| 
  • If you are citizen of an European Union member nation, you may not use this service unless you are at least 16 years old.

  • You already know Dokkio is an AI-powered assistant to organize & manage your digital files & messages. Very soon, Dokkio will support Outlook as well as One Drive. Check it out today!

View
 

HOME1

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Ton coeur est ton foyer

Home is where the Heart is

 

Melissa Good

 

Traductrice : Katell

 

************

 

Démenti standard : ces personnages, en tout cas la plupart d'entre eux, appartiennent à Universal et Renaissance Pictures et aux autres personnes possédant les droits de Xena: Warrior Princess. Cette histoire n'a pas été écrite dans un but commercial, et aucune violation de copyright n'a été voulue.

Démenti spécifique à l'histoire :

Violence : il y a un peu de violence. Xena s'ennuierait autrement et commencerait à lancer son chakram un peu partout, et vous savez à quel point ça peut être dangereux. De plus, vous trouverez des références, mais pas de description graphique, à une relation parent/enfant abusive. Si cela vous gène, on préfère vous prévenir tout de suite.

Subtext : cette histoire raconte la vie de deux femmes très amoureuses l'une de l'autre. Bien qu'il n'y ait aucune scène sexuelle graphique, le thème est présent tout au long de l'histoire et, si cela vous dérange, retournez à la page des fictions et allez lire autre chose. De plus, je l'ai dit et je le répète, si l'amour vous offense, envoyez-moi un petit mot avec votre adresse postale, et je vous enverrai des 'brownies', cette fois, parce que vous me faites vraiment de la peine. J'y mettrai même des morceaux de chocolat, mais si vous êtes en Floride, et que c'est l'été, venez me voir. Ça sera plus simple.

Cette histoire est la suite directe de La Séparation (At A Distance), et enchaîne directement sur les événements de cette histoire.

Vos commentaires seront toujours les bienvenus. Vous pourrez m'envoyer un message électronique à l'adresse suivante : merwolf@worldnet.att.net

*********

 

Partie 1A

******

 

Un vent frais soufflait entre les arbres autour du camp isolé, soulevant doucement la crinière de la jument crème qui paissait paisiblement, et projetant, au hasard, quelques étincelles sur le sol qui entourait le feu. Installée sur une épaisse fourrure noire se trouvait une jeune femme aux cheveux clairs, qui, concentrée, faisait crisser sa plume avec hésitation sur une série de parchemins étalés devant elle.

 

"Bon sang. Je n'y arriverai pas", soupira Gabrielle. "Je ne peux pas." Elle mâchouilla l'extrémité de sa plume, puis pencha soudainement la tête sur le côté. "Hé", fit-elle, un grand sourire se dessinant sur ses lèvres. "Tu ne peux plus me surprendre, tu sais." Elle se tourna sur le côté, et regarda la grande forme sombre enjamber le tronc d'arbre et s'installer près d'elle. Un bébé-loup agité arriva derrière elle, et essaya de sauter par-dessus le tronc, en vain.

 

"Roo !" protesta-t-il, jusqu'à ce que la guerrière le ramasse et l'installe sur la fourrure, où il se roula en boule, satisfait.

 

"Qui a dit que je voulais te surprendre ?" demanda Xena, essuyant l'excès d'eau de ses cheveux. "Hmm ?"

 

"Oh, des petits trucs… comme te voir te faufiler en dehors de mon champ de vision", répondit le barde, avec un sourire malicieux. "Mais ça ne marchera pas… je t'ai sentie." Ses yeux étincelaient.

 

"Hmm hmm", fit Xena. "En fait, la rivière est de ce côté, et depuis quand je rentre au camp en faisant du bruit, hein ?"

 

Gabrielle la regarda. "Hmm… d'accord", admit-elle en riant. "OK, je te le concède, pour cette fois." Elle tendit la main et la posa sur le genou de la guerrière. "Hé, tu es allée te baigner ! Brr."

 

Xena agita le lin devant elle. "Ouais." Elle se laissa glisser et s'appuya sur un coude. "Ça avance, ton histoire ?"

 

Le barde jeta sa plume, écœurée. "Je ne peux pas, Xena." Elle lui adressa un regard penaud. "Je ne peux pas écrire une histoire sur moi. Je n'y arrive pas." Elle écarta les manuscrits et roula sur le ventre, posant son menton au creux de sa paume.

 

Xena la regarda, pensive. "Pourquoi ?"demanda-t-elle, tendant la main et grattant doucement le dos du barde, tout près d'elle. "Tu as vraiment fait toutes ces choses."

 

"Je sais", répondit Gabrielle. "C'est juste que… je ne sais pas, Xena. Je n'arrive pas çà trouver les mots." Elle leva les yeux vers la guerrière. "Pas comme quand j'écris des histoires sur toi."

 

Xena ferma à moitié les yeux, réfléchissant. "Essaie de parler de la reine des Amazones comme si c'était quelqu'un d'autre", suggéra-t-elle, penchant la tête vers le barde. "Fais comme si c'était quelqu'un que tu ne connais pas."

 

Gabrielle réfléchit un moment. "Mmm… peut-être", marmonna-t-elle. "Ouais, ça pourrait marcher." Ses yeux verts se posèrent sur Xena. "Qu'est-ce qui t'a fait penser à ça ?" demanda-t-elle, curieuse.

 

Xena leva les sourcils, un sourire joueur sur les lèvres. "C'est ce que je fais quand je t'écoute raconter tes histoires sur moi." Elle se mit à rire en voyant l'expression sur le visage du barde, puis ébouriffa ses cheveux blonds. "Je fais comme si tu parlais de quelqu'un d'autre." Elle haussa les épaules. "Bien sur, l'histoire en elle-même m'est un peu familière…"

 

Gabrielle se mit à rire elle aussi. Elle secoua la tête. "Encore une leçon de la Princesse Guerrière." Puis elle soupira. "Une de plus." Mais elle leva les yeux et sourit à Xena. "Je vais ranger tout ça. Je suis plutôt fatiguée, et on sera à Potadeia demain." Une grimace. "Je vais avoir besoin de repos ce soir."

