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Bound1B

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Unies/ Bound

 

par Melissa Good

 

Traduction : Katell et Fryda

 

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Partie 1B

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Chapitre 7

 

Argo était nerveuse, Gabrielle s'en rendait compte ; et c'était dû, soit à l'absence de sa cavalière habituelle, soit au fait que l'animal sensible percevait sa propre agitation, elle le savait. " Calme, Argo. " Murmura-t-elle, tapotant le cou de la jument, qui lui valut un mouvement d'oreille en réponse. " C'est bien... calme-toi. "

 

Son inquiétude pour Argo avait aidé son esprit à éloigner ce pour quoi elle s'inquiétait vraiment. Et ça ne servait à rien - elle se dirigeait déjà dans la seule direction qui pourrait l'aider, aussi vite qu'Argo le pouvait sur le sol rocheux.

 

Mais elle ne pouvait s'en empêcher - chaque fois que son esprit se vidait, les souvenirs commençaient à affluer avec une réalité encore plus accrue. Et ça l'effrayait - ça l'effrayait beaucoup de penser que ces souvenirs étaient la seule chose qui lui restait.

 

Maintenant, enfin, elles étaient sur le chemin de pierre, sur de l'herbe haute, et elle mordit sa lèvre, et pressa ses genoux, et Argo répondit, allongeant son pas, amenant l'herbe à fouetter les jambes de Gabrielle. Plus vite... son esprit la pressait et elle sentit une urgence faire écho de loin. " Allons, Argo. " Elle agrippa les rênes fermement et demanda plus de vitesse à la jument.

 

Et Argo, tout en reniflant, accepta, bondissant par-dessus l'herbe à un galop de plus en plus rapide. " Va, Argo... " Murmura-t-elle, se penchant bas sur le dos de la jument. " Tu ne veux pas perdre... " Sa respiration se bloqua dans sa gorge. " Non... " Son esprit chaotique lui envoya une image vivace - Xena et elle assises, le dos contre un rocher élevé, regardant le soleil couchant. Elle ferma les yeux et laissa le souvenir affluer.

 

Ca s'était passé après cet enlèvement, lorsque Xena avait perdu la vue.

Elle avait eu le coeur à la gorge pour ce qui lui avait semblé une éternité, mais n'avait duré que quelques minutes, après qu'elle avait doucement lavé les yeux de Xena avec la mixture piquante de séné... et qu'elles avaient attendu. Attendu de voir s'il n'était pas trop tard après tout - si le prix de sa vie serait la vue de Xena. Gabrielle ne pouvait le supporter... la regardant assise aussi calme - mais elle voyait le battement du coeur. Il allait si vite que c'était un miracle que le barde n'entende pas le bruit rapide.

Puis les yeux bleus dans le vague avaient pris de la clarté, et de l'expression, et s'étaient concentrés sur elle.

Ce sourire. Quelle vue pour des yeux abîmés, hein ? Cette vue s'était presque évanouie de soulagement, et tu parles de la vue que ça aurait fait !

Et plus tard, elles regardaient le soleil se coucher, en lançant des dagues cramoisies de lumière par-dessus l'herbe moelleuse de la rivière sur laquelle elles étaient assises ; une lumière qui capturait des éclairs perçants dans deux yeux bleus sans repos, qui semblaient tout absorber... avec une calme appréciation.

Elles mangèrent leur dîner, puis soudain le regard de Xena fut sur elle, et le sourire de nouveau. " J'ai eu le temps de penser à toutes les choses que j'aurais regretté de ne plus voir. " Dit-elle. " Les lacs, les arbres, les couchers de soleil. " Et elle fit une pause. " Toi. " Elle sourit au rougissement du barde et glissa un bras autour de ses épaules.

Et le coeur de Gabrielle s'était pratiquement arrêté de battre, parce que c'était la première fois qu'elle avait jamais entendu cette... intonation... dans la voix de Xena... Elle regarda le coucher de soleil comme si c'était le premier qu'elle voyait, et peut-être que ça l'était, parce que c'était le premier qu'elle ait jamais regardé avec le bras de Xena autour d'elle. Et ce fut la première fois qu'elle baissa sa garde avec précaution, se permettant de croire qu'elles allaient toutes les deux dans une direction à laquelle elle avait seulement rêvé avant ça.

 

Si elle fermait les yeux, elle pouvait encore sentir la riche senteur du buisson de baies de sureau près duquel elles s'étaient assises. Et dont elles avaient partagé le fruit, dans une complicité qui avait envoyé des frissons tout au long de son épine dorsale, parmi d'autres endroits.

 

Puis elle s'était forcée à ouvrir les yeux et avait cligné pour les éclaircir, sentant la panique monter en elle. "Je ne peux pas perdre ceci." Elle murmura ces mots à quiconque écoutait. Je ne peux pas la perdre. Pas encore une fois. Elle se concentra sur le tonnerre des sabots d'Argo, et dirigea la jument en bas vers la petite vallée qui les mènerait enfin près de la rivière qui marquait la frontière du peuple de Jessan.

 

 

 

Chapitre 8

 

Se réveiller de nouveau dans l'obscurité était probablement la pire des choses qui lui soit arrivée, pensa Xena, sonnée. Même le battement de son coeur lui faisait du mal. Elle prit de petites inspirations, sa poitrine bougeant à peine dans l'air immobile, pour ne rien secouer.

 

Elle entendit un petit piaulement. " Calme, Arès. " Et elle tressaillit à l'enrouement de sa voix. Elle sentit sa langue soyeuse sur son pouce et força sa main à bouger, pour le frotter doucement derrière les oreilles. " Désolée que tu sois coincé là-dedans. "

 

Elle déglutit contre la sécheresse soudaine de sa gorge. " Je présume que c'est tout ce que je peux attendre, hein ? " Elle ressentit une profonde tristesse. " Une blague des dieux, Arès. Peut-être qu'il était en colère à cause de toi après tout. " Le bébé-loup leva les yeux lorsque quelque chose atteint sa tête et cligna des yeux. " Je savais que c'était trop bien pour être vrai. " Arès secoua la tête lorsque quelque chose tomba de nouveau sur lui. " Si seulement je n'avais pas attendu si longtemps. "

 

Arès secoua de nouveau la tête, et rampa plus près, montant le long de son bras centimètre par centimètre jusqu'à ce que son nez humide touche le sien. Avec un petit piaulement, il commença à lécher son visage.

 

" Merci. " Elle murmura en pressant sa joue contre la fourrure soyeuse. " Je ne suis pas prête pour ça, Arès. J'ai toujours cru que je le serais. Quand tu fais ce que je fais... tu te fais à l'idée en quelque sorte. " Elle bougea ses épaules, provoquant un craquement inquiétant des rochers, mais elle diminua un peu la pression sur son dos. " Je ne peux pas... supporter... l'idée de la laisser. " Elle laissa sa tête reposer de nouveau contre le rocher cruel et ferma les yeux, pendant qu'Arès continuait à la lécher de manière affairée. " Tu dois avoir soif, hein ? " Moi pas... et c'est mauvais signe. Mon corps doit ralentir. " Contente d'avoir pu t'aider. " Le bébé-loup mit son museau contre son oreille et pressa son corps contre son épaule, s'installant avec un soupir.

 

Au moins, nous avons eu du temps. Elle prit une inspiration frémissante. Et si mon heure est venue, je remercie tous les dieux de l'Olympe que nous nous soyons enfin parlé. Parce que si je devais mourir sans qu'elle sache... non... j'ai juré la dernière fois que ça ne se produirait pas. Et ça ne s'est pas produit, et s'il y a une seule chose dont je puisse être contente dans cette vie pitoyable, c'est ce que nous avons partagé. Son coeur se serra douloureusement. Mais je ne veux pas abandonner cela... maintenant... alors je pense que je vais m'accrocher… encore un peu.

