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Femmesenprison2

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Femmes en prison

 

par Elaine Sutherland (ESuther105@aol.com)

 

traduction Marie Bouard

 

 

**********

Partie 2

 

*******

7.

Le jour suivant, c'était dimanche et Krieger était au repos, et rien n'est arrivé. Juste un autre jour en taule. Laska boudait dans son coin, mais elle boudait tout le temps dans son coin maintenant, alors on faisait plus attention. Mais elle traînait maintenant avec d'autres prisonnières, de l'autre côté de la cour. Peut-être comme si elle voulait créer un nouveau gang de filles.

 

Pas bon, ça.

 

Chucker, Losa se sont installées avec moi, ce matin-là, à notre place habituelle sur les escaliers près de la rampe de chargement, et voulaient savoir ce qui s'était passé dans la cellule de punition. Je m'suis assise sur la dernière marche, j'ai allumé ma première clope de la journée, et leur ai raconté tout ce que je me rappelais. Je dis que je n'avais jamais rien vu qui puisse se comparer à ces deux-là. Qu'elles étaient comme le jour et la nuit dans une espèce de duel. Et la gamine semblait gagner, en tous cas jusque-là.

 

Losa a ri, "Ouais, mais pour moi, le match me semble inégal. Tout ce que Krieger avait, c'était un fouet, des menottes et un revolver .38. Mais la gamine... la gamine avait 20 siècles de vers !"

 

Chucker a dit plus sérieusement, "Vous savez, j'aime bien la gamine. Elle apporte un peu de soleil à chaque fois qu'elle s'assoit à notre table. Je pense qu'on devrait garder un oeil sur elle. On peut pas faire grand' chose, rapport à Krieger. Mais Laska, c'est une autre histoire. Elle veut la gamine aussi, mais elle veut son sang, pas son cul."

 

J'étais d'accord. Je l'aimais bien aussi, et c'était agréable pour une fois de se soucier de quelque chose de bien. "Bon, on va prévenir les autres. Vous pouvez être sûres que c'est pas fini, et de loin."

 

*****

 

 

Le réfectoire ce soir-là était presque joyeux. Chucker avait raison à propos de la gamine ; elle apportait une espèce de clarté à toute la table. Et elle savait en débiter, des contes. Elle nous a raconté des histoires sur elle-même, mais elle s'était retrouvée mêlée à des gens tellement bizarres, que ça ressemblait vraiment à un roman. On commençait à comprendre comment une gamine innocente comme elle avait pu se retrouver mêlée à une bande de putes en colère, être au mauvais endroit au mauvais moment, avec les gens qu'y fallait pas quand le crime a eu lieu.

 

Elle semblait vraiment s'intéresser à nous aussi, et nous posait des tas de questions, et je me demandais si on n'allait pas devenir les nouveaux personnages du prochain conte qu'elle raconterait à d'autres personnes, ailleurs. Mais elle écoutait bien aussi, et on lui faisait confiance, alors on lui a raconté nos histoires.

 

Ephie lui a raconté ses années dans le rodéo, comme cascadeuse et tireuse à l'arc. "Je pouvais toucher le centre de la cible alors que j'étais en plein galop." Elle se rappelait comment elle pensait pouvoir commencer son propre spectacle avec les chevaux qu'elle avait volés, jusqu'à ce que le sheriff et son adjoint débarquent au corral un soir. Il y avait des larmes dans ses yeux à l'évocation de ce souvenir : "Quand je les ai vus emmener Phantes, mon étalon favori, une espèce de furie ancestrale m'a submergée. J'ai attrapé ce bon vieil arc et des flèches, et je les lancées, deux tirs parfaits, et je les ai attrapés, ces deux fils de pute, à trente mètres." La gamine lui a pris la main et a hoché la tête, dans un geste de sympathie.

 

Lorsqu'elle a tourné ses doux yeux verts sur moi, j'ai pas pu résister et j'lui ai tout raconté sur Aggie, mais j'ai quand même laissé tomber la partie sur le ragoût. Pony lui a raconté sa carrière de kickboxer et comment la Mafia avait essayé de la faire s'allonger pendant un match. Au moment où ils la menaçaient, car elle refusait, elle leur a écrabouillé leurs crânes à mains nues. "J'en avais ras le cul d'être emmerdée par ces mecs en costard, tu vois ce que je veux dire ?"

 

La gamine a placé sa main sur une des épaules massives de Pony et lui a répondu " Ouais, je vois ce que tu veux dire." Puis elle s'est tournée vers Losa. "Je parie que tu as une bonne histoire à raconter".

 

"Je crois que oui. J'étais une actrice, crois-le ou non. Un soir, je revenais juste d'une répéptition d'une pièce de Kleist intitulée "Penthésilée". Loin, très très loin de Broadway, mais un engagement, c'est un engagement, et j'étais contente d'avoir du travail. En réalité, c'était un rôle fantastique, mais le budget qu'on avait était tellement craignos qu'on avait très peu d'accessoires et qu'on devait s'arranger à droite à gauche pour les armures et les armes. J'avais emprunté cette superbe épée chez un collectionneur, une copie de musée, et vraiment super, et je la ramenais chez moi pour plus de sûreté. Il était près de minuit et je continuais à répéter mes dialogues ; tu sais, Penthésilée continuait à tourner dans ma tête. Près de la 34e rue, trois punks ont essayé de m'arrêter ; ils cherchaient les ennuis. Mais ces mecs se sont attaqués à la mauvaise reine cette nuit-là, et à l'idée qu'ils puissent me défier dans ma propre rue, la rage a explosé en moi, et j'ai tout lâché. J'ai tiré cette jolie épée de son fourreau et j'ai fait le vide autour de moi. Le temps que je revienne à des dispositions plus normales, je les avais tous tués."

