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Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

 

Ton coeur est ton foyer

Home is where the Heart is

 

Melissa Good

 

Traductrice : Katell

 

************

Partie 3A

********

 

 

 

Xena traversa la cour avec Alain et se dirigea vers l'auberge en riant doucement. Ils s'apprêtaient à entrer lorsqu'elle repéra une silhouette familière sortant de la grange. "Johan !", appela-t-elle, "par ici."

 

"Ah, gamine." Il lui fit signe de la main resserrant sous son bras un gros paquet. "Te voilà." Il vint jusqu'à elle et passa le paquet à Xena. "C'est pour toi, et pour Gabrielle, bien sûr." Il lui adressa un sourire malicieux.

 

Xena lui lança un regard amusé en prenant le paquet. "Maman t'a envoyé nous surveiller ?" Sa voix portait une nuance d'irritation mais elle n'avait pas perdu son sourire. "Je pourrais mal le prendre."

 

Johan fit claquer sa langue. "Ah… elle ne pense pas à mal, tu le sais bien." Il sourit et indiqua la porte d'un mouvement du menton. "Tu y vas ? Et c'est qui, ça ?" avec un regard interrogateur à l'attention du silencieux Alain.

 

"Oh. Pardon", répliqua Xena. "Alain, voici Johan."

 

"Bonsoir", fit le garçon, dans un murmure.

 

"Bonsoir, garçon", répondit le marchand en souriant. "Il y a des gâteaux dans le paquet." Il adressa un regard entendu à la guerrière. "N'oublie pas de partager."

 

Xena leva les yeux au ciel avec une exaspération amusée. "C'est à moi que tu dis ça ? Allez, viens", soupira-t-elle en ouvrant la porte.

 

L'intérieur était chaudement éclairé et plein à craquer. Xena sentit des yeux se poser sur elle dès qu'elle franchit le seuil, mais décida de les ignorer, traversant la pièce pour gagner sa table préférée, dans un coin au fond.

 

Elle repéra Gabrielle assise près de sa mère, une expression intense sur le visage ; une expression qui s'adoucit dès qu'elle releva la tête et croisa les yeux de Xena. Le barde lui sourit, et même Hécuba, qui s'était tournée pour voir ce qui avait causé une telle réaction chez sa fille, esquissa un sourire du bout des lèvres.

 

Ce qui, pensa Xena, amusée, était plutôt agréable, parce que les regards que le reste de la foule lui adressait étaient franchement plutôt… hostiles. Peu concernée, elle fit le tour de la pièce des yeux et rendit les regards les plus désagréables sur le même mode, faisant apparaître un air de menace frémissante à la surface de ses pensées… sachant que cela se verrait dans ses mouvements. Les regards noirs s'estompèrent soudainement, les gens trouvant tout à coup d'autres choses à fixer. Des choses moins dangereuses. Xena sourit et guida sa bande à travers la foule jusqu'à la table vide, avant de choisir la chaise la plus reculée, tout contre le mur.

 

Un serveur approcha prudemment, ayant eu le temps de s'habituer à la présence de Xena au cours des derniers jours. La guerrière leva un sourcil à son attention et secoua la tête. "Est-ce que je porte des armes ? Est-ce que j'ai l'air de vouloir cogner sur quelqu'un ?" gémit-elle en regardant Johan. "Qu'est-ce qu'ils ont tous avec moi ?"

 

Johan s'appuya contre le dossier de sa chaise et la regarda, sérieusement. Elle était assise de façon nonchalante, c'était exact, une botte reposant sur le support de la table et les avant-bras appuyés sur ses genoux. Pas d'armure, mais sa combinaison de cuir était sombre et rehaussait sa silhouette musclée d'une façon qui ne laissait que peu de place à l'imagination. Ses cheveux noirs étaient attachés en arrière, et la lumière des chandelles dessinait des ombres sur ses traits fermes. Et puis il y avait les yeux, qui renvoyaient même la lumière la plus faible en étincelles de feu pâle. "Ben, ma grande", dit-il avec un sourire désabusé, "tu attires l'attention, ça c'est sûr." Il jeta un œil vers le serveur. "Une bière pour moi. Et pour la dame." Il désigna Xena d'un mouvement du menton, ce qui lui valut un sourcil levé de la part de la guerrière. "Le plat du jour, c'est quoi ?"

 

Le serveur regarda nerveusement Xena, puis ses yeux se posèrent à nouveau sur Johan. "Le ragoût du jour."

 

Johan jeta un œil vers Xena qui lui adressa un haussement d'épaule indifférent. "Mets-nous en trois", dit-elle. "Et une petite bière pour lui", fit-elle en désignant Alain qui s'était assis discrètement et regardait autour de lui avec des yeux brillants.

 

"Bon", fit Johan, la voix douce, tandis que le serveur s'éloignait. "Tu vas me dire ce qui s'est passé ? Ou est-ce qu'il va falloir que je retourne auprès de Cyrène les mains vides ?" Il tendit la main et la posa sur le poignet de Xena. "J'ai vu les marques sur son visage."

 

Xena inspira profondément et lui raconta toute l'histoire, et vit la colère envahir son regard, tout comme elle l'avait fait dans le sien. Elle était consciente de la présence d'Alain, qui écoutait intensément, et dont les yeux s'agrandirent lorsqu'il entendit ce que son père n'avait osé que murmurer aux voisins.

 

"Salopard", cracha Johan, lorsqu'elle eut fini. "Lui faire du mal, à elle… dieux, Xena !"

 

Xena secoua la tête et lui toucha la main pour le faire taire lorsqu'elle aperçut Gabrielle qui se dirigeait vers eux. La guerrière sourit en voyant le barde s'approcher et puis appuyer ses deux mains sur la table. "Bonsoir, Johan… Alain…" dit-elle pour leur souhaiter la bienvenue. "Salut", ajouta-t-elle, croisant le regard de Xena ; où elle se perdit un long moment qui la remplit d'une chaleur irrésistible.