 

 

 

Chapitre 9

 

La vitesse d'Argo mollit lorsqu'elles pénétrèrent dans la vallée sinueuse et suivirent un petit ruisseau dans son centre. Les murs s'élevaient de chaque côté, réfléchissant le soleil brillant depuis les pentes. Ca aurait pu être un joli endroit, songea Gabrielle, mais là maintenant elle le haïssait. Elle avait haï chaque kilomètre qui se trouvait entre elle et de l'aide. Entre elle et la montagne derrière elle. L'urgence la brûlait et elle serra plus fort les genoux contre les flancs de la jument, provoquant un reniflement.

 

" Ecoute. " Elle plaida sa cause auprès d'Argo. " Je sais qu'il fait très chaud, je sais que tu es fatiguée... moi aussi... mais c'est comme ça, Ok ? " Elle caressa le cou couvert d'écume et enroula ses doigts dans la crinière couleur de blé de la jument. " S'il te plaît ? " Gabrielle savait que la jument ne pouvait comprendre les mots, mais son pas accéléra de nouveau quand même, et elles descendirent le chemin à toute vitesse.

 

Sois positive, Gabrielle, se dit-elle. Pense à ce qu'ont été ces deux derniers mois. Et comme tu veux que cela continue. Ce qu'elle fit et elle se perdit un court instant dans la chaleur du souvenir du moment où elle réalisa que leur amitié devenait plus profonde... plus vite qu'aucune des d'eux ne l'avait envisagé.

 

C'était tard un soir, après un long jour de combat contre des bandits qui avaient attaqué une petite ville marchande. Elles s'étaient toutes les deux trempées longuement dans un lac proche, et elle s'était inquiétée de l'expression épuisée sur le visage de Xena. Alors elle avait calmement préparé de l'infusion, en utilisant les fruits que Xena aimait, et la lui avait apportée alors qu'elle était assise, fixant le feu, un long bras enroulé autour de son genou relevé.

Elle leva les yeux et répondit à l'inquiétude inscrite dans les yeux du barde par un sourire. " Qu'est-ce que c'est que ça ? " Avait-elle demandé. " Je t'ai fait du thé. Tu as l'air plutôt lessivée. " Avait répondu Gabrielle, et à sa surprise, Xena avait tapoté une place à côté d'elle. Sur sa couverture. " Partage-le avec moi. " Avait dit la voix et Gabrielle pouvait encore la sentir, là, dans ses tripes.

Alors elle s'était assise et elles avaient partagé la tasse, en se la passant, et elle s'était retrouvée sans savoir pourquoi, effleurant la large épaule de la guerrière. Et Xena, au lieu de s'éloigner, s'était penchée en arrière, et avait allongé un bras le long de la bûche derrière elle. Et comme si cela faisait partie d'un plan, Gabrielle s'était installée dans l'espace soudain amical et chaleureux contre elle, et, respirant à peine, elle avait posé sa tête dans le creux de l'épaule de Xena.

Pas un mot de la guerrière, juste ce doux sourire, et le confort surprenant de son bras qui monta de la bûche pour s'enrouler autour de la taille du barde.

Ce n'était pas grand-chose. Et ça aurait paru presque normal. Elles étaient deux amies très proches et les dieux savaient qu'elle recevait autant d'étreintes que Xena voulait bien se permettre d'en donner. Ca aurait pu, sauf qu'elles avaient commis l'erreur, au milieu de cette proximité, de se regarder dans les yeux.

Et cela, Gabrielle s'en souvenait avec une clarté douloureuse, cela avait tout changé. A partir de ce moment, elles avaient arrêté de se chercher des excuses pour être proches. Et peu de temps après, elle avait été appelée au village des Amazones pour régler une dispute. Et le reste, comme elle le disait souvent, c'était de l'histoire.

 

Cela amena un sourire nostalgique sur son visage, alors qu'elle contournait le dernier virage de la vallée, et son corps se pétrifia, lorsqu'elle repéra les hommes vêtus de cuir alignés en travers du chemin.

 

Instinctivement, elle tendit la main vers son bâton, juste pour réaliser qu'il se trouvait sous l'alcôve là-haut dans la montagne, et elle pesta contre elle-même. Ne te fais jamais prendre sans une arme. Xena le lui avait répété maintes et maintes fois. Bon sang, et maintenant je suis, et alors que sa vie... Gabrielle sentit sa gorge se serrer. J'ai tout bousillé. Imagine. Tu étais folle de dépendre de moi, Xena.

 

L'alignement des hommes se rapprocha et elle pouvait maintenant voir certains d'entre eux sourire, lorsqu'ils commencèrent à agiter de longs bâtons vers la jument qui galopait, en lui faisant signe.

 

Une image plongea soudain dans son esprit, d'un jour pas si lointain où elle était assise à l'ombre d'un chêne, et regardait Xena faire marcher la jument. Ses longs bras confortablement détendus sur les côtés, la guerrière utilisait juste de légers signaux de ses jambes pour diriger le cheval à travers un labyrinthe de fortune, finissant par la faire sauter, toujours sans se tenir, par-dessus une haute balle de foin qui pourrissait dans le champ. " A quelle hauteur peut-elle sauter, Xena ? " Elle se souvenait d'avoir posé la question, et cela mit une idée folle dans sa tête. Je ne peux pas le faire. Ses yeux se fixèrent sur l'alignement des hommes qui se rapprochaient maintenant. Mais je ne peux pas non plus les laisser m'arrêter. Elle ferma les yeux et se concentra, se souvenant exactement de ce que Xena avait fait - oui... elle s'était assise bas, juste comme ceci...

 

Gabrielle enchevêtra ses doigts dans la crinière d'Argo et la mena vers les hommes, sans ralentir. La jument sembla sentir ce qu'elle faisait, parce que le barde pouvait la sentir se ramasser sous ses genoux douloureux, et elle espéra simplement qu'elle pourrait tenir bon et ne pas tomber de la jument si et quand elle sauterait.

 

Elle se pencha en avant, bougeant son corps au-dessus des épaules de la jument, et elle vit la surprise horrifiée sur le visage du premier homme lorsqu'elle enfonça ses talons dans les flancs couverts de sueur du cheval, et la sentit s'envoler dans une explosion de ses hanches. Le vent la fouetta au visage, lorsqu'elle vit le ciel tournoyer sauvagement autour de sa tête, puis son visage cogna avec une force étonnante contre le cou d'Argo lorsqu'elle atterrit, et trébucha sur un pas avant de continuer.

 

Gabrielle faillit s'évanouir. Elle pouvait sentir le gris à la périphérie de sa vision, et son ouïe diminua, mais elle garda sa prise solide sur les crins épais et ondoyants et réussit d'une manière ou d'une autre à ne pas glisser à bas. Elle sentit de l'humidité sous son nez et elle libéra une main pour frotter son visage, et elle regarda avec fascination sa main couverte de sang. Lorsqu'elle tourna la tête, elle vit la poussière de chevaux qui la suivaient et elle réalisa que les hommes la poursuivaient.

 

Non... Son esprit fatigué grogna et elle posa sa main contre le cou laborieux d'Argo. " Désolée, ma fille... je ne t'aurais pas fait faire ça si j'avais su qu'ils nous poursuivraient. Je sais que tu es fatiguée... tu ne peux pas les semer. "

 

Elle commença à tirer avec précaution sur les rênes mais Argo avait autre chose en tête. Soit elle était contaminée par cette urgence, ou c'était juste son entêtement, la jument refusa la requête, secouant sa tête et tirant sur le cuir couvert de sueur entre les doigts du barde. Elles allèrent jusqu'au bout de la vallée, entendant le bruit des sabots approchant des attaquants, mais maintenant la brise fraîche soulevait ses cheveux trempés de son front, et fouettait la rude crinière sous ses mains, ravivant ses esprits.

