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Bound10B

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Unies/ Bound

 

par Melissa Good

 

Traduction : Katell et Fryda

 

 

*********

Partie 10B

 

**********

Chapitre 74

 

Gabrielle regarda en silence la tête de sa compagne disparaître dans le gouffre sombre, puis elle s'assit en tailleur près de l'ouverture, les coudes appuyés sur ses genoux. Les êtres de la forêt l'observèrent un moment, puis se dispersèrent un peu, pour aller explorer la petite salle et examiner les tablettes.

Seule Wennid vint s'asseoir près d'elle, imitant sa position. " Gabrielle ? "

La jeune humaine aux cheveux blonds leva vers elle des yeux verts un peu troublés. " Hmm ? "

" Quelque chose… ne va pas ? " demanda-t-elle délicatement, ses yeux jaunes pâles ne faisant aucune supposition. Pas avec ces humaines-là, qui étaient bien plus complexes que ce qu'elle avait d'abord cru.

Gabrielle la regarda un long moment. " Merci, Wennid, mais ce n'est pas quelque chose dont je me sente prête à parler pour l'instant. " Elle soutint le regard de l'être de la forêt, puis baissa à nouveau les yeux vers le gouffre.

" Hm. " Wennid n'abandonna pourtant pas. " Je sais… que tu n'aimes pas parler de choses personnelles, Gabrielle… mais si ce qui t'inquiète à quelque chose à voir avec votre don… alors je peux peut-être t'aider ? "

Le barde inspira pour lui répondre, puis sentit une boule de peur glacée exploser dans son ventre. Elle ferma les yeux, et la combattit, se concentrant sur sa compagne, et sur la chaleur de leur lien. Après une minute, la sensation disparut, et elle rouvrit les yeux avec un petit soupir inaudible. " Ce n'est pas le cas ", fit-elle clairement à l'attention de Wennid. " Je peux m'en occuper. " J'aurais dû y aller à sa place. Bon sang, pourquoi est-ce que je la laisse toujours me convaincre dans des situations pareilles ? Il va falloir que ça change.

Wennid lui tapota le bras, et hocha la tête. " Très bien… mais si tu as besoin de quoi que ce soit… "

Gabrielle lui lança un coup d'œil et lui sourit. " Je sais… et je t'en remercie. " Elle respirait à présent un peu mieux. " Je crois que ça va aller. " Elle sentit la sensation glacée disparaître peu à peu, et elle se détendit. Du courage ? Tu trouves que c'est moi qui ai du courage, Xena ? C'est comme si j'étais allée me tenir délibérément au bord d'un précipice. Elle sourit et s'appuya en arrière sur ses mains, regardant les autres êtres de la forêt envelopper les tablettes avec précautions, se préparant à les emporter avec eux.

Wennid ouvrit un paquet, et offrit au barde une tranche de viande enveloppée d'un morceau de pain sans levain. " Tu as l'air d'avoir faim ", fit-elle en souriant.

Gabrielle se mit à rire et accepta l'encas. " C'est souvent le cas ", admit-elle, avant de mordre à belles dents et de mastiquer. Elle finit le premier sandwich et était sur le point d'en attaquer un autre, lorsqu'elle s'immobilisa.

Elle reposa le pain, ses yeux se fermant à moitié en réaction au gouffre sombre qui venait de s'ouvrir en elle. " Wennid ? " fit-elle, sa voix à peine un murmure.

" Hmm ? " répondit l'être de la forêt, se tournant vers elle. " Gabrielle ! " Elle avait presque crié en voyant l'expression sur le visage du barde. Elle se leva rapidement et fut en un instant aux côtés de la jeune humaine, posant une main ferme sur son épaule. " Gabrielle… " Sa voix basse et pressante.

" Une corde ", fit le barde, se forçant à inspirer profondément. " Vite. " Sa voix devint presque dure.

" Tobias ", aboya Wennid. " Détache cette corde. Allez ! " Elle se retourna vers le barde. " Gabrielle, que se passe-t-il ? "

Le regard du barde redevint plus net, et elle croisa le sien. " Il faut que je descende. "

" OK… OK… " fit Wennid en lui caressant le bras. " Tu vas descendre. Mais qu'est-ce qui se passe ? "

Gabrielle secoua la tête. " Je ne sais pas. " Elle regarda Tobias lancer la corde par-dessus le bord du gouffre et, sans y réfléchir, elle l'attrapa, se balança et se laissa tomber dans le trou.

Ooh. Elle poussa un grognement, ses bras soutenant tout à coup tout son poids, et elle se balança un peu au bout de la corde. Ne regarde pas en bas, Gabrielle. Il fait noir de toute façon. Elle enroula les jambes autour de la corde, et se laissa glisser, sentant la brûlure dans tout son corps. Ça a l'air tellement facile quand c'est Xena qui le fait… se dit-elle, davantage pour penser à autre chose qu'à l'horrible sensation qui s'était installée dans son estomac.

C'est parce qu'elle passe des heures à grimper aux arbres et à se balancer de branches en branches, Gabrielle, et pas toi. La réponse était logique. Elle glissa encore un peu plus dans les ténèbres, jusqu'à ce qu'elle fut à peu près à mi-chemin. La sensation de brûlure dans ses bras était de plus en plus forte, et elle s'arrêta un moment pour reprendre son souffle.

Encore un peu, et elle lâcha prise, se laissant tomber, et atterrissant avec une sensation de piqûre contre le sol inégal. Elle sentit le choc dans ses genoux et la douleur remonta jusqu'aux épaules, mais elle serra les dents et laissa l'élan l'emporter.

Elle atterrit contre le mur du fond, et resta assise un moment, grimaçant de douleur. Puis elle se releva et passa la tête dans l'ouverture, sentant la proximité des murs, mais voyant, à l'autre extrémité, une minuscule lueur. Pas de torche. C'est malin, Gabrielle. Hésitante, elle entra dans le tunnel, ses doigts tâtant doucement l'air devant elle pour ne pas rentrer dans quelque chose.

Tiens bon, mon amour. Je sais que ça ne va pas, murmura-t-elle en pensées, alors qu'elle atteignait le bout du tunnel, et sentit son pied cogner quelque chose. Elle baissa les yeux, vit la flèche et esquissa une grimace.

