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EYE OF THE STORM5

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

L'OEIL DU CYCLONE

Eye of the Storm

 

 

Par Melissa Good

 

Résumé et traductions : Fryda

 

 

***********

Partie 5 - Chap. 8B

*********

 

Kerry se déplaça péniblement dans le séjour, son T-shirt Titi sur une épaule, et une bouteille de crème à l'aloe à la main ; elle y croisa Dar qui sortait de son bureau, suivie de Chino. " Hé… je peux te demander un service ? "

Dar observa la jeune femme quasiment nue, les deux sourcils relevés. " Un service ? " Murmura-t-elle, les yeux légèrement écarquillés.

" Tch. " Kerry cogna la tête contre l'une des épaules de son amie. " Masse-moi, s'il te plaît ? " Elle tendit la bouteille. " J'ai l'impression d'être compressée dans du scello frais. "

Dar prit l'aloe et en fit sortir un peu en pressant, puis elle tourna délicatement son sujet et commença à l'étaler. " Alors. Tu as gagné le pari ? " Demanda-t-elle l'air de rien, en traçant une ligne humide et verte sur la zone rosée sur la nuque de Kerry.

" Quel pari ? " Murmura Kerry.

" Les poissons. " Un léger traînaillement dans la voix qui effleura sa peau sensible.

" Quels p… oh. " Kerry tourna la tête et regarda. " Hum… "

" Tu… " Dar lui lécha l'oreille, " es une sacrée mêle-tout. "

La jeune femme blonde prit un air contrit. " Tu es en colère? "

Dar la laissa mariner un moment, pendant qu'elle finissait d'étaler la crème, sentant les épaules bouger sous ses doigts et se redresser. " Je devrais… tu m'as prise tellement par surprise avec ça ", dit-elle finalement. " Ce n'est pas un sentiment plaisant. " Elle retourna Kerry pour lui faire face et commença sur la peau brûlée de ce côté, consciente du regard grave qui cherchait sur son visage.

" Tu aurais été bien trop embarrassée autrement ", murmura presque Kerry. " Je voulais juste qu'elle voit que tu as quelque chose d'elle en toi. "

Dar ne répondit pas, son visage prenant un air pensif.

" Je… je ne vous connais pas depuis très longtemps, ni l'une ni l'autre… mais, en quelque sorte, j'y ai bien réfléchi... " La nervosité de Kerry afflua dans un torrent de mots. " Et il me semble que toi… et ton père êtes si proches… vous vous ressemblez tant, et tout et tout, je pensais que peut-être tu… je veux dire que si ta mère pouvait voir qu'il y a cette petite partie… je… " Kerry dut s'interrompre parce que Dar l'embrassa, arrêtant son exposé. Quand elles se séparèrent, Kerry laissa passer un minuscule soupir. " J'ai ce gène du 'résoudre tous les problèmes des autres' qui se pointe quelquefois. " Un haussement d'épaules. " En plus, j'aime bien ta mère. "

Dar posa son front sur celui de sa compagne. " J'ai remarqué que vous aviez l'air de bien vous entendre ", murmura-t-elle. " Ecoute, Kerry… ma mère et moi, on a trente ans de descente de rapides derrière nous. " Elle embrassa doucement la peau rougie. " Et il y a des choses qui ne peuvent pas s'arranger comme ça. "

Kerry la regarda tristement.

" En tout cas, pas tout de suite ", ajouta Dar rapidement. " Encore que… " Elle fronça les sourcils. " On dirait qu'il y a un tas de choses sur lesquelles on semble un peu plus d'accord maintenant. " Un soupir. " Ou bien elle s'est sérieusement radoucie ou bien… "

" Tu as grandi ", termina Kerry doucement.

" Mm ", approuva la jeune brune. " Peut-être un peu des deux. " Elle attrapa le T-shirt de Kerry et serra le tissu, le passant avec précaution par-dessus la tête de celle-ci, et sur son corps maintenant enduit d'aloe. " En tout cas, c'était un coup fichtrement bien fait. "

" Ah oui, tu trouves ? " Kerry tenta un sourire. " C'est tellement difficile de te coincer. J'ai été vraiment surprise de voir que ça marchait. " Elle passa ses doigts sur la peau nue de Dar, entre la chemise coupée court et son short en coton. " Est-ce que ta mère a dit quelque chose après que je sois partie ? "

" Non. " Une pause pensive. " Mais elle réfléchissait. "

" C'est bien ce que je pensais. " Kerry soupira de satisfaction. " Elle a attrapé son carton à dessins avant de partir. " Un œil vert pétilla, et elle tapota le côté de Dar, avant de la contourner et de se diriger vers la cuisine.

Dar la regarda et secoua la tête, reconnaissant la fibre pugnace et entêtée de sa compagne. Puis elle la suivit, prit un verre dans le placard et y mit une giclée de sirop au chocolat. " T'en veux ? "

" Nan, nan. " Kerry s'affairait au comptoir, remplissant une chope avec de la crème glacée à la vanille, puis elle ajouta du Mister Pibb. " A chacune son poison. " Elle tapota la glace avec une cuillère, pour faire pétiller le soda. " Ouaouh… il faut que je te dise, Dar, tes parents m'ont lessivée. " Elle prit le bras de sa compagne et l'entraîna dans le séjour, où elles s'installèrent ensemble sur le canapé ; et elles posèrent leurs pieds en chaussettes sur la table de salon. " J'espère qu'il me restera cette énergie qu'ils ont quand je prendrai de l'âge. "

" Toi et moi ", acquiesça Dar. " Ils sont pas courant. " Elle observa la moustache moussue sur la bouche de Kerry, et décida de l'enlever. " Mm. " Elle lécha une lèvre stupéfaite. " Peut-être que je devrais essayer ça une fois. "

" Essayer quoi ? " Kerry avait posé son verre et se tournait à demi, gigotant pour remonter le long du corps de Dar, essayant avec difficulté d'attraper un peu de son lait au chocolat. " Hmm… ooh, j'aime bien ça… ouais… et je… Mon Dieu ! Dar ! " Cria Kerry, se mettant presque à léviter au-dessus des cuisses de Dar. " Tes mains sont FROIDES ! "

" Nan, nan. " Dar bougea les mains. " Ta peau est si chaude… désolée, j'ai oublié le coup de soleil. " Elle glissa les doigts plus bas. " C'est mieux ? "

" Oh… ouais. Bien mieux. " Elle se détendit à nouveau, mettant le nez dans le cou de Dar. " Heureusement qu'il y a les maillots de bain. "

" Absolument ", dit Dar en riant, tout en faisant glisser le T-shirt en coton pour trouver un nombril savoureux à mordiller ; elle sentit un frisson agréable le long de son dos alors que Kerry se penchait et goûtait le haut de son épine dorsale. L'odeur d'aloe, et de peau chaude, et un soupçon d'huile de noix de coco flottaient autour d'elle, ainsi qu'un léger son rauque lorsque la respiration de Kerry s'approfondit. Ses dents tiraient joyeusement sur l'élastique du sous-vêtement en coton qu'elle portait, et elle sentit le corps de la jeune femme blonde bouger vers elle, obéissant à la pulsion avec un désir subtil.