 

Xena la regarda rassembler ses parchemins et les ranger dans son sac. Elle s'inquiétait un peu pour sa partenaire, sans bien savoir pourquoi. Le barde avait été plutôt silencieuse depuis Amphipolis, ce qui était inhabituel, et elle semblait s'enfoncer davantage dans son mutisme avec chaque kilomètre qui la rapprochait de son village natal. Pourtant, elle renonça à poser des questions, pensant qu'elle redoutait probablement le mauvais accueil qu'elle ne manquerait pas de recevoir là-bas. Ce qui est probablement vrai, pensa la guerrière. Mais ça ne sera pas la première fois, et elle y fait habituellement face avec gaieté. Peut-être parce que c'est… plus personnel, cette fois.

 

Elle considéra le problème sérieusement, pendant que Gabrielle rangeait ses affaires, puis le barde revint vers elle et s'assit de nouveau sur les fourrures, fixant le feu, ses bras entourant ses genoux.

 

Xena soupira intérieurement et se redressa, s'asseyant en tailleur près du barde, et attendit. Gabrielle finit par sentir le regard posé sur elle et tourna la tête pour le croiser. "Salut", fit doucement la jeune femme.

 

"Salut", répondit Xena, se penchant un peu en avant. "Ecoute, ce n'est pas vraiment mon truc, mais quand tu seras prête à parler de ce qui te chagrine, n'oublie pas de venir me trouver, OK ? Tu ne peux pas me louper, je suis la grande brune avec l'épée."

 

"Xena !" s'exclama Gabrielle avec un petit rire. Puis elle commit l'erreur de regarder dans ces yeux bleus tout près d'elle. Ils firent fondre sa résolution comme s'ils étaient une vague de l'océan, et elle un château de sable sur la plage. "Quand j'étais à la maison… la dernière fois." Elle baissa les yeux vers la fourrure, et joua avec du bout des doigts. "Après… tu sais…" Perdicus. "On a eu des mots."

 

Xena leva les sourcils. "A quel propos ?" De moi, sans doute. soupira-t-elle intérieurement.

 

"De ce que je faisais", répondit brièvement Gabrielle. "Ils voulaient que je reste là-bas, que je me remette de la mort de Perdicus, et Papa allait arranger… quelque chose d'autre." Elle avait mentionné son défunt mari avec une seconde pause mais pas de douleur apparente.

 

"Tu crois que c'est le 'quelque chose d'autre' ?" demanda doucement Xena. C'est bien son père, ça. Il ne m'a pas trop plu dès le début. Mais, bon, ils me détestaient tous, alors ce n'est pas à moi de juger.

 

Gabrielle hocha la tête. "Je crois que oui." Elle tourna la tête vers le feu, rougissant un peu. "Je crois qu'il est déterminé à…"

 

Xena acquiesça rapidement. "récupérer ta dot", dit-elle simplement. "Combien veut-il ?" La question surprit le barde.

 

"Euh… je… je n'en sais rien". Sa voix devint un peu rauque. "On ne nous parlait jamais de ces choses-là." Elle fit une pause. "A Maman, ou Lila, ou à moi."

 

La guerrière plissa les yeux, réfléchissant. "Je me demande ce qu'il ferait si je lui proposais de la lui payer ?" fit-elle d'une voix traînante, un petit sourire malicieux sur les lèvres. Elle vit l'expression de Gabrielle passer de l'inquiétude, au choc, à l'espoir et enfin à la déprime.

 

"Tu ne lui donneras pas un dinar, Xena", souffla le barde, tendant la main pour saisir le bras de la guerrière. "Je ne vais pas me laisser acheter." Et puis ses yeux redevinrent timides. "Ce n'est pas que… je veux dire… euh… ce que je veux dire, c'est que…" Elle leva les yeux vers Xena. "Il n'y a personne d'autre…"

 

Xena eut pitié d'elle, et lui sourit. "OK… OK… du calme. Ecoute, tu peux régler le problème comme tu l'entends, mon barde, mais si tu crois que je vais rester sans rien faire pendant qu'on te marie de force…" Elle fronça les sourcils. "Tu as pris un coup de trop sur la tête à l'entraînement."

 

Gabrielle sourit. "Je le sais bien." Elle rit un peu. "Je crois que j'aimerais que tout soit réglé et que je puisse encore les considérer comme ma famille." Un petit haussement d'épaules. "Et ça sera sympa de revoir Lila. Je pourrai peut-être la convaincre de t'adresser la parole cette fois." Elle regarda la guerrière, un peu penaude. "Je suis désolée, mais je doute que ma famille soit aussi gentille avec toi que la tienne avec moi."

 

Xena la regarda. "C'est pas grave, j'ai l'habitude", fit-elle, avant de s'appuyer en arrière et d'étendre ses jambes. "J'essaierai de ne faire peur à personne." Une pause. "Enfin pas trop", corrigea-t-elle. "Viens là." Elle tendit un bras et Gabrielle obéit avec plaisir, se blottissant contre elle. Xena tendit la main et plaça une couverture sur elles, souriant lorsque le barde se rapprocha encore, et entoura son ventre de son bras. Après y avoir longuement réfléchi, elles avaient opté pour un principe, lorsqu'elles voyageaient dans la nature. Lorsque les sens hyper aiguisés de Xena les protégeaient, et les gardaient hors de danger, des sens qu'elles ne pouvaient émousser d'aucune façon ; c'est pourquoi il était hors de question d'être intimes. C'était trop dangereux.