Elle tourna au coin, et vit enfin la lumière des torches ; son pas se fit plus rapide, alors qu'elle entrait dans la caverne circulaire et elle s'arrêta, puis étouffa un juron et se mit à courir vers la forme qu'elle avait repérée, étendue sur le sol.

 

" P'tit chien ! " La voix enfantine et aiguë de Xena avait pris un ton énervé, tandis qu'elle avançait tant bien que mal parmi l'herbe haute, à la recherche de l'animal, que les gamins du village avait chassé. " P'tit chien ! " La petite fille grimaça, agacée, puis s'assit une minute sur un rocher. Elle avait ramassé quelques cailloux boueux et avait fait déguerpir les gamins, mais le chiot s'était enfui, alors elle avait décidé de le suivre. Elle dressa l'oreille en entendant un couinement étouffé. " Ah, ah ! " fit-elle en souriant, puis elle se leva et partit en courant vers le bruit qu'elle venait d'entendre.

" Oh. " Elle écarquilla les yeux, en voyant l'animal effrayé, tout près du bord de la carrière abandonnée. " Non… viens ici. " Elle se mit à genoux, et lui tendit la main. " Allez… viens… je vais pas te faire de mal. "

L'animal renifla d'un air soupçonneux, puis tendit prudemment le cou vers sa petite main.

" C'est ça ", fit Xena d'une voix rassurante, en agitant les doigts. " Viens là. " Elle rampa jusqu'à lui, puis posa les doigts sur sa fourrure, avant de tirer un peu. " J'te tiens ", fit-elle en souriant, et elle se retourna à moitié en entendant les bruits de pas, mais pas assez vite pour éviter le gamin ricanant qui la poussa, lui fit perdre l'équilibre et l'envoya rouler par-dessus le bord et au bas de la pente de la carrière.

Elle hurla, tenant le chiot bien serré contre elle, tandis qu'ils rebondissaient d'un rebord sablonneux à l'autre, jusqu'à ce qu'elle atterrisse en plein sur le toit d'un puits abandonné, et fasse s'écrouler le grès fragile sur elle.

Elle pouvait à peine respirer, il y avait trop de pression, de tous les côtés, et il faisait noir, et en plus… en plus, le petit chien n'était plus avec elle, parce son atterrissage forcé l'avait arraché de ses mains, et elle n'arrivait pas à le retrouver en tâtonnant autour d'elle. Elle essaya de creuser un passage, mais la surface fragile s'écroulait à chaque fois un peu plus, et la coinçait de plus en plus… et il faisait de plus en plus noir, jusqu'à ce que tout se referme sur elle et l'étrangle. " Maman… " fit-elle, à bout de souffle. " Maman… "

 

Une main sur son visage… de l'eau qui lavait la poussière. On appelait son nom. Mais ce n'était pas la voix de sa mère… pas cette fois… c'était une voix plus aiguë, et plus chaude et qui la touchait plus profondément qu'aucune autre au monde.

Très lentement, elle recouvra ses esprits. Ce n'était pas la carrière, pas de grès… une grotte profonde, creusée dans le granite. Et elle n'avait plus six ans, elle était beaucoup plus vieille… et les mains qui lui caressaient doucement le visage n'étaient pas celles de Cyrène.

Avec un grognement bien senti, elle ouvrit les yeux, pour se trouver face au visage inquiet de Gabrielle. Le barde tenait la tête de Xena blottie sur ses genoux, et la sensation humide sur son front provenait d'un morceau de la chemise du barde, arraché à la hâte. " Hé ", parvint-elle à articuler, se forçant à garder les yeux ouverts et fixés sur les traits un peu flous de Gabrielle.

Gabrielle lui tenait le visage entre les mains, et son expression était des plus sérieuses. " Xena ? "

" Mmm ", grogna-t-elle, puis elle déglutit. " Dieux… ce que ça fait mal. "

" OK… attends, ne bouge pas. Je vais te chercher de l'eau ", fit doucement le barde. " Tu étais en train… d'appeler ta mère… j'était un peu… inquiète. "

Xena cligna des yeux plusieurs fois, puis se souvint. " Oh, bon sang. Désolée. " Elle déglutit à nouveau. " C'est de l'histoire ancienne. " Elle commença à se lever, mais la nausée qui la saisit à cet instant lui fit changer d'avis. Gabrielle lui saisit immédiatement les épaules.

" Reste tranquille ", ordonna le barde. " Tu t'es fait une sacrée bosse. "

Avec plaisir, pensa Xena, et elle reposa à nouveau la tête contre la cuisse chaude du barde. " Comment tu es descendue ? "

" Par l'ouverture, qu'est-ce que tu crois ? " répondit Gabrielle, un peu agacée.

Xena leva les yeux, et pendant un instant, Gabrielle lut dans son regard la peine d'une enfant. Puis elle cligna des yeux, et la vision disparut, remplacée par un sourcil levé. " Gabrielle, je ne me suis pas fait tomber une étagère en pierre sur la tête exprès pour te faire venir, tu sais. "

Gabrielle ferma les yeux et laissa échapper un long soupir, puis rouvrit les yeux. " Je sais… " Elle serra doucement les épaules de Xena contre elle. " Mais tu m'as fait peur, tu sais. Tu ne savais pas qui tu étais… ni qui j'étais, moi… c'était comme si tu n'étais même pas là. Ça m'a… " Elle fit une pause. " Ça m'a fichu la trouille….et… tu étais où, au fait ? "

Xena ne répondit pas tout de suite. Puis elle pencha la tête en arrière et regarda sa compagne. " J'avais… oh… six ou sept ans, je crois. " Elle s'arrêta. " je faisais des trucs de gamin… je ne sais même plus quoi. Je me suis retrouvée au bord d'une carrière. " Elle fit une nouvelle pause, et sentit la main de Gabrielle prendre la sienne. " Quelqu'un s'est dit que ça serait marrant de me pousser… je suis tombée dans la carrière… dans un… je ne me souviens plus… dans une espèce de trou. " Elle ferma les yeux pour repousser le souvenir.

" Je te tiens. " La voix calme de Gabrielle flotta vers elle et vient se poser doucement sur elle, pour la rassurer.