Elle sentit la fatigue de la journée disparaître alors qu'elle encerclait la taille mince et guidait Kerry en arrière, la faisant doucement descendre sur le canapé, commençant sérieusement son attaque.

Le froid du cuir contre son dos brûlé la distraya momentanément, mais très peu de temps après, des chatouillis et des mordillements experts lui firent perdre le fil de détails aussi insignifiants qu'une peau douloureuse. Ses doigts glissèrent dans les cheveux de Dar, et caressèrent le bord de ses oreilles, puis vagabondèrent un peu plus loin, vers les muscles ondulés de chaque côté de sa nuque et qui bougaient quand elle les touchait. Elle sentit son souffle devenir plus laborieux, et essaya de respirer plus profondément, mais la tension qui montait de ses tripes maintenait son corps tendu, et remuant, et désireux.

Un grondement bas et ronronnant sortit de Dar, envoyant une secousse violente dans ses reins, et elle s'abandonna totalement à la pure joie animale qu'elle contenait.

****************************************

" Tu sais quoi, Andy ? "

" Mmm ? " Les yeux bleus étaient fermés.

" Je viens de me rendre compte que je suis une vieille femme rasoir et ça m'attriste. "

Un œil apparut. " Ouais. " Il baîlla. " Ces gamines ont trop d'énergie. "

Céci avait découvert une chaise à bascule dans la zone protégée d'un côté du cottage, et ils y étaient nichés tous les deux, balançant doucement sous le ventilateur qui tournait paresseusement. " Mais ça m'a fait du bien de me retrouver sous l'eau. "

Son mari ne répondit pas tout de suite, puis il renifla et s'éclaircit la voix. " Ça fait moins mal là-dessous ", admit-il. " Ya pas mal de douleur dans ces maudits os. " Trop d'années et trop de blessures, et voilà, qu'enfin, ici se trouvait la dernière personne au monde à qui il l'aurait admis. Mais au moins maintenant, ça ne faisait mal que physiquement, c'était beaucoup plus facile à vivre.

Ça ne comptait presque plus, en fait.

" J'ai de l'onguent aux herbes… " Proposa Céci. " Je peux te faire une onction ? "

" C'est le mot à cinq dollars pour un massage du dos ? " Proposa-t-il en la taquinant avec hésitation.

" Pas vraiment… parce que je pensais aller bien plus loin que ton dos ", répondit-elle avec taquinerie, sentant le mouvement silencieux alors qu'il riait. " Hé, Andy ? "

" Ouais ? "

" Tu sais… tu vas penser que je suis folle, mais j'ai pensé toute la journée à combien c'est agréable d'être sur ce bateau. "

" Ah ouais ! " Une voix traînante.

" Vraiment… tout est à portée de main et c'est tout simplement mignon ici. "

" Oui, oui. "

" Qu'est-ce que tu penses de l'idée d'en avoir un, plutôt qu'une maison ? "

De longs moments paisibles d'un silence total s'ensuivirent.

" Tu es en train de me dire que tu veux vivre sur un fichu bateau ? " Finit par bafouiller Andrew. " Il y a un peu plus de trente ans, tout ce que tu voulais, c'est que je descende de ces foutus trucs, et maintenant tu veux embarquer? "

Céci se mordit la lèvre, reconnaissant le paradoxe. " Eh bien… oui, en fait. "

" Nom de nom. "

" Allez Andy, tu sais bien que tu en as toujours voulu un… on pourrait même t'acheter un de ces petits chapeaux de capitaine. "

" Ça risque pas. "

" Un blazer bleu ? "

" Aucune idée de l'endroit où j'peux trouver ces machins, femme… c'est pas comme si tu allais les chercher au supermarché. " Mais elle lui avait mis l'idée en tête.

" Quoi… un blazer ? Bien sûr que tu peux, chéri… " L'assura Céci, puis elle rit. " Je parie que quelqu'un sur l'île sait où les trouver… allez, peut-être même qu'on peut en faire faire un sur-mesure… tu peux leur dire ce que tu veux. " Une pause. " Le bateau, je veux dire. Pas la veste. "

Les doigts pianotèrent sur la cuisse couverte de coton. " A moins que tu n'aimes les cloisons grises, Mme Roberts, tu ferais mieux d'être la décoratrice de l'équipe. "

" Ça veut dire oui ? "

" Tu es sérieuse ? " Demanda-t-il, honnêtement curieux.

Céci se nicha contre son épaule et hocha la tête. " Oh oui ", répondit-elle doucement. " On peut louer un emplacement à la marina de South Beach… ils ont un joli coin par-là, et c'est tout près. "

" T'as pensé à tout, hein ? "

" On peut partir jusqu'aux Bahamas, si on veut… plonger dans les récifs par-là. " Sa femme lui montra un point. " Ou descendre vers Key West… regarder quelques couchers de soleil. " Les couleurs lui plurent. " Je pensais faire quelques dessins de paysages… peut-être que je pourrais le faire sous l'eau ? "

" Plus de scènes de rochers ? " Demanda Andy, en caressant doucement la chevelure blond cendré, repensant à celle qu'il avait vue dans cette petite galerie et que tout le monde avait tant aimée.

L'attente au bord de l'océan, l'avait-elle intitulée. Un abri marin fait d'ardoise, surplombé d'un gris maussade et d'écume, contre un ciel orageux, une silhouette solitaire debout dans le vent.

Seule.

" Non… mon bateau est rentré au port. " Un léger sourire. " Si je peignais cela aujourd'hui, il y aurait une éclaircie dans les nuages, et le soleil éclairerait tout alentour ", dit Céci dans un soupir d'émerveillement. " Quelle différence une semaine peut faire. "

Ouais. " Je m'demande la taille des moteurs pour ce genre de truc ? "

Céci le regarda. Oh, oh.