 

Loin devant, elle vit la lueur bienvenue du soleil sur l'eau, et la clairière sauvage environnante la salua dans toute sa familiarité. " Oh dieux... c'est si près. Allons Argo, tu peux le faire. " Elle se coucha sur le cou de la jument et enroula ses mains dans le cuir et les crins, sentant la chaleur augmenter sur la peau d'Argo. Et lorsque ses mains encerclèrent la jument, elle sentit un faible effleurement de bras autour d'elle dans une sensation si chaude qu'elle en eut mal. " Reste avec moi. " Les mots se formèrent sur ses lèvres. " S'il te plaît. "

 

 

 

Chapitre 10

 

Deggis bâilla et étira ses longs bras par-dessus sa tête en écoutant le craquement des jointures avec un tressaillement.

 

" Par les arbres vivants, je n'aurais pas dû faire autant d'exercices hier. " Il soupira, et reçut un grognement d'assentiment d'Olanis à la fourrure claire, qui s'appuyait contre l'arbre du poste de garde et parcourait l'horizon des yeux.

 

" Je te l'ai dit. " Olanis roula les yeux. " Il faut vraiment que tu persistes à te mesurer à Jess, n'est-ce pas ? Abandonne donc, OK ? "

 

" Quelqu'un doit le houspiller, autrement il va devenir encore plus paresseux. Est-ce que tu as... " Deggis s'arrêta, lorsque ses yeux saisirent un mouvement non familier venant dans leur direction. " Hé ! Tu vois ça ? "

 

Olanis se redressa et regarda dans cette direction. " Un cheval. " Murmura-t-il, en plissant les yeux " Pas un des nôtres. "

 

L'être de la forêt au pelage plus sombre abrita ses yeux et jura. " Non.. Pas un des nôtres. " Il regarda par-dessus sa tête et s'agenouilla, puis il bondit vers la première branche, se collant contre elle, avec une meilleure vue du cavalier approchant. " Plus d'un. " Siffla-t-il lorsqu'il repéra le nuage de poussière. " Et... " Il cligna des yeux et son front s'élargit. " Je connais celui qui mène... Je crois... Arès, c'est bien elle. C'est Argo. "

 

Olanis se hissa sur la branche et regarda. " En es-tu sûr ? "

 

" Ouais... " Ses yeux firent le point. " Oh, oh. On dirait que c'est la conteuse qui chevauche. C'est pas bon signe. Tu ferais mieux de passer le mot. "

 

Olanis grommela. " On dirait que les autres s'arrêtent. "

 

" Bien. " Deggis soupira. " Je ne cherchais pas le combat aujourd'hui. "

 

Olanis se laissa tomber de la branche et se dirigea vers l'étalon en courant, sautant sur le dos gris de l'animal et le pressant vers le village.

 

Deggis continuait à regarder, maintenant que la jument arrivait sans obstacle et il attendit.

 

 

 

Chapitre 11

 

" Allons, Procci, arrête d'être aussi mou et frappe-moi, donc. " Jessan soupira en contournant son opposant plus petit, agitant sa large épée d'avant en arrière d'ennui.

 

" Facile à dire pour toi. " Procci cracha, nettoyant le sang au coin de sa bouche. "C'est pas toi qui prends une raclée. " Il partit comme une flèche et frappa de côté, espérant toucher le grand Jessan au niveau du genou.

 

" Nul. " Jessan rit et bloqua le coup, tournant le poignet ce faisant et envoyant l'épée de Procci dans les airs. Il sautilla plusieurs fois alors qu'il regardait Procci se traîner et ramasser l'épée, puis il s'arrêta envahi de nouveau par un vague sentiment d'inquiétude. Bon sang... qu'est-ce que c'était que ça ? Des bruits de sabots attirèrent son attention et il tournoya pour regarder le portail du village.

 

Un éclair de gris et il reconnut Olanis qui était de garde cette semaine - bien que les relations avec Hectator soient excellentes, et c'était la seule vraie approche de leur territoire sur laquelle ils gardaient un œil.

 

Olanis regarda autour de lui et le repéra, enfonçant les genoux dans les flancs gris pour galoper dans sa direction.

 

C'est ça... Son esprit palpita. Je savais qu'il y avait quelque chose. J'aurais dû écouter plus tôt. " Qu'y a-t-il ? " Cria-t-il alors qu'Olanis freinait devant lui.

 

" Une cavalière, elle arrive vite, depuis les montagnes. On dirait le cheval de Xena, Argo, et Deggis dit que c'est la conteuse qui chevauche. " Il fit une pause. " Seule. "

 

Jessan murmura un juron et commença à courir, en sifflant pour appeler Eris en même temps. Il réussit à ranger son épée sans se couper le bras et atteignit le portail au moment où Eris l'atteignait. " Allons... allons... " Il grogna en se hissant sur le dos élevé du cheval noir et agrippa sa crinière, pointant sa tête vers le poste de garde et laissant sortir un rugissement sauvage. Le corps d'Eris sursauta et il bondit comme un éclair, éparpillant un groupe de chasseurs qui rentraient, au hasard sur le chemin.

 

 

 

Chapitre 12

 

Argo se fatiguait méchamment, Gabrielle le savait. Elle pouvait sentir la respiration laborieuse de la jument sous ses genoux, et l'écume s'échappait de sa tête et de son cou et couvrait le barde à intervalles irréguliers. Mais elles avaient semé leurs attaquants - elle avait entendu les bruits de sabots diminuer un moment plus tôt, et maintenant elles étaient pratiquement arrivées au ruisseau qui marquait la frontière du territoire des êtres de la forêt.

 

L'éclaboussement de l'eau glacée la choqua et l'éveilla, et Argo renifla avec lassitude lorsque le liquide passa en cascade sur ses flancs, secouant la tête lorsqu'elle trébucha en sortant de l'autre côté du ruisseau, et continua à galoper. Gabrielle sentit une vague de fatigue la submerger et elle posa sa tête sur le cou de la jument, et se cramponna simplement, laissant Argo aller où elle voudrait. Le son d'un cheval au galop pénétra son oreille et elle sentit qu'Argo changeait de direction vers l'endroit d'où il venait. Le bruit devint un tonnerre sourd et elle était sur le point de relever la tête lorsqu'Argo s'arrêta soudain et se cabra, et elle tomba en arrière, le dos sur l'herbe douce et odorante de la prairie.

 

Ce fut le silence, à l'exception de la respiration difficile d'Argo. Puis des jurons murmurés par une voix qu'elle connaissait, et le son d'un corps lourd atterrissant sur le sol, tout près. Deux bruits de pas et elle sentit la douce fourrure des bras de Jessan qui la soulevait. Elle ouvrit les yeux pour voir les siens, dorés, la fixer anxieusement, et elle sentit le tremblement nu d'un sourire déformer ses lèvres.

 

" Gabrielle... " sa voix était douce. " Que s'est-il passé ? Est-ce que tout va bien ? "

 

" Non. " Elle réussit à lui répondre. " Tout va mal. " Elle s'assit et prit une inspiration. Allons, Gabrielle. Tu es venue jusqu'ici, ne tombe pas en lambeaux maintenant. " Nous étions... là-haut dans les montagnes. Et il y avait une tempête. Une grosse. " Elle s'éclaircit la voix. " Argo a été effrayée, et Xena l'a suivie. " Ses yeux s'assombrirent. " Et il y avait un effondrement... Jess. Elle a été prise dedans. J'ai besoin... " Une autre respiration. " De ton aide. Pour la sortir de là. " Elle fit une pause. " S'il te plaît."

 

D'autres bruits de sabots, et un groupe d'êtres de la forêt l'entourait, les visages tendus d'inquiétude.

 

Un homme plus âgé se laissa tomber près d'elle et mit une main sur son genou. " Un effondrement, dis-tu, Gabrielle. " La voix de Lestan était calme, et les yeux du chef des êtres de la forêt montraient de la sympathie.