" Ça leur a pris… toute la nuit, je crois… pour me trouver ", termina doucement Xena. " Je n'arrêtais pas… d'appeler ma mère… je n'ai jamais… je ne… "

" Tout va bien ", faisait Gabrielle en lui caressant doucement les cheveux. " C'est fini… je te tiens. "

" Je me suis jurée… " continua la guerrière avec un murmure passionnée, " que je ne serais jamais plus à ce point impuissante. "

Et cela… expliquait… pas mal de choses, se dit Gabrielle, en regardant l'horreur quitter lentement le regard de sa compagne pour être remplacée par une lueur presque normale. " Je crois que tu as tenu ta promesse, mon amour ", murmura-t-elle à l'oreille de la guerrière, tout en la serrant un peu plus contre elle.

Elle sentit un rire secouer un peu le corps de Xena et laissa échapper le souffle qu'elle avait retenu pendant si longtemps. " Ça va aller, Xena. Détends-toi un peu. "

" Bien sûr que ça va aller ", marmonna la guerrière en fermant les yeux. " Tu es là. "

Et le silence retomba à nouveau.

Gabrielle observa la silhouette immobile de sa compagne un long moment, ses mains caressant sans cesse ses cheveux, le tissu froissé de sa tunique, retirant la poussière de son bras.

Elle essaya de s'imaginer dans la peau d'une petite enfant endurant une telle expérience. Et qui en était ressortie plus forte, plus déterminée… cela en disait long sur la personne avec qui elle avait choisi de partager sa vie. " J'aurais voulu être là, Xena ", murmura-t-elle doucement. " J'aurais filé un bon coup de pied aux fesses à celui qui t'a poussée. " Elle sentit sa poitrine se serrer. " Et j'aurais bien eu besoin d'une amie comme toi quand j'étais petite. " Ses doigts caressèrent doucement les pommettes hautes. " Si seulement on n'avait pas attendu si longtemps pour se trouver… mais tu sais… " Elle rit doucement. " J'ai l'impression que je te connais depuis toujours. "

Soudainement, les yeux bleus s'ouvrirent, et lui sourirent. " Et moi j'ai l'impression que je te connais depuis bien plus longtemps que ça, mon amour. "

Gabrielle sourit. " Oh… je ne savais pas que tu étais… je croyais que tu dormais… euh… "

Xena ricana doucement. " C'est pas grave. " Elle leva la main et l'enroula autour de la cuisse du barde. " C'est pas une bonne idée de dormir avec le coup que j'ai pris sur la tête… et puis, j'aime bien t'écouter. " Elle sourit au barde, un peu penaude. " Et bien que j'adore rester allongée là, totalement à ta merci, je crois qu'on ferait mieux de sortir de là. "

" Ouais, je crois que tu as raison ", répondit doucement le barde. " Je ferais mieux d'aller dire à Wennid et aux autres que tout va bien. " Elle serra doucement l'épaule de Xena. " Je criais plutôt fort. Ça m'étonne qu'ils ne soient pas déjà descendus. "

Xena la regarda. " Je me disais bien que ta voix était un peu rauque. Pourquoi tu criais ? "

 

A la lumière vacillante des torches, elle l'avait trouvée allongée par terre, et elle avait traversé la salle en courant et s'était jetée à genoux près de Xena. Elle avait touché un corps si tendu qu'il avait l'air fait de pierre.

" Xena… " avait-elle appelé en tirant sur une épaule pour tourner la guerrière vers elle, puis elle avait vu l'intense grimace de douleur sur son visage, et avait alors tiré le corps de Xena dans ses bras et l'avait serré contre elle de toutes ses forces.

Après un moment, la tension avait diminué, mais lorsque les yeux de la guerrière s'étaient ouverts, elle ne les avait pas reconnus. Gabrielle regardait une étrangère, qui la fixait avec un regard vide et perdu.

" Xena ? " avait-elle dit, doucement, et n'avait vu aucune réaction, pas même une lueur de compréhension. " Hé… réveille-toi, ok ? "

Rien. Alors elle avait pris peur, et avait levé la voix. " Ne me fais pas ça ", avait-elle supplié. " Ne me laisse pas toute seule ici, Xena. "

Elle avait saisi le visage de la guerrière entre ses mains, et l'avait fixée droit dans les yeux, comme pour la forcer à répondre. Comme pour forcer le néant de ces yeux à disparaître et à y rappeler l'intelligence vive qu'elle y voyait toujours. " Reviens ! " avait-elle fini par hurler, prise de panique, et elle avait secoué Xena brusquement, avant de la gifler.

Et cela lui avait fait encore plus peur, non pas parce qu'elle l'avait fait, mais parce qu'elle avait pu le faire, et que Xena n'avait pas fait le moindre geste pour l'arrêter. Alors elle avait levé la main pour frapper à nouveau, et cette fois… cette fois, on lui avait saisi le poignet d'un geste très rapide, et les yeux de Xena s'étaient à nouveau refermés, ses lèvres murmurant le nom de sa mère.

Quelques instants pendant lesquels elle avait marmonné des mots incohérents, puis ouvert les yeux, et son regard avait croisé celui de Gabrielle, et s'était instantanément réchauffé, ses lèvres dessinant un demi-sourire familier en reconnaissant celle qui la tenait dans ses bras.

 

" Je te raconterai plus tard, OK ? Tu m'as fait un peu peur, c'est tout ", soupira Gabrielle en lui touchant à nouveau le visage, refusant de perdre le contact entre elles. " Ne me refais jamais ça, OK ? "

Xena fronça les sourcils et roula avec précautions sur ses coudes, puis se redressa et s'assit, face au barde. " Apporte cette torche par ici ", dit-elle doucement.

