos, ceci était définitivement quelque chose qui demanderait pas mal de temps pour récupérer, et il n'y avait aucun doute que la maison serait un bon endroit pour le faire.

 

Ce n'est pas comme si tu n'y pensais pas déjà, se dit-elle. Mais que la décision lui soit imposée… ça, ça ne lui plaisait pas trop.

 

Arès leva une tête somnolente, et bâilla, clignant des yeux vers elle. " Shh. " Lui murmura-t-elle. " Personne n'est réveillé. " Elle laissa une main reposer sur son dos et le chiot reposa son museau avec obéissance entre ses pattes, et il ferma les yeux. " Petite chose paresseuse. " Xena rit doucement entre ses dents.

 

Est-ce que ce n'est pas de ça que j'ai peur si ceci me force à rentrer à la maison ? Une analyse honnête. Ce serait si, si facile de retourner là-bas, pour se remettre… mais la dernière fois, elle avait eu une nécessité sinistre qui l'avait poussée à dépasser la blessure, et à retrouver sa forme. Qu'en était-il maintenant ?

 

Xena soupira. Maintenant, elle le savait, oui, elle irait à la maison ça ne faisait pas de doute, et retomberait dans la routine quotidienne, et elle perdrait tout… son acuité, ses talents… parce qu'il n'y aurait aucune raison pour elle de s'imposer de traverser la douleur que cela demanderait pour les retrouver.

 

Elle ne semblait simplement plus avoir l'auto-discipline de le faire, elle l'avait su après une quinzaine de jours passés à paresser avec Gabrielle à la maison. Elle n'avait pas fait un seul exercice pendant tout ce temps, et ce qui était encore plus effrayant… ça ne lui avait pas manqué. Du tout. Et la vérité était dure à avaler. Toris l'avait taquinée le dernier jour, sur le fait qu'elle perdait son avantage, et elle l'avait trempé dans une mare de boue, puis jeté dans le ruisseau pour lui prouver qu'il avait tort. Mais il n'avait pas tort. Et elle le savait diablement bien.

 

La question était, est-ce qu'elle s'en souciait ?

 

Xena reposa sa tête, et y réfléchit pendant un long moment, écoutant l'instant où la nuit et le jour, les ténèbres et la lumière se rejoignaient. Un long moment immobile, où le monde entier semblait retenir sa respiration, attendant la première teinte légère de couleur à l'horizon.

 

Elle réfléchit à comment elle ressentait ce qu'elle faisait. Et ce qu'elle était. Et elle sut que ses capacités étaient tissées tellement serrées dans l'image qu'elle avait d'elle-même, qu'elle n'était pas sûre de ce qui resterait si elle laissait cela se dérouler.

 

Ouais, je m'en ferais. Xena se l'admit. Alors, je présume que je dois juste trouver à quel point c'est mauvais, et quelles sont les limites que ça va me mettre. Peut-être que si je continue à me dire que je déteste être malade, je peux être motivée pour dépasser ça.

 

" Lorsque tu seras prête à parler de ce qui te tracasse, " Une voix tranquille la surprit, " tu sais où me trouver, d'accord ? Je suis la petite aux cheveux clairs qui parle beaucoup. "

 

Xena sentit un sourire tirer ses lèvres contre sa volonté, et elle baissa la tête pour croiser les yeux verts endormis qui la regardaient. Les mots du barde faisaient écho aux siens, il n'y a pas si longtemps, dans une clairière non loin de Potadeia. " Salut. " Elle gagna du temps, tendant la main pour caresser les doux cheveux de Gabrielle. " Je réfléchissais. "

 

" A quel sujet ? " Demanda doucement Gabrielle en se blottissant plus près, et elle se fondit contre le corps de la guerrière. " S'il te plaît. " Ses yeux cherchaient ceux de Xena et elle leva une main pour toucher sa poitrine. " Ne m'enferme pas à l'extérieur de ça. "

 

" Jamais. " Dit Xena, en inspirant profondément. " Tu le sais bien. " Elle s'interrompit un moment. " Un de ces rochers m'a apparemment frappée au mauvais endroit. " Elle s'arrêta et regarda le visage tendu de Gabrielle.

 

" Ces vertiges. " Réalisa le barde, ses mains serrant le tissu de la chemise de Xena.