 

"Jolie tunique", fit Xena d'une voix traînante, laissant un sourire appréciatif se dessiner sur ses lèvres. "J'ai toujours aimé cette couleur."

 

Le barde portait une tunique en soie vert pâle qui offrait un joli contraste avec ses cheveux blond-roux, et qui était presque de la même couleur que ses yeux. Et qu'un collier en argent portant une pierre unique. "Merci", répondit-elle joyeusement. "Je crois qu'il est temps de commencer. Est-ce que…" elle adressa à Xena un gentil sourire, "… tu as des préférences ?"

 

Xena ricana un peu. Lui demander de ne pas en raconter une sur moi ne servira à rien, pas vrai ? Nan. "Je les aime toutes, Gabrielle. Tu le sais bien."

 

Le barde sourit. "Je sais." Et elle observa les yeux bleus de l'autre côté de la table. "Souhaite-moi bonne chance", fit-elle en plaisantant et son regard se trouva soudain capturé par celui de Xena, qui l'attirait vers leur lien avec une force presque physique.

 

"Tu n'as pas besoin de chance, mon barde", fut la douce réponse qui remplit ses oreilles et devint, pendant un court instant, le seul son qu'elle entendit. "Tu es trop douée. Allez, va leur montrer."

 

Gabrielle hocha la tête, lui offrit un petit sourire, puis tourna les talons et se dirigea vers l'avant de la pièce, préparant déjà les histoires avec lesquelles elle allait commencer, pour briser la glace dans la salle afin que ses contes les plus intenses aient plus d'impact.

 

Elle se lança avec une histoire drôle et légère sur les flèches de Cupidon devenues folles, ce qui captura leur attention, et l'humour du conte fit disparaître leur façade de désapprobation, alors qu'ils commençaient à progressivement l'accepter. Il faut qu'ils oublient qui je suis. Je suis juste un barde… je ne viens pas de Potadeia…

 

L'histoire classique d'Hélène de Troie après ça… en laissant de côté son point de vue personnel, pensa-t-elle, amusée. A présent, ils commençaient à réellement écouter l'histoire, y prêtant plus attention qu'au barde. Parfait. Un coup d'œil rapide vers le fond de la salle, où elle fut accueillie par un sourire. Concentre-toi sur ton histoire, Gabrielle… Mais son visage ne put s'empêcher de rendre le sourire.

 

Xena laissa son regard errer sur la salle, embrassant les expressions captivées des villageois qui donnaient toute leur attention au barde. Elle regarda l'hostilité disparaître de leurs visages et leurs traits se relaxer à mesure que Gabrielle tissait ses contes autour d'eux. Et, de temps en temps, le barde lui rendait son regard, juste un instant, un rapide échange de chaleur entre elles.

 

Elle se laissa absorber dans les contes, même lorsque le suivant parla d'elle… à peine consciente des têtes qui se tournaient vers elle, et des regards intéressés et pas si hostiles que ça. Parfois, pensa-t-elle, amusée, je l'écoute raconter ces histoires, et c'est vraiment comme si elle parlait de quelqu'un d'autre… certains trucs qu'elle raconte… je n'ai pas pu vraiment faire ça… non ? Ça a l'air si impossible.

 

Gabrielle termina cette histoire, puis but une longue gorgée d'eau, étudiant son public. Ils étaient à présent totalement captivés, se tournant et chuchotant entre eux tandis qu'elle reprenait son souffle, et lançant des coups d'œil vers le fond de la salle où Xena se tenait, appuyée contre le mur, sirotant sa bière et observant la foule d'un regard voilé.

 

Encore une, décida Gabrielle, puisque celle qu'elle avait en tête était plutôt longue. Elle inspira profondément et se lança dans une histoire parlant d'une reine amazone qui avait essayé d'amener la paix dans la nation, contre une sévère opposition. Après les premières minutes, elle osa jeter un œil vers la table du fond et croisa les yeux bleus stupéfaits et le demi-sourire qui l'y attendait. Je t'ai eu,pensa-t-elle, amusée, tout en continuant son récit. Ohh… je t'ai bien eue.

 

Xena écoutait, son sourire grandissant, alors que Gabrielle tissait le récit compliqué autour de son auditoire, ne laissant jamais deviner qu'elle était en fait la reine amazone qu'ils apprenaient à connaître. Seule la guerrière et Johan connaissaient la vérité, puisque ce dernier avait entendu l'histoire originale à la table de Cyrène à Amphipolis. Il toucha le bras de Xena et leurs yeux se croisèrent lorsqu'elle se tourna vers lui. Elle acquiesça, puis secoua la tête.

 

Et les spectateurs devinrent de plus en plus captivés, à mesure que le danger augmentait, jusqu'à ce que le barde les tienne prisonniers de ses mots et ne les laissent dans une clairière battue par la pluie, et avec la détente d'une arbalète se relâchant vers un cœur sans défense mais plein de bravoure.

 

Même Xena, qui, pour d'excellentes raisons, connaissait la fin de l'histoire, se surprit à retenir son souffle. C'est idiot, Xena. Tu sais bien ce qui s'est passé. Evidemment… puisque c'est toi qui as attrapé cette maudite flèche.

 

Et lorsque Gabrielle continua, et raconta l'intervention de dernière minute, tout le monde dans la salle se tourna et regarda Xena pendant un long et immobile moment.

 

"Comment tu as fait ça ?" chuchota doucement Alain, tirant sur sa main. "C'est vrai, hein ?"

 

Xena arracha ses yeux de ceux de Gabrielle et pencha la tête vers Alain. "Oui. C'est vrai."

 

"Eh ben", souffla-t-il, se tournant à nouveau vers Gabrielle.

 

Elle termina son histoire, et à présent elle avait conquis la foule qui l'applaudit dès qu'elle eut fini. Gabrielle passa quelques minutes à aller d'un endroit à un autre dans la salle, parlant aux gens, répondant à des questions sur les histoires.