Gabrielle s'exécuta, observant son visage avec attention, voyant à quel point sa compagne était sérieuse. " OK. "

La guerrière hocha la tête. " Regarde mes yeux. " Une pause, puis elle se mit à sourire doucement. " Regarde-les, Gabrielle, ne t'y perds pas… "

" Oh. " Le barde lui rendit son sourire. " Désolée. Ils sont… plutôt… euh. Désolée. "

" OK… je vais les fermer. Lorsque je les rouvre, regarde si la partie la plus sombre diminue en même temps dans les deux yeux. " Xena hocha à nouveau la tête. " Compris ? "

Gabrielle acquiesça. " Oui… OK… Vas-y. "

Xena ferma les yeux, et compta jusqu'à trente, puis les rouvrit, et regarda la torche pendant trente autres secondes, puis posa son regard sur le visage de Gabrielle, clignant un peu des yeux. " Alors ? "

Le barde soupira. " L'œil gauche n'a pas bougé. " Elle se mordit un peu la lèvre, et regarda Xena lever la main et se toucher la nuque. " C'est une commotion ? "

Xena acquiesça. " Ouais… on dirait bien ", fit la guerrière en grimaçant. " Ça expliquerait pourquoi je suis autant dans le cirage. " Elle posa les coudes sur ses genoux et appuya son menton sur ses mains. " Voyons voir si rien ne manque. " Elle réfléchit un moment. " On est en quelle année ? "

Le barde lui répondit.

" OK. Je sais qui je suis, et je sais qui tu es. Mon village est Amphipolis, et le tien Potadeia. " Elle cligna des yeux. " On est juste à côté du village de Jessan, c'est bien ça ? "

Gabrielle sentit la tension en elle commencer à la quitter. " Oui. "

Xena hocha à nouveau la tête. " Et on s'apprête à rentrer à la maison, c'est ça ? "

Un énorme sourire de la part du barde. " Oh, ça oui. " Elle se rapprocha et posa la main sur le genou de Xena. " Bois ça. "

La guerrière prit la tasse et la vida lentement, puis examina la coupe pensivement. " Je me sens toujours un peu… " Elle hésita. " embrumée, je crois. " Elle esquissa un sourire. " Mais je me souviens de l'essentiel. " Elle reposa la tasse et enlaça ses doigts avec ceux du barde. " Et si tu cherchais ces parchemins pendant que je me reprends un peu, et puis on pourra ficher le camp d'ici, OK ? "

Gabrielle acquiesça. " Très bonne idée. Je reviens tout de suite. " Elle se leva, et alla rapidement jusqu'à l'entrée, emportant une torche avec elle.

" Attention au marteau ", s'écria Xena. " Ne va pas te cogner la tête."

" Quel marteau ? " demanda Gabrielle, puis elle passa la tête dehors et s'arrêta net. " Oh… ce marteau-là ", fit-elle avec un tout petit rire. " Je crois que je t'ai vue et puis je n'ai pas fait attention à grand-chose d'autre. " Elle secoua la tête, et continua vers le trou.

Xena se détendit jusqu'à ce qu'elle soit appuyée contre le mur, et laissa échapper un long soupir. Dieux. Elle ferma les yeux et se frotta les tempes. Ça fat un bon moment que je n'avais pas pensé à… ce petit incident. Ça doit être l'accident, et tout ça, qui a tout déclenché… cette pauvre maman…

Lorsque la panique s'était estompée, elle avait arrêté de hurler, et avait creusé la terre autour d'elle jusqu'à ce que ses doigts touchent la fourrure sale du chiot qui l'avait sentie, et s'était mis à creuser dans sa direction, jusqu'à ce qu'elle puisse l'attraper par les pattes avant. Elle avait tiré, et tiré encore, et avait fini par libérer le chiot terrorisé de sa prison, et cela…. Elle le savait maintenant, l'avait empêché de devenir folle. L'animal lui avait permis de concentrer sa peur et ses angoisses sur autre chose.

Pauvre Digger, pensa Xena. Elle avait refusé de le laisser partir, même après qu'ils l'eurent enfin sortie de là et ramenée à la maison, couverte de bleus et le bras cassé. Cyrène avait été obligée d'accepter une bouche de plus à nourrir, jusqu'au jour où il s'était trouvé au mauvais endroit et qu'un cheval avait rué au mauvais moment.

J'ai pleuré pendant des jours, se souvint la guerrière. Ça avait fait tellement mal. Je crois que j'ai décidé à cet instant, à… quel âge, 10 ans ?… de ne plus laisser quoi que ce soit me toucher comme ça. Elle ricana un peu, lorsque Gabrielle revint, et que leur yeux se croisèrent. Mais ça… ça a ses propres inconvénients. Je suis contente de ne pas avoir tenu parole.

" OK ", fit Gabrielle en souriant. " Ils ont arrêté de paniquer. " Elle sourit à Xena, un peu penaude. " Comment tu te sens ? " Elle s'approcha et vint s'agenouiller près de sa compagne, posa doucement la main sur la bosse qui avait poussé sur la tempe de la guerrière.

Xena lui saisit la main, et la maintint en place, une expression sérieuse sur le visage. " Ce que je sens, c'est que j'ai une chance incroyable. " Le barde s'immobilisa. " Je suis heureuse que tu sois dans ma vie, et je crois que je ne te le dis pas assez souvent. "

En fait… Gabrielle se dit doucement. Tu ne me l'as jamais dit, tout court. Ça doit être une sacrée bosse qu'elle a sur la tête. " C'est marrant… j'ai toujours cru que c'était moi qui avais de la chance. " Du bout des lèvres, elle effleura leurs mains jointes. " La chance que tu m'aies laissé percer la carapace. " Elle sourit. " Allez, viens. Il faut qu'on te sorte de là. "

Xena rit doucement puis regarda autour d'elle. " Je sais pas… c'est plutôt tranquille ici. " Elle observa la salle d'un air pensif. " Je parie qu'elles l'aimaient bien, cette grotte, elles. " Soudain, elle sentit les mains de Gabrielle sur son visage, et tourna des yeux étonnés sur le barde. " Quoi ? "

" Ça ne te dérange pas d'être ici ", fit le barde calmement, mais d'un air un peu tendu.