 

La guerrière hocha un peu la tête. " Je le pense, oui. " Elle bougea ses épaules d'inconfort. " Je peux sentir cette tension dans ma nuque. " Elle leva une main et montra l'endroit. " Ça fait mal. "

 

Gabrielle mâchouilla sa lèvre pendant un court instant. " Qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce que ça va aller ? "

 

Xena reposa sa tête contre le capiton, et ferma les yeux. " Je ne sais pas. " Et c'était une des choses les plus difficiles qu'elle ait jamais dite à sa partenaire. " Ça dépend simplement de l'importance des dégâts, et de la difficulté de ce que je devrai faire pour l'arranger. "

 

Le barde resta silencieux un moment. " Tu as peur. " Finit-elle par murmurer.

 

" Ouais. " La réponse parvint calme dans l'obscurité.

 

Gabrielle laissa ses mains commencer un doux mouvement sur le corps tendu autour duquel elle était enroulée. " Pourquoi ? " Demanda-t-elle, en entendant le battement rapide du cœur sous son oreille. " Tu as déjà été blessée… dieux, Xena, je déteste quand tu l'es, mais tu es toujours… " Elle haussa les épaules, et sut que la guerrière le sentit. " passée au travers. " Elle leva les yeux de nouveau.

 

" Je sais. " Xena soupira. " Peut-être que c'est ce dont nous avons parlé plus tôt. Au sujet de rentrer à la maison… ce genre de douleur… Hadès, Gabrielle, la dernière fois que j'en ai eu une comme ça, ça m'a pris presque six mois à m'en remettre. "

 

Le barde haussa les épaules. " Alors… nous rentrons, pour un moment. Tu en parlais de toutes les façons, n'est-ce pas ? " Son front se plissa. " Je ne vois pas… " Puis elle jeta un regard au visage de Xena. " Tu n'as pas encore décidé. N'est-ce pas ? "

 

Une lente secousse de la tête en réponse. " Je ne veux pas être forcée à prendre cette décision. "

 

" Qu'est-ce qui te fait penser que ça serait le cas ? " Demanda Gabrielle, raisonnablement.

 

" Ça le serait, c'est tout. " Répondit Xena, emmêlant ses doigts nonchalamment dans les cheveux du barde, qui s'étalaient doucement sur la poitrine de la guerrière. " Je ne sais pas si je peux… me remettre complètement cette fois. " Elle s'interrompit et haussa les épaules. " Ou si je le veux. "

 

Le barde se mit sur ses coudes et bougea jusqu'à ce qu'elle puisse regarder Xena droit dans les yeux. " Qu'est-ce qui t'arrive ?" Elle secoua la tête de confusion. " Depuis tout le temps que je te connais, je ne t'ai jamais vue douter de toi-même. Le destin, la vie, les autres, moi… mais jamais de toi-même. Qu'est-ce qu'il y a ? "

 

Xena laissa passer un souffle longtemps retenu et se frotta le visage d'une main. " Je ne sais pas. " Elle l'admit d'un ton las, laissant sa main au-dessus de ses yeux. " Je… ne sais vraiment pas ce qui ne va pas. " Elle passa ses doigts en râteau dans ses cheveux foncés. " Désolée. Je dois te rendre folle. "

 

Gabrielle leva une main et caressa doucement la joue de sa partenaire. " Après m'avoir sortie des ennuis à Potadeia, n'aie pas l'audace de penser que ce que tu peux faire puisse me rendre folle, Xena. " Elle s'interrompit. " Ecoute... je pense que tu… es passée par quelque chose de vraiment mauvais… quelque chose que personne que je connaisse n'aurait pu traverser. " Ses yeux brillèrent. " Et je veux que tu saches simplement combien je te suis reconnaissante que tu aies la force et la volonté de continuer, même lorsque n'importe qui d'autre aurait abandonné. "

 

" J'avais promis, tu te souviens ? " Le ton de Xena caressa l'oreille du barde et il amena un sourire sur son visage. " Que je sois maudite si j'allais laisser une malheureuse montagne me faire briser cette promesse. "

 

Gabrielle hocha la tête et amena les doigts de la guerrière à ses lèvres pour les embrasser. " Je sais. " Murmura-t-elle. " Mais, " d'un ton légèrement plus fort, " je pense que ça t'a demandé beaucoup. " Elle leva une main et toucha doucement le front de Xena. " Là aussi. " Elle vit Xena fermer les yeux dans une confirmation tacite. " Et tu dois simplement te laisser le temps de digérer tout ça.