 

Mais la nature physique de leur relation autorisait les câlins, ce qu'elles faisaient dès qu'elles n'étaient pas occupées aux corvées et tâches de la vie au grand air. Elles s'étaient construit un endroit confortable, malgré le vent froid qui soufflait à travers le camp et bousculait le feu.

 

"Mmm", marmonna Gabrielle. "Ils ne se feront jamais à ça." Ses yeux se posèrent sur Xena, pleins de regret.

 

"Ça, je m'en doute", fit la guerrière, amusée. "C'est à cause de qui je suis, ou de ce que je suis ?" demanda-t-elle, baissant les yeux vers le barde, curieuse.

 

Gabrielle demeura silencieuse un long moment, réfléchissant. Elle pouvait entendre le battement régulier du cœur de Xena sous son oreille, et le rythme ne changea pas ; elle savait donc que la question ne préoccupait pas beaucoup sa compagne. Mais elle voulait trouver une réponse qui serait au moins sensée. "Disons que…" dit-elle finalement, "ils sont très traditionnels… alors le 'qui' les gênera probablement." Elle eut une légère moue mais continua. "Mais je crois qu'ils pourraient finir par s'y faire, mais le 'quoi'…" Elle eut un petit gloussement. "Désolée. Tu leur fiches vraiment la trouille."

 

"Tant mieux", fit Xena en bâillant. "Si ça devient trop dur, tout ce que j'aurai à faire, c'est ça." Elle releva le menton du barde, pencha la tête et l'embrassa. "Ça devrait les distraire suffisamment longtemps pour qu'on ait le temps de prendre la fuite sur Argo."

 

Le barde gloussa à nouveau. "Oh, dieux… je m'imagine la tête qu'ils feraient." Elle reposa sa tête en arrière et soupira. "Ça va pas être drôle." Et elle ferma les yeux, résolue.

 

 

 

Le jour suivant, elles marchèrent à travers les collines, les anciennes forêts, avant de se diriger vers une région un peu plus domestiquée, juste aux abords de Potadeia. Xena leva les yeux vers le soleil et amena Argo à l'ombre des arbres. Elle défit l'une des sacoches attachées à la selle puis jeta un coup d'œil vers Gabrielle qui fixait la route, pensive, les mains enroulées autour de son bâton. "Hé !", appela la guerrière, sortant de la sacoche du pain, du fromage et un peu de viande séchée, avant de dénouer le sac contenant un Arès piaffant. "Allez, mon gros. Descends." Elle posa le chiot sur le sol et le poussa un peu de la main. "Va la chercher."

 

Arès la regarda, puis cligna des yeux vers la direction indiquée ; il repéra le barde et se lança vers elle. Il rejoignit Gabrielle et planta les dents dans sa botte, tirant de toutes ses forces. "Grr !"

 

"Arès !" s'écria le barde en riant. Elle baissa les yeux vers son assaillant, puis se pencha et le ramassa. "Elle t'a envoyé me chercher ?" Elle se tourna vers Xena, qui était tranquillement appuyée contre Argo, et la regardait. "On dirait que oui." Elle la rejoignit et accepta le sandwich que lui tendait Xena. "Merci."

 

Elles s'assirent à l'ombre l'une à côté de l'autre, Arès étendu sur la cuisse de Xena d'où il pouvait réclamer une partie de son déjeuner. "Grr." Il la poussa un peu, et en fut récompensé par un morceau de viande.

 

Gabrielle eut un sourire narquois. "Tu es en train de le pourrir, tu sais", commenta-t-elle. "Il fait de toi tout ce qu'il veut." Elle jeta un coup d'œil à Xena, qui leva un sourcil expressif à son attention.

 

"Je crois bien que ça pourrait être un problème", répondit sérieusement la guerrière. "Tu lui donnes des leçons pendant que je m'entraîne à l'épée la nuit, ou quoi ?"

 

"Qui, moi ?" fit Gabrielle, d'un air innocent. "Je ne sais vraiment pas de quoi tu parles." Elle cligna des yeux, l'air faussement blessé.

 

"Hmm, hmm", fit Xena, et lorsque le barde tenta de s'échapper, elle tendit sa main libre et se mit à la chatouiller. "Tu ne sais pas de quoi je veux parler, hein ?"

 

"Xena !" grogna Gabrielle à travers les gloussements. "D'accord… d'accord…j'abandonne…" Elle soupira et reprit son souffle alors que Xena cessait la torture, et retournait à son sandwich. "Un jour, j'apprendrai à ne pas faire ça."

 

"Nan", marmonna Xena, la bouche pleine. Elle baissa les yeux et donna à un Arès impatient un autre morceau de viande.

 

Gabrielle rit doucement, puis se rapprocha, laissant sa tête reposer sur l'épaule de la guerrière. "Tu ne sais pas à quel point j'avais envie de faire ça quand j'étais avec les Amazones", soupira-t-elle, fermant les yeux et souriant.

 

"Quoi, être chatouillée ?" demanda Xena, mais sa voix était douce et elle posa sa joue contre la tête de Gabrielle. "Je plaisante." Une pause. "Moi aussi", admit-elle, laissant la vague de chaleur amener un sourire sur ses lèvres.

 

Elles restèrent assises là un long moment après avoir terminé leur déjeuner, regardant la vallée et laissant la brise fraîche de cette fin d'après-midi les caresser doucement. Enfin, Xena recouvra ses esprits et poussa gentiment sa compagne. "Tu es prête ?" demanda-t-elle, alors que le regard perdu du barde vint croiser le sien. "Gabrielle ?"