 

"Tu as tué trois hommes avec une épée d'amazone ?"

 

"Eh bien, oui, si l'on peut dire."

 

"Ouah. Meurtre par mythe." La gamine avait l'air profondément impressionné, et je pouvais être sûre, rien qu'en voyant son regard, que ça allait devenir une histoire.

 

Elle s'est ensuite tournée vers Chucker.

 

"Et maintenant il y a la lance. Ce n'est pas exactement le type d'objet que l'on a tous prêt à l'emploi sur la table à café."

 

"Non, bien sûr que non. Mais j'étais étudiante en anthropologie. Civilisation mycénienne. Mon sujet de thèse était la reproduction de la panoplie complète d'un hoplite grec au moment de la guerre de Troie. Ca s'est passé environ 1000 ans avant JC, tu sais, et il existe très peu de reproductions. J'ai dû effectuer des mois de recherche. Mais finalement, j'avais une ébauche complète de l'armure et j'avais réalisé un jeu complet d'armes historiquement fidèles. Et puis j'ai découvert que mon directeur de thèse et son assistant avaient plagié l'ensemble de l'étude et l'avaient publié sous leurs propres noms. Dans le monde de la recherche, c'est un crime capital. Alors, un après-midi j'ai déboulé dans leur bureau et leur ai montré mon dernier chapitre, "L'utilisation d'une lance mycénienne". C'était une vrai beauté, et elle fonctionnait comme il y a près de trois mille ans. Ils moururent exactement comme les Troyens de Priam ont dû mourir. Ca aurait fait un article académique extraordinaire. Mais l'exactitude historique n'a pas eu l'air de beaucoup impressionner le jury."

 

La gamine nous a regardées l'une après l'autre, autour de la table, avec un étonnement respectueux, et à ce qui m'a semblé, avec admiration.

"Ahurissant. Vous êtes toutes tellement.... archaïques !"

 

Ephie a rigolé. "Archaïque. Hmm. C'est un mot très plaisant. Mais ce n'est pas celui que le juge a employé. il a plutôt utilisé un terme comme "sauvage". Peut-être qu'il avait raison. C'est comme ça que je l'ai ressenti à l'époque."

 

"Je vais vous dire qui est sauvage," a rétorqué Losa. "Krieger est sauvage". Elle s'est tournée et a posé gentiment sa main sur le bras de la gamine. "Est-ce qu'elle t'a fouettée ?"

 

"Oh, non. Elle n'a jamais posé la main sur moi. Euh, je veux dire qu'elle ne m'a pas fait de mal. Je sais qu'elle aime faire ce truc avec les menottes, mais c'est juste un show. Elle est réellement incomprise, vous savez. Je pense que cet extérieur sadique et brutal est un masque cachant une personne extrêmement vulnérable."

 

Pony a secoué la tête et a dit, le visage impassible, " Ouais. Ca a toujours été mon problème, être incomprise".... et elle a regardé ses mains puissantes qui avaient tué trois hommes...."et vulnérable".

 

 

8.

Le lundi, on pensait que les choses s'étaient peut-être calmées. La gamine était de bonne humeur - sans doute parce que Krieger ne l'avait pas emmerdée la nuit d'avant, et Laska n'avait pas menacé de la tuer.

 

Chose plutôt drôle, lorsque Krieger est entrée, on s'en est à peine aperçues. Elle a pas fait son show habituel : descendre le long des rangées et choisir quelqu'un pour la nuit. Elle s'est contentée d'entrer, de regarder un peu autour d'elle, de parler au garde en service, et de partir.

 

La gamine l'a vu, et Laska aussi, mais tout le monde faisait comme si personne n'avait rien vu. Comme si tout le monde était vachement détendu et pas intéressé. Ca me foutait vraiment la trouille, car je savais que quelque chose allait se passer. C'était évident.

 

Après le repas, on s'est mises en rang pour retourner dans nos cellules. La mienne était située deux cellules après celle de la gamine, celle de Losa une après moi, et celle d'Ephie une encore après. On a dépassé toutes les trois la cellule de la gamine. Et pis je l'ai vu, et je m'suis arrêtée d'un coup, Ephie me rentrant dedans et créant un carambolage.

 

"Oh, merde" je m'suis dit, plutôt calmement.

 

A la tête du lit de prisonnier bien en ordre de la gamine, sur l'oreiller, il y avait un bouquet de fleurs. C'aurait tout aussi bien pu être une bombe.

 

Le pire, c'est que quelques minutes plus tard, Laska l'a vu aussi. Je l'ai vue marquer une espèce de temps d'arrêt au moment où elle regardait dans la cellule. Je pouvais pas voir son visage d'où je me tenais, mais je savais qu'elle rétrécissait ses yeux méchants en deux petites fentes. On pouvait pratiquement entendre une mouche voler.

 

 

9.