Les yeux bleus de la guerrière firent encore une fois le tour de la grotte, puis se posèrent à nouveau sur sa compagne. " J'ai dû en faire trop, je sais pas… mais… pas en ce moment, en tout cas. Non. "

Gabrielle soupira, un peu vexée. " C'est pas croyable, ça… tu peux pas guérir comme tout le monde, non ? "

" Hein ? " Xena fronça brusquement les sourcils. " Gabrielle, qu'est-ce que tu racontes ? "

" C'est pas la première fois. Une épaule démise, et tu rentres dans un mur. Tu te fais mal au dos, et tu vas t'écraser contre un arbre, et pouf. Et maintenant, ça. C'est dingue, ça ! " Elle leva un peu la voix. " J'ai pas envie d'avoir à te donner des coups sur la tête pour guérir tes blessures, Xena. C'est… barbare. "

Cette dernière remarque fit rire la guerrière. " Je le fais pas exprès, tu sais. "

" Bien sûr que si. Et juste pour m'énerver ", répondit Gabrielle, riant presque de soulagement.

" Non, non… Ça, par contre, je le fais exprès. " Xena passa la main derrière la nuque du barde, la tira vers elle, et l'embrassa passionnément, souriant intérieurement en sentant le corps de Gabrielle fondre contre le sien.

Les yeux du barde clignèrent, un peu flous, dès qu'elles se séparèrent pour reprendre leur souffle. " Ça, ça ne m'énerve pas. "

" J'espère bien que non ", fit Xena pour la taquiner, tout en caressant les lèvres de Gabrielle du bout du doigt. Elle sourit lorsque le barde la mordit doucement. " Et si on trouvait ces manuscrits, mon barde ? "

Elles se levèrent en riant, Gabrielle tenant fermement le bras de sa compagne jusqu'à ce que la guerrière fut debout. Puis elle se mirent à chercher.

" J'ai trouvé ", annonça le barde en levant les yeux du coffre en bois qu'elle avait découvert, caché sous la couchette. Elle avait soulevé le couvercle et l'odeur familière d'encre l'avait stimulée. " Dieux… il y en a des dizaines… " Elle en sortit un et le déroula en partie. " On dirait des textes de guérisseur. "

Xena s'agenouilla près d'elle et jeta un coup d'œil au manuscrit. " Oui. Je reconnais ça… "

Le barde la regarda. " Tu as déjà vu ça ? " Pas franchement étonnant… ma mystérieuse compagne.

La guerrière secoua la tête. " Non… j'ai vu les textes sur lesquels celui-ci est basé. " Ses yeux observèrent doucement le visage de Gabrielle. " Chez Nicklios. "

Ah, pensa Gabrielle, en se souvenant des murs couverts de parchemins, et auxquels elle ne s'était pas du tout intéressée. " Je savais… qu'il y avait… des manuscrits. " Elle tapota du doigt le parchemin qu'elle venait de re-enrouler. " Mais je ne… " Cette longue et horrible nuit lui revint à l'esprit. " Ça aurait pu être les Mystères du Mont Olympe, que je m'en serait fichue tout autant. " Comprendre que Xena était partie… ce sentiment brûlant et vide qui l'avait transpercée… la douloureuse solitude qui lui avait fait vouloir appeler la mort. " Pas cette nuit-là. " Sa voix n'était plus qu'un murmure.

De longs bras s'enroulèrent autour d'elle, et elle ne résista pas, ayant besoin du toucher chaleureux de sa compagne, qui fit doucement reculer l'horreur jusque dans sa tanière. Elle enfouit son visage dans l'épaule de Xena, se plongeant dans la sensation rassurante de leur lien, le laissant la bercer doucement.

Enfin, elle leva la tête et soupira. " Ça va aller. C'est juste que… plus je comprends ce que j'ai failli perdre ce jour-là, plus le souvenir en devient horrible. " Elle reposa le manuscrit dans le coffre, et en sortit un autre, tordant un peu ses bras et ceux de Xena, mais réussissant quand même à l'ouvrir un peu. " Hé… celui-là est différent. " Elle grimaça. " Je ne peux pas… " Ses yeux se levèrent vers ceux de Xena ; la guerrière avait appuyé son menton contre l'épaule du barde et regardait elle aussi le parchemin. " Tu peux, toi ? "

Xena parcourut des yeux le manuscrit, rendu presque cassant par le temps, l'encre si pâle qu'il lui fallut quelques instants pour déchiffrer l'inscription.

Dyma y hanes can Elevown ac Ardwyn pwy creadded hwn tir eang a llifio ymwnc a rhyfeddod….

Elle rit doucement. " On dirait que notre amie Ardwyn était un peu comme toi, mon barde. " Elle appuya la tête contre celle de Gabrielle. " Voici les contes d'Elevown et Ardwyn, qui ont parcouru cette vaste terre et vu de nombreuses merveilles. " Ça fait longtemps que je n'avais pas vu ces lettres. Je n'arrive pas à croire que j'arrive encore à les lire. Tu étais un bon professeur, M'lila.

Gabrielle étudia le manuscrit, puis Xena, observant l'expression douce et introspective sur le visage anguleux de la guerrière. " Il y a des dizaines de parchemins, Xena. "

La guerrière acquiesça. " En effet. " Ses yeux brillaient de malice. " Ça en fait des histoires à raconter. "

" Je veux les entendre ", fit le barde dans un souffle, tout en effleurant des doigts les lettres, fascinée. Elle tourna des yeux brillants vers Xena. " Tu me les liras ? "

Ce qui lui valut un sourire penaud en retour. " Ben.. je sais pas… qu'est-ce que tu me donnes en échange ?? " fit-elle d'un air taquin.

Gabrielle pencha la tête sur le côté, et adoucit son regard, fixant Xena d'une expression rêveuse.

Xena sentit son cœur fondre devant ce regard, et fit appel aux souvenirs enfouis dans sa mémoire. " Amcan innau rhaid at cofio fy Cymraeg. " Elle parvint à trouver les mots, et sourit en voyant l'expression charmée sur le visage de Gabrielle. J'ai sans doute mélangé la syntaxe. M'lila s'énervait toujours contre moi là-dessus.

" C'est si… différent. " Elle sourit, émerveillée. " Comme de la musique. "

Le passé la submergea doucement, et Xena se souvint du bruit des vagues de l'océan. Elle sentit les embruns sur son visage, tandis qu'elle écoutait M'lila lui parler de son pays. D'un amour si farouche qu'il illuminait les yeux de la jeune Celte. Un jour… M'lila lui avait dit, une fois, lorsqu'elle avait demandé. " Un jour, tu connaîtra ce sentiment, Xena. Et tu seras changée à tout jamais. " Ah… M'lila… comme tu avais raison.