J'avais oublié le gamin et ses jouets. " Hum… chéri ? "

" Eh… eh… oui ? "

" N'oublie pas les ceintures à l'avant. "

******************************

Le téléphone bourdonna. " Dar ? "

La voix faillit la faire sursauter, tant elle se concentrait sur le schéma de réseau sur son écran. " Oui ? "

" M. Alastair est sur la ligne uno. "

Merde. Dar jeta un coup d'œil à sa montre. Le salaud ne perd pas de temps. " Allez-y. " Elle écouta le clic. " Bonjour, Alastair. "

" Bonjour, Dar. " La voix de son patron avait l'air ennuyé. " Je voulais vous parler en vidéo mais je suis en route vers le bureau. "

" Vraiment ? Quel temps avez-vous à Houston ? " Dar essaya de façon un peu malsaine de retarder l'inévitable. " Il pleut ici. "

" Beau. " Alastair soupira. " Je pense que vous savez pourquoi j'appelle. "

Elle joua avec l'idée de nier. " Je m'en doute, oui. " Elle mit un peu de dégoût dans son ton. " Steve Trouduc est rentré à la maison et a décidé de lancer ses procès. "

Alastair garda le silence un moment. " J'ai reçu un message vocal de sa part. Vous avez tout à fait raison, Dar. Il lance une procédure judiciaire contre vous, personnellement, aujourd'hui pour une liste de choses qui, pour la plupart, m'ont bien fait rire, mais la dernière de sa liste est le fait que vous ayez pris des décisions qui visaient à vous apporter un bénéfice personnel. "

" Ah ouais ? Comme quoi ? " Dar cliqua sur un routeur et vérifia sa configuration. " Le fait est, Alastair, que depuis que je suis actionnaire, chaque décision que je prends est calculée pour me faire, moi et tous les autres actionnaires, un bénéfice personnel. "

" Ce qu'il veut dire, c'est que vous avez engagé Kerry parce que toutes les deux vous étiez amantes. "

" J'ai engagé Kerry avant que nous ne devenions amantes ", répliqua Dar. " J'ai engagé Kerry avant même que nous ne devenions amies. "

" Vous avez manqué aux règles de la compagnie. "

" Pas à ce moment-là, non. "

" Bien sûr que si, Dar. Vous l'avez engagée sans tenir compte du processus d'entretiens, et avez fait abstraction de vingt autres candidats plus compétents. "

Dar resta calme pendant quelques battements de cœur. " Elle était compétente. "

" Je ne le conteste pas, je ne l'ai pas fait à l'époque, et je ne le fais pas maintenant, Dar, d'autant plus qu'elle s'est avérée être extrêmement qualifiée ces six derniers mois. Kerry est une bonne employée, une excellente manager, et un très bon choix pour remplir le poste qu'elle occupe. "

" Mais ? "

Un soupir. " Mais le fait est que vous avez manqué aux règles. "

" Et ? "

" Et le conseil d'administration m'est tombé sur le poil après avoir épluché votre fichier de personnel. "

" C'était quand ? " Dar sentit tout son corps se tendre, mais elle garda un ton léger. " Ne me dites pas qu'ils ont travaillé tout le week-end. "

" Hier. "

" Qu'est-ce qui leur prend ? Depuis quand est-ce qu'ils s'occupent de savoir qui couche avec qui, Alastair ? Vous savez bien que Harby a une relation connue avec cette chanteuse de country, et Allan Jacobs a été coffré le mois dernier pour avoir fait de la retape avec des mineurs sur l'internet. "

Alastair soupira bruyamment. " Ce qu'il leur prend, c'est qu'Ankow veut en faire un procès très public, exposant ce qui arrive quand vous laissez 'ces gens-là' être au niveau où vous êtes. "

" Il va perdre le procès. "

" Ça n'a pas d'importance. Il aura son scandale malgré tout, et ce n'est pas comme si on pouvait vous balayer sous le tapis, Dar. "

Dar croisa les mains sur le buvard de son bureau, l'écran oublié. " Qu'est-ce qu'il veut ? "

Un autre long soupir. " Vous dehors. Moi, démissionnant dans un temps raisonnable. La présidence remise au vote de l'assemblée générale des actionnaires. "

Elle se pencha en avant. " Et ? "

" Et quoi ? "

" Et qu'est-ce que vous allez faire ? " Un sentiment nauséeux s'installa au creux de son estomac. " Vous me virez ? "

" Je préférerais me couper ma couille gauche ", répliqua Alastair d'un ton crispé, en se laissant aller à une grossièreté peu habituelle. " Le conseil se réunit jeudi soir. Il faut que vous soyez là. Ce qui suivra, je n'en sais rien, Dar. " Il garda un silence embarrassé puis prit une inspiration. " Ça ne vous aide pas, je le sais, mais ma position personnelle a été, et sera jeudi, qu'avant et maintenant, je fais implicitement confiance à votre jugement et que parmi toutes les décisions que vous avez prises, je n'en regrette aucune. "

Dar ferma les yeux. " Ça m'aide beaucoup, Alastair. Il en a autant après vous qu'après moi… il a essayé de m'inciter à aider à vous mettre dehors. J'ai dit non. C'est de là que vient le procès. "

Il y eut un long silence, assez pour qu'elle entende clairement le son de climatiseur qui ronronnait dans son bureau. " Alastair ? "

" Vous l'avez envoyé balader, hm ? " Sa voix comportait une égale mesure d'ironie et de curiosité agitée. " Laissez-moi deviner… vous lui avez dit… "

" Qu'il pouvait aller se faire voir, oui. " Dar sourit un peu. " Et malgré ce qui se passe maintenant, je ne le regrette pas. Ce type me rend malade, Alastair. " Elle s'interrompit. " Le conseil a les jetons, hein ? "

" Oui ", répondit son chef. Mais ce qui m'inquiète, Dar, c'est qu'il dit qu'il a des preuves que votre relation a perverti votre jugement… et que toutes les deux avez tiré avantage de la compagnie, et de vos fonctions pour détourner les règles de la compagnie. " Il avait l'air ennuyé. " De quoi est-ce qu'il s'agit ? "