Les deux semaines suivantes, les choses ont commencé à changer. Certaines choses se sont arrêtées. Par exemple, Laska ne traînait plus avec nous et Krieger s'est arrêtée de faire ses tournées le long des rangées du réfectoire. Elle ne portait plus de fouet, elle ne "choisissait" plus personne, pas même Laska, et elle n'emmenait plus la gamine en dehors de sa cellule la nuit non plus. Ca pouvait être dû au fait que Krieger avait un nouvel assistant qui lui avait été imposé, et qu'il y avait un deuxième bureau dans la salle de garde. Cela signifiait que celle-ci était exclue pour tout type "d'interrogatoire nocturne". Mais Krieger semblait complètement garder ses distances. Elle n'avait pas l'air bien non plus. Il y avait des cercles noirs autour de ses yeux bleus glace. Avec toutes les choses qui traînaient dans l'air, je ne comprenais pas ce qui lui arrivait.

 

Puis des choses ont commencé. Les Sinistres et Mortelles se reformaient de nouveau. Laska recommençait un nouveau gang de filles. Les nouvelles se marquaient elles-mêmes avec une petite coupure au menton et au début, il y en avait juste deux ou trois. Puis cinq. Puis toute une équipée, toutes avec leur petite coupure croûteuse. Seule Laska avait une ancienne coupure. Les SEM prenaient de nouveau leur essor, et Laska en était la Reine.

 

En moins de trois semaines, la gamine avait réussi l'impossible. Elle avait brisé la volonté du tyran, et mis à bas le vieux régime. Et elle avait commencé une guerre. Si la gamine avait remarqué le danger flottant dans l'air, en tous cas elle n'en disait rien. Elle parlait de tout le reste néanmoins. On n'écoutait pas toujours avec attention, mais on aimait toutes entendre le son de sa voix. Elle ne semblait jamais être déprimée et elle nous faisait nous sentir bien. C'était une nouvelle chose aussi, se sentir bien.

 

Pendant ce temps, les SEM s'accroissaient. On pouvait les entendre la nuit aiguiser leurs cuillères sur le sol bétonné, les transformant en petits couteaux de poche. C'était un son qu'on reconnaissait à chaque fois.

 

Puis un jour, la gamine était seule dans la cour pendant quelques minutes et Laska lui a sauté dessus avant qu'on puisse la protéger. De l'autre côté de la cour, on l'a vue attraper la gamine par la gorge. Laska était à moitié folle et n'avait rien à perdre en blessant la gamine vraiment méchamment, ou même en la tuant. Elle purgeait déjà quelques sentances à vie, alors ç'aurait pu en être fait de la gamine. On a couru vers elle aussi vite que possible, mais on savait qu'on n'arriverait pas à temps. Laska l'a ramassée par la gorge et a entrepris de l'étrangler pour de bon. La gamine s'est battue une minute, mais elle n'était pas de taille à résister à l'autre femme, plus grande. On était encore à trois mètres environ quand on a entendu l'écho d'un fusil puissant, et un peu de poussière s'est élevée juste à côté du pied de Laska. Elle a aussitôt lâché la gamine, et on savait toutes ce que c'était. C'était le fusil 30.06 à longue portée de la tour de garde située sur le mur. On a levé les yeux toutes en même temps et on a vu Krieger qui visait directement Laska. Toute la cour était silencieuse, et même si Krieger était haut sur le mur, on pouvait l'entendre clairement.

 

"Ecarte-toi Laska, ou je t'élimine au prochain coup. Tu sais que je peux. Tu sais que je le ferai."

 

Laska s'est écartée, le regard rempli de venin, et on a aidé la gamine à se remettre sur pied. Deux autres gardes ont attrapé Laska pour la foutre au trou. Ca n'allait pas faire grand bien. Elle serait sortie dans quelques jours, plus dangereuse que jamais.

 

Laska et son groupe de saletés étaient sinistres, et mortelles, juste comme elles le prétendaient, et une fois que Laska serait sortie du trou, la vie de la gamine ne vaudrait pas peau de balle. Il y aurait une exécution, ou une guerre, et on devait toutes choisir son camp. C'était dingue, je pensais. Tout marchait normalement pendant le règne de terreur, aussi longtemps que Krieger était fidèle à son côté sadique et malade. Mais maintenant l'enfer se déchaînait parce qu'elle était "devenue bonne" et avait arrêté de violer les prisonnières. Mince, on était tarées ou quoi ?

 

 

10.

Les choses ont rapidement bougé après l'incident dans la cour. La nuit suivante, Krieger et la gamine sont de nouveau allées dans la cellule de punition, et je les ai suivies encore une fois pour voir ce qui se passait avec Krieger.

 

Les deux étaient assises sur le sol l'une en face de l'autre de chaque côté de la cellule, contre le mur.

La gamine a dit, "merci de m'avoir sauvé la vie."

"C'était aussi agréable que des fleurs ?"

"Je dirais que oui. Mais j'ai eu les fleurs aussi. A moins qu'elles ne soient de Laska."

"Noooon. Tu sais qu'elles venaient de moi."

"Est-ce que ça signifie que vous avez laissé tomber l'approche par le fouet ?"

"Pour l'instant. On verra comment ça se passe."

"On peut dire que j'avais de la chance que vous vous trouviez sur le mur, à surveiller."

"Ce n'était pas de la chance. Je te surveille tout le temps."

"Vraiment ? Je pensais qu'après m'être refusée à vous, et que vous m'ayez laissée partir, vous m'aviez oubliée."

"Je n'ai pas oublié. Pas un instant. Je te voulais, mais je ne pouvais te forcer. Et la force, c'est tout ce que je connaissais. Tout ça, c'est nouveau pour moi."

"Tout ça ?"

"La séduction."