" fi cariad ti, Gabrielle. " Elle laissa la phrase surgir d'un endroit au plus profond d'elle-même.

Des lèvres chaudes se posèrent sur les siennes pendant un instant infini. Puis Gabrielle pencha la tête en arrière et la regarda dans les yeux. " Je t'aime aussi. "

" Je ne savais pas que tu parlais cette langue ", fit Xena, taquine.

Le barde sourit. " Ta bouche ne dit jamais ces choses-là, Xena… mais tes yeux, si. " Je t'ai eue… pensa-t-elle, ravie, en voyant la rougeur envahir le visage de sa compagne. Et un point pour le barde, un. Elle posa la tête contre l'épaule de Xena un long moment, absorbant le parfum inhabituel de laine épaisse, mêlé à l'odeur particulière des herbes qu'elles gardaient dans leurs sacoches. " Faudrait sans doute y aller, hein ? "

Xena se força à ouvrir les yeux, et regarda autour d'elle. Dans la grotte régnait une atmosphère calme et tranquille et elle laissa son esprit vagabonder un moment, imaginant ce qu'avait été la vie dans cet endroit. En pensées, elle redessina la salle, plaçant un feu crépitant dans l'âtre, des fourrures chaudes et moelleuses sur la couche contre laquelle elle était appuyée, redonna leurs couleurs aux tapisseries sur les murs, et parvint, pendant un bref instant, à presque entendre les notes élevées et aériennes de la harpe.

C'était un endroit privé, comprit-elle. Et… je crois que c'est ce que je veux… pour nous… " Ouais… vaudrait mieux ", dit-elle, mais ni l'une ni l'autre ne bougea pour autant. Elle jeta un coup d'œil triste à Gabrielle. " C'est sympa, ici, hein ? "

Cette fois, ce fut le barde qui se força à ouvrir les yeux. " Très ", fit-elle en riant doucement, puis elle posa la main sur le genou de Xena et se leva, avant de commencer à remplir de parchemins le sac à dos que Xena avait apporté. " Donne-moi un coup de main, tu veux ? "

La guerrière s'approcha et obéit, lui passant les manuscrits avec précaution. Lorsqu'elles eurent terminé, elle laissa Gabrielle sortir de l'alcôve, puis se leva, s'étira de tout son long, puis se secoua un peu. Le brouillard a à peu près disparu… c'est plutôt bon signe, se dit-elle. Elle baissa les yeux en sentant une pression chaleureuse contre sa poitrine.

" Ferme les yeux ", demanda le barde, éloignant la torche qu'elle tenait à la main.

Xena obéit sans protester, compta, puis rouvrit les yeux et fixa la lumière.

" C'est mieux ", approuva Gabrielle, en lui donnant une petite tape sur l'estomac. " Comment te sens-tu ? "

La guerrière hocha la tête. " J'ai mal au crâne, mais c'est pas trop mal. " Elle ramassa le sac rempli de parchemins, et le glissa sur son dos, ajustant les sangles autour de sa poitrine pour bien le maintenir en place. " Prête ? "

Xena fit le tour de la grotte et éteignit les torches l'une après l'autre, puis rejoignit Gabrielle à l'entrée, où le barde tenait la dernière torche. Elles se retournèrent toutes les deux pour regarder derrière elles, puis avancèrent dans le petit passage qui conduisait au tunnel.

" Par les dieux ", soupira Gabrielle en examinant le marteau lorsqu'elles le contournèrent. " Est-ce que c'est… "

" Mouais ", acquiesça Xena. " Heureusement que j'ai des réflexes corrects. "

Le barde ricana. " Corrects. " Elle soupira de façon mélodramatique. " Ah… la Princesse Guerrière des Euphémismes frappe encore. " Une niche dans la roche attira son attention, et elle fit un détour pour l'examiner. " Je me demande à quoi ça sert ? Hé, Xena, regarde… "

" Gabrielle, ne touche p… "

Un bruit de tonnerre aigu et assourdissant éclata et Xena réagit par réflexes purs ; elle attrapa Gabrielle autour de la taille et la tira de toutes ses forces en arrière.

Avec un fracas terrifiant, une énorme grille tomba, libérée par un contre-poids, et scella le passage. La poussière vola tandis que le portail se refermait, le craquement de la roche sous sa base témoignant de son poids et de sa taille.

Xena leva les yeux, tenant Gabrielle serrée contre elle, protégeant son corps du sien. Elle soupira, puis plaça ses lèvres tout contre l'oreille du barde. " Tu attires les ennuis comme du miel attire les abeilles, tu sais ça ? "

Gabrielle jeta un coup d'œil sous le bras de la guerrière et fit une grimace. " Ce qui expliquerait ta présence avec moi, hein ? " fit-elle en plaisantant doucement.

Contre toute attente, Xena éclata de rire. " Je n'y avais jamais pensé de cette façon, mais tu as sans doute raison. " Elle se leva, tira le barde avec elle, et essuya la poussière de leurs vêtements. Je devrais perdre les pédales, coincée là-dedans. Mais non. Je me demande si c'est juste passager à cause du coup que j'ai pris sur la tête… " Ok, Superbarde. C'est toi qui nous as mises là-dedans, c'est toi qui va nous en sortir. "

Gabrielle posa les mains sur ses hanches, outrée. " Ne commence pas avec ça ", fit-elle d'un ton menaçant. " Je ne l'ai pas fait exprès. " Elle fit une pause. " Et arrête avec ce petit air suffisant. " Encore une pause. " Arrête, je te dis. "

Xena finit par effacer le sourire sur ses lèvres, puis s'appuya contre le mur et croisa les jambes aux chevilles.

Le barde secoua la tête, et retourna vers l'alcôve. " Si elles pouvaient déclencher le mécanisme, alors elles devaient avoir un moyen de le relâcher ", raisonna-t-elle, et fut soulagée d'entendre le grognement approbateur de Xena. Elle étudia le rocher qu'elle avait touché, puis suivit des yeux la corde qui tenait le contre-poids. " Oh… OK ", fit-elle en souriant. " Je vois… si ça retient ça en place, alors tout ce que tu as à faire, c'est… " Elle déplaça un second rocher. " Et tout devrait s'inverser. "

Un craquement très bruyant récompensa ses efforts, et elle lança à Xena un regard suffisant.