 

Elle hocha la tête. " Pas beaucoup de temps. Je suis venue ici... aussi vite que j'ai pu. "

 

Jessan prit doucement son visage entre ses larges mains et la força à le regarder dans les yeux. " Nous allons y aller, tu sais que nous allons le faire, Gabrielle... Mais... " Ses yeux brillèrent. " C'est une montagne cruelle... elle n'aime pas rendre ce qu'elle a pris. "

 

Ils étaient tous en attente, la regardant. Elle savait ce que Jessan voulait dire. " Non... elle est toujours vivante. " Elle prit une profonde inspiration. " Je le saurais, autrement. " Et elle se tourna pour regarder Lestan avec le coeur au bord des lèvres. " N'est-ce pas ? " S'il te plaît... s'il te plaît, dis-moi que je ne suis pas en train d'imaginer ceci. Que je n'ai pas chevauché le Tartare pour rien. S'il te plaît... ne m'enlève pas l'espoir. Pas encore.

 

Lestan laissa ses yeux se fermer pour un petit moment, puis il les ouvrit en grand. " Oui, tu le saurais. " Répondit-il calmement, avec une note de surprise dans sa voix grondante. Il tendit la main et prit son menton. " Tu le saurais vraiment, petite sœur. "

 

Un murmure passa parmi les êtres de la forêt qui regardaient, mais il fut suivi du silence lorsque Lestan se leva. " Nous devons faire vite. Appelle une patrouille de montagne et qu'ils me retrouvent ici. Maintenant. Va. " Il pointa un doigt vers la première sentinelle qui l'avait suivi. " Et toi, emmène ce cheval et occupe-t-en. " En détaillant un second qui s'approchait avec précaution d'une Argo épuisée, et qui la prenait par la bride lui parlant d'une voix charmeuse.

 

" Tu vas chevaucher avec moi, OK ? " Lui murmura Jessan, visiblement ennuyé. " Tiens. " Il prit l'outre d'eau qu'un cousin lui offrait et l'ouvrit, avançant la main pour la tenir à ses lèvres. " Bois quelque chose, Gabrielle, s'il te plaît. "

 

Gabrielle laissa l'eau couler, puis soupira, et mit la tête dans ses mains, posant ses coudes sur les genoux. " J'ai peur, Jess. "

 

" Je sais. " Il la regarda avec une sympathie douloureuse. " Je sais qu'elle compte beaucoup pour toi... " Il prit un morceau de lin de sa poche et, le mouillant avec de l'eau de l'outre, il essuya le sang de son visage avec précaution.

 

" Non... " Gabrielle réussit à faire un sourire étranglé. " C'est plus que tu ne le sais. Beaucoup de choses ont changé depuis la dernière fois que tu nous as vues. "

 

Jessan la fixa, puis ferma les yeux et étendit sa Vision. Puis ses yeux dorés se rouvrirent et un sourire grandit sur sa bouche, exposant le bout de ses canines. " Oh... bon sang. " Elles l'avaient fait. Bon sang... je savais que ça devenait plus profond quand je les ai laissées... mais... Xena disait qu'elle ne ferait jamais... Je me demande ce qui a changé.

 

" J'ai promis. Je t'empêcherai de la taquiner à ce sujet. " Dit le barde avec un ton de calme désespoir.

 

Jessan claqua les mains et massa le froid glacial qui s'y trouvait. " Je te le jure, Gabrielle, je ne clignerai même pas dans ces yeux bleus de bébé. Pas un mot. "

 

Cette pensée fut presque trop forte pour elle et elle dut mordre durement sa lèvre pour s'empêcher de craquer. Elle leva les yeux vers lui. " Oh Jess... qu'est-ce que je vais faire si... " Elle ne put finir la phrase.

 

" Shh. " L'être de la forêt mit son long bras autour d'elle. " N'y pense pas. Nous irons là-bas. C"est la personne la plus forte que je connaisse - et elle tiendra là-bas jusqu'à ce que nous la sortions de là. Crois en elle, Gabrielle. Tu sais que je le fais. "

 

Le barde sentit son poids s'alléger. " Tu as raison. J'avais perdu la notion de ça... que peut faire une montagne contre la force de sa volonté, n'est-ce pas ? Ce sera une chance si ça ne finit pas en décoration de jardin. "

 

Jessan sourit contre sa volonté. Ca ressemblait tellement à Xena, aussi. Il leva les yeux alors que la patrouille de montagne approchait et offrit la main à Gabrielle. " Il est temps d'y aller. "

 

Ils étaient sur Eris au moment où la patrouille les atteignit, et Lestan prit la tête, lorsqu'ils repassèrent le ruisseau en éclaboussant, et se dirigèrent vers les pics de granite.

 

 

 

Chapitre 13

 

L'air devenait vicié, pensa Xena lorsqu'elle se poussa de nouveau vers la conscience. Elle se demanda combien de temps ça avait duré - son horloge interne ne semblait plus fonctionner et elle n'avait aucune idée du temps qui avait passé.

 

Arès somnolait près de sa tête et elle pouvait sentir sa douce respiration contre sa joue. Pauvre petit gars, pensa-t-elle d'un air las. Il a à peine eu de la chance, n'est-ce pas ? D'abord une panthère tue sa maman et tous ses frères et soeurs, maintenant ça.

 

Elle étira un peu son corps, ignorant la douleur et soupira. Et bien, les dommages internes semblaient s'être stabilisés, au moins, puisqu'elle ne sentait plus le rude battement accéléré de son coeur et le gonflement tendu qui s'y trouvait auparavant. Gabrielle me taquine toujours avec ce truc de guérir vite... peut-être que je vais guérir juste à temps pour suffoquer. Quel humour noir de la part de quelqu'un qui en était économe.

 

Avec précaution, elle étendit ses membres, sentant les muscles hurler d'agonie d'avoir été coincés à la même place si longtemps, et elle réalisa qu'elle avait au moins échappé à des os brisés ; Elle sentit un rire ironique faire son chemin et le laissa courir, même si l'effort fit battre son crâne.

 

Bon sang. L'obscurité s'installait de nouveau autour d'elle, une noirceur d'encre épaisse qui la fit espérer le plus petit rayon de soleil. Pire que lorsque j'étais aveuglée, pendant ce moment... au moins je pouvais voir les ombres... ceci... je hais ceci. Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour voir... Sa poitrine se contracta douloureusement, et elle ne finit pas sa pensée, parce que cette fois-ci, même dans une stupeur inconsciente, elle se souvenait, son esprit s'était tourné vers Gabrielle - elle se rappela des demi rêves de soleil, de vallées, de chevaux, et un éclaboussement glacial d'eau qui avait paru si réel...

 

Elle va me manquer. Elle ressentit une calme angoisse. Et je ne veux pas mourir ici, seule dans le noir, sans aucune chance de la revoir... et je ne crois pas que je la reverrai. Elle fut remplie d'une tristesse profonde. Parce que je suis plus que sûre que nous n'allons pas au même endroit... Et elle regarda au fond de son âme avec honnêteté, jugeant la noirceur de sa vie face à la misérable retraite relative des quelques dernières années, et elle sut que c'était la vérité. Et ce ne sera vraiment plus jamais, même si elle veut croire le contraire. Et je sais qu'elle le veut.

 

Quelque chose en elle se fracassa à cette pensée, et les échardes de cette brisure faisaient plus mal que n'importe laquelle des blessures qu'elle pouvait avoir.

 

 

 

Arès remua et lécha son oreille. " Salut, mon grand. Tu aurais mieux fait de continuer à dormir. " Murmura-t-elle dans une voix étouffée. Plus que tout, elle était surtout fatiguée. De combattre. De souffrir. De perdre des gens. Elle ne pouvait pas gagner, et peut-être qu'il était juste temps d'arrêter d'essayer.