Dar se leva et alla vers sa fenêtre, elle s'appuya contre la vitre et regarda dehors. " De stupidité ", murmura-t-elle. " Je suis restée malade à la maison un jour la semaine dernière. Kerry a réorganisé son emploi du temps et a pris un demi-jour de congé. " Elle secoua la tête. " Il l'a suivie jusqu'au ferry. "

" Et alors, ce n'est pas si terrible. "

" Non. " C'était embarrassant, maintenant qu'elle se souvenait. " Mais on est allées à la fête de mon lycée samedi dernier, et il a pris des photos de nous ensemble là-bas. "

" Et alors ? "

" Bras dessus-bras dessous. "

" Encore une fois, et alors ? "

" Habillées comme deux nanas à motards. "

Silence de mort. " Oh putain de Dieu ", jura Alastair. " Dites-moi que vous vous fichez de moi, Dar. Je ne peux pas croire ça. "

" J'aimerais bien. " Dar repartit vers son bureau et se rassit. " C'était un truc du style 'venez comme vous étiez', et je ne me souviens pas si vous vous souvenez comme j'étais, mais… "

" Je me souviens. "

" Bon, ça faisait un tableau plutôt sympa. " Dar posa le menton sur sa main. " J'ai… hum… merdé, Alastair. Je suis désolée. "

" Dar, vous êtes la directrice des systèmes d'information de la plus grande compagnie d'informatique du monde. Comment avez-vous pu faire quelque chose d'aussi stupide ? "

Ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas eu à subir ce genre de réprimande. Et elle n'avait vraiment pas de bonne réponse à donner. " C'était qu'une fête, Alastair ", finit-elle par marmonner. " Je n'y ai pas vraiment pensé. "

" Mon Dieu. " Alastair avait l'air dégoûté.

Dar soupira. " Et bien, maintenant que vous connaissez le pire, il faut que j'y aille, Alastair. On va commencer à mettre en place le nouveau réseau. " Elle s'interrompit. " Je pense que je vous verrai mardi. " Elle ressentit le silence. " A moins que vous ne souhaitiez que je démissionne maintenant, et que je nous épargne tout le tracas, et à moi un billet d'avion. "

Son chef hésita, puis émit un son à mi-chemin entre un soupir et un grognement. " Et vous faites quoi sur cette photo ? "

" On marche. "

" C'était une fête à thème ? "

" Oui. "

" Par pitié, dites-moi qu'aucune de vous n'est nue. "

" On ne l'est pas. "

" Ou soûle. "

" Nan. "

" Vous marchez juste ? "

" C'est ça. On était dans le parking… il traînait là à nous attendre, ce qui, maintenant que j'y pense, Alastair, est fichtrement étrange, parce que le nombre de personnes qui savait où j'étais ce soir-là est foutument limité. "

" D'accord ", répliqua-t-il, avec plus d'assurance. " Au moins on a la tête haute… comme ça quand il sortira ce fichu truc, je pourrai en rire, ou trouver un moyen de désamorcer ce problème-là. " Il soupira. " Le moins que je puisse faire pour vous après que vous vous êtes mise dans la ligne de tir pour moi… mais pour l'amour de Dieu, Dar… essayez de vous souvenir que vous n'êtes plus une punk à crête. "

" D'accord ", répondit-elle avec une admirable contrition.

" J'ai essayé de vous joindre hier soir… vous n'avez pas répondu à votre bipeur. "

Dar relâcha une inspiration contenue, mais elle savait que le sursis n'était que temporaire. " On était sur le bateau au large… avec des invités très spéciaux. " C'était si étrange d'y penser, encore plus de le dire. " Mes parents. "

" M… " commença Alastair, puis il s'interrompit. " Attendez… m… je pen… " Il s'interrompit de nouveau. " ne… hum… je pense me souvenir que… on a envoyé… ah… "

" Ils ont fait une erreur. Il était porté disparu et il est rentré. " Dar sourit au combattant qui soufflait des bulles vers elle.

" Pourquoi vous ne me l'avez pas dit, bon sang ? Il faut toujours qu'on parle de désastres ? " Lâcha Alastair, indigné. " Dar, c'est merveilleux. Je n'ai eu le plaisir de rencontrer votre père qu'une seule fois, mais j'ai pensé que c'était un type merveilleux, et j'ai été vraiment désolé d'apprendre que quelque chose lui était arrivé. " Une pause. " C'est une très bonne nouvelle. "

" Merci. " Une alerte bipa sur son moniteur, et elle commuta les écrans. " Oups… les backbones se mettent en place… il faut que j'y aille, Alastair… si j'avais seulement quelques jours de plus, j'aimerais m'assurer que ce fichu réseau soit d'abord en place. "

Un léger soupir. " Je vous reparlerai, Dar. " La ligne devint silencieuse, et Dar regarda le téléphone un long moment, avant de se lever et de prendre sa veste, puis elle se dirigea vers la porte.

********************

" Hé, Ker ! " La voix de Colleen lui parvint de l'autre côté de Bayside, et Kerry fit un écart pour éviter un clown qui soufflait des ballons pour la trouver. C'était la nuit de sortie des filles, et elle était plus que prête pour ça après une longue journée agaçante, et les sombres nouvelles de Dar par-dessus tout.

" Hé ! " Elle salua son amie d'une étreinte. " On est les premières, non ? "

" Ouais… viens, on s'assied et on prend un verre avant que la foule n'arrive. " Colleen lui prit le coude et l'emmena vers une table près de la baie, s'assit et fit un signe à un serveur en roller. " Comme d'hab' ? "

" Le même en double. " Kerry se laissa glisser et grogna. " Quelle journée pourrie. "

Le serveur prit leur commande et partit en roulant. " Alors… dis-moi, qu'est-ce qui se passe ? La dernière fois que je t'ai vue, c'était au bowling… tout va bien ? Je ne voulais pas appeler comme ça pour demander. "

Kerry étouffa un bâillement. " Tout allait super bien. " Elle pencha la tête d'un côté et sourit. " Vraiment génial… mieux que je ne pouvais l'imaginer, en fait. Le père de Dar est allé là-bas, ils se sont retrouvés, et ils sont revenus ici ! On a passé toute la journée d'hier avec eux. "

" Vraiment ! " Dit Colleen en riant. " C'est fabuleux ! " Elle se rapprocha. " Alors… quand est-ce que je vais pouvoir rencontrer cette dame mystérieuse ? Je pense que le père de Dar est excellent, je ne peux pas imaginer ce à quoi ressemble la personne qu'il a épousée. "