 

"Ouais", répondit le barde. "Désolée… j'étais ailleurs." Elle s'essuya les mains rapidement, puis se leva, s'étirant et passant les mains dans ses cheveux. "Tiens." Elle se tourna et tendit la main à Xena, qui était toujours assise par terre. "Besoin d'aide ?" Elle vit la douce étincelle dans les yeux bleus. Sachant parfaitement que sa compagne pouvait non seulement se lever sans aide mais aussi se lancer dans les airs en un seul bond depuis sa position assise.

 

"OK", fit Xena d'une voix traînante, prenant la main offerte et se laissa hisser sur ses pieds. "Merci." Elle souleva le chiot, et le porta jusqu'à la sacoche d'Argo où elle l'installa à nouveau, en toute sécurité. Puis elle se tourna vers Gabrielle. "Bon, c'est toi qui choisis. Tu veux arriver à pied ou à cheval ?"

 

Le barde penchant sa tête blonde sur le côté et réfléchit un instant. "Même si je déteste l'admettre : à cheval", avoua-t-elle avec un petit sourire.

 

"Comme tu veux", répondit Xena, avant de se hisser sur la selle d'Argo et de tendre la main vers le barde. "Allez, viens."

 

Gabrielle saisit fermement l'avant-bras de la guerrière et se laissa hisser sur la croupe d'Argo avec une facilité nonchalante. Elle gloussa un peu, puis passa ses doigts sur le dos et les épaules de Xena. "Tu as fait de l'exercice pendant que tu étais à la maison, hein ?"

 

Xena ricana un peu. "C'est soit ça, ou tu es devenue plus légère. Ouais… un peu." Elle haussa les épaules pour mettre son armure en place. "Il m'a fallu modifier deux fois les pièces d'épaules."

 

Le barde se mit à rire. "Ça doit être ça, parce qu'avec la cuisine de ta mère, c'est sûr que je ne suis pas devenue légère." Elle glissa les deux mains autour de la taille de la guerrière. "En fait, je crois bien qu'elle a réussi à te coller un petit kilo", fit-elle, taquine, en serrant doucement la taille de Xena et en lui donnant une légère tape sur le ventre.

 

Xena ricana, sarcastique. "Plus d'un", admit-elle. "Et ce n'est pas toi qui as aidé." Elle adressa au barde un regard amusé.

 

Et en fut récompensée par un petit rire. "Ouais, je sais. Mais on en avait besoin toutes les deux, et ça ne t'a pas fait de mal."

 

La guerrière haussa les épaules. "C'est vrai. En plus, avec tout ce qu'on marche, ça ne va pas rester très longtemps."

 

Gabrielle soupira. "Tu as raison. Ce n'est pas souvent qu'on a l'occasion de se reposer pendant deux semaines, pas vrai ?"

 

Xena ne répondit pas, mais d'un léger coup, lança Argo dans un petit galop et la dirigea vers la vallée, traversant un petit cours d'eau, puis rejoignit une route poussiéreuse et battue qui coupait entre des carrés de champs bien cultivés. Elle remarqua les ouvriers agricoles qui marchaient le long de la route vers le village s'arrêter pour les regarder passer. J'avais oublié à quel point j'adore Potadeia, soupira Xena intérieurement. Et à quel point Potadeia m'adore. "Ça va ?" fit-elle en jetant un coup d'œil par dessus son épaule. "Hé ?"

 

Gabrielle sortit de sa rêverie et appuya sa joue contre le dos de la guerrière. "Ça va." Essayant d'ignorer les battements violents de son cœur, et la sensation de nausée qui avait envahit son estomac. "Vraiment." Bon sang. Elle sentit les doigts de Xena effleurer son poignet. Et Argo ralentir son pas.

 

Xena se tourna à moitié sur la selle, et regarda sa compagne dans les yeux. "Gabrielle, quoiqu'il arrive, on peut y faire face", dit-elle sérieusement.

 

"Je sais." Le barde expira longuement. "Tu peux faire face à n'importe quoi."

 

Xena fit une pause et pencha la tête. "Nous, Gabrielle. Tu es tout à fait capable de faire face à ce que cette situation te réserve. Tu le sais bien. Tu as fait face à une Amazone qui faisait deux fois ta taille. Je sais que tu peux faire face à n'importe quoi."

 

Gabrielle la fixa un moment. Elle a raison. Pourquoi est-ce que ça me fiche autant la trouille ? Vieille habitude, sans doute. "Désolée. Je… c'est une longue histoire." Elle sourit à Xena. "Mais merci… j'avais besoin d'entendre ça." Une pause. "Venant de toi."

 

Xena la regarda longuement, avec intensité. Puis elle finit par hocher la tête. "OK. Mais il faudra bien que tu prennes le temps, bientôt, de me raconter cette longue histoire, d'accord ?"

 

"D'accord", acquiesça le barde, soupirant de soulagement lorsque Argo reprit sa marche. Non… pas de si tôt, Xena. Cette histoire est bien là où elle est. Dans le noir.

 

Xena ralentit à nouveau la jument lorsqu'elles approchèrent des premières maisons du petit village. Les regards des habitants devenaient à présent plus ouverts et hostiles, et elle sentit sa personnalité changer pour adopter une attitude de menace glaciale. Ça marchait la plupart du temps. Elle dirigea Argo vers la maison des parents de Gabrielle, et choisit d'ignorer les regards. Elles y étaient presque, lorsque Xena, entendant une voix vaguement familière, tourna la tête et serra doucement le bras de Gabrielle. "Lila", dit-elle à mi-voix, alors que la sœur de Gabrielle apparut et se précipita vers elles.

 

Le barde relâcha son étreinte, et la guerrière balança la jambe par-dessus l'encolure d'Argo, puis se laissa glisser sur le sol, avant de se tourner et de s'empêcher de saisir la taille de Gabrielle pour la faire descendre. Il faut que je fasse attention, pensa-t-elle, amusée. C'est devenu une habitude. Et ce n'est pas facile de s'en débarrasser aussi vite.