 

Hécuba lui adressa un sourire serré mais fier lorsqu'elle vint se tenir près de la table à laquelle était assise sa mère. "Ces histoires étaient très jolies, Gabrielle", fit-elle. "Et tu as une façon tout à fait merveilleuse de les raconter."

 

Le barde sourit et s'agenouilla près de la table. "Merci. Je m'entraîne beaucoup." Ses yeux brillaient doucement. "Et j'ai une amie qui ne manque jamais de m'inspirer, là-bas." Ses yeux glissèrent et allèrent croiser ceux de Xena ; son sourire s'agrandit, et elle se tourna à nouveau vers sa mère.

 

"Cette dernière histoire…" fit Hécuba, baissant la voix, "Tu y étais vraiment ? Tu as vu tout ce qui s'est passé ?"

 

Gabrielle essaya de toutes ses forces, mais ne parvint pas à repousser le sourire qui se dessina sur son visage. "Euh… oui. On peut dire ça."

 

Hécuba était sur le point de lui poser d'autres questions lorsqu'un mouvement attira leur attention à toutes les deux et elles se tournèrent pour voir Lennat et Lila entrer dans l'auberge, l'air tout excité. "Hmm…" fit Gabrielle, amusée. "Je me demande ce qui leur arrive…"

 

Xena observait tout cela depuis l'autre côté de la pièce, d'où elle vit Lila s'avancer vers la table où se trouvaient sa mère et sa sœur. Lennat la suivait, un grand sourire sur les lèvres. Ahh… la guerrière ricana. Voilà ma récompense pour toutes ces manœuvres ennuyeuses. Elle fixa son regard sur Gabrielle et attendit.

 

Elle vit les joues colorées de Lila et les regards qu'elle lançait à Lennat, qui vint s'asseoir à la table et donna quelques explications timides, tout en bougeant les mains pour illustrer son propos. Lila posa la tête sur son épaule et le regarda avec adoration. Puis il tendit la main, saisit la sienne et la regarda dans les yeux, avant de dire quelque chose qui la fit rougir.

 

Hécuba saisit son visage entre ses mains, ravie. Et Gabrielle se leva, d'abord pour aller étreindre Lila, puis elle posa ses mains sur la table et tourna la tête, croisant le regard patient de Xena.

 

La guerrière sentit un sourire se dessiner sur son visage, incontrôlable, tandis qu'elle absorbait le regard de gratitude adorée que lui adressaient les yeux vert brume du barde. Elle se sentit parcourue d'une sensation de chaleur fort agréable. Ça en avait valu la peine… Ce regard dans ses yeux… je ferais… dieux… n'importe quoi pour voir ça. Pour elle. Et elle examina cette pensée inattendue avec attention, et comprit que c'était là la vérité. Dieux… on dit qu'on tombe amoureux… tu parles d'une chute que j'ai faite. Et elle rit d'elle-même.

 

Elle regarda Gabrielle serrer Lila dans ses bras à nouveau, puis elle dit quelques mots et se retourna, avant de venir jusqu'à la table de Xena, écartant les mains impatientes qui voulaient ralentir sa progression. Jusqu'à ce qu'elle atteigne la table. "On dirait qu'on s'est bien occupé, ce soir", commenta-t-elle, ne quittant pas Xena des yeux. "Lennat et Tectdus viennent de signer un contrat d'apprentissage, et il a demandé à Lila de l'épouser."

 

"Eh bien, voilà de bonnes nouvelles", fit Xena d'une voix traînante, adressant au barde un sourire paresseux. "Elle a dit oui ?"

 

Gabrielle se contenta de sourire.

 

Johan se leva et tendit la main au-dessus de la table vers Alain. "Allez, viens, mon garçon, allons chercher une autre bière, ok ?"

 

"OK", répondit joyeusement Alain, ses yeux allant rapidement de Gabrielle à Xena. "J'ai soif." Il se leva, prenant la main de Johan, et le suivit à l'autre bout de la salle où un petit groupe de villageois se tenait, discutant.

 

"Il est subtil", fit Gabrielle en souriant. Elle fit le tour de la table et vint s'accroupir près de la chaise de Xena, posant la main sur la cuisse de la guerrière. Un instant, elle observa le visage de sa compagne en silence. Puis… "Merci", dit-elle doucement.

 

Xena leva la main qu'elle avait posée sur le bras de la chaise et caressa du bout des doigts la joue de Gabrielle. "Je suis contente que ça se soit bien passé." C'était la réponse désabusée habituelle. "Je n'ai pas fait grand-chose", ajouta-t-elle en haussant légèrement les épaules.

 

"Non", fit Gabrielle, levant vers elle des yeux intenses. "Non… ne dis pas ça… Xena… tu viens de leur changer la vie… et ça veut dire beaucoup pour eux." Elle s'interrompit, leva la main et enlaça ses doigts avec ceux de Xena. "Et encore plus pour moi."

 

Leurs yeux se croisèrent et pendant un instant, la salle disparut autour d'elle, les laissant seules. "Je ne sais pas comment je vais pouvoir te remercier pour ça", fit Gabrielle, plaisantant à moitié, puis elle se tut lorsque les doigts de Xena effleurèrent ses lèvres pour la faire taire.

 

"Oh non, mon barde…" La voix de Xena s'adoucit et devint plus grave. "De mon plein gré, tu le sais bien. Entre toi et moi, il n'y a pas de dette ni de remerciement, pas aujourd'hui, ni jamais."

 

Gabrielle ferma les yeux et sourit, laissant ses lèvres effleurer doucement les doigts de la guerrière. "Je sais."

 

Xena expira. "Très jolies histoires, au fait. Surtout la dernière." Ses yeux brillaient. "C'était une surprise… je ne savais pas que tu l'avais terminée."

 

"Je me suis servie de ton idée… tu crois que quelqu'un a compris ?" demanda le barde avec un petit rire. "Ça a bien marché… tu as vu leurs têtes quand je leur ai raconté le coup de la flèche ?"