 

La gamine a hoché la tête et a esquissé un sourire. Puis pendant quelques minutes, pesronne n'a ouvert la bouche. C'était le silence le plus long et le plus sexy que j'avais jamais entendu. Le seul son présent était celui du vent nocturne qui sifflait à travers la cour de pierre désertée. Finalement, Krieger a pris la parole, doucement et calmement, d'une façon dont je ne l'avais jamais entendue parler auparavant.

 

"Gabrielle"

"Oui ?"

"Ton nom. Je ne l'avais jamais prononcé avant."

"Non. Je ne crois pas que vous l'ayez fait." Elle fronça les sourcils. "Je ne connais même pas le vôtre."

"Xenia."

"Oh. Quel nom magnifique. Etrange, pourtant. C'est grec ?"

"Ouais. Une espèce de nom de famille. Ma grand-mère a étudié les lettres classiques. Ouais, vraiment ! Elle a trouvé des espèces d'anciens parchemins grecs pendant la guerre. A propos d'une ancêtre assez lointaine. On m'a donné son prénom. A l'ancêtre, je veux dire."

"Curieux. Ma grand-mère a aussi fait quelque chose du même genre. Elle était archéologue. Je ne l'ai jamais rencontrée, pourtant. Quand je suis née, elle n'était déjà plus là. Morte pendant des fouilles, ou quelque chose comme ça. Elle a écrit beaucoup de choses à propos des Grecs, mais je n'ai jamais rien lu. Je pense que j'aurais dû. Peut-être qu'elle a entendu parler de votre ancêtre. Ce serait drôle n'est-ce pas ?"

"Ce serait même encore plus drôle si elles se connaissaient !"

"Bon dieu, et très déprimant aussi" a dit la gamine. "Si nous sommes issues de grand-mères aussi accomplies, comment a-t-on bien pu finir ici ?" Elle a jeté un oeil à la fenêtre barrée et a caché son visage dans ses mains.

Krieger s'est mise debout et d'un pas a traversé la cellule, puis s'est assise à côté de la gamine. Elle a commencé à lui caresser les cheveux.

"Tu n'as vraiment rien à faire ici Gabrielle."

"Je sais. Vous non plus."

"Oh, si. Je suis pas quelqu'un de bien." "Ce n'est pas vrai. Je vois beaucoup de bien en vous. Vous êtes juste un peu, euh, violente, à l'occasion. Vous avez quelques problèmes avec le rejet."

"Ouais. Quelque part en route, je suis devenue mauvaise. J'crois que je suis pas différente de la plupart des prisonnières ici."

"Bon, mais vous n'êtes pas une prisonnière. Vous êtes libre. Vous pouvez faire tout ce que vous voulez. Vous pouvez changer, pour faire le bien."

"Tu le penses vraiment ?"

La gamine a tourné la tête et a regardé Krieger, et a hoché la tête en souriant, et a regardé Krieger encore davantage. Je commençais vraiment à m'ennuyer à suivre cette discussion.

Krieger a alors pris une mèche des cheveux blonds de la gamine et l'a brossée hors de son visage. Elle a recommencé avec une autre mèche. Elle l'a regardée dans les yeux et a dit "Tu as raison. Il n'y a rien de plus excitant que ça."

"Quoi ?"

"Le désir dans tes yeux."

Elles se sont rapprochées l'une de l'autre et se sont embrassées. Elles avaient à peine commencé que la gamine a fait "Ummpf".

"Quoi ?"

"Ton pistolet."

"Oh, désolée. Je l'enlève."

"Non, non, laisse-le. J'aime plutôt bien. Bouge-le juste un peu."

Krieger l'a alors placé en arrière sur sa hanche.

 

Elles se sont encore embrassées, à moitié assises, à moitié alongées sur le sol, et c'est devenu passionné très vite. D'après mes calculs, Krieger avait passé trois semaines à sec, et elle était clairement au bord de l'explosion. J'avais entendu Krieger se faire "faire" un nombre incalculable de fois pendant des années, même depuis le bureau des gardes, mais je ne l'avais jamais vue, et j'ai pensé, ça y est, ce coup-ci, c'est bon.

 

Mais Krieger, de la façon dont les choses se sont passées, a tout fait.

 

Pendant qu'elle l'embrassait, Krieger a tiré la chemise de la gamine de sa ceinture, et, sans la déboutonner, a glissé sa main à l'intérieur. Tout ce que je pouvais voir, c'était le mouvement de ses doigts sous le vêtement, mais je pouvais imaginer que sa main prenait du bon temps. C'était la même poitrine qu'elle avait caressée deux semaines plus tôt, mais ce coup-ci, il n'y avait aucune objection. Ensuite elle a remonté la jupe de la gamine et a glissé son genou entre ses jambes. Je pouvais voir, d'après les expressions de son visage, combien la gamine était excitée quand l'autre femme a commencé à embrasser sa gorge, mais quand Krieger a glissé sa main de nouveau entre ces innocentes cuisses, elle a hésité. Tout d'abord elle a dit "Non, pas ici, sur le sol." Puis juste "S'il te plaît, non." Puis juste "S'il te plaît, oh, s'il te plaît..." Et enfin "Oh oui... oui... oui." Je pense que Krieger avait fini par la convaincre.

 

De son bras gauche, Krieger soutenait le haut du corps de l'autre femme ; en même temps, elle a commencé un lent mouvement avec sa main droite haut sous sa jupe. Voyant comment le "Chérubin" commençait à se presser en rythme contre la main de Krieger en soupirant de long "ooohhh", je dirais qu'elle était en train de s'envoyer en l'air. Et le Capitaine des gardes Krieger, fléau des femmes et violeuse en série, donnait au lieu de prendre. Mais si la méchanceté a fléchi ce jour-là, et s'est essayée à la bonté, l'innocence à son tour s'est risquée du côté sauvage. Ce doux ange blond non seulement se laissait baiser sur le sol pierreux d'une prison, mais encore, dans les flammes de la passion, sa petite main blanche s'était glissée le long de la hanche du Capitaine des gardes et avait saisi la crosse de son revolver.