 

Gabrielle le remarqua et lui adressa un petit sourire, puis se laissa glisser à son tour sur le sol et courut à la rencontre de sa sœur. "Lila !" s'exclama-t-elle, alors que la jeune fille brune l'entourait de ses deux bras. "Je suis contente de te revoir." Elle la serra contre elle avec enthousiasme.

 

Lila acquiesça, et s'écarta un peu, saisissant les épaules de sa sœur, la dévisageant. "C'est tellement bon de te revoir, Bree." Elle lança un regard prudent par-dessus l'épaule de Gabrielle. "Bonjour, Xena."

 

Xena adoucit le ton volontairement. "Bonjour, Lila. Tu as l'air en pleine forme." Et elle parvint même à esquisser un demi sourire à l'attention de la grande sœur brune de sa partenaire. On ne dirait même pas qu'elles ont les mêmes parents, pensa-t-elle, amusée. Gab a peut-être été adoptée. Cette pensée amena un véritable sourire sur ses lèvres.

 

Lila lui adressa un long regard méfiant. "Merci." Puis elle se tourna à nouveau vers sa sœur. "Bree, on nous a dit que tu n'étais pas loin." Un autre coup d'œil vers Xena.

 

Gabrielle acquiesça. "Nous étions à Amphipolis." Elle jeta un coup d'œil vers la maison. "Il est là ?"

 

Lila secoua la tête. "Au marché. Il sera de retour après le coucher du soleil."

 

Le barde expira. "OK… bon…"

 

"Voilà ce que je te propose", interrompit Xena, capturant le regard de Gabrielle et lui adressant un clin d'œil à peine perceptible. "Je vais installer Argo à l'écurie près de l'auberge. Vous deux pourrez discuter un peu."

 

Gabrielle sourit. "Bonne idée." Elles échangèrent un regard chaleureux. "A tout à l'heure."

 

La guerrière leur dit au revoir de la main et conduisit la jument vers le centre du village, où elle avait repéré l'écurie publique. Elle pourrait, peut-être, voir si les parents de Gabrielle accepteraient de les loger, elle et la jument… elle se mit à sourire, ironique, rien que d'y penser. Non, sans doute pas.

 

Lila se tourna vers Gabrielle dès qu'elle pensa que la guerrière ne pouvait plus les entendre. "Elle ne va pas quand même pas rester, Bree ?" Sa voix était tendue. "Tu ne…"

 

Gabrielle recula d'un pas et la regarda. "Bien sûr que si, elle va rester", répondit-elle tranquillement. "Qu'est-ce qui se passe, Lila ?" Elle saisit le coude de sa sœur et la guida vers la maison.

 

"Dieux", siffla Lila. "Papa va faire une attaque." Elle jeta un coup d'œil derrière elle. "Tu ne comprends pas."

 

Le barde haussa les épaules. "Papa lui a envoyé un message pour lui demander de me ramener ici. Tu ne croyais quand même pas qu'elle allait se contenter de me laisser et repartir ?" Qu'est-ce qu'il lui prend ? "En plus, je ne reste pas."

 

Lila s'arrêta net, et lui saisit le bras. "Ne dis pas ça." Elle regarda autour d'elle. "Il faut que tu restes, Bree, je t'en supplie."

 

"Ok. Qu'est-ce qui se passe ici ?" Gabrielle prit un ton très net, imitant inconsciemment celui de sa partenaire. "Allez, raconte." Elle regarda sa sœur dans les yeux et croisa les bras.

 

Lila hésita et inspira profondément. "Viens. Tu as l'air d'avoir besoin d'un bon bain." C'était leur ancien code, pour aller discuter en privé. Là où elles savaient qu'on ne les écouterait pas.

 

"Très bien", concéda Gabrielle. "Laisse-moi aller dire bonjour à Maman avant." La crispation de Lila lui donnait mal à la tête, et elle se dit mentalement de se calmer un peu. Une voix flotta librement dans son esprit. Je sais que tu peux faire face à n'importe quoi. Oh, Xena… sais-tu à quel point j'avais besoin de t'entendre me dire ça ? Surtout maintenant ? Elle suivit Lila sur le porche et puis dans l'entrée.

 

La maison. Un sentiment trouble l'envahit. Elle regarda autour d'elle, les meubles en bois, et les tapis et tapisseries poussiéreux et colorés. L'œuvre de sa mère. La petite pièce, avec son âtre bien entretenu. La table en bois où elle avait mangé tous les jours de son enfance. Les chaises, fabriquées par son père. L'alcôve au fond, à droite, qui conduisait à la petite chambre qu'elle partageait autrefois avec Lila. La maison. Elle sentit l'étrangeté de la situation, la familiarité pourtant présente. Tout comme lors de sa dernière visite, lorsqu'elle avait compris qu'elle était bien plus que Potadeia.

 

Un bruit sur sa droite. Elle se tourna et vit sa mère qui se tenait dans l'embrasure de la porte de la cuisine.

 

"Gabrielle", fit-elle lentement. Puis elle vint jusqu'à elle.

 

"Bonjour, Maman", répondit le barde et elle accepta son étreinte plutôt tendue. En essayant de ne pas comparer cet accueil à celui qu'elle avait reçu de Cyrène.

 

Hécuba la relâcha et l'observa d'un œil critique. "Va te laver un peu avant que ton père ne revienne. Et enfile des vêtements décents." Un regard noir à l'attention de Lila. "Tu as fait la lessive ?"

 

"Oui, Maman", répondit Lila, puis elle saisit le bras de Gabrielle. "Allez, viens, Bree." Elle commença à avancer, mais dut s'arrêter car sa sœur n'avait pas bronché. Elle se retourna vers elle, et vit les étincelles de colère qui avaient envahi les yeux de Gabrielle. "Pas maintenant", siffla-t-elle, puis elle tira sur la jupe du barde. "S'il te plaît…"

 

Gabrielle se ressaisit et posa les mains sur ses hanches. "Je vais prendre un bain, mais ce sont mes vêtements et je ne me changerai pas." Elle croisa le regard d'Hécuba. "Je suis sûre qu'il comprendra."