 

"Hmm… ouais", fit Xena avec un sourire désabusé. "J'ai vu leurs têtes, parce qu'ils se sont tous tournés vers moi pour regarder." Elle serra doucement les doigts encore enlacés aux siens. "Bien joué, Gabrielle. Je crois que tu les as vraiment touchés."

 

Gabrielle hocha un peu la tête. "Ouais… je crois que oui… ça m'a vraiment fait du bien." Sa voix se brisa un peu et elle s'éclaircit la gorge en grimaçant. "Je crois bien que je vais le payer… aïe. D'habitude, j'essaie de me servir de ma respiration quand je dois parler longtemps comme ça, mais…" Elle grimaça à nouveau, la main posée sur ses côtes. "C'est encore un peu douloureux."

 

"Oh... je crois pouvoir te préparer quelque chose pour ça", fit Xena en riant. "Tu avais bien aimé cette mixture à base de menthe et de miel l'autre jour, si je me souviens bien." Et plus sérieusement, elle ajouta : "Et je mettrai un autre bandage sur tes côtes." Elle posa une main chaude sur le côté du barde.

 

"Mmm..." acquiesça Gabrielle. "OK… ça roule. Je vais aller parler un peu à ma mère et Lila… d'ailleurs, je crois que Lila voulait te parler…" Ses yeux étincelèrent. "Tu promets de ne pas faire la grimace si elle t'embrasse ?"

 

Pour toute réponse, un sourcil levé. "Je verrai ce que je peux faire." Le ton était gentiment moqueur, mais elle se leva, soulevant Gabrielle du même coup, puisque leurs mains étaient toujours liées. "Allez, viens."

 

Elles rejoignirent la famille de Gabrielle, Xena héritant de regards inquiets mais pas aussi hostiles qu'auparavant. C'était déjà mieux,pensa-t-elle, posant nonchalamment son avant-bras sur l'épaule de Gabrielle alors qu'elles s'arrêtaient à la table. "Il paraît que je dois te féliciter", fit-elle d'une voix traînante, adressant un petit sourire à Lila.

 

La jeune fille brune lui sourit sincèrement. Lila avait observé Gabrielle du coin de l'œil depuis que sa sœur était partie au fond de la salle… après qu'elle lui ait appris la très bonne nouvelle et vu le regard que Gabrielle avait adressé à la guerrière. Elle avait trouvé un moyen… c'était bien ce que sa sœur avait dit, non ?

 

Lila secoua la tête en pensées. Gabrielle n'avait jamais eu le moindre doute… et voilà qu'elle, Lila, se retrouvait fiancée à Lennat, et qu'il allait devenir forgeron. C'était magique… pensa-t-elle, amusée… exactement comme l'avait dit Lennat lorsqu'il était entré dans leur maison et, gravement, courtoisement, s'était mis à genoux et avait humblement demandé sa main à son père. Si romantique… soupira Lila.

 

Son père avait brusquement refusé de lui donner une dot… et la réponse de Lennat avait été… parfaite ! Rien qu'elle, monsieur, avait-il dit, ce qui était sans valeur, et Hérodotus avait lentement acquiescé. Elle n'avait jamais connu de moment plus doux et à présent, elle regardait la personne qui lui avait, par des moyens au-delà de sa compréhension, offert ce cadeau.

 

N'attendant rien en retour, connaissant l'hostilité qui l'entourait, retenue par le bouclier de son regard froid et éloigné qui les toisait tous.

 

Spontanément, Lila fit le tour de la table et serra Xena dans ses bras, espérant tout en le faisant qu'elle n'allait pas se retrouver par terre à l'autre bout de la salle. Elle s'y attendait presque, en fait, elle s'y était préparée… mais Xena, amusée, referma ses longs bras autour d'elle et lui rendit son geste.

 

Ce n'était pas ce à quoi elle s'attendait, pensa Lila plus tard. C'était comme si on était un enfant et que quelqu'un de beaucoup plus grand et de beaucoup plus fort vous tenait dans ses bras. C'était ce genre de sensation, parcourant son être tout entier dans une poussée de chaleur, jusqu'à ce que la guerrière lui donne une petite tape et la relâche. "Je sais ce que tu as fait", parvint à murmurer Lila avant de reculer. "Je ne l'oublierai jamais."

 

Ce qui lui valu un demi-sourire. "Pas de problème", répondit Xena, échangeant un bref regard entendu avec Gabrielle. "A tout de suite", ajouta-t-elle, leur adressant un petit signe de tête à tous, avant de se diriger vers les escaliers, se glissant au milieu de la foule avec une facilité fluide et montant les marches dans un éclair de cuir sombre et un mouvement régulier d'épaules bien musclées. Sachant, bien sûr, que toute la salle avait les yeux rivés sur elle.

 

Ce n'était rien de vraiment clair, pensa Lila, amusée, qui marquait l'attachement qui existait entre sa sœur et Xena. C'était les petites choses… la façon dont Gabrielle la suivait des yeux presque inconsciemment, et le petit sourire qui se dessinait sur ses lèvres lorsque leurs regards se croisaient, et les effleurements distraits entre elles qui semblaient totalement normaux entre deux proches amies, jusqu'à ce qu'on remarque que Xena ne laissait personne d'autre, quelle que soit l'attitude de la personne, prendre le même genre de liberté avec elle. Ou jusqu'à ce qu'on remarque qu'elles se tenaient vraiment très près l'une de l'autre, ce qui contrastait très nettement avec la distance qu'elles maintenaient entre elles et les autres. Il n'y avait pas de barrière entre elles, et Lila, ayant reconnu ce trait dernièrement dans sa relation avec Lennat, sourit intérieurement. Dieux… je n'arrive pas à y croire… elles sont amoureuses l'une de l'autre, tout comme nous. Elle regarda le visage de Gabrielle, voyant la douce lueur qui brillait dans ses yeux vert brume. Zeus… c'est à ça que je ressemble quand je regarde Lennat ?