 

Pendant une seconde, j'ai cru qu'elle allait le chiper.

 

Mais non. Sa petite main est restée là et a pressé, caressé et frotté ce vieux .38 Police Special tout le temps, comme s'il était une partie du sexe de Krieger. Krieger semblait également le sentir et décoller en même temps, parce qu'elle a changé de position, tirant la gamine au-dessus de ses propres jambes, et a commencé à accompagner le rythme de l'autre femme d'une poussée qui lui était propre. Je pouvais l'entendre haleter d'excitation. Et après quelques petites minutes de sexe entre eux trois, Krieger, la gamine et le .38, au fond de cette prison sale et minable, sainte et pécheresse ont joui bruyamment et en même temps.

 

Après ça, elles sont restées allongées, très calmes, mais elles avaient allumé un feu en moi et je n'avais envie de rien d'autre que d'aller à la recherche d'un peu de sexe moi-même. J'ai pensé à Maggie, en bas au 1er étage.

 

Mais alors Krieger a commencé à parler et soudain tout est redevenu intéressant.

"Oh, comme j'aimerais te sortir de là, Gabrielle. Tu mérites mieux que ça."

"Comme c'est gentil de dire ça. Tu as une idée ?"

"Oh, j'ai plein d'idées. Ce dont je suis plutôt à court, ce sont des plans."

"Idées à propos de quoi ?"

"A propos d'où on pourrait aller. Et comment le faire."

"Eh bien, tu as ma plus complète attention. Quel endroit as-tu en tête ?"

"Aussi loin d'ici que possible. L'autre côté de la terre. La Nouvelle-Zélande, peut-être."

"Mmmmh. Ca m'irait bien, la Nouvelle-Zélande."

"Bien. J'ai de la famille là-bas."

"Euh, je crois que la grosse question, c'est comment faire, tu ne crois pas ?"

"Ouais, c'est un peu plus délicat, comme question. Mais j'ai un ami assez haut placé qui pourrait nous aider. Un ancien petit ami. Toujours un bon ami, je pense. J'espère."

"Le Directeur ? Le Gouverneur ? Le Président ?"

"Nan, pas aussi important. Mais quand même..."

"Qui ?"

"Bobby Tapper." "Le présentateur du journal télé ?"

"Il l' a été. Maintenant, il est producteur d'importants débats télévisés."

"Il a une influence dans le milieu juridique ? Il peut corrompre un juge ?"

"Mieux. Il a un hélicoptère."

"Ouais, exact ! Hélico trois. Ouah ! Tu crois....?"

"Je ne sais pas. Mais laisse-moi voir ce que je peux faire. Mais pour l'instant..."

"Qu'est-ce que tu fais ?"

"Je pensais que tu le saurais, maintenant."

"Non, pas encore. Pas ici." "Non est ce que tu as dit avant. Je crois que j'aime bien quand tu dis non."

"Euh, je crois que nous allons devoir travailler ça. Je veux dire distinguer entre non qui veut dire "réellement non" et non qui veut dire "allez, convainc moi."

"Et celui-là, il fait partie de la second catégorie, oui ?"

"Oui, je pense que oui, vu que tu ahhhhh déjà ohhhh ta main là."

"Bien. Et je pourrais t'attacher encore. Juste un petit peu ?"

"Pas de liens. Peut-être plus tard. Quand ce sera un peu plus pour faire semblant."

"Oh, je vois ce que tu veux dire."

Et elles sont reparties pour un tour, alors je les ai laissées pour aller rejoindre Maggie au premier étage.

 

 

11.

Le jour suivant, au réfectoire, on a tout mis à plat. Il y avait le noyau, composé de nous cinq, plus une douzaine d'autres, ou à peu près, qui ou bien aimaient la gamine ou haïssaient Laska. On avait toutes nos chances dans une bagarre. Mais on ne pouvait pas laisser les SEM décider du où et du quand. On devait se préparer. Comme je l'ai déjà dit, je me suis pas mal baladée. J'avais les clés. Je pouvais pas sortir de taule, mais je pouvais aller dans beaucoup d'endroits. La laverie, la réserve. Ca n'a pas l'air d'être grand-chose, mais on trouvait dans la réserve les produits chimiques, les serpillères et les balais. Plus précisément, les serpillères et les manches à balais. On allait en faire des bâtons de combat.

 

Losa et la gamine était déjà douées pour ça, et le reste d'entre nous a appris. La gamine était vraiment douée. Elle allait directement aux genoux. Chucker était la seule à vouloir des lances, alors on a dit d'accord. Mais pas réellement trop aiguisées. On voulait assommer quelques personnes, et non pas les empaler. C'était facile de les cacher. On les revissait avec les têtes des balais et les serpillères, et on les laissait traîner dans tous les coins.

 

Comme la gamine ne savait pas que je les avais vues, elle et Krieger, je pouvais pas réellement lui dire que je savais qu'elle allait se casser. Mais tout le monde savait qu'il y aurait une guerre contre les SEM à propos de Krieger et de la gamine. Krieger savait pour sûr qu'on était du côté de la gamine, et il semblait qu'elle était devenue distraite lorsque les balais et les serpillères ont commencé à apparaître dans tous les coins de la prison. On était le groupe de cellules le plus propre de tout le système pénitentiaire.