 

L'air devenait difficile à respirer, et Xena réalisa, d'une manière lointaine, que son temps touchait à sa fin. Elle pencha la tête et embrassa doucement Arès sur son museau humide. " Désolée, mon vieux... je t'ai donné quelques mois de plus, au moins, hein ? " Il lécha son visage, en poussant un petit miaulement. " Tu n'as jamais vraiment eu une chance... mais... je présume que moi non plus. "

 

Elle sentit l'obscurité grandissante, et l'air immobile et vide s'installa sur elle comme une couverture. Et elle prit une profonde inspiration, comme par défi, renvoyant sa peur, et concentrant ses pensées vers un seul endroit. Vers une seule personne. Bon sang, comme si j'allais laisser une chose aussi insignifiante que la mort m'empêcher de lui dire au revoir.

 

Entends-moi, Gabrielle... Ecoute cette pauvre âme noire que tu as amenée à la lumière, pendant un petit instant.

 

Je veux que tu prennes soin de toi, Ok ? Parce que je ne peux pas être là pour le faire pour toi... bien que je donnerais n'importe quoi pour en être capable.

 

Je veux que tu vives le reste de ta vie en sachant que tu as fait une différence, pour moi, et pour tous ceux que tu touches de ta grâce, de ton honneur et du cadeau de ton envie de donner sans partage.

 

Je veux que tu saches que tu porteras toujours une partie de moi dans ton coeur - parce que je te l'ai donné, et je ne l'ai jamais regretté une seule seconde.

 

Je veux que tu saches que tu as apporté dans ma vie un miracle que je ne méritais pas, et que je n'oublierai jamais. Ce souvenir me portera au travers de l'éternité du Tartare, et je sourirai. Et ils ne comprendront pas, mais je m'en fiche.

 

Je veux que tu saches que je t'aime, et que je t'ai toujours aimée, et que je t'aimerai toujours. Pense à moi, de temps en temps. Tu sais que j'écouterai.

 

 

 

Chapitre 14

 

La patrouille des êtres de la forêt dévala dans un bruit de tonnerre à travers la passe vers la vallée, et les attaquants commencèrent à sortir pour les arrêter. Lestan en tête, se leva dans ses étriers, levant ses bras couverts de fourrures et découvrant ses canines. Un rugissement de basse jaillit de sa gorge et les attaquants s'éparpillèrent et coururent, laissant leurs chevaux et leur équipement derrière eux.

 

" Quelquefois, les crocs font vraiment la différence. " Murmura Jessan à l'oreille de Gabrielle, avec un sourire malade. " Et c'est bien plus rapide que de s'arrêter et de les combattre. "

 

Gabrielle sourit et reposa sa tête contre le bras de Jessan, essayant d'ignorer le barattage dans son estomac. Ils revenaient... aussi vite qu'ils le pouvaient... il n'y avait rien de plus qu'elle put faire juste là... mais ça n'empêchait pas le désespoir froid et rampant qui jetait une ombre au-dessus de son âme. Elle pouvait la sentir. Ils manquaient de temps.

 

N'ose surtout pas de me quitter, pensa-t-elle férocement vers les montagnes. N'ose surtout pas, Xena, pas après que j'ai chevauché Argo presque jusqu'à la mort, et sauté par-dessus des brigands meurtriers et crasseux. Moi, sautant avec Argo. Alors n'y pense même pas. Tu ne bouges pas, tu m'entends ? Mais malgré la force de ses pensées, elle regarda le soleil couchant avec des yeux écoeurés. Ca m'a pris tellement de temps.

 

Ils commencèrent la longue chevauchée qui montait le chemin étroit, bougeant aussi vite que possible, mais le crépuscule arriva avant qu'ils ne contournent le dernier tournant et voient l'effondrement.

 

La respiration de Jessan s'arrêta, avant qu'il ne puisse la contrôler et il grogna. Personne... pas même Xena... et pourtant, si je ferme les yeux, je peux voir une connexion... nue... fine, toujours présente. Que les dieux m'aident... je ne peux pas la voir se briser. Je ne peux pas.

 

" Jessan. " La voix de Gabrielle était un murmure dénudé et tendu.

 

" Oui ? " Répondit-il, se penchant vers elle et la regardant dans les yeux, tressaillant à l'expression hantée qu'ils contenaient.

 

" Dépêche-toi. " Ce fut sa réponse.

 

La moitié du groupe prit des torches, et les alluma. L'autre moitié commença à déplacer les rochers, prenant les petits d'une main et les plus grands en équipe.

 

Gabrielle les aida pendant un moment, mais elle vit qu'elle se trouvait plus dans leurs jambes qu'autre chose, et elle trouva un rocher le plus près possible de l'endroit où ils travaillaient, elle s'accroupit dessus, regardant le découpage grandissant dans la pile. Xena... plus très longtemps... s'il te plaît... je peux te sentir là qui tient bon. Je sais que tu le fais. Ne me quitte pas... je ne sais pas ce que je ferai sans toi. S'il te plaît ?

 

Jessan écarta les poils de ses yeux, et surveilla la pile depuis sa place au sommet. Son coeur sombra lorsqu'il réalisa combien de rochers ils devraient bouger avant d'avoir la moindre chance d'atteindre Xena. Si elle était vivante, et bien que sa Vision insistait pour lui dire que c'était vrai, sa raison lui disait que rien, ni personne, ne pouvait avoir survécu à l'écrasement des tonnes de granite.

 

Et si ma hache casse ce dernier morceau... et que je la découvre... alors quoi ? Qu'est-ce que je vais faire si je dois porter son corps sans vie hors d'ici ? Parce que, sur mon honneur, ce sera fait par moi et personne d'autre. Ma vie lui appartient.

 

Il jeta un coup d'oeil en arrière vers Gabrielle, blottie sur son rocher, les yeux dans le vague. Je l'ai taquinée à ce sujet. Que les dieux me maudissent et m'envoient au Tartare. Je l'ai taquinée.

 

Le grand être de la forêt retourna son attention vers les rochers, balançant sa hache et envoyant les éclats voler par-dessus la pile, douchant ses cousins et ses frères qui travaillaient avec des échardes acérées de pierre. Douchant Gabrielle, mais elle ne montra aucun signe qu'elle les sentait.

 

Soudain, elle leva les yeux, et regarda directement dans ses yeux et il y vit le début du désespoir.

 

Non... un murmure de son esprit, et il lança sa hache avec une force paniquée, fracassant un rocher presque de sa taille en trois grands morceaux, et en poussant un sur le côté d'un coup de pied, pour continuer son assaut forcené. Il lança encore, et encore, et encore, chaque fois avec une puissance plus grande qu'il appelait du plus profond de lui.

 

Maintenant il était assez près pour sentir la vie en Xena. Il la sentit glisser loin. Et il laissa passer un hurlement d'angoisse qui fit un écho acéré et rude contre le mur de roche auquel il faisait face.

 

La panique enflamma son corps lorsqu'il laissa partir un dernier coup, qui s'écrasa comme un coup de tonnerre dans la pierre froide, et bougea une section entière de rochers sur le côté.

 

Il perdit son équilibre et trébucha en arrière, comme les rochers glissants explosaient de partout, mus par quelque chose de plus que son propre élan.

 

Et un moment de silence choqué suivit, avant qu'il ne rampe sur la pile de débris, vers la dernière poche cachée dans la pierre, et vers une forme immobile, poussiéreuse et vêtue de cuir.

 

 

 

Chapitre 15

 

C'était un répit entre les ombres, Xena le savait, une partie d'elle comprenant qu'elle était piégée et mourante. Et une autre partie commença à se libérer, et bougea lorsqu'un bourdonnement emplit ses oreilles, et que l'air inutile fit un aller-retour dans ses poumons qui travaillaient toujours.