 

"Lila, on a des préparatifs à faire", remarqua Hécuba, visiblement ravie. Elle leva les yeux vers Gabrielle qui était appuyée sur la table. "Gabrielle… tu restes pour le mariage… ?" Une lueur d'espoir illumina son regard fatigué, un regard contre lequel sa fille n'avait aucune défense.

 

"Il faut que tu restes…" Lila lui saisit le bras. "Je veux que tu sois ma demoiselle d'honneur… je t'en prie, Gabrielle, dis oui."

 

Le barde les regarda avec un petit sourire. Et depuis quand on me demande quelque chose poliment au lieu de m'ordonner de faire ci ou ça ? Sentant que ce respect soudain était un peu déplacé, de la part de personnes desquelles elle attendait si peu. "Bien sûr que je vais rester, Lila. Je ne vais quand même pas manquer ton mariage !"

 

Hécuba se leva et tapota doucement le bras de Gabrielle. "J'ai vraiment aimé tes histoires, ma chérie." Ses yeux observèrent le visage du barde avec une perspicacité soudaine. "Tu as l'air fatigué… et ça ne m'étonne pas, après une telle performance. Va te reposer."

 

"Promis", fit Gabrielle. "A demain", ajouta-t-elle, les serrant tour à tour dans ses bras, avant de regagner sa chambre.

 

Xena était en train de verser de l'eau chaude sur des herbes parfumées lorsqu'elle ouvrit la porte, ce qui libéra une odeur merveilleuse dans toute la chambre, une odeur qu'elle respira avec un soupir ravi.

 

"Dieux que ça sent bon", commenta le barde. Elle attendit que la guerrière ait terminé de verser l'eau et ait reposé la bouilloire avant de se glisser près d'elle et de l'entourer de ses bras, la serrant de toutes ses forces.

 

"Hé", fit Xena en riant. "C'est pour quoi, ça ?"

 

"Rien… tout…" sa voix se brisa. "… juste parce que."

 

"Oh", fit Xena doucement, l'attirant encore plus près, jusqu'à ce qu'elles puissent se sentir tout le long de leur corps. "Ça va mieux ?"

 

"Hmm, hmm", fut l'humble réponse. "Si on pouvait trouver le moyen de mettre cette sensation en bouteille… on pourrait prendre notre retraite et vivre dans un palais, tu sais…"

 

Xena adressa au barde un regard affectueux. "Tous les dinars du monde ne peuvent acheter ça, Gabrielle." Oh… et ça les vaut bien."Mais il faut que tu avales ça ou tu vas le regretter demain."

 

A contrecœur, le barde relâcha son étreinte et alla s'asseoir à la table, serrant doucement dans ses mains la tasse que Xena avait préparée. "Mm… ok. Au moins, c'est bon." Elle lança à Xena un sourire en coin. "Et à ce propos, j'ai remarqué que tu n'avais pas touché à ton dîner", fit-elle avec un regard accusateur.

 

"Nan", confirma la guerrière. "J'ai en même donné un bout à Arès…" Elle fit un geste vers le chiot endormi. "Ça lui a bien plu, mais moi, j'ai goûté et…" elle fit une grimace. "Pas très bon." Puis un sourire vint se dessiner sur ses lèvres. "Toutefois…"

 

"Oui ?" fit Gabrielle, penchant la tête sur le côté.

 

Un geste bref vers un paquet posé sur la table. "Ça devrait être beaucoup plus comestible."

 

Avec un sourire, le barde tira le paquet jusqu'à elle, défit tranquillement l'emballage, ricanant en découvrant le contenu. "Oh, oui", approuva-t-elle, retirant une grosse pâtisserie qu'elle tendit à Xena. "Ton dîner. Mange." Puis elle en prit une pour elle et se réinstalla dans sa chaise avec une expression satisfaite.

 

"Hmm…" marmonna Xena la bouche pleine. Oh dieux… que c'est bon… il vaut mieux cacher le restant de ce paquet ou je suis morte… "C'est sûr que c'est meilleur que le ragoût du jour."

 

"Hmm, hmm", acquiesça Gabrielle tout en alternant pâtisserie et thé. "Tiens." Elle passa une seconde pâtisserie à Xena et en prit une autre pour elle. Elle lança un regard agacé à la guerrière lorsque celle-ci hésita. "Ecoute, il se trouve que je sais que tu n'as mangé une bouchée d'un petit pâté en croûte à midi et que la majeure partie de ton petit déjeuner est allée nourrir la petite machine sur pattes là-bas." Elle remarqua le petit sourire sur le visage de Xena, ce qui voulait dire en général qu'elle venait de gagner la bataille. "Et si je ne prends pas soin de toi, qui le fera, hein ?"

 

Xena se contenta de sourire et mastiqua le second gâteau. Elle a raison. En plus, je ne peux pas résister à ces machins-là et elle le sait très bien. Elle s'essuya les doigts après avoir fini puis leva un sourcil à l'attention du barde. "Et si on regardait un peu ces côtes, OK ?"

 

Gabrielle acquiesça et se leva, retirant sa tunique, la posant sur la chaise avant d'enfiler une chemise de nuit plus ample qu'elle laissa déboutonnée ; puis elle se tourna vers Xena qui venait de retirer un petit pot de sa trousse et l'ouvrit.

 

"Bon sang", soupira la guerrière, frottant tout doucement l'huile sur les hématomes qui marquaient très nettement la peau bronzée du barde. "Ça doit faire mal."

 

Gabrielle lui sourit. "Pas quand tu fais ça", fit-elle, ce qui lui valut un sourcil paresseusement levé en réponse.

 

"Oh vraiment ?" fit Xena, amusée.

 

"Ouais, vraiment", répondit le barde, s'approchant un peu et laissant ses mains glisser doucement sur la silhouette couverte de cuir de Xena.

 

"Tien donc…" mélangé à un rire grave que Gabrielle sentit au bout de ses doigts.