Kerry soupira. " Et ben, il se pourrait qu'on ait plus de temps libre à l'avenir ; alors je suis sûre qu'on pourra arranger quelque chose. " Dar avait essayé de rendre tout le truc de façon optimiste, mais même dans leur brève rencontre de couloir, elle avait ressenti combien sa compagne était perturbée. " On dirait que ce type qui causait tous ces ennuis a vraiment réussi. "

Colleen lui lança un regard choqué. " Attends… il est après vous deux ? "

" Moi par association. " Kerry accepta sa grande pina colada de fête, choisit un énorme morceau d'ananas et en mordit un bout. " Dar dit qu'il n'est pas vraiment après elle, non plus - en fait il en a après la compagnie, mais il sait que soit elle est de son côté, soit il s'en débarrasse pour le faire, et elle lui a dit d'aller se faire voir, alors… "

" Ouille. " Colleen tressaillit. " Mais toi, t'es où dans ce schéma ? "

" Ben. " Kerry sirota de sa boisson glacée, en clignant des yeux à la puissance du rhum. " Mm… quand ils disent double, ils rigolent pas. Bref… " Elle prit une autre gorgée. " Il a ce soi-disant procès sur Dar qui se fait du fric sur le dos de la compagnie, et qui profite de sa position dans la boîte… un des trucs qu'il met en avant, c'est moi. "

" Toi ? "

" Moi. " Kerry savait qu'elle devrait se sentir mal à cause de tout ça, mais ce n'était pas le cas. " Moi, parce que j'ai eu mon job comme je l'ai eu, et le fait qu'on vive ensemble, et le fait qu'il a une photo de nous à moitié nues rampant pratiquement l'une sur l'autre. "

Colleen se contenta de la fixer.

" C'était à cette fête de samedi… je t'en ai parlé. "

" Les anciens élèves ? "

" Ouais… Dar habillée en punk… et une partie du marché, c'était que je fasse pareil, alors… il était tard, et il n'y avait vraiment pas de quoi fouetter un chat, on marchait simplement vers la Harley, et il a pris une photo. Ce sac à merde a dû traîner dans le parking la moitié de la nuit. "

" La Harley ? "

" Mmhm. Ça faisait partie du costume, pour ainsi dire. "

" Alors… tout ça ne t'inquiète pas ? " Son amie se pencha en avant. " Kerry, vous pourriez vous faire virer toutes les deux ! "

" On sait ", répliqua Kerry. " On pensait lancer notre propre société… tu veux un job ? "

Les cils roux clignèrent plusieurs fois. " Tu rigoles, hein ? "

" Non… pourquoi je ferais ça ? Dar a un peu de fric de côté… elle connaît sa partie, je connais la mienne… on a toutes les deux un bon réseau de contacts… ce n'est pas comme si la création de systèmes et le support, c'était de la physique nucléaire Col. " Kerry tira sur sa paille. " On en parle depuis un moment, en fait. Trop de conneries avec ILS ces derniers temps. "

" Ben. " Colleen sirota sa boisson. " Ouaouh… c'est dément. "

" Je sais. " Kerry leva son verre et fit un signe de la tête au serveur. " Je veux dire… ça ne me rend pas heureuse, Col… ne crois pas ça. Et Dar non plus… elle a travaillé pour eux quinze ans, pour l'amour de Dieu. " Elle s'interrompit. " Et je mentirai si je disais que ça ne fait pas mal ; après tout, j'ai fait du bon boulot pour eux, et je le sais. "

" De l'excellent boulot, si tu veux mon avis. "

Kerry sourit. " Et pour rendre les choses pires, ce nouveau réseau sur lequel Dar se casse le cul depuis deux mois, est monté en charge aujourd'hui, et ça ne lui apportait aucun plaisir. Ça m'a vraiment fichu en colère… ce système, c'est le top, Col… Dar a fait un tel boulot sur sa réalisation et son implantation… il a tout. "

" J'ai entendu mes chefs en parler. " La jeune femme rousse hocha la tête. " Clyde disait qu'il était impatient de s'y accrocher… il est censé améliorer notre vitesse de traitement de données de plus de quarante pour cent… il bavait pratiquement dans l'ascenseur. " Elle soupira. " Tout ça doit faire un mal de chien, alors. "

" Ouais ", murmura Kerry tristement. " Je me sens si mal… elle était si excitée par le projet, et maintenant elle dit qu'au moins c'est sympa de voir des données de production passer en réel avant qu'on l'écarte des systèmes. "

" Bon sang. " Colleen se mordit la lèvre. " Alors, l'affaire est bouclée, ou bien… ? ? ? "

" Elle doit aller à Houston mardi. Ils tiennent une réunion importante du conseil… elle présume qu'ils vont le faire à ce moment-là. " Kerry joua avec sa paille. " Et je ne peux même pas y aller, parce que je serai dans l'avion pour Washington. "

" Oh. "

" Elle a dit qu'elle terminerait là-bas, et qu'ensuite elle me rejoindrait à Washington. Je suppose qu'on décidera de ce qu'on fait après ", murmura Kerry. " Peut-être quelques semaines de congés… un peu de randonnée, ou aller à Key West, on verra. "

" Vivre un peu ? "

" Ouais. " Un sourire. " Ça dépendra de leur humeur… peut-être qu'ils ne s'intéresseront même pas à moi. "

" Tu resterais ? "

" T'es malade ? " Kerry ricana. " Sûrement pas… ils pourraient nommer Ankow à la place de Dar… et il faudrait que je le tue. "

Colleen la regarda. " Ooh. On joue les dures. "

" Oh s'il te plaît. " Elle jeta un coup d'œil au menu sur la table lorsque leur serveur revint. " Je peux avoir un grand panier de chips et de sauce mexicaine pendant qu'on attend ? "

Le serveur sourit en posant son second verre. " Bien sûr mon chou… je reviens. "

" Alors. Parle-moi de ce costume punk. " Colleen sirota son verre et se pencha en arrière. " Punk avec des épingles de sûreté dans le nez, ou quoi ? "

" Punk avec… un deux-pièces en cuir. " Kerry rougit en le disant. " DIEU merci, j'ai convaincu Dar de me laisser porter un jean avec… je serais morte s'il m'avait surprise avec la minijupe qui allait avec. "

" Un deux-pièces en cuir ! ! ! ! " Couina Colleen. " C'est quoi le nom du gars ? Je veux cette photo ! ! ! ! Et Dar, elle portait quoi… la même chose ! ! ! " Ses yeux s'agrandirent comme deux balles de golf. " Oh mon dieu ! ! ! "

" Col, calme-toi avant que ta cervelle ne te sorte par les oreilles. " Kerry se couvrit les yeux de la main. " Non… non… encore que… maintenant que tu le dis, j'aurais dû lui faire porter… bon, en tous cas, non. Je lui ai choisi un joli gilet en cuir à lacets, et elle le portait avec un jean et des chaînes en argent et des trucs que j'ai ramassés dans la maison. "

" Un gilet en cuir ? Ça n'a pas l'air très marrant. "

" Ben, il y avait beaucoup d'ouvertures… en fait, c'était surtout des bouts de cuir attachés ensemble. "

" Même. " La jeune femme rousse haussa les épaules. " Ça a l'air ennuyeux à côté de ce que tu portais. "

" Hum… elle ne portait rien dessous. " Kerry baissa la voix.