 

" Tu le penses ? " Xena songea. Elle pourrait avoir raison. Il aura fallu ses yeux pour le voir, cependant.

 

" Je le pense. " Confirma le barde, en remettant sa tête sur la poitrine de Xena, et en enroulant ses bras autour du corps de la guerrière pour une étreinte sauvage. " Ecoute… " Sa tête se releva et leurs yeux se croisèrent. " Je ne peux pas prétendre que je n'ai pas de nœuds à l'intérieur quand je te vois faire les choses que tu fais… mais tu en retires tellement de joie, Xena… n'abandonne pas ça. "

 

" Je ne… " Xena commença à protester puis s'arrêta, et garda le silence. Une longue pause. " Ouais, je présume que oui. " Finit-elle calmement, en laissant son regard chercher le visage de Gabrielle qui la regardait. " Plutôt triste, hein ? "

 

Le barde secoua la tête. " Non. "Et son sourire devint un peu penaud. " Parce que j'ai découvert que j'aimais te regarder les faire. "

 

" Hmmm. " Grogna Xena, puis elle rit un peu. " Et bien, dans ce cas, je ferais mieux de trouver dans quel état est vraiment mon dos. "

 

Gabrielle pencha la tête. " En faisant… quoi ? "

 

" En l'utilisant. " La réponse fut courte et pratique. " Je dois savoir quelles sont mes limites. "

 

Et Gabrielle, capturant fermement le visage de sa partenaire dans ses mains, planta ses yeux dans les siens, vert contre bleu. " Tu n'as pas de limites. " Déclara-t-elle. " Ça, je le sais. "

 

A ses yeux, je n'en ai pas. Songea Xena calmement. Peut-être que je pourrais simplement fermer les miens un moment, et voir à travers les siens. La vue risque d'être plus plaisante. " Gabrielle ? "

 

" Hmm ? " Répondit le barde en lui faisant un sourire.

 

" Merci. " Dit Xena d'une voix douce.

 

Elle se regardèrent en silence, puis Xena prit le barde dans ses bras et l'étreignit un long moment, savourant le contact de son corps, l'odeur familière, et la chaleur qui se déversait sur elle, emportant la peur et l'incertitude, et la laissant, pour la première fois depuis l'accident, en paix avec elle-même.

 

Chapitre 35

 

" Es-tu sûre de… " Dit Gabrielle plus tard, alors qu'elles se tenaient toutes les deux sur le porche, regardant la lumière très matinale apparaître au-dessus des toits en chaume des maisonnettes en face d'elles. Elle hésita et lança un regard en coin à sa partenaire, se pénétrant de l'expression tranquille sur son visage. " Laisse tomber. Sois juste prudente, ok ? "

 

Xena lui lança un regard. " Allons, Gabrielle arrête un peu. Je vais juste me promener. " Elle rit un peu. " Ne pense pas que je puisse en faire plus. Alors, détends-toi, d'accord ? "

 

" C'est ça. " Grogna le barde. " Tu pars en promenade, et le cours de l'histoire change. Fréquemment. Tu oublies que je vis avec toi depuis plus de deux ans. "

 

Xena secoua simplement la tête et descendit du porche, faisant un signe de la main à Gabrielle. " A tout à l'heure. " Cria-t-elle par-dessus son épaule alors qu'elle arrivait à la première rangée d'arbres sur un sentier à peine visible tracé dans la forêt dense, consciente du léger tapotement des pattes d'Arès qui marchait à côté d'elle à grands pas.

 

" Oui. " Gabrielle soupira, en la regardant jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Je souhaiterais qu'il y ait plus… Hadès, Gabrielle. Tu essaies de démêler l'un des puzzles - l'une des énigmes les plus complexes de la Grèce là. Elle tira sur sa tunique et sauta du porche, se dirigeant à pas déterminés vers la maison de la guérisseuse.