 

"Ouais, tu sais…" Son marmonnement de réponse fut efficacement interrompu par les lèvres de Xena. "Pas grave…" ajouta-t-elle, le souffle un peu court, avant d'en redemander. Elle se sentit soulevée aussi facilement qu'une enfant, puis se retrouva blottie tout contre Xena sur l'édredon doux qui recouvrait le lit, laissant ses mains explorer librement.

 

 

 

Gabrielle se laissa lentement glisser vers l'éveil, passant du sommeil à la chaude sécurité des bras de Xena avec un plaisir infini. Mmm… ça ne m'étonne pas que ça soit si facile de se réveiller, ces temps-ci. Qui s'en plaindrait ? Pas moi… non, non… nan… il est très content, le barde.

Elle garda les yeux fermés et se laissa flotter quelques instant. Alors… Lila va se marier, pensa-t-elle, amusée. C'est super… je me demande combien de temps je vais devoir attendre avant de devenir tante ? Se demanda-t-elle. Sans doute pas très longtemps… Lila a toujours voulu des enfants. Puis sa bonne humeur s'évanouit. Bon sang… je veux vraiment rester pour son mariage… mais… je ne sais pas si je pourrai… il va falloir que je retourne dans cette maison et que je le revois… et je ne crois pas que je…"

 

Un frisson involontaire la parcourut et elle sentit immédiatement les bras de Xena se resserrer autour d'elle, les rapprochant un peu plus. Gabrielle ouvrit les yeux et croisa le regard tout à fait éveillé de la guerrière. "Hé…", dit-elle, clignant des yeux. "Ça fait longtemps que tu es réveillée ?" demanda-t-elle avec un sourire taquin.

 

Xena hocha la tête et sourit elle aussi. "Ouais", ricana-t-elle. "Réveillée et profitant d'un moment de pure paresse, à vrai dire."

 

"Oh", fit le barde. "Tu aurais pu me réveiller… ça ne m'aurait pas dérangée."

 

Xena haussa les épaules. "Nan… tu dormais trop bien… mais c'était quoi ce frisson ? Je sais que tu étais réveillée, là." Ses yeux la fixèrent et examinèrent le visage de Gabrielle avec intensité.

 

Gabrielle baissa les yeux et fixa la gorge de Xena, laissant ses doigts glisser le long de l'os, d'une épaule à l'autre. "J'ai promis à Lila de rester pour le mariage", soupira-t-elle. Et elle vit les muscles de chaque côté du cou de Xena bouger un peu alors qu'elle haussait les épaules.

 

"Ça me paraît évident, Gabrielle. Quel est le problème ?" La voix de Xena bourdonna dans ses oreilles.

 

Le barde se tût un long moment, essayant de trouver le moyen d'exprimer ce qu'elle ressentait. Enfin, elle jeta un coup d'œil vers Xena, qui attendait patiemment. "Dès que je pense… à lui... le voir… lui parler… Xena, je…" Elle avala. "Je ne peux pas." Elle enfouit son visage dans l'épaule de Xena. "J'ai cette sensation atroce… ça me soulève le cœur rien que d'y penser."

 

Xena expira lentement, fronçant les sourcils. "Est-ce que… est-ce que tu as peur qu'il te fasse à nouveau du mal ?" demanda-t-elle, hésitant, pour tâter le terrain.

 

Un long silence. "Je… non… je ne sais pas de quoi j'ai peur, Xena. J'ai peur, c'est tout", chuchota-t-elle enfin. "Je veux juste me cacher… qu'il ne me trouve pas."

 

"Tu lui as déjà tenu tête", fit Xena, lentement, son esprit travaillant pourtant très vite.

 

"Oui, je sais…" répondit le barde. "Mais maintenant… je ressens ce que je ressentais quand j'étais petite… peut-être que quand il a… je ne sais pas… ça m'a rappelé tout ça… Xena, j'ai promis à Lila que je serais sa demoiselle d'honneur… et je ne sais pas si j'en suis capable." Elle commença à trembler. "Dddésolée…" bafouilla-t-elle, "Je ne voulais pas t'embêter avec tout ça. Tu as déjà déplacé des montagnes…"

 

Xena caressa doucement ses cheveux. "Gabrielle, tu ne m'embêtes pas. Si tu as un problème… ça devient mon problème. Compris ?"

 

"Oui", fut la réponse étouffée et à peine audible.

 

"Est-ce que tu veux que je vienne avec toi… dans la maison ?" demanda la guerrière.

 

Gabrielle leva la tête et la secoua. "Non… non… Xena… il te déteste… il…"

 

Xena saisit le visage du barde dans ses mains et la regarda droit dans les yeux. "Il ferait quoi, Gabrielle ? Qu'est-ce qu'il pourrait bien me faire, à moi ?" demanda-t-elle, la fixant intensément. "A moi, Gabrielle… tu te souviens de qui je suis, pas vrai ?"

 

Des yeux vert brume clignèrent un peu, confus. Ses cauchemars d'enfant se mêlaient à sa logique d'adulte alors que le souvenir d'une grande et sombre silhouette la surplombant envahissait son esprit. "Il est… si fort… et… il te… il te ferait du mal… je ne peux pas…"

 

"Non." La voix de Xena était extrêmement intense. "Gabrielle… écoute-moi", répéta-t-elle. "Tu n'étais qu'une enfant… tu le vois encore à travers les yeux d'une enfant." Une pause. "Il ne peut pas me faire du mal… tu le sais bien. Tu me connais." Lentement, la logique revint dans les yeux du barde. "Et je ne le laisserai pas… je ne le laisserai JAMAIS te faire du mal. Tu m'entends ?"

 

Pendant un instant, les yeux qui la regardaient furent ceux d'une petite fille effrayée, puis Gabrielle inspira profondément, ferma puis rouvrit les paupières, visiblement avec grand effort, puis elle avala difficilement. "Je t'entends…" répondit-elle doucement. "Dieux. Pardon…."

 

"Arrête de t'excuser", répondit Xena. "Ce n'est pas de ta faute, Gabrielle." Elle sentit son cœur reprendre son rythme habituel après l'accélération douloureuse qu'elle venait de ressentir. "Tout ira bien. Je te le promets."