 

Hécuba fit la moue. "Je vois que ton attitude n'a pas changé." Elle secoua la tête, puis lui tourna le dos. "Il va falloir s'occuper de ça." Puis elle repartit dans la cuisine.

 

"Arrête un peu, tu veux ?" fit Lila, saisissant le bras du barde. "Allez, viens !" Puis elle s'arrêta et regarda sa sœur. Les muscles tendus et fermes sous ses doigts. Les yeux verts qui ne se baissaient pas. Elle la regarda longuement. "Ton attitude n'a pas changé", dit-elle enfin, doucement. "Mais toi, tu as changé, pas vrai ?"

 

"Oui", fit doucement le barde. "J'ai changé." Et elle se laissa enfin conduire vers la salle de bain. J'espère seulement avoir suffisamment changé.

 

Lila maintint un rythme régulier de conversation tandis qu'elles remplissaient la grande baignoire d'eau chaude, pour la plupart des ragots du village, et d'autres choses du même genre.

 

Gabrielle contribua à la discussion, avec quelques petites choses qu'elle avait vues sur la route et à Amphipolis, sachant que Lila pourrait s'identifier avec ces événements. Elle toucha l'eau d'un doigt et sourit. "Parfait." Elle retira ses vêtements de voyage et attrapa le bord de la baignoire, avant de sauter dans l'eau avec un soupir. Lila l'imita, plus doucement, et se laissa glisser de l'autre côté, jetant un coup d'œil à sa sœur.

 

"Tu as l'air… différent", fit Lila, tout en l'observant. "Tu as perdu beaucoup de poids."

 

Gabrielle bâilla et baissa les yeux, jugeant sa propre apparence. "Si tu m'avais vue il y a quinze jours", dit-elle en riant. "Ça, c'est après une exposition prolongée à la cuisine de la mère de Xena. Délicieux." Elle regarda Lila, qui n'avait pas l'air très à l'aise. "Je vais bien. Je ne suis pas malade, tu sais." Elle haussa les épaules. "C'est juste ce qui arrive, quand tu fais ce qu'on fait."

 

Lila se détendit un peu. Gabrielle commençait à ressembler un peu plus à la sœur dont elle se souvenait. "Tu as l'air…" Elle fit une pause. "Plus forte." Sans regarder son propre corps, ses amples courbes là où Gabrielle offrait des muscle finement dessinés.

 

"Mmm… ouais, ça vient avec le reste', admit le barde, levant un bras et l'observant un moment. "Je n'y ai jamais vraiment pensé." Elle sourit légèrement. "Ça doit être tout cet entraînement." Une vision soudaine. "Si tu voyais Xena. Alors là, c'est vraiment du muscle." Voyant que Lila levait ses yeux au ciel, elle soupira. "Allez, Lila, arrête un peu, tu veux."

 

"Je suis désolée, Bree." Lila glissa un peu plus près et regarda son cou. "Je ne l'aime pas, tu le sais bien." Elle tendit la main et toucha la cicatrice sur la gorge du barde. "Je n'arrive pas à lui pardonner de t'avoir emmenée loin de nous. Et de t'avoir presque fait tuer."

 

Le barde laissa rouler sa tête en arrière, et regarda le plafond. Elles avaient eu la même discussion lors de sa dernière visite. "Lila, pour la dernière fois, elle ne m'a emmenée nulle part. C'est moi qui l'ai suivie. Et je ne voulais pas la lâcher. Je l'ai probablement rendue folle pendant très longtemps avant qu'elle ne s'y habitue." Elle redressa un peu la tête et croisa le regard de Lila. "Et tu sembles oublier que nous serions toutes les deux des esclaves ou mortes, si elle ne nous avait pas sauvées."

 

Lila se laissa glisser un peu plus dans l'eau, une expression perplexe sur le visage. "Je sais, Bree. C'est juste que je ne comprends pas pourquoi tu fais ça. Evidemment, tu voulais partir, et elle t'a emmenée loin d'ici. Mais au nom d'Hadès, qu'est-ce que tu fais encore avec quelqu'un comme elle ? Tu te sens obligée, parce qu'elle a assommé ces soldats, après tout ce temps ?"

 

Oui, pourquoi ? pensa le barde, tout en se détendant dans l'eau chaude. Qu'est-ce que je peux bien dire à ma sœur qu'elle pourrait comprendre ? Puis-je lui dire qu'on s'allonge sous les étoiles la nuit, et qu'on y voit des cochons ou des moutons ? Puis-je lui parler de quelqu'un à qui je peux tout dire ? Qui m'écoute toujours ? Dont le sourire me réchauffe de la tête aux pieds ? Non. Je ne peux pas. "C'est ce dont j'ai toujours rêvé, Lila. Tu le sais bien. Je voulais raconter des histoires et voir le monde. Eh bien, c'est ce que je fais." Elle se redressa un peu dans le bain. "J'ai rencontré des rois, des princes, des héros…. Tu savais que je connaissais Hercule ?"

 

"Vraiment ?" fit Lila, sa curiosité piquée malgré elle.

 

"Oui… Iolaus et lui sont de bons amis à nous", confirma Gabrielle. "Je raconte des histoires à toutes sortes de gens. Je fais aussi partie un peu de ces histoires, parfois, parce qu'il se passe tout le temps plein de choses, avec Xena."

 

"Je sais tout ça", dit Lila, le visage sérieux. "C'est pourquoi tu es ici." Elle se pencha en avant. "Métrus, tu te souviens de lui ?"