 

Admets-le, tu es inquiète. S'accusa-t-elle. Tu t'es tellement habituée à la voir faire face à tout et à tout le monde que ceci t'effraie pour de bon. Gabrielle ferma brièvement les yeux puis les rouvrit. Je n'ai jamais pensé à… bon, je veux dire, elle fait ce qu'elle a à faire, d'accord ? D'accord. Mais… je n'avais jamais pensé à si elle aimait ce qu'elle fait - ou si elle a jamais pensé qu'elle ne serait pas capable de faire les choses qu'elle fait.

 

Elle fronça les sourcils. Peut-être que c'est ce que je ressens pour les histoires. Comment me sentirais-je si tout d'un coup, je ne pouvais plus le faire ?

 

Le barde s'arrêta dans les traces et regardant sans voir vers le sol. " Wow. " Murmura-t-elle fort. J'ai toujours pensé au truc qu'elle fait comme étant du travail acharné et de la pratique… mais la façon dont elle le fait, c'est presque un art, n'est-ce pas ? Elle en tire du plaisir tout comme moi quand j'écris de la poésie. Je ne l'ai jamais envisagé…

 

Puis elle se réprimanda honnêtement. Ce n'est pas vrai, Gabrielle. Et tu le sais diablement bien. Tu le lui as dit - quand elle bouge, c'est de la poésie, tu te souviens ? Tu l'as toujours su, même si tu ne voulais pas te l'admettre. Le barde reprit sa marche toujours enfouie dans ses pensées. Mais elle pense que c'est tout ce qu'il y a chez elle. Comment puis-je faire pour qu'elle voit que ce n'est pas vrai... il y a tellement plus.

 

Elle se souvint de ce matin chaud où elles étaient à Amphipolis depuis une semaine environ et elle venait juste de finir d'aider Johan à décharger quelques fournitures qu'ils avaient achetées. Elle s'était brossé les mains et était allée à la recherche de Xena, qu'elle avait vu aller dans la partie principale des étables un peu plus tôt.

 

Elle avait entendu des voix alors qu'elle passait la porte, et elle s'arrêta, cachée dans les ombres près de l'entrée, pour observer.

 

Xena était affalée sur une balle de foin, s'appuyant sur une autre, ses longues jambes étirées en face d'elle, et sa tête penchée avec attention sur la tâche dans ses mains. Près d'elle, regardant avec fascination, se trouvait l'un des petits garçons qui semblaient toujours courir dans la ville, et qui se ressemblaient tous.

 

La guerrière parlait à voix basse et indiquait quelque chose de caché par la courbe de sa main gauche, utilisant un petit couteau et des petits gestes précis de sa main droite en même temps que ses instructions.

 

" Wow ! " Gabrielle avait entendu le garçon marmonner. " T'peux me montrer si je trouve un morceau comme ça ? " Sa voix haute comportait plus qu'un soupçon d'excitation.

 

" Bien sûr. " Avait dit Xena avec un rire bas et facile, qui avait envoyé une vague de chaleur dans le barde qui regardait. " Vois si tu peux en trouver un. "

 

" OK. " Le garçon avait souri et sauté de la balle en se précipitant vers la porte et bousculant pratiquement Gabrielle. " Désolée ! " Cria-t-il mais il était déjà dehors et courait sur le chemin.

 

Gabrielle avait marché nonchalamment et pris sa place encore chaude sur la meule de foin, jetant un coup d'œil par-dessus le bras de Xena. " Qu'est ce que c'est ? " Demanda-t-elle en lançant un regard curieux à la guerrière alors qu'elle avait refermé la main sur l'objet lorsque le barde s'était approché.

 

" Oh. " Avait dit Xena, en s 'éclaircissant un peu la voix. " Et bien, rien vraiment... juste... " Elle s'arrêta lorsqu'elle vit l'expression dans les yeux de Gabrielle et ouvrit simplement sa main en silence, exposant une petite tortue proprement sculptée dans sa paume. Le bois semblait avoir été finement travaillé autour de ses points naturellement sombres et clairs, créant un dessin réaliste de pièces sur le dos de la créature.

 

Gabrielle le prit doucement et l'examina, faisant passer le bout de son doigt légèrement sur sa carapace puis elle leva des yeux interrogateurs vers le visage de Xena qui était devenu plutôt immobile. " Tu as fait ça ? "

 

Un léger hochement de tête.