 

Gabrielle laissa échapper un long soupir. "Merci", répondit-elle, posa la tête sur l'épaule de Xena et enroulant à nouveau son bras autour de la guerrière. "Je suis désolée… oups… je veux dire… je ne t'ai même pas demandé si tu voulais rester pour le mariage…" elle hésita, puis continua. "Tu peux… partir… si tu veux…"

 

Xena ricana. "Et manquer une super fête où personne ne peut me sentir ? Jamais de la vie, mon barde. Tu vas être obligée de me supporter, il va falloir t'y habituer."

 

Le barde la regarda et un petit sourire se dessina sur ses lèvres. "Ça te dit, un pique-nique ?"

 

Xena la regarda, surprise. "Pardon ?"

 

Gabrielle baissa les yeux, puis les releva. "J'aimerais… aller à la clairière où les mercenaires nous avaient trouvées… et me souvenir de ce jour. Et j'aimerais le faire avec toi. Alors… ça te dit, un pique-nique ?"

 

"Oh", fit Xena. "Bien sûr… ça me dit beaucoup."

 

Elles se regardèrent et sourirent. "Il vaudrait mieux bouger…" soupira Xena. "Au fait, c'est pour quand, ce mariage ?"

 

"Ohhh…", réfléchit le barde, fronçant les sourcils. "Oh… dans trois jours. A la lune de la moisson."

 

"Quel bon augure", ricana Xena. "Alors comme ça, Lila veut des enfants, hein ?"

 

 

Lila passa les voir après qu'elles se soient habillées et qu'elles aient mangé un morceau, que Xena s'était procuré auprès d'une échoppe du marché après avoir examiné ce qui se préparait à la cuisine. "Ne va pas là-dedans", conseilla-t-elle au barde, en revenant dans la chambre par la fenêtre, des petits pâtés en croûte à la main, les mêmes que ceux qu'elle avait mangés la veille.

 

"Et toi ?" demanda Gabrielle, tapant du pied et fronçant les sourcils.

 

"J'ai déjà mangé le mien", répondit Xena en souriant. "Et j'ai rapporté ça pour Arès", ajouta-t-elle en s'asseyant en tailleur par terre avant de donner au chiot impatient des restes de viande crue. "Roo !" s'exclama-t-il et il commença à mastiquer avec enthousiasme.

 

Xena ricana, le regarda manger un moment, puis leva les yeux vers Gabrielle. "Quoi ?" fit-elle, voyant le regard intense sur le visage du barde.

 

"Rien", répondit Gabrielle, s'asseyant à la table et terminant ses pâtés sans autre commentaire, regardant Xena jouer avec Arès.

 

Lila arriva peu de temps après, son visage plus animé qu'à l'accoutumée. "Bonjour !" fit-elle en souriant.

 

Ce qui lui valut des sourires en réponse. "En effet", fit Xena d'une voix traînante, étendue sur le sol, près du chiot.

 

"Assieds-toi", dit Gabrielle en désignant une chaise, puis elle se remit à griffonner sur le parchemin ouvert devant elle. "Comment vont les préparatifs ?"

 

Lila s'assit, puis soupira. "Ça va… papa était livide quand je lui ai dit que je t'avais demandé d'être ma demoiselle d'honneur." Les deux sœurs échangèrent un coup d'œil. "Maman a quand même réussi à le calmer." Son regard se posa sur Xena. "Je n'ai pas eu le courage de lui demander…"

 

La guerrière leva un sourcil. "Ce n'est pas grave…" répondit-elle sérieusement. "Si Gabrielle y va, j'y vais."

 

"Il…" Lila fit une pause et pencha la tête sur le côté, tout en regardant Xena. "Il va piquer une crise, mais en fin de compte, il ne peut pas faire grand-chose, pas vrai… ?" fit-elle, amusée. "Je veux que tu viennes", finit-elle, adressant à la guerrière un regard courageux.

 

Xena la regarda, amusée. Ça, c'est ce que j'appelle du changement… pensa-t-elle. Elle regardait Gabrielle du coin de l'œil, Gabrielle qui s'était tue et s'était momentanément arrêté d'écrire. Xena l'observant, elle réfléchit un instant, puis inspira profondément et continua à écrire. La guerrière sentit une poussée soudaine de sympathie pour elle. "Merci de l'invitation", dit-elle à Lila.

 

Gabrielle essaya d'ignorer ce que disait Lila, de ne pas écouter. Elle inspira et continua à coucher ses pensées sur le papier, l'histoire de leur dernière aventure, à l'aide de mots qui lui servaient à se distancer de sa peur. Alors qu'elle bataillait avec sa description, elle sentit une sensation chaleureuse l'envahir. Elle tourna la tête, et vit les yeux bleus de Xena qui la fixaient, comprenant d'où venait cette sensation. Wow… pensa-t-elle. Ça marche vraiment… Génial.

 

"Bref", disait Lila, "il te faut quelque chose de convenable… et ne me regarde pas comme ça, Bree… c'est un mariage, ok ? De convenable à porter… Maman a dit qu'elle irait avec toi chez la couturière ce matin." Elle fit une pause. "On a encore quelques-unes de tes vieilles robes… mais il va falloir les reprendre", ajouta-t-elle, une lueur malicieuse dans les yeux.

 

Gabrielle soupira un peu. Bon sang… j'ai horreur des séances d'essayage. Elle le sait bien… et je parie que Xena me regarde d'un air suffisant. Elle jeta un coup d'œil discret. Tout juste… "Arrête avec ton petit air suffisant", fit-elle et elle jeta un œil noir à Lila. "C'est bien parce que c'est toi, Lila… je veux que ça soit clair."

 

La jeune fille brune sourit. "Je savais que je pouvais compter sur toi."

 

Le barde sourit soudainement. "Hé…" elle se tourna et lança à Xena un regard diabolique. "Tu pourrais venir avec nous."