 

Losa s'est révélée avoir une aptitude instinctive à diriger un combat. Elle s'était installée avec la gamine et elles décidaient quand et où s'entraîner et comment monter la grande bataille. Krieger ne nous parlait pas, mais, d'une manière ou d'une autre Losa et le reste du groupe on était désignées chaque soir pour nettoyer la prison. Ca incluait le sous-sol, l'endroit parfait pour s'entraîner. On pensait qu'il était sûr de nous entraîner à peu près deux heures tous les soirs sans que notre absence soit remarquée par les autres prisonnières et on emballait les bâtons dans des tissus afin que personne ne puisse entendre le bruit lorsqu'on les frappait les uns contre les autres. Losa était un bon prof et après une semaine environ, la plupart d'entre nous pouvait se défendre seule contre quelqu'un armé d'une lame.

 

Une nuit, toutes les six on était en train de s'entraîner là-bas. Losa, la gamine, Pony, Chucker, Ephie et moi. La gamine exécutait un réel splendide travail de ses bras, et elle avait remonté sa chemise et l'avait nouée sous ses seins afin de se donner une plus grande liberté de mouvement. Elle avait un petit ventre hyper mignon. Si j'avais eu 20 ans de moins, je lui aurais fait des avances. Elle avait aussi déchiré sa jupe, créant une ouverture, mais elle avait trouvé que ça donnait plus de liberté à ses jambes, alors elle avait fini de la déchirer jusqu'à la taille et retenait le tout au-dessus avec sa ceinture de cuir. Après Losa, elle était la meilleure, et quand ces deux-là s'entraînaient ensemble, c'était un peu comme voir Robin des Bois et Petit Jean. Si vous vous rappelez le film.

 

Au moment où elles étaient dans leur truc à fond la caisse, on a entendu du bruit dans les escaliers qui descendaient au sous-sol et avant qu'on puisse cacher nos armes, la porte s'est ouverte. Personne n'a bougé.

 

Krieger.

 

Elle est entrée d'un pas nonchalant, nous a regardées pendant qu'on se tenait là, hésitantes, à ses côtés, et puis elle s'est tournée vers la gamine.

"Mignon comme tenue. Surtout le haut. T'as l'air génial en vert."

Tout le monde s'est détendu.

J'ai dit "Vous savez pourquoi nous sommes là, en train de faire ce que nous faisons."

Elle a répondu. "Evidemment. Après tout, je suis un peu la cause de cette guerre, non ?"

Personne n'a rien répondu. Alors elle a repris.

"Je veux que vous sachiez que je vous suis reconnaissante que vous ayez décidé d'aider à protéger Gabrielle. Mais ça ne me surprend pas. Toutes les cinq, vous avez toujours été soudées, et vous êtes un bon groupe. Vous n'avez jamais créé de trouble. Après toutes ces années, j'ai un peu l'impression de vous connaître."

 

"Certaines d'entre nous bibliquement" a remarqué Losa, et à notre grande surprise elle s'est approchée et a posé sa main sur le bras de Krieger. C'était la première fois qu'une prisonnière posait sa main sur elle sans y avoir été invitée. "Vous savez, c'était juste le pistolet qui nous gênait. Le reste était... plutôt sympa."

 

"Le pistolet n'a jamais été chargé. Qu'est-ce que vous croyez, que je suis folle ?"

"Quoi !? Eh bien, pourquoi est-ce que vous n'avez juste pas demandé ?"

"J'avais pas envie de demander, à ce moment-là."

 

La gamine a levé les yeux au ciel et visiblement, elle voulait changer de sujet. "Losa nous a vraiment mises en bonne condition avec les bâtons de combat. On a environ douze femmes qui peuvent les utiliser et plein d'autres qui vont juste se joindre à nous parce qu'elles haïssent les SEM."

"Oui, mais ce n'est pas uniquement les SEM qui entrent en jeu. Tu sais ça."

J'ai alors décidé qu'il était temps pour moi de l'ouvrir. "Ouais, on sait. C'est à propos de la gamine. On l'aime beaucoup et on est d'accord pour dire qu'elle n'a pas sa place ici. Elle n'est pas comme nous, et on veut lui donner une chance de se tirer. Tout ce qu'on peut faire de l'intérieur c'est retenir Laska et créer une gentille petite diversion pour vous permettre de disparaître."

"Ah, vous avez deviné. Ca met tout le plan en balance."

"Non ! Non ! Vous inquiétez pas pour nous. Toutes les cinq, on est d'accord. Toutes les autres vont se battre juste pour le fun et n'ont pas besoin de savoir quoi que ce soit. Vous nous dites juste quand et on fera notre possible pour mettre en place une gentille bruyante et fumante émeute."

"Fumante, tu dis ? Je n'y avais pas pensé."

"Bien sûr. Tous ces balais et ces serpillères. On a un peu de kérosène pour le nettoyage qui fume d'enfer. Ca et quelques chiffons imbibés de fuel devraient faire ressembler l'endroit aux portes de l'enfer."

"Hmm. Ca me plaît. Bon, si vous pouvez être prêtes mardi après-midi dans la cour nord, je pourrai amener mon homme là-bas."

"Mardi, ouais, on peut y arriver pour mardi."