" Oh. " Les sourcils roux se froncèrent. " Oh ! " Ses yeux s'agrandirent. " Ouaaaaaahhhh… maintenant je vais aller voir ce type et lui arracher la photo des mains avec des tenailles ! " Elles se mirent à rire et se détendirent. " Alors, vous avez passé la journée en mer, hier ? Tu es encore toute rose. "

Kerry hocha la tête paresseusement. " Ouais… on est sortis le matin, on a fait deux longues plongées dans le récif, puis on est allés pêcher, et on a cuisiné sur l'île de Dar. " Elle fouilla dans sa poche et tendit quelque chose. " Regarde ce que j'ai trouvé ! "

" Ohh. " Colleen prit l'objet et l'examina. " C'est une pièce… ouaouh… c'est un trésor pirate ou quoi ? " Elle regarda Kerry qui sourit, et elle passa un genou par-dessus l'accoudoir de sa chaise, reconnaissant avec conscience combien son amie était bien plus confiante en elle et à l'aise maintenant. " Alors, c'est comment d'avoir des beaux-parents ? "

Kerry fronça le nez. " C'est si bizarre… je veux dire, j'ai toujours été à l'aise avec le père de Dar… c'est vraiment un type chouette, et je l'aime à mourir, et Dar est folle de lui. Je pensais que sa mère allait poser un problème… mais… d'une certaine façon, ce n'est pas le cas, parce qu'il y a des choses en elle qui ressemblent à Dar, et je peux le voir. " Un petit mouvement de la tête. " Je ne pense pas qu'elles s'en rendent compte, mais elles ont pas mal de réactions similaires, et des petits trucs, comme la façon dont Dar croise les bras et les chevilles, tu vois, comme ça… " Elle fit une démonstration. " Sa mère fait pareil. "

" Oui. " Colleen hocha la tête. " Dans notre famille c'est comme ça aussi… mes frères faisaient leur imitation de Papa l'autre jour, et tu sais, tu peux voir que quand ces mecs énormes auront vingt ans de plus, ce sera comme d'en avoir six comme lui à la maison. " Elle s'interrompit. " Oh, Sainte Marie Mère de Dieu… qu'est-ce que je suis en train de dire ! " Elle se couvrit les yeux.

Kerry se mit à rire, puis fit un geste de la main alors que d'autres amis arrivaient. " Et voilà la bande… c'est quoi le plan, on mange juste ou bien… "

" On pensait aller danser au club… " Colleen fit un signe de tête vers la musique au loin. " Dar nous rejoint ? "

" Elle ne peut pas… elle va être jusqu'au cou dans le réseau ce soir… j'allais rester mais elle m'a mise dehors, et m'a dit de bien m'amuser. " Kerry mordilla sa lèvre inférieure.

" Comme si elle n'avait pas encore compris que tu serais aussi heureuse à rester avec elle pour appuyer sur des boutons ou quoi que ce soit qu'elle est en train de faire ", dit Colleen en riant. " Allez, on va s'éclater un grand coup… je suis d'une humeur de macarena ce soir ! "

Un chœur de grognements.

" On pourrait aussi faire du karaoké ! " Avertit la jeune femme rousse. " Souvenez-vous, on a parié la dernière fois pour savoir ce qu'il faudrait pour que Kerry grimpe et chante. "

" Il n'y a pas assez d'alcool dans tout Miami ", marmonna Kerry entre ses dents, puis elle fourra une chip couverte de sauce dans la bouche de Colleen qui se rouvrait. " D'accord… allons-y… le Hard Rock Café d'abord, Ok ? J'ai vraiment envie d'un bon gros cheeseburger. "

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" Ouaouh. Cet endroit a bien changé ", fit remarquer Céci, en passant près d'un roller à moitié nu qui descendait l'allée.

" Ouais ", acquiesça Andrew, en prenant une inspiration de l'air salé. " Mais c'est le meilleur spectacle à bon marché que j'ai trouvé jusqu'à maintenant. " Il jeta un regard à une femme-fusée qui le rasa de près, puis fit une petite grimace. " Un ingénieur des ponts et chaussée s'éclaterait avec celle-là. "

Céci se mit à rire. Ils avaient passé la matinée à faire des recherches sur les bateaux, et la marina, puis avaient décidé de déjeuner sur South Beach et de se balader le long de la vieille promenade en planches, à s'imprégner des nouvelles vues et des anciennes. " Je me souviens quand tout ceci n'était qu'un bout de plage endormie et battue par les vents, remplie d'hôtels pour retraités. " Elle jeta un coup d'œil par-dessus l'épaule d'Andy. " C'est un chien en roller ? "

" Ouais. " Son époux hocha la tête. " J'm'asseyais souvent par ici… " Il montra un petit balcon près d'un motel reconstruit. " à regarder ce fichu clébard monter et descendre… j'ai finalement deviné de quoi il retournait. "

" Hm ? "

" Le mec à qui il était, il travaillait à Penrods. " Andy pointa du pouce par-dessus son épaule. " L'avait une p'tite amie à quelques centaines de mètres… dans un des petits restos rapides. Il transportait des notes. "

" Comment tu sais ça ? " Demanda Céci avec curiosité.

" J'l'ai arrêté et j'en ai lu une. " Les yeux bleus sans honte brillèrent furtivement. " Le gars avait besoin d'un dictionnaire et d'une bonne dose d'imagination, j'te l'dis. "

" Andy ! Comment as-tu pu ! " Dit-elle d'un ton de réprimande.

Il fredonna un peu.