 

Le barde hocha lentement la tête. "Le marchand. Ouais, un peu pirate sur les bords, mais plutôt jovial."

 

"C'est ça", confirma Lila. "Il te veut. Pour tes histoires. Il pense qu'il pourra se faire pas mal de dinars avec toi." Elle baissa soudain les yeux. "Papa a accepté."

 

Gabrielle cligna des yeux, et se redressa d'un seul coup. "Hein ??" s'exclama-t-elle. "Il doit vraiment être dingue s'il s'imagine que je vais me laisser faire."

 

Lila se glissa tout près d'elle et lui saisit les bras. "Tu n'as pas le choix, Bree ! Il a le droit, tu le sais bien ! Il n'a plus d'argent… tu sais pourquoi." Elle fit une pause. "Et… il dit… qu'il n'y a rien pour moi." Elle finit dans un murmure. "Et le frère de Métrus… nous sommes…" Son regard croisa celui de Gabrielle, qui était devenu plutôt froid. "Il dit que je pourrai faire partie du marché. C'est ma seule chance." Elle eut un regard dégoûté. "Je ne suis pas jolie, comme toi. Et je ne suis pas intelligente."

 

Gabrielle se força à garder son calme, à respirer profondément, et à ne pas réagir à ce que Lila venait de dire. Une partie d'elle-même voulait sortir du bain, scandalisée, et une autre partie sentait une compassion profonde pour sa sœur. Elle savait, mieux que personne, à quel point Lila voulait quitter cette maison. Reste concentrée, Gabrielle. Reste calme. Il doit bien y avoir un moyen de se sortir de là. Pour toutes les deux.

 

Elle releva doucement les genoux, et les entoura de ses bras. Puis elle leva les yeux vers Lila. "Il ne peut pas me forcer." Il doit y avoir un autre moyen."

 

Lila éclaboussa l'eau, furieuse. "Mais qu'est-ce qui te prend ? Métrus te laissera raconter tes bon sang d'histoires, et il t'entretiendra bien. Tu ne vas pas me dire que tu préférerais errer dans la nature, et sans doute aller te faire tuer, à suivre cette folle. Ça ne va pas ? Tu te prends pour une Amazone ou quoi ?"

 

Gabrielle ne put retenir un sourire. "Eh bien, d'une certaine façon…" commença-t-elle, puis elle sentit une sensation chaleureuse dont elle connaissait la source. "Tu vois, c'est que.."

 

"Elle est la reine des Amazones." La phrase vint d'une voix grave et amusée derrière elles. Le visage de Lila s'assombrit de colère et de surprise en voyant Xena entrer, tout en armure, et venir appuyer ses avant-bras sur le rebord de la baignoire. "Ce n'est pas vrai, votre Majesté ?"

 

"C'est vrai ?" siffla Lila, n'y croyant pas.

 

Gabrielle haussa les épaules. "Ouais", confirma-t-elle. "C'est vrai." Elle laissa sa sœur considérer la situation et se tourna vers sa compagne, glissant un bras hors de l'eau et le posa tranquillement sur l'avant-bras de la guerrière. "Argo va bien ?"

 

"Mmm… oui", répondit Xena. "Je viens de parler avec ton père." Elle jeta un coup d'œil vers Lila. "Il n'est pas très content de me voir."

 

"Personne n'est content de te voir", cracha Lila, avant de se glisser à l'autre bout de la baignoire.

 

"Et ?" fit Gabrielle, se laissant absorber par ce regard bleu pendant un long moment.

 

"Et… en gros, je lui ai dit que je comptais rester dans le coin jusqu'à ce que tu me dises de m'en aller", répondit calmement la guerrière.

 

Elle se souvint de la scène, devant la maison. La nuit tombait et la maison n'était illuminée que par le feu et la lumière de quelques torches. Elle était entrée et l'avait surpris. Il s'était tourné et avait laissé éclater sa colère. "Qu'est-ce que tu fabriques ici ?" avait-il grogné. "Tu aurais pu déposer ma fille et partir. On ne veut pas de toi ici."

 

Xena avait continué d'avancer, jusqu'à ce qu'elle soit nez à nez avec lui. Et il avait réalisé qu'il devait lever un peu la tête pour croiser son regard. Son meilleur regard glacial de seigneur de guerre. "Tu m'as envoyé une invitation." Elle avait sorti la missive de son gant. "Et je me fous pas mal de ce que tu peux vouloir."

 

"Fous le camp", fit-il, hautain. "Tu en as assez fait." Il recula un peu. "On peut s'occuper d'elle, maintenant, Xena. C'est ma fille, et j'ai enfin trouvé un bon mari pour elle, après que le dernier se soit fait tuer à cause de toi."

 

Ça, ça l'avait un peu refroidie, parce que c'était vrai. "Voilà ce que je te propose", lui avait-elle dit. "Si Gabrielle vient me dire elle-même de partir, alors je partirai." Une pause. "Et je te garantis que tu ne me reverras plus jamais."

 

Il l'avait dévisagée un long moment, puis s'était mis à rire. "C'est tout ? Très bien. Marché conclu. Maintenant, fiche le camp de chez moi."

 

Gabrielle ricana. "Ça ne risque pas d'arriver de si tôt." Elle sourit à Xena. "A moins que tu ne m'emmènes avec toi." Elle choisit d'ignorer Lila, parce qu'elle sentait que Xena était plus troublée que ce qu'elle voulait bien montrer. Il y avait une lueur triste dans ses yeux bleus couleur cristal et cela rendait Gabrielle mal à l'aise. Qu'est-ce qu'il a bien pu dire qui… oh… Perdicus. Bien sûr. J'oublie qu'elle se rend responsable de ce qui est arrivé. Et donc, sachant que sa sœur les regardait avec une fascination malaisée, elle laissa sa main glisser sur l'avant-bras de Xena jusqu'à toucher celle de la guerrière, puis elle croisa son regard avec intensité. "Jamais." Un mot. Une promesse. Et elle en fut récompensée lorsque ce regard hanté disparu lentement, pour être remplacé par une douce chaleur.