 

Elle sentit qu'on la tirait de l'extérieur, et hésita, une part grandissante d'elle qui voulait juste se laisser aller bataillant avec la part d'elle-même qui appartenait à Gabrielle, qui rejetait cette partition et combattait bec et ongles. Elle était si fatiguée... mais Gabrielle attendait quelque chose d'elle.

 

Je ne peux pas lui dire non. Une pensée unique et agonisante flottait en liberté et ce fut assez pour armer ses instincts combatifs innés, ceux qu'elle n'avait jamais abandonnés. N'arrête jamais. Ne te laisse jamais aller.

 

Elle fit appel à sa volonté et repoussa l'obscurité, se cramponnant à la seule chose qui ne se contestait pas. Non... je ne vais pas permettre que cela se produise. Elle fouilla profondément dans ses réserves inconnues, dans la force sombre qui venait de la colère. De ce qui l'avait faite ce qu'elle était. De la part la plus sauvage d'elle qui, plus que tout le reste, venait d'Arès. Là où sa vraie force résidait.

 

J'ai promis. Les mots résonnèrent aussi clairement qu'une cloche dans son esprit, repoussant le bourdonnement et la laissant entendre le son soudain, et vibrant de haches pressées explosant contre la roche proche. J'ai promis, et aucune maudite montagne ne me fera briser cette promesse.

 

Dans un grondement féroce qui ignora l'air dépensé et l'obscurité, et la douleur, elle rassembla tout ce qu'elle était et le lança contre la force qui la tirait et la séparait de sa compagne.

 

Un feu prit en elle, au moment où les piles de roche au-dessus d'elle dévalaient sous les assauts de l'extérieur, elle enroula son corps soudain relâché et poussa vers l'extérieur, éjectant un rocher de la taille de son propre corps, se libérant enfin de sa prison obscure.

 

Et elle sentit un rugissement éthéré de lumière et d'obscurité, alors que l'air froid de l'extérieur la frappait et entrait en elle, et le vent fouettant les scintillements soudains d'une rangée de torches amenèrent des étincelles douloureuses à ses yeux, et une odeur de goudron brûlant remplit ses poumons.

 

Elle atterrit avec un craquement douloureux sur une pile d'échardes de granite, et l'impact la rendit pratiquement inconsciente de nouveau. Mais elle se cramponna à la conscience, se forçant à ouvrir les yeux pour voir les étoiles illuminées au-dessus d'elle, elle le savait. Et elles étaient là, alors elle plongea dans leur lumière et l'air frais béni, et dans l'odeur des morceaux brûlants de granite, et celle des êtres de la forêt en sueur, avec un sentiment submergeant de soulagement.

 

Deux mains couvertes de fourrure étaient sur les siennes, elle le savait mais l'ignora, allongée là, aspirant l'air dans son corps affamé, écoutant Arès faire de même, blotti dans le cercle protecteur de son bras. Il fallut ce qui parut une éternité pour que la grisaille rugissante diminue, mais elle le fit, et fut cassée par la soudaine sensation de mains que son corps connaissait, des mains dont elle réclamait le toucher plus que l'air et la lumière.

 

Xena tourna la tête et rencontra les yeux vert brumeux de la personne qui berçait son visage avec une douceur infinie. Elle sentit un sourire involontaire déformer son visage et vit la réponse dans l'expression de Gabrielle. " Hé ! " Elle put à peine émettre un murmure enroué.

 

" Hé, toi-même. " Répliqua le barde, apparemment inconsciente des larmes qui couraient sur son visage. " Tu m'as inquiétée pendant quelques minutes. " Je t'ai sentie partir... je l'ai senti... et puis tu.. " J'aurais dû deviner qu'il faudrait plus qu'une montagne minable pour te battre, hein ? "

 

" J'avais une promesse à tenir. " La réponse vint à peine audible. " Je ne voulais pas... te décevoir. "

 

" Tu ne m"as pas déçue. " Gabrielle répondit avec douceur, repoussant gentiment les cheveux noirs de ses yeux. " Tu ne me déçois jamais. "

 

" J'essaie... " La douleur grandissait, de nouveau, et elle sut qu'elle n'avait que quelques minutes avant qu'elle ne l'emporte de nouveau vers l'inconscience. Alors elle planta ses yeux sur le barde, et plongea dans cette vue. " Merci... d'être revenue. "

 

" Merci d'être restée. " La voix de Gabrielle trembla. " Nous devons te ramener au village des êtres de la forêt, Xena. Tu es blessée. "

 

Xena hocha un peu la tête, tendant la main pour joindre ses doigts à ceux du barde. " Je le sais. Je pense... que tu vas avoir l"occasion... de me gâter pour de bon cette fois-ci. "

 

Ceci reçut un sourire tendu de la part de Gabrielle. " Tu paries ? " Sa voix s'affermit. " Xena... "

 

Les yeux bleus se plantèrent dans les siens et prirent une lueur fantomatique. " Je sais. "

 

Elles hochèrent un peu la tête l'une vers l'autre.

 

Xena bougea la tête et rencontra le regard brillant de Jessan. " Salut, Jess. "

 

Jessan leva la main de Xena vers ses lèvres, l'embrassa et puis la pressa contre sa joue. " C'est bon de te voir, Xena. En fait, c'est la meilleure chose qui me soit arrivée de toute la journée. "

 

Cela lui valut aussi un sourire.

 

" Grr. " Arès grogna faiblement, levant la tête pour regarder Jessan.

 

" C'est bon, Arès. C'est un ami. " Gabrielle calma le bébé.

 

" Arès ? " Demanda Jessan en levant un sourcil.

 

" C'est une longue histoire. " Répondirent-elles à l'unisson.

 

Puis la douleur ne put être contenue plus longtemps et Xena se sentit partir de nouveau. " Désolée... ça a été dur cette fois. " Elle cligna des yeux vers eux. " Je vais devoir partir un moment. " Et elle laissa finalement l'obscurité la reprendre. Pendant un petit moment.

 

Gabrielle regarda Xena en silence alors que les yeux se fermaient et que son corps se détendait. Ce fut seulement qu'elle se permit de se laisser tomber près de la forme meurtrie de la guerrière, et relâcha un long et frissonnant soupir de soulagement. " Oh dieux. " Murmura-t-elle, levant une main tremblante vers sa tête.

 

Elle sentit la main douce de Jessan sur son épaule, et leva la tête vers ses yeux inquiets. " Gabrielle... "

 

" Merci. " Répliqua-t-elle doucement. " Du fond de mon coeur, Jessan, merci. "

 

Jessan ne répondit pas, il mit simplement une main sur sa joue et sourit de son sourire féroce. Puis tous les deux tournèrent les yeux vers la forme tranquille de Xena. " Dieux... comment a-t-elle bien pu... " Jessan respira, ses yeux glissant sur les bleus, les éraflures et les coupures qui couvraient le grand corps de la guerrière.