"Bien. En attendant, pendant le meeting habituel hebdomadaire, je rappellerai aux gardes qu'ils ne doivent faire feu qu'en cas de risque de situations mortelles. Aussi longtemps que vous n'essayez pas de tuer quelqu'un, vous ne devriez avoir à vous soucier que des petites lames de Laska. La fumée est une bonne idée dans la mesure où ça signifie qu'on aura besoin de moins de personnes en train de se battre pour créer une diversion. Mais vous devez empêcher que ça devienne trop sanglant, où vous aurez droit aux lacrymos."

"Okay. Je ferai passer la consigne. Y aura la télé ?"

"Comptez-là dessus."

"Oh, génial" a dit Pony. "Je porterai mes plus beaux jeans de prisonnière."

 

Le reste du groupe s'est retiré et a fait semblant de s'entraîner pendant que la gamine et Krieger repartaient ensemble vers la porte. Krieger a fait courir ses doigts le long du ventre nu de la gamine et lui a dit "Il faudra que tu portes ça de temps en temps pour moi." Puis elle l'a rapidement embrassée sur les lèvres et est partie.

 

On s'est jeté des coups d'oeil qui signifiaient tous la même chose : "Plus dure sera la chute !"

 

 

12.

Mardi après-midi est arrivé et c'est devenu NOTRE heure. On avait tout préparé comme une pièce de théâtre, et si c'est plutôt devenu un cirque, c'est parce qu'on savait qu'il y aurait la télé et on a été un peu emportées par notre enthousiasme. On voulait toutes nos 15 minutes de gloire.

 

1er acte : la gamine est sortie avec Ephie pour balayer les mégots de cigarette et autres saloperies dans les escaliers situés dans le coin nord de la cour. Au moment prévu, elles ont commencé à s'engueuler et Ephie trépignait avec son balai en appelant la gamine "une petite pisseuse frigide" . La gamine lui a hurlé en retour quelque chose comme "sodomite crasseuse" et s'est assise toute seule sur la dernière marche. C'était la partie la plus faible de notre plan, parce qu'on était dépendantes de la réaction des punks SEM quant à la situation. Dix longues minutes sont passées et on commençait à se ronger les ongles. Soit les SEM étaient vraiment douées et avaient vu le piège, ou elles étaient complètement stupides et n'avaient rien vu. En fait, c'était cette dernière explication qui était la bonne. Quand enfin l'une de leurs scientifiques nucléaires remarqua que la gamine était seule, Laska et une de ses copines se sont approchées. Alors voilà comment ça s'est passé après :

 

2e acte : la gamine a levé les yeux, la peur clairement visible sur son visage -- certainement en partie authentique -- et a essayé de gagner du temps avec elles deux pendant quelques instants, le temps que Pony et Chucker se trouvent à distance raisonnable pour leurs lances. Et puis dix autres brutes sont apparures dans les environs au même moment que Losa et moi. Comme dans un ralenti, la main de Laska est sortie, armée de sa lame, et le spectacle a commencé. Les bâtons sont apparus tous au même instant, ainsi que les quatre lames. La gamine sauva d'instinct sa propre peau grâce à un coup assuré de son manche à balai devenu bâton de combat sur la main armée de Laska. Une seconde après, la "lance" non aiguisée de Chucker s'est écrasée dans le dos de Laska et l'a envoyée rouler par terre la tête la première et la respiration coupée. Ses copines se sont approchées pour attaquer mais Pony est arrivée à ce moment à leur hauteur et les a frappées dans les jambes. Quelques minutes plus tard, on était une douzaine en train de contrer et de frapper et de pousser dans un bruit sans cesse grandissant. Davantage de détenues se sont jointes à la mêlée et bientôt, il y avait des combats tout autour de nous, répétés ou improvisés, de vieilles dettes étaient réglées, de nouvelles hostilités déclenchées, et, au moins du côté de mes filles, il y avait beaucoup de bruit et de théâtre.

 

3e acte : C'était finalement assez facile de faire sauter ces stupides petites cuillères aiguisées des mains des SEM. La partie la plus difficile était de les garder engagées dans les combats quand les feux furent allumés. C'est incroyable le peu de feux un peu fumants dont vous avez besoin pour simuler l'enfer. Carmen et Julie, qui s'étaient de nouveau réconciliées, ont déboulé avec un vieux matelas qu'elles avaient trempé de kérosène, et il est devenu le clou du spectacle. A ce moment-là, on avait assez de figurantes pour être classées comme émeute de première importance et on valait la peine de passer au journal télé. On aurait pu même faire l'objet de photos de première classe, s'il n'y avait pas eu la fumée.

 

J'ai remonté les escaliers de la plate-forme de chargement afin d'avoir une vue d'ensemble et de surveiller mes filles. Pony s'acquittait très bien de sa tâche dans la bagarre. On l'avait prévenue de ne pas fracturer de crânes et elle s'en tenait à des coups de poing et de pied peu dangereux et était quant à elle complètement indemne. Chucker était également en sécurité. Elle avait opté pour sa lance non aiguisée et elle la récupérait à chaque fois qu'elle avait fait tomber quelqu'un, l'utilisant comme bâton uniquement entre ses lancers. Ephie s'écroula une fois à cause d'un coup sur la tête, mais Losa la remit sur pied et elle se battaient épaule contre épaule. Comme elles étaient toutes deux d'une nature théâtrale, elles ont commencé à lancer des espèces de cris de guerre sauvages du type "AiAiAiAiAi !!". Sympa, j'ai pensé pendant que je me ruais en bas des escaliers pour les rejoindre.