 

Relâchant la main de Xena, elle lui répéta ce que lui avait expliqué Lila. "Alors…" finit-elle, levant les mains hors de l'eau, et ignorant le regard furibond de sa sœur. De ce simple geste, elle déposait le problème entre les mains de Xena, et savait que la guerrière utiliserait toute son expérience pour trouver la solution. Ah… les sourcils qui se fronçaient déjà, la tête sombre légèrement penchée, l'expression pensive de son regard aiguisé.

 

"Lila", fit Gabrielle, se tournant vers sa sœur, qui s'était réfugiée à l'autre bout de la baignoire, furieuse.

 

Xena lui donna une petite tape sur l'épaule. "Je vais aller m'installer à l'auberge, avant que ton père ne s'aperçoive que je n'ai pas vraiment filé." Elle fixa le barde d'un regard. "Ça va aller ?"

 

Gabrielle acquiesça. "Oui, plus ou moins. Va dormir un peu", ajouta-t-elle, poussant un peu la guerrière.

 

"Toi aussi", fit Xena en ricanant un peu. "Et sors de là avant que tu ne fondes." Elle leva brusquement les yeux lorsque Lila se leva et sortit de l'eau avec des mouvements secs. C'est alors que son pied glissa sur une flaque d'eau sur le sol et qu'elle tomba à la renverse, sa tête menaçant de heurter voilement le rebord de la baignoire.

 

Xena réagit de façon purement instinctive. Elle se lança en avant et attrapa les épaules de la jeune fille, arrêtant net sa chute. Puis elle la saisit fermement et la souleva, la replaça sur ses pieds. "Fais attention", dit-elle gentiment, tout en tendant à une Lila choquée une serviette en lin. La jeune fille croisa le regard de Xena, tout près d'elle.

 

"Merci", fit-elle, lorsqu'elle parvint à arracher ses yeux de ceux de Xena. Elle s'enroula rapidement dans la serviette en lin et jeta un œil vers Gabrielle qui soupira, puis se leva et sortit de la baignoire, acceptant la serviette que lui tendait Xena.

 

"A plus tard", fit la guerrière, leur disant au revoir de la main avant de se glisser dehors, dans les ténèbres.

 

Gabrielle s'essuya consciencieusement puis regarda sa sœur qui affichait une expression étrange. Le barde réfléchit un instant, puis esquissa un sourire et avança jusqu'à Lila, avant de s'appuyer contre le mur près d'elle, les bras croisés sur la poitrine. Elle prit très rapidement une décision, espérant contre toute attente qu'elle ne se trompait pas.

 

Lila leva les yeux et elles se regardèrent un moment. "Merveilleux bleu, pas vrai ?" fit Gabrielle, parvenant à masquer la lueur malicieuse dans ses yeux.

 

Lila devint cramoisie. "Je ne sais pas de quoi tu parles", bredouilla-t-elle, mais elle n'avait plus l'air d'être en colère.

 

En plein dans le mille. Dieux, Gabrielle, tu es douée. "Hmm, hmm." Elle rit doucement. "Ecoute, Lila", fit-elle sérieusement. "On trouvera une solution." Puis elle s'approcha de cette femme avec qui elle avait grandi et qu'elle avait depuis longtemps dépassée. "Je ferai tout ce que je peux pour toi, tu le sais bien." Elle tendit la main pour toucher le bras de Lila où apparaissait une vieille ecchymose presque effacée. "Il n'a pas changé, à ce que je vois." A présent, son visage était sinistre.

 

Lila baissa les yeux puis la regarda à nouveau. "Je suis tombée, en lui apportant son assiette. C'était de ma faute." Ses épaules s'affaissèrent. "Je l'avais mérité."

 

Le même sentiment, tout droit sorti de son enfance, resurgit dans l'esprit de Gabrielle, et la même nausée l'envahit. Arrête. Je ne suis plus cette personne. J'ai passé deux ans à apprendre que je ne suis plus cette personne. "Maman aide un peu ?" Elle connaissait la réponse avant même de poser la question.

 

Lila haussa les épaules. "Elle essaie, tu sais. Elle fait en sorte qu'il soit aussi content que possible." Elle lança à Gabrielle un regard inquiet. "C'est pire depuis quelques temps. Plus de bière, sans doute." Elle baissa les yeux.

 

"Lila, je suis désolée", dit le barde, très doucement, puis elle passa son bras autour d'elle. "Je vais essayer de te sortir de là. J'aurais dû le faire il y a bien longtemps."

 

Lila la regarda d'un air triste. "Il n'y a qu'une seule chose à faire, et…" Ses yeux sombres croisèrent le regard vert de Gabrielle. "Tu ne vas pas le faire." Son regard se posa sur la porte.

 

"Ne la déteste pas", supplia doucement Gabrielle. "Je t'en prie, Lila, ça me fait mal quand tu la détestes."

 

Sa sœur la regarda très longuement. "Je ne te promets rien, Bree. Je ne te promets rien. Mais j'essaierai."

 

Gabrielle acquiesça lentement. "C'est déjà ça", répondit-elle. "Je ferais mieux d'aller lui parler. Pour en finir." Elle resserra la serviette autour d'elle et attrapa ses vêtements.

 

"Fais attention", fit Lila, posant la main sur son bras. "Je t'en prie, Bree… tu sais comment il est."

 

Le barde mordilla un peu sa lèvre, pensive. "Je sais. Je ferai attention."

***********

 

 


 

Comments (0)

You don't have permission to comment on this page.