 

" Tu n 'as jamais dit que tu savais sculpter. " Dit le barde avec une note de délice dans la voix. " C'est beau. "

 

Xena avait haussé les épaules. " C'est juste un petit truc. Je ne... ce n'est pas quelque chose que je fais souvent. "

 

" Pourquoi diable non ? " Demanda Gabrielle en regardant la sculpture de plus près, puis dans ses yeux. " Xena, c'est un véritable don que tu as là. "

 

La guerrière avait pris une inspiration et regardé au loin. " Pas très utile au milieu d'une bagarre. " Elle avait lancé un regard malicieux au barde. " Et de toutes les façons... je dois vraiment être... " Elle s'interrompit. " Je dois être d'une certaine humeur pour le faire. Ça ne me vient pas très souvent. "

 

Et Gabrielle avait étudié son visage, voyant la douce expression introspective dans ses yeux, et la relâche de sa tension habituellement acérée qui caractérisait toujours sa partenaire, et elle avait souri. " Alors il faut que je t'amène à cette humeur plus souvent. " L'avait-elle gentiment taquinée, et elle avait commencé à rendre la tortue à sa créatrice.

 

Mais Xena avait hoché la tête et sourit, et plié les doigts du barde sur la créature en bois. " Pour toi. " Avait été son seul commentaire.

 

Gabrielle l'avait étreinte. " Tu es pleine de surprises, n'est-ce pas ? " Elle soupira joyeusement. " Peut-être que si j'essaie vraiment fort, je pourrai te soutirer un cirque athénien tout entier. " Et elle avait levé les yeux, accrochant une expression d'agitation dans ces yeux bleus.

 

Et une fois de plus elle avait aperçu pendant un court instant la personne que sa partenaire était vraiment, sous tout ce sang, et la torture, et les souvenirs du mal. La personne qui était douce, et drôle, et pleine de merveilles, qui ne sortaient qu'à de rares moments très isolés. Je veux pouvoir mieux connaître cette personne. Avait-elle pensé à ce moment-là et elle le faisait toujours.

 

" Peut-être que tu peux. " Avait dit Xena, lentement, en touchant son nez du bout de son doigt. " Parce que juste te regarder me met dans cette humeur. " Et l'expression dans ces yeux avait réchauffé le barde.

 

Et le faisait toujours, même maintenant, des semaines plus tard. Gabrielle se sentit un peu mieux et grimpa les marches vers la maison de la guérisseuse avec un sourire confiant. Xena traverserait ça. Elle trouverait un moyen de contourner quelque problème que ce soit, même si ça devait prendre du temps. C'est OK. Le barde sourit à l'intérieur. Ce n'est pas grave si ça prend toute une vie, pour autant que je passe cette vie à ses côtés.

 

Elle ouvrit la porte et passa la tête à l'intérieur, frappée par l'atmosphère de silence tendu dans le bâtiment. Plusieurs paires d'yeux dorés se tournèrent vers elle et la plupart se détournèrent de nouveau.

 

" Salut. " Dit-elle doucement tout en allant vers sa chambre voyant Elaini avec les yeux injectés de sang qui la regardait toujours. La guérisseuse se leva et marcha un peu rapidement vers elle et elle lui tapota l'épaule. " Comment va-t-il ? " Lui murmura le barde en fixant les êtres assemblés avec confusion.

 

" Il se maintient. " Dit Elaini avec un sourire. " Il a oscillé la plus grande partie de la nuit mais il est plus fort ce matin. " Elle jeta un œil derrière elle. " Du soutien pour Gennen. " Continua-t-elle d'un ton plus bas. " C'est traditionnel - lorsqu'il y a une possibilité. "

 

" Elaini. " Une voix froide l'interrompit, et elles se retournèrent toutes les deux. L'un des êtres de la forêt, à la fourrure tachetée marron et dorée les fixait. " Pas la peine d'expliquer ce qui ne peut être expliqué, petite. "

 

" Mais... " Commença Elaini en levant une main. " Tu ne... "

 

" Non, non... " Dit la femme clairement. " Les humains ont assez de chance pour ne pas s'inquiéter de ce qu'on ressent à la cassure, alors n'insulte pas Gennen en essayant de l'expliquer. " Elle se permit un coup d'œil vers Gabrielle qui la regardait avec une expression sérieuse. " Je ne voulais pas t'offenser, conteuse. "

 

" De quoi parlez-vous ? " Demanda Gabrielle en avançant dans la pièce.