 

On était entourées de feux, et les filles criaient comme des harpies. Pourtant, je commençais à grogner et à souffler à cause de l'effort que je produisais pour balancer mon manche, pardon mon bâton de combat. Flûte, j'ai cinquante ans. Qu'est-ce que je croyais ? Mais la gamine était complètement dedans. A chaque fois qu'elle assommait quelqu'un, elle exécutait une petite dance en cercle et elle criait "Yiiha !"

 

Qui l'aurait cru ?

 

Le plus extraordinaire, c'est qu'il n'y avait aucun garde sur les murs, aucun d'entre eux en train de pointer leurs fusils et leurs mitraillettes sur nous. Krieger devait les retenir pour un prétexte quelconque, mais pour combien de temps encore, personne n'en savait rien. Jusqu'à présent, il ne semblait pas y avoir de blessures sérieuses, mais on ne savait pas comment garder le tout sous contrôle. Les émeutes sont par définition hors de contrôle.

 

A ce moment précis, il y a eu un assourdissant putaputaputaputaputa dans l'air. J'ai levé les yeux et j'ai vu -- imposant et même plus que ça -- le ventre d'un hélicoptère.

Bobby Tapper. Fidèle à sa parole. Sur les lieux pour "obtenir l'info".

 

Soudain Krieger est apparue aux côtés de la gamine. Elles sont restées là quelques minutes dos à dos, bien qu'il n'y ait personne de suffisamment dingue pour attaquer Krieger, puis elles ont couru à un endroit juste en-dessous de l'hélicoptère de la télé, où la caméra ne pourrait pas les voir. Mais je parie que la caméra était dirigée ailleurs de toutes façons. (Sur Pony, j'espère. Elle s'était habillée pour l'occasion).

 

Quelqu'un a balancé une corde et Krieger l'a attachée autour de ses hanches et de sa poitrine, faisant un noeud sur le devant. La gamine était attachée avec elle, mais alors qu'elles étaient quelques mètres en l'air elle a commencé à glisser. J'ai entendu Krieger crier "escalade mon corps", mais je ne pouvais imaginer comment quelqu'un pouvait faire ça. Mais la gamine s'est accrochée, a serré ses jambes autour des cuisses de Krieger et a enfoui son visage contre la poitrine de son sauveur.

 

Quelqu'un était supposé les tirer à l'intérieur de l'hélicoptère, mais je pouvais voir que quelque chose ne tournait pas rond avec le plan. Pendant de longues minutes elles sont restées suspendues trois mètres au-dessus de la cour, tournant lentement et n'allant nulle part. Les gardes ont commencé à débarquer dans la cour et c'était un miracle qu'aucun coup de feu ne soit tiré. Puis, comme on le craignait, ils ont commencé à balancer des gaz lacrymogènes. Les boîtes sont tombées tout autour de nous et le gaz a rempli peu à peu la cour d'une espèce de soupe aérée.

 

A ce moment, Krieger a montré combien elle était forte, pas forte avec un fouet ou un pistolet, mais forte dans l'endurance. Par la seule puissance brute de ses bras, elle a grimpé la corde, soutenant son poids et celui de la gamine. Le vent généré par les pales de l'hélico soufflait la poussière et les débris en une forme de spirale autour d'elles et c'était comme si elle s'extrayait elle et la gamine d'un puits, centimètre par centimètre, main l'une après l'autre, jusqu'à ce qu'elles atteignent les patins de l'hélico. Une main gantée de noir est alors apparue et les a tirées à l'intérieur. L'hélico s'est retourné, a fait une espèce de saut de côté par-dessus le mur de la prison et, alors que je tombais sur mes genoux et que je commençais à dégobiller à cause des gaz lacrymo, je pouvais entendre les putatputaputa disparaître au loin.

 

 

13.

Elles sont parties maintenant, ces deux-là, ensemble et en sécurité, je suis sûre. Je suis la seule à savoir où, et je ne dirai rien. Un nouveau Capitaine des gardes est arrivé quelques jours plus tard. Le Directeur Moneus nous l'a amenée hier au réfectoire et on l'a jaugée. Plutôt maigre, mais mignonne. Elle portait une seule paire de menottes, et le pistolet et la matraque réglementaires. "Super" a dit quelqu'un très doucement. Quelqu'un d'autre a murmuré "Celle-là va être du gâteau." Je pouvais déjà voir Laska se lécher les lèvres. Plus de passage à tabac. Plus d'existence dans la terreur.

 

Moneus a pris un mégaphone et nous a demandées de nous asseoir. Il avait une annonce à faire.

"Bonjour mesdames. Ici le Directeur Moneus. Depuis l'émeute de la semaine dernière et le départ, euhh, inattendu du Capitaine Krieger, nous avons eu quelques problèmes de personnel. Mais nous avons désormais un nouveau Capitaine des gardes à bord et les choses vont bientôt retourner à la normale. Bien sûr il y aura quelques changements dans le règlement, afin d'empêcher la reproduction de tels troubles, et vous serez informées de ceux-ci. Entretemps, je souhaite vous présenter le nouveau Capitaine des gardes Calvina Stowe."

 

Il lui tendit un écritoire avec toutes les nouvelles règles.

"Voilà, Cally, elles sont toutes à vous."

"Merci, Sal." Elle s'est avancée sur la plate-forme moins élevée et a jeté un oeil dans toute la pièce en souriant d'une façon inquiétante. Ses grands yeux bruns luisaient et elle semblait nous transpercer l'une après l'autre. Un sentiment d'anxiété m'a traversée et j'ai pensé, "Oh, Oh, nous allons avoir des problèmes."

 

FIN

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