Mais les contre-poids étaient très anciens, et faits de fourrures qui n'avaient pas vu la lumière du jour depuis des siècles. Avec un bruit sourd, le poids lâcha et largua sa charge de sable sur leur tête.

" Eh m… " soupira Gabrielle, en secouant le sable de ses cheveux d'un air dégoûté. Puis elle donna un coup sur le rocher et se mit à chercher autour des bords de la grille, ses gestes secs et pleins de colère.

Xena la regarda un moment, puis vint jusqu'à elle et posa ses mains sur les épaules du barde. " Hé. "

" Quoi ? " grogna Gabrielle en continuant à chercher. " Je cherche une autre solution. Va t'asseoir, va. "

La guerrière vint se placer devant elle, et la força à s'arrêter, son visage à présent très sérieux. " Je plaisantais, Gabrielle. "

Le barde soutint son regard. " Je n'aime pas qu'on me rappelle à quel point tu es plus douée que je le suis ", dit-elle simplement.

Xena leva un sourcil. " J'ai déclenché deux de ces mécanismes moi-même en venant, tu sais. Et puis j'ai ensuite réussi à me faire tomber une étagère en pierre sur le crâne et c'est toi qui as dû venir ici pour me sortir de là. Alors tu ne vas pas me dire qui est douée et qui ne l'est pas, OK ? " Elle posa la main sur l'épaule de Gabrielle. " Et en plus, tu as trouvé une excellente solution au problème. Ce n'est pas de ta faute si ce truc tombe en morceaux. "

Gabrielle soupira. " Je suppose que tu as une solution miracle, maintenant. " Elle était de toute évidence toujours en colère.

Xena soupira à son tour. " Tu sais… je pense sincèrement que tu es une personne très capable et très intelligente, Gabrielle. Je mettrais ma vie entre tes mains, et je l'ai fait plus d'une fois, sans hésitation. "

Le barde essaya de rester en colère, mais… " Je sais ", admit-elle. " C'est juste que… Xena, je me fiche de ce que les autres pensent de moi. Tu le sais, ça. "

" Je sais ", répondit doucement la guerrière.

" Mais je ne me fiche pas de ce que tu penses, toi. " Gabrielle se rapprocha un peu. " Ecoute… je sais qu'il y a plein de choses que tu sais faire mieux que moi. Et je l'accepte. Tu es cette étincelle merveilleuse, magique qui peut faire l'impossible. "

" Gabrielle… " objecta Xena. " Ce n'est pas vrai. "

Le barde saisit sa tunique et la secoua. " Si, c'est vrai, Xena. Arrête de le nier. Arrête de faire comme si tout le monde pouvait faire ce que tu fais. Tout le monde ne peut pas. Il y a quelque chose de spécial en toi et tu le sais bien, bon sang. "

Sa compagne ne répondit pas.

" Et parfois… je ne me sens pas trop sûre de moi. Parce que je n'ai rien de spécial. Et les dieux savent que je ne peux pas te faire de concurrence, mais je ne supporte pas non plus l'idée que tu puisses me regarder de haut ", finit Gabrielle tout doucement.

Xena la regarda, choquée, en silence. " La seule raison pour laquelle je te regarde de haut, Gabrielle, est le fait que je fais une tête de plus que toi ", dit-elle calmement, puis elle s'agenouilla aux pieds du barde. " Tu es ma raison de vivre. " Elle hésita. " Tu le sais ça, non ? " Elle baissa les yeux. " Je ne suis qu'un ancien seigneur de guerre fatigué, Gabrielle. Si je fais… " Elle secoua un peu la tête. " Des choses extraordinaires… c'est simplement parce que j'ai une inspiration extraordinaire. " Elle leva les yeux et croisa le regard vert de sa compagne. " Comment peux-tu penser… ne serait-ce qu'une seule… qu'une seule minute… que tu n'as rien de spécial ? "

" C'est facile ", murmura le barde, en s'agenouillant près d'elle, la main posée sur son genou. " Parce que tu es la seule personne qui m'ait jamais dit le contraire. " Elle sourit. " Et… si je crois ça, moi… alors il faudra bien que tu croies que tu es bien plus qu'un ancien seigneur de guerre fatigué. " Une pause. " D'accord ? "

Un sourire désabusé se dessina sur les lèvres de Xena. " D'accord ", acquiesça-t-elle.

Gabrielle soupira. " Et maintenant… mon cher ancien seigneur de guerre fatigué… tu n'aurais pas un plan miraculeux pour nous sortir de là, par hasard ? Parce que… franchement… j'en ai un peu marre de l'odeur des vieilles pierres poussiéreuses. "

Xena eut une moue pensive, puis se releva et saisit la torche qu'elles avaient coincée dans une crevasse. " Reste là. " Elle repartit vers la salle principale, laissant Gabrielle dans les ténèbres.

Tu es ma raison de vivre… les mots étaient encore présents à son esprit, si chaleureux. Dieux… c'est merveilleux d'entendre quelqu'un vous dire ça. N'importe qui, d'ailleurs. Mais que ce soit quelqu'un comme elle… elle ne le voit pas… du tout. On dirait qu'il va falloir être à la hauteur des attentes de l'autre… c'est plutôt marrant. Elle leva les yeux au moment où Xena surgissait de l'obscurité, la torche dans une main et quelque chose de long et miroitant dans l'autre. " Salut… "

" Tiens-moi ça ", fit Xena en lui passant la torche.

" Tu as une idée ? " demanda Gabrielle en prenant la torche, jetant un coup d'œil à sa compagne.

" Va te mettre là-bas. " La guerrière la prit par les épaules et la plaça contre le mur du fond.