 

Ils la regardèrent tous avec un recul étrange dans leurs regards.

 

Elaini soupira. " Tu ne comprends pas. " Dit-elle à la femme qui avait parlé. " Gabrielle, ils parlent de ce qui se passe lorsque tu... perds... ton partenaire de vie. "

 

Gabrielle bougea lentement sa tête en un cercle pour les croiser tous du regard. " Est-ce que c'est arrivé à quelqu'un ici ? "

 

Une réponse étonnée. " Non. " Dit la femme en secouant la tête.

 

Le barde hocha lentement la tête. " Alors je le comprends bien mieux que vous. "

 

Un silence de mort s'ensuivit, et à ce moment même Gennen, blotti sur la paillasse avec son Compagnon la regardait fasciné.

 

Des paupières se fermèrent et se rouvrirent sur des yeux dorés choqués. " Par la langue d'Arès. " Dit la femme dans un hoquet. Elle se tourna vers Elaini avec une expression de colère. " Tu ne l'as jamais dit... "

 

La guérisseuse leva un sourcil. " J'ai essayé. " Répondit-elle brièvement, puis elle se tourna vers Gabrielle. " Voudrais-tu t'asseoir ? "

 

La femme plus âgée agita une main vers elle. " Mon nom est Cessi. " Elle tendit un avant-bras à Gabrielle. " Et... je m'excuse, conteuse. Je n'avais aucune idée... mais que voulais-tu dire par le fait que tu comprenais mieux que nous ? "

 

Gabrielle prit le bras offert et s'assit sur un banc bas. " C'est une longue histoire qu'il vaut mieux ne pas raconter... ici. " Elle jeta un coup d'œil autour d'elle et fit un bref sourire à Cessi. " J'essaie d'en apprendre plus sur toute cette chose - tout le monde assume soit que je sais, ou ne pense pas que j'ai besoin de savoir, et les deux me rendent dingue. " Elle s'interrompit. " Mon nom est Gabrielle, à propos. "

 

" Bienvenue, Gabrielle. " Dit Cessi avec un sourire montrant ses canines. " Et voilà Berrat, et Legres et Tobias. " Elle montra ses trois compagnons. " Tu connais déjà Elaini. "

 

" Nous devons reconnaissance à ta partenaire pour avoir aidé Ereth là-bas, hein ? " Le petit homme très sombre que Cessi avait appelé Tobias prit la parole.

 

Le barde hocha la tête. " Nous les avons entendu appeler au secours. Au bon endroit au bon moment, la bonne personne, je présume. " Ils étaient toujours mal à l'aise et elle essayait de trouver un moyen de les détendre, lorsque Gennen appela doucement depuis l'endroit où il était perché.

 

" Gabrielle ? " Le garçon lui fit un sourire qu'elle retourna. " Veux-tu nous raconter une histoire ? "

 

Le barde sourit. " Bien sûr. Y en a-t-il une que tu préfères ? "

 

Ses yeux brillèrent. " Quelque chose avec Arès ? "

 

Oh bon sang.Gabrielle gémit en pensée... puis sourit. " Bien sûr... as-tu entendu parler de la fois où il a perdu son épée et est devenu un mortel pendant un petit moment ? "

 

Elle avait maintenant capturé toute leur attention. " Non... est-ce que c'est vraiment arrivé ? " Demanda Cessi en penchant la tête.

 

Gabrielle hocha la tête. " Ouaip... j'étais là. " Elle n'aurait pas mieux fait si elle avait secoué leurs yeux ronds avec un tremblement de terre.

 

" Tu le connais ??? " Dit Gennen dans un souffle et un murmure profond passa parmi les êtres de la forêt.

 

" Ouaip. " Confirma le barde distraitement. " Alors voilà ce qui s'est passé... nous avions traversé plusieurs petites villes et nous avions remarqué comme tout le monde était en colère... "

 

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