 

Gabrielle parcourut les bras couverts de poussière de granite et les jambes près d'elle de ses mains expertes, et laissa sortir un soupir de soulagement. " Rien de cassé. " Incroyable. Elle se tourna avec précaution vers la tête de Xena et étudia le bleu sombre qui commençait sur sa pommette droite et disparaissait dans ses cheveux. " Ca a l'air mauvais. "

 

Ses yeux trouvèrent ceux de Jessan dont le front s'agrandit lorsqu'il laissa le bout léger de ses doigts toucher sa poitrine, puis son estomac, avec une douce pression. " Elle est plutôt pâle et je peux sentir des dommages ici. " Dit-il. " Je pense qu'elle saigne à l'intérieur. " Il leva la main et toucha de nouveau le visage de Gabrielle. " Mais elle... Gabrielle, la plupart des gens qui ont ce genre de blessure ne passent pas l'heure suivante. Peut-être deux. " Ses yeux se levèrent vers le ciel sombre. " Quand est-ce arrivé ? "

 

" Ce matin. " Le barde confirma en écartant les cheveux des yeux fermés de Xena avec une tendresse infinie. " Mais elle n'est pas comme tout le monde. " Elle leva les yeux et trouva ceux de Jessan avec une confiance absolue. " Elle ira bien. "

 

Et Jessan, confronté aux yeux verts qui semblaient voir au-delà des siens, joignit sa conviction à la sienne sans aucune hésitation. " Je sais que oui. " J'ai senti le feu en elle, et c'était comme regarder le centre du soleil, parce que la Mort est venue la chercher et qu'elle lui à ri au visage. " Elle tiendra. Mais nous devons la ramener au village. Reste ici avec elle pendant un moment. - je vais voir si la litière est prête. "

 

Le barde hocha la tête et tourna son attention vers un Arès sonné, effondré sur l'épaule de Xena, à moitié blotti dans l'un des bras meurtris. " Hé, Arès ! Comment vas-tu ? " Elle parla doucement, le levant gentiment pour le tenir contre elle.

 

" Rrrr. " Le bébé se plaignit, rongeant gentiment sa main d'un coeur presque léger.

 

" Ouais, je sais. " Gabrielle soupira et passa avec précaution ses doigts dans la fourrure épaisse, cherchant quelque blessure. " Wow, on dirait que tu as eu de la chance. " Dit-elle au loup qui continuait à mâchouiller. " Ta maman t'a protégé, n'est-ce pas ? " Le barde chatouilla son menton. " C'est une bonne maman, hein ? Elle aime protéger tout le monde. " Elle leva les yeux et les laissa voyager sur le corps inconscient de Xena. " A part elle-même, bien sûr. "

 

Elle extriqua sa main de la mâchoire d'Arès et glissa sur le côté, berçant doucement la tête de Xena en la posant sur ses genoux. La guerrière remua mais se calma lorsque Gabrielle ajouta un bras chaud et protecteur autour de ses épaules bleuies et sentit les muscles tendus se détendre sous le contact. La conscience intime de sa présence allégea son humeur, et elle réussit à faire un léger sourire, lorsqu'elle passa ses doigts dans les cheveux emmêlés de Xena et les caressa. Xena... songea-t-elle. Tu as eu des moments si rudes, mon amour. Elle sentit sa conscience glisser et se concentrer sur le visage pâle et immobile. Ca a dû être un cauchemar pour toi... Je sais comme tu hais les endroits confinés. Ses pensées glissèrent. Même si je suis la seule à le savoir. Même si c'est ma maladresse idiote qui t'a obligée à me laisser le savoir.

 

C'était juste un autre jour pluvieux, peu de temps après qu'elles avaient quitté Cirron, avant de recevoir le message d'Ephiny sur les Amazones. Cette fois, c'était juste un de ces jours pluvieux, longs, ennuyeux et bruineux qui rendait tout humide, et à la minute où vous le séchiez, le mouillait de nouveau. Après l'avoir regardée s'irriter de plus en plus à l'eau qui coulait le long de son dos, Xena, sans un mot, avait trouvé une grotte pour les abriter.

Une grotte agréable, en fait, avec un sol de sable doux, et un trou déjà prêt pour le feu. Xena avait monté le campement, avait ôté ses vêtements en cuir trempés, et nettoyait et huilait son épée patiemment. Gabrielle avait décidé d'aller faire une petite exploration après avoir lancé le pot-au-feu, qui bouillonnait et diffusait un riche arôme de viande dans la caverne aux murs clairs.

Elle trouva une petite crevasse dans la sombre ouverture arrière et elle rampa à travers, curieuse de voir ce qu'il y avait de l'autre côté.

Elle perdit l'équilibre et tomba la tête la première dans un puits naturel froid avec un cri de surprise, car elle ne pouvait sentir le fond ni voir quoi que ce soit dans l'obscurité environnante.

Quelques secondes plus tard, la faible lumière de la caverne extérieure fut bloquée et une main puissante l'attrapait, la tirant hors de l'eau, haletante dans les bras de Xena. Elle s'assit, dégoulinant doucement, attendant que son coeur arrête de marteler, et elle réalisa que celui de Xena battait encore plus fort et que la guerrière tremblait.

" Qu'est-ce qui ne va pas ? " Demanda-t-elle, tendant le cou pour voir celui de Xena dans la faible lumière, le plafond de la crevasse effleurant leurs têtes.

" Désolée. " Répondit-elle enfin, après avoir pris plusieurs inspirations. " C'est trop petit ici. "

" Dieux. " Gabrielle avait juré, se tirant hors de là, presque effrayée hors de raison par le pâle visage choqué et la respiration rapide. Mais Xena avait fermé les yeux et se concentrait, et quelques instants plus tard, sembla-t-il, elle allait bien.

 

Et le barde avait gardé un oeil discret sur elle après ça, réalisant que lorsque la guerrière avait dit haïr les grandes fêtes ou les places bondées, voilà d'où ça venait. Ca ne l'inquiétait pas tant que ça, cependant maintenant... le front de Gabrielle s'agrandit. Maintenant ce serait pire. Elle le savait... parce qu'elle avait développé une sensibilité à cela elle-même après avoir été enfermée dans ce cercueil.

 

Ca ira très bien, Xena... Bien que je sache combien tu hais admettre ce genre de faiblesse. Même à moi. Je t'aiderai à passer ça. Je le promets.

 

Ca avait inquiété Xena, cette nuit-là dans la grotte. Gabrielle le savait à l'expression que le barde apprenait à lire, la tension dans ses épaules, et le mouvement incessant de ses mains. Le barde avait essayé de la distraire avec des histoires, lui avait posé des questions - rien. Elle était simplement allée vers elle en fin de compte, avait mis un bras autour de ses épaules raidies, et s'était assise comme cela en silence, jusqu'à ce qu'elle sente les muscles tendus se relâcher et la respiration devenir plus profonde, et voit les yeux se fermer dans une douce reddition.

" Gabrielle. " Avait-elle dit, de cette voix merveilleuse et profonde que le barde n'était jamais fatiguée d'entendre.

" Hmmm ? " Avait répondu Gabrielle, posant une joue contre le haut du bras de Xena en la regardant, sachant que ses yeux trahissaient ses sentiments et qu'elle avait décidé qu'elle s'en fichait.

Les yeux bleus croisèrent les siens, un bras glissa autour d'elle et puis le sursaut lorsque les lèvres de Xena avaient touché les siennes pendant un moment fulgurant. " Merci. " Avait dit Xena, assez près pour qu'elles puissent chacune respirer le souffle de l'autre. Assez près, Gabrielle en était sûre, pour que Xena ait entendu le battement de son coeur qui tambourinait assez fort à l'intérieur pour la faire trembler.

Assez près pour qu'elle marche sur une fine corde pour ce qui lui parut une éternité, avant qu'elle puisse prendre une inspiration et baisser l'intensité. " A ton service. Merci de m'avoir tirée de là. Une fois de plus. "

 

Gabrielle sourit tendrement à ce souvenir, et leva les yeux vers Jessan et Lestan qui approchaient, marchant doucement pour ne pas la surprendre. " Prêts ? " Demanda-t-elle sans bouger les mains.

 

Lestan s'accroupit près d'elle et mit une main sur les siennes, là où elles reposaient sur l'épaule de Xena. " Oui, petite soeur. " Il fit une pause. " Comment vas-tu ? "

 

Gabrielle réfléchit à ça un long moment. Comment allait-elle ? Bonne question. " Mieux. " répondit-elle.

 

" Nous pouvons vous transporter toutes les deux sur la litière. " Répliqua Lestan avec un léger sourire.

 

Comme s'il savait que c'était exactement ce qu'elle voulait, pour ne pas laisser Xena, pas même un court instant.