" Qu'est-ce que tu vas faire ? " demanda le barde en levant les sourcils. " Allez, Xena… dis-moi. "

La guerrière recula et souleva ce qu'elle transportait : une épée. " Tu vois… notre amie viking était plutôt maligne, Gabrielle. " Xena leva les yeux et son sourire devint féroce. " Mais je crois qu'elle ne s'attendait pas à ce que je passe par ici. "

Elle sautilla un peu, puis se pencha en avant, et fit trois longue enjambées, se propulsant sur la dernière et sautant dans les airs. D'un grand coup d'épée arrière, elle trancha l'épaisse corde qui retenait le marteau de guerre, avec un crissement de métal sur la fibre. Elle laissa son élan l'emporter, puis elle sauta tranquillement, laissant le marteau s'écraser sur le sol avant d'atterrir tout près de son énorme tête.

" Eh ben ", fit Gabrielle en riant, tout en ôtant de petits morceaux de granite de sa tunique.

Xena laissa tomber l'épée par terre, et alla jusqu'au marteau, s'essuyant les mains sur sa tunique avant de saisir la poignée de l'arme. D'un mouvement fluide, elle la souleva et la posa sur son épaule, avant de s'approcher de la grille qu'elle étudia attentivement.

Elle fit deux pas en arrière, puis se mit à courir en avant, et balança le marteau de toutes ses forces contre la grille. Un craquement impressionnant retentit dans la salle, envoyant un écho et des frissons dans les bras de Gabrielle. Elle regarda Xena recommencer, encore, et encore, jusqu'à ce que, à la troisième fois, la moitié de la grille explose et envoie des échardes voler dans toutes les directions.

Xena reposa le marteau sur son épaule et se recula un peu pour admirer son œuvre. " Ça devrait faire l'affaire ", fit-elle en souriant, puis elle se tourna vers Gabrielle pour lui tendre la main. " On y va ? "

Gabrielle s'approcha et étudia le trou d'un œil critique. Puis elle glissa son bras autour de la taille de Xena et lui donna une petite tape amicale. " Beau boulot. "

" Tu trouves ? " fit la guerrière d'un air suffisant. " Pas mal pour un ancien seigneur de guerre fatigué, hein ? "

" Pas mal du tout ", acquiesça le barde. " Je crois que je vais te garder. "

" Ravie de l'apprendre ", fit Xena en riant, alors qu'elle passait à travers le trou et prenait la torche des mains du barde. " Allez, viens. "

Elles avancèrent dans le passage, et s'arrêtèrent à l'ouverture du tunnel. " Ça va ? " demanda Gabrielle en étudiant attentivement le visage de sa compagne.

" Ça va ", fit Xena d'un air distrait, en examinant la roche. " Pourquoi ? " Elle baissa les yeux lorsqu'elle se rendit compte que Gabrielle n'avait pas répondu, et vit le regard que lui lançait le barde. Elle haussa les épaules et continua à avancer dans le tunnel, ravie d'être libérée de sa peur. C'est sans doute temporaire, se dit-elle à regret. Ça fait longtemps que je traîne ça, et ça m'étonnerait que j'arrive à le contrôler si facilement… enfin, c'est quand même sympa de ne pas avoir à y penser pour l'instant. Elles atteignirent le gouffre et levèrent les yeux vers le visage inquiet de Wennid. " C'est bon… on a les manuscrits ", cria Xena en leur faisant signe de la main. Elle se tourna vers Gabrielle. " Allez, on monte, ma Reine. "

Le barde hésita. " Xena… je ne crois pas pouvoir… "

" Bien sûr que si ", fit Xena pour la rassurer, tout en resserrant les sangles de son sac à dos.

" Non… je ne peux pas… je n'ai pas réussi à descendre jusqu'en bas. Il a fallu que je lâche prise. " Les yeux verts du barde croisèrent les siens, pleins de regret. " On peut toujours leur demander de me hisser, non ? "

Xena la regarda. " Gabrielle, tu as la force de le faire. Je le sais. J'étais là-dedans, tu te souviens ? " Elle prit la main du barde et la posa sur la corde. " Allez. Je serai juste derrière toi. "

A contrecœur, Gabrielle se mit à grimper, consciente de la présence rassurante de sa compagne derrière elle tandis que la guerrière se hissait contre la paroi en utilisant les prises sur la roche. A mi-chemin, elle s'arrêta, le souffle cour. " Je ne… "

Xena enveloppa son bras autour d'elle, et la souleva un peu, prenant appui avec ses pieds sur la roche. " Repose-toi un peu ", souffla-t-elle dans l'oreille du barde. " Tu vas y arriver. "

" OK ", acquiesça Gabrielle, puis elle reprit son ascension, et avant peu, des mains couvertes de fourrure saisissaient ses avant-bras et elle se retrouva hissée hors du gouffre et vers le chaos le plus total. " C'est bon… je vais bien… Xena va bien… arrêtez de hurler ! "

Xena regarda le barde disparaître avec amusement, et se prépara à finir son escalade. Elle aurait pu, elle le savait bien, saisir la corde et grimper. Mais cela aurait été trop facile, et s'il y avait un moyen de rendre les choses plus difficiles, elle le trouvait toujours.

Pour le moment, elle était en équilibre sur la dernière prise et au-dessus d'elle n'avait rien d'autre que la paroi lisse, et l'ouverture du gouffre plusieurs mètres plus haut. Elle rit doucement et sentit un franc sourire venir sur ses lèvres. Non… non… ma chère viking… tu n'avais vraiment pas pensé à moi, hein ?

Elle inspira profondément et s'accroupit un peu plus, puis se propulsa vers le haut, les deux mains tendues vers le ciel, et sourit en agrippant le rebord du gouffre. Maintenant venait le plus difficile. Mais elle n'avait pas passé autant de temps à grimper aux arbres pour rien. Elle resserra sa prise sur le rebord, puis se hissa et força son corps hors du gouffre, jusqu'à ce qu'elle soit assise tout près de l'endroit où Gabrielle était étendue. Et voilà… se dit-elle, très contente d'elle. Pas mal pour un ancien seigneur de guerre fatigué.

Gabrielle posa la tête sur la cuisse de Xena et la regarda d'un air suppliant. " Fais-les taire ", marmonna-t-elle.

" Tout ce que tu veux, mon barde. " Xena lui toucha le bout du nez, puis leva les yeux, et son expression s'assombrit tout à coup, passant d'une personne à l'autre jusqu'à ce que le silence retombe sur la pièce. " Voilà qui est mieux ", grogna-t-elle.

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