" Qu'est-ce que ça disait ? "

" Hé ! " Andy sourit, puis s'interrompit et jeta un coup d'œil à la bande de plage visible au travers des bâtiments. Il monta la pente verdoyante vers la promenade, puis s'appuya sur la rambarde et fixa la large étendue vert-bleu au-delà de la plage sablonneuse. " C'est un endroit que Dar aime bien. "

Céci regarda le grand morceau de plage sauvage, près d'un vieil hôtel abandonné, et rempli d'algues. Il était bien caché de la promenade, et si on y allait, on avait probablement une jolie vue. " C'est là qu'elle était, la première fois que tu l'as vue ? "

" Ouais. " Andrew posa le menton sur sa main. " Je pensais que mes yeux me jouaient des fichus tours… mais il n'y avait pas à se tromper sur ce profil. "

Céci tourna légèrement la tête et le regarda. " Non ", admit-elle, avec un petit sourire. " C'est très vrai. "

" Elle est revenue plusieurs fois, surtout la nuit, toujours toute seule… elle avait toujours l'air triste, d'une certaine façon. " Il soupira. " Puis une nuit, il était vraiment tard. J'étais descendu sur la jetée pour aider un vieux pote, et j'suis revenu ici… et elle était là. "

Céci se contenta d'écouter, comprenant à quel point cela avait dû être dur pour lui de rester à l'écart.

" Cette nuit-là, j'ai eu peur pour elle ", continua Andy. " Elle me donnait l'impression d'être au bout de quelque chose… de sa corde, de sa route… j'étais à mi-chemin sur le sable… je ne pouvais pas m'en empêcher, quand elle s'est levée et qu'elle est partie, comme ça. " Un souffle. " Elle est pas revenue. "

" C'est pour ça que tu as fini par la contacter ? "

" Fallait que je sache si elle allait bien ", répondit-il simplement. " J'ai découvert plus tard que c'était la nuit où Kerry et elle s'étaient rencontrées. "

Sa femme hocha la tête pensivement. " Qu'est-ce que tu as pensé quand tu as fini par rencontrer Kerry ? "

Il pencha la tête d'un côté, à la façon de Dar. " Que j'avais à pas à m'inquiéter qu'on m'appelle papi, au moins. " Il rit en l'entendant rire. " Nan, j'étais content… foutument content que ma gamine trouve enfin quelqu'un pour l'avenir. "

" C'est le cas ", approuva Céci. " Et c'est quelqu'un parfois, aussi… ce qui me rappelle, marin, à quel point es-tu impliqué dans l'organisation parfaite de cette petite démonstration de dessin d'hier soir ? " Elle donna un petit coup dans les côtes d'Andy.

" Ouille. " Il prit une expression innocente. " J'vois pas d'quoi vous parlez, madame. J'étais en haut à piloter le bateau. " Andy se repoussa de la rambarde. " Et en parlant de ça… on n'a pas rendez-vous avec un type au sujet de tous ces foutus trucs ? "

" Mm. " Céci se laissa faire et lui prit la main alors qu'ils se retournaient et descendaient la promenade vers la marina. " Elle a un style intéressant, tu sais ", dit-elle l'air de rien. " Tu parles d'une bonne surprise. "

Andy se contenta de sourire dans le soleil de cette fin d'après-midi.

" Hé… et si on mangeait des sushis après avoir choisi notre nouvelle maison ? "

Les yeux bleus s'agrandirent et s'arrondirent. " Pardon ? "

" Allez, Andy… il y a un endroit génial au bout de la plage… en tout cas, il y en avait un… allons-y ! "

" Tu m'demandes d'avaler du poisson cru? "

" Tout le monde le fait… tu sais bien que ça ne te fera pas de mal. "

" Mme Roberts, si vous en saviez autant sur les poissons que moi, vous n'en mangeriez pas un gramme sans qu'il soit d'abord bouilli une demi-heure, puis rôti et servi avec des chips ", dit Andy d'un ton d'avertissement, en regardant un homme vêtu uniquement d'un Speedo bleu clair sur un vélo à une roue. " Bon Dieu. "

" Tu vois ? Je parie qu'il mange des sushis ", le taquina Céci.

" Ouais… et ça lui a fait tomber les parties, alors il peut rouler sur un machin pareil ", déclara l'ex-marine. " Ouaouh… attends une minute. " Il dirigea Cécilia dans un petit escalier qui menait dans un bâtiment quelconque. " Faut que je règle un petit truc. "

" D'accord. " Céci regarda les murs neutres. " C'est quoi ? "

" Faut que je signe mes papiers de divorce avec l'Oncle Sam. " Andy la regarda. " Ça fait de moi un civil pour la première fois depuis l'âge de seize ans. " Il baissa le regard un moment. " J'pensais que peut-être, tu voudrais être là à ce moment-là. "

Ce bureau sans fioritures, terne avec ses affiches passées sur les murs, et ses chaises pliantes craquelées sur les côtés, prit soudain une patine de merveilleux à ses yeux. " C'était bien pensé. " Elle prit une inspiration alors que la préposée en uniforme assise derrière un petit bureau en bois griffé levait les yeux et souriait, reconnaissant Andy de toute évidence.

" Bonsoir monsieur… j'ai du courrier pour vous. "

Andy s'avança, en tirant Céci et prit le paquet entouré d'un élastique. " Merci. " Il jeta un coup d'œil à une petite porte derrière elle. " Il est là ? "

Elle hocha la tête. " Tous les papiers sont prêts… je pense que vous n'avez plus qu'à les signer. " Ses yeux se posèrent sur Céci avec curiosité. " Madame. "

" Viens. " Andrew les emmena vers la porte et frappa, puis il l'ouvrit lorsqu'un grognement parvint de l'intérieur.

Le bureau s'avéra être un espace bizarrement agencé, converti de manière évidente de son utilisation originale qui faisait partie de la cuisine d'un vieil hôtel. Il y avait une porte vitrée au fond, et un plafond haut, ainsi que des fenêtres avec des volets, le tout peint dans un bleu neutre. Il y avait un bureau bien posé au fond de la pièce, et derrière lui se trouvait un homme énorme, au cou de taureau et une coupe militaire sur quelques cheveux. Il leva les yeux de dessous des sourcils clairs et bas lorsqu'ils entrèrent.

" Salut Andy. "

" Keith. "

" C'est qui la jolie petite dame avec toi ? " La voix basse était presque un grognement.