 

" C'est idiot, Lestan. " Elle lui fit un sourire. " Ca ira pour moi. "

 

" Ce n'est pas idiot du tout. " Lui dit l'être plus âgé, la regardant droit dans les yeux. " Tu veux rester avec elle. " Le bout de ses canines apparut quand il sourit. " Et c'est très bien. "

 

" Oh. " Murmura le barde, fermant les yeux en mordant sa lèvre. Quelqu'un qui comprend. " Ouais... ok. "

 

C'est si dur pour elles. Pas d'entraînement. Pas de traditions, juste... et encore, elles avaient réussi. " Très bien. Viens alors, tu montes la première, et Jess va apporter Xena. " Il jeta un coup d'oeil à Arès. " Hmmm... tu veux aussi prendre ton ami, là ? Je pense qu'il n'aimera pas que ce soit moi qui le fasse. "

 

" Bien sûr. " Gabrielle sourit et attrapa le chiot immobile bien qu'hébété, qui avait la présence d'esprit de grogner vers Lestan lorsqu'il eut une meilleure vue de l'être. " Arès, arrête ça. " Elle le gronda, secouant sa patte. " C'est un ami. "

 

Lestan leva les sourcils. " Arès ? "

 

" Roo ! " Répondit le bébé. " Grr. " Ajouta-t-il en lançant un regard soupçonneux vers Lestan.

 

Le barde secoua la tête. " Ne pose pas de questions. Ou mieux, demande à Xena. C'est elle qui l'a baptisé. "

 

Gabrielle attendit que Jessan ait installé le corps de Xena dans ses bras puissants, puis marcha près d'eux le long de la colline couverte d'ardoise, où le reste de la patrouille attendait. Le barde avait toujours senti qu'elle était la bienvenue chez les êtres de la forêt mais les regards qu'elles recevaient de leur part maintenant, étaient remplis d'une compréhension et d'un respect qui n'y étaient pas auparavant.

 

La litière avait un petit dossier et des côtés abaissés pour maintenir son contenu. Lestan la souleva avec une facilité négligente et la reposa dans une position inclinée, contre le dossier bas. Elle installa Arès près de ses genoux alors que Jessan se penchait et déposait doucement Xena, pour que sa tête et ses épaules soient blottis contre la poitrine du barde.

 

C'était une sensation merveilleuse, mais Gabrielle ne s'arrêta pas à s'en représenter la raison. Elle enroula légèrement les bras autour de la guerrière et s'installa en arrière avec un soupir d'aise. Jessan ébouriffa ses cheveux et fit un pas en arrière avec un sourire. " Je n'aurais jamais pensé que.. bien, quoi qu'il en soit, Deggis a récupéré le reste de votre équipement, Gabrielle... "

 

Elle tourna les yeux vers l'être plus petit, plus sombre. " Merci. "

 

Deggis rougit et haussa ses épaules couvertes de fourrure sombre. " De rien. "

 

Les êtres de la forêt remontèrent à cheval et démarrèrent, les deux éclaireurs en avant avec des torches allumées, qui provoquaient des éclairs épars de lumière ambrée des falaises de granite gris. Ils chevauchèrent dans un silence brisé seulement par le vent agité qui fouettait la crinière des chevaux et secouait les flammes des torches, ainsi que les pas réguliers et résolus des grands chevaux.

 

 

 

Chapitre 16

 

Le doux mouvement de balancier de la litière repoussait doucement Xena dans un flou gris au travers duquel les faibles sons du voyage arrivaient vers elle dans le lointain.

 

La douleur était la plus présente et la plus en avant, et demandait une bonne partie de son attention, mais la douleur était une vieille connaissance, et elle avait développé des techniques, tout au long des années, pour se permettre de laisser la douleur flotter en quelque sorte derrière elle, à l'arrière de son esprit qui la reconnaissait, mais ne l'empêchait pas de prêter attention à ce qui se passait autour d'elle.

 

Et ce qui s'y passait, elle le recevait avec des sens autres que la vue, parce qu'ouvrir les yeux auraient demandé bien trop d'effort juste maintenant. Aussi le murmure de fumée huileuse et l'odeur chaude de chevaux proches combinés avec la texture laineuse familière de son propre manteau que ses doigts identifiaient l'assurèrent qu'elle était sauve.

 

Ce qu'elle savait déjà, parce que son corps n'avait aucun problème pour reconnaître la présence incroyablement réconfortante de la personne contre laquelle elle était appuyée, dont les bras étaient librement serrés contre elle.

 

Elle avait conscience d'avoir soif maintenant. Bon signe, songea-t-elle, mais elle réalisa que cela signifiait aussi qu'elle devrait faire l'effort d'ouvrir les yeux pour boire quelque chose et elle ne savait pas si elle avait la force de le faire. D'un autre côté, Gabrielle se sentirait sûrement mieux si elle faisait au moins l'essai, alors...

 

Elle se força à ouvrir les yeux à contrecoeur, et cligna plusieurs fois pour les éclaircir, réalisant qu'elle regardait pratiquement une couverture d'étoiles qui scintillaient dans l'air clair de la nuit. C'était beau. Sa bouche se tordit dans une sorte de faible sourire. Puis elle sentit un toucher léger comme une plume sur le dessus de sa tête et le sourire devint définitif. Elle prit une inspiration d'essai, la trouva inconfortable mais supportable, et puis une seconde. " Je pense que je peux me faire à ça. " Elle tressaillit à l'enrouement de sa voix mais fut récompensée par le serrement convulsif des bras qui la berçaient, ce qui fit mal, mais elle n'y fit pas attention parce que le sentiment qui l'accompagnait valait la peine de la douleur du moment.

 

" Salut. " La voix de Gabrielle flotta près de son oreille. " Comment vas-tu ? "

 

" Pas trop bien. " La réponse fut faible. Aucune raison de prétendre le contraire, pas avec Gabrielle, en tout cas, qui savait quand elle le faisait avec une justesse énervante, ces jours-ci. " Tu as de l'eau ? "

 

Un bras relâcha sa prise autour d'elle et attrapa une outre posée contre la hanche du barde. " Ca se pourrait. " Gabrielle déboucha le bec et le porta à ses lèvres, souriant lorsque Xena trouva l'énergie de lever un peu la tête et de prendre l'outre entre ses dents, avant d'en tirer quelques gorgées.

 

" Hé... doucement. " Le barde rit et obtint un mouvement de sourcil en réponse.

 

Xena continua jusqu'à ce qu'elle n'ait plus de force et doive s'arrêter, et réinstalle sa tête en arrière, clignant en regardant le visage à peine éclairé de Gabrielle. " Merci. " Sa voix était plus claire. " Comment vas-tu ? "

 

Le barde posa l'outre et remit son bras autour de Xena, pressant très doucement et enfonçant son visage dans les cheveux de Xena. " Très bien. " Sa voix était étouffée mais Xena pouvait entendre qu'elle la retenait, et elle pouvait sentir la pointe de résolution dans sa respiration. Elle se tut un moment, et puis Gabrielle finit par prendre une profonde inspiration tremblante et renifla.

 

" Désolée. " Le barde soupira. " Juste le soulagement, je présume. "

 

En tressaillant, Xena leva un bras et couvrit la main de Gabrielle avec la sienne. " Ca va. "

 

" C'est pas juste, Xena. Je suis supposée de réconforter. " Gabrielle ne put s'empêcher de sourire et vit un sourire de réponse apparaître sur la bouche de Xena.

 

" L'habitude. " Admit Xena. " Par ailleurs, tu me réconfortes. " Elle posa sa joue sur la poitrine de Gabrielle et ferma les yeux, respirant l'odeur familière du barde. " Très bien. " Et elle sentit les lèvres de Gabrielle toucher son front lorsqu'elle glissa de nouveau dans le crépuscule et la chaleur des bras de sa partenaire qui l'entouraient.

 

A suivre - 2ème partie

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