Andy laissa passer un demi-sourire vite effacé de son visage. " T'as jamais rencontré ma femme, Cécilia, non ? " Il jeta un coup d'œil sur le côté. " Céci, voici Keith Hawkins, on peut dire qu'il a pris soin des choses ici pour moi en quelque sorte. "

L'homme derrière le bureau se leva, surplombant même la haute taille d'Andy et tendit une main de la taille de la moitié d'un pain vers elle. " Non, madame… je n'ai jamais eu le plaisir… mais je suis fichtrement sûr de l'avoir maintenant. " Un sourire se dessina sur son visage anguleux. " Ce fichu mollusque n'a pas dit qu'il reviendrait avec vous… m'a juste envoyé un mot pour demander de préparer ses affaires. "

Céci prit sa main avec précaution et la pressa doucement, parce que serrer quelque chose de cette taille ne semblait pas être une bonne idée. " Ravie de vous rencontrer… et merci d'aider Andy à partir. "

Le géant prit un dossier dans une corbeille sur son bureau et l'ouvrit, puis il le retourna et le poussa vers eux. " Signe. "

Andy sortit un stylo de sa poche arrière et s'assit sur le bord du bureau, ses yeux bleus parcourant rapidement le document. Puis il leva les yeux vers Hawkins avec surprise. " J't'ai pas d'mandé ça. "

Celui-ci rit doucement. " Andy, tu veux bien la fermer et signer, merde ? " Un regard. " Désolée pour le langage, madame. "

" Je suis mariée à un marin depuis plus de trente ans ", répliqua Céci sans rire. " C'est un terme que j'ai déjà entendu. "

" Je n'ai jamais parlé comme ça devant toi ", protesta Andy avec indignation.

" Non, chéri… mais tous tes amis l'ont fait. " Sa femme lui tapota le genou. " Ce n'est pas grave. " Elle se pencha et étudia les papiers. " Qu'est-ce que c'est ? "

" Si vous passez assez de temps pour toucher la retraite, il faut la prendre ", répondit doucement Hawkins. " Surtout si vous avez fait comme Andy… pas tout le temps derrière un bureau. " Il regarda Andy signer au bas du document avec précaution. " Et pendant que tu y es, donne-moi une bon sang d'adresse pour que le Département de la Marine, que j'ai sur le dos, t'envoie toutes ces putains de décorations que tu as refusé de venir chercher. "

" J'en veux pas. " D'un ton féroce.

" C'est bien dommage ", lança Keith à son tour. " Donne-les à ta môme si t'aimes pas les couleurs. "

Andrew le regarda d'un sale œil. " Et qu'est-ce qu'elle f'rait avec ces bon sang de trucs ? "

Céci mit la main sur son bras. " Les garder précieusement. " Leurs regards se croisèrent. " On parle de l'enfant qui a acheté et construit une maquette de chaque navire sur lequel tu as navigué, Andy. "

" Oooh. " Keith sourit. " Il ne me l'avait jamais dit… comme c'est mignon. "

" Nom de nom. " Andy soupira exagérément. " Bien… bien… c'est bon. " Il gribouilla l'adresse de Dar sur le papier. " Envoie ces fichus trucs là-bas s'il le faut. " De longs doigts couverts de cicatrices repoussèrent les papiers sur le bureau. " Je vais chercher mes affaires. " Il se leva et marcha à grands pas vers la porte du fond, les laissant silencieux.

Keith se rassit et la regarda. " Alors, comme ça c'est vous la patronne, hein ? "

" Oui. " Cécilia jeta un coup d'œil autour d'elle puis son regard revint vers lui. " Je parie que vous ne saviez même pas qu'il avait une femme. "

" Je parie que vous avez tort ", dit l'homme en ricanant. " Je parie que j'en sais plus sur vous et sa fichue gamine que j'en sais sur ma mère. " Un sourire forcé. " Andy est d'une discrétion totale sur lui-même, mais bon sang, qu'est-ce qu'il causait de vous deux. "

Céci sourit et hocha la tête, et ils se regardèrent en silence pendant un moment.

" Il est passé par l'Enfer ", dit finalement Keith avec douceur. " Il a vécu quelque chose qui aurait tué n'importe qui d'autre. "

" Je sais. "

" Prenez soin de lui, madame. C'est un gars spécial. "

" Je le ferai ", répondit doucement Cécilia.

Ils se retournèrent vers Andy qui revenait avec un sac souple simple, bleu marine. " Ben, c'est tout ", déclara-t-il en tendant la main à Keith. " J'vais pas loin… on s'verra sur les quais. "

Keith prit sa main et la serra avec un calme respect. " Garde le contact, Andy… tu sais où nous trouver. "

" Ouais. " Avec un brusque mouvement de la tête, Andy se retourna et captura la main de Céci, puis il se dirigea vers la porte, sortant calmement d'un chapitre de sa vie, en la fermant avec fermeté derrière lui. Ils émergèrent sur le trottoir, dans une onde de soleil coloré et une bouffée de salsa, et ils descendirent la rue.

Céci laissa le silence durer un moment, alors qu'ils passaient près des hôtels branchés, et ceux qui allaient le devenir. " Comment tu te sens ? " demanda-t-elle finalement, alors qu'ils approchaient de la marina. " Je sais qu'ils étaient comme ta famille. "

Andy fit encore quelques pas, en réfléchissant visiblement. " Ouais ", dit-il d'un ton songeur, alors qu'ils montaient l'escalier. " Ils l'étaient… mais je vais te dire, Céc… avoir tout le temps à choisir entre partir et rester… ça m'a presque tué. " Il s'interrompit, en lui lançant un regard honnête. " Je sais que tu ne le pensais pas parfois… mais grimper la passerelle à nouveau, c'était dur. "

Céci l'étudia. " Te regarder la monter était tout aussi difficile pour moi. " Elle tendit la main. " Viens… allons acheter le nôtre cette fois-ci… on pourra en monter et descendre toute la journée ensemble. "

Un lent sourire. " D'accord. " Il prit sa main. " Mais, Céc ? "

" Hmm ? "

" Rien en rose. "

Elle pointa un doigt vers lui, et l'agita. " Rien que pour ça, des rideaux roses. "

" Allez, viens. " Il tira la porte.

" Des sièges roses à l'avant. "

" Cécilia Roberts. "

" Une flamme rose sur le mât principal. "

" Oh bon Dieu. "

Céci gloussa. " Alors, comment va-t-on l'appeler ? "

" Smarties, au point où on en est. "

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