 

Les deux sourcils se levèrent en même temps. "Pour que la couturière soit si nerveuse qu'elle te pique à dix endroits différents avec ses aiguilles ?" répondit-elle. "Ce n'est probablement pas une bonne idée."

 

"S'il te plaît ?" fit le barde, penchant légèrement la tête sur le côté. Elle vit le léger mouvement de la bouche de Xena qui signifiait sa proche victoire. "Si tu viens… elle n'osera pas me faire la leçon."

 

Le mouvement se transforma en franc sourire. "Oh, bon, d'accord", soupira Xena. "Allez, viens… allons-y." Elle se leva d'un mouvement fluide, essuya un peu sa tunique et marcha jusqu'à la porte. Gabrielle et Lila échangèrent un coup d'œil, puis la suivirent.

 

Hécuba était… surprise de voir qui les accompagnait dans leur expédition chez la couturière, mais elle ne fit aucun commentaire et eut un petit hochement de tête à l'attention de Xena. "Allons-y", fit-elle. "Lila, il faut que tu t'occupes du…"

 

"Je sais", soupira Lila, puis elle leur fit un signe de la main. "A tout à l'heure."

 

Elles marchèrent en silence pendant quelques minutes, puis Hécuba indiqua le tissu plié sur son bras. "J'en ai choisi deux qui te plaisaient, si je me souviens bien.'

 

Gabrielle regarda les choix en question et soupira intérieurement. Elle n'aimait aucune des deux… mais bon, les autres n'étaient guère mieux. "Ça m'étonne que tu les ai gardées", commenta-t-elle avec un petit rire.

 

"Il ne faut jamais rien jeter", répliqua sa mère. "Nous pensions toujours que…" Elle s'interrompit et jeta à Gabrielle un regard de côté. "J'ai toujours espéré que tu reviendrais", finit-elle, son regard glissant vers l'horizon.

 

Le barde soupira. "Je sais…" répondit-elle et elle sentit des doigts effleurer son dos et la réconforter légèrement. "Vous me manquez, toi et Lila… mais…" Elle sourit doucement à sa mère. "J'aime… vraiment… la vie que je mène…" Et la personne avec qui je la partage. "Et les choses que je vois et que je fais…" Et cela s'adressait tout autant à la silhouette silencieuse marchant tranquillement derrière elle qu'à sa mère. "Je suis très heureuse."

 

Hécuba eut une petite moue et eut un petit sourire désabusé. "Je le vois bien, Gabrielle." Puis son regard les captura toutes les deux. "Il y a beaucoup de choses que je ne comprends pas dans ta vie, mais… ça me réchauffe le cœur de voir quelle joie tu y trouves." Elle inspira profondément. "Nous y voilà", commenta-t-elle, alors qu'elles venaient d'atteindre la porte de la petite maison devant elles. "Tu as une préférence…", fit-elle, montrant le tissu à Gabrielle.

 

Le barde hésita, étudiant les deux couleurs. Puis une voix grave et basse lui chatouilla l'oreille. "La grise", fut le conseil de Xena, trop bas pour que Hécuba puisse entendre.

 

"Mmm… celle-ci, je crois", répondit Gabrielle, choisissant la robe gris foncé plutôt que la lavande. "On devrait avoir moins besoin de la reprendre. Elle était plutôt serrée quand je suis partie." Et elle se souvint de la dernière fois qu'elle l'avait portée… la danse de la moisson, lorsque Agtès l'avait attirée derrière la grande grange, et que Perdicus les avait trouvés. Ils s'étaient battus… Gabrielle fit la grimace en se souvenant des coups que le doux Perdicus avait pris pour elle. Elle n'avait plus porté la robe depuis… mais elle était jolie, à l'époque, et peut-être était-il temps.

 

Hécuba acquiesça. "C'est vrai", dit-elle et elle ouvrit la porte, leur faisant signe de passer devant elle.

 

La couturière, une petite femme agitée aux cheveux roux et aux yeux bleus tristes se mit à parler sans s'arrêter dès leur arrivée, bien qu'elle s'arrêtât quelques secondes et cligna des yeux en voyant Xena, qui la regarda sans broncher, et alla s'asseoir sur un petit banc au fond de la pièce. "Zeus", fit-elle. "Tu es une costaude, toi, pas vrai ?" Ce qui déclencha un rire chez Gabrielle et un reniflement sardonique de la part de la guerrière.

 

Gabrielle en riait encore en passant la robe par-dessus sa tête et en arrangeant les plis autour d'elle, levant un sourcil en considérant l'ensemble.

 

"Tss… tss…" fit la couturière d'un air réprobateur, rassemblant le tissu en trop. "Il va falloir reprendre ici, et ici aussi un peu."

 

Le barde jeta un coup d'œil dénué d'enthousiasme vers le miroir et essaya de penser à autre chose tandis que les deux femmes piquaient et discutaient du tissu, pour enfin l'arranger à leur convenance. Bon… pas si mal, pensa-t-elle, amusée en examinant le résultat dans le miroir. Le gris de la robe offrait un joli contraste avec le blond roux de ses cheveux, au moins, et le décolleté était… ok, mais… Elle soupira et jeta encore un coup d'œil dans le miroir, et cette fois y vit le reflet d'un sourire ravi de Xena, ainsi que la lueur appréciative dans ses yeux bleus étincelants.

 

Et elle sentit une rougeur lui envahir le cou, une rougeur qu'elle ne pouvait absolument pas contrôler. Heureusement, sa mère et la couturière étaient encore trop occupées pour le remarquer. Timidement, elle leva les yeux et croisa le regard de Xena, sentant son humeur s'améliorer en absorbant l'admiration de ce regard. "C'est bon", dit-elle à la couturière qui attendait son verdict. "C'est très joli."

 

Hécuba acquiesça. "Ça ira", fit-elle, puis elle aida sa fille à retirer doucement la robe sans défaire les épingles dont elle était couverte. "Voilà, ce n'était pas si terrible, pas vrai ?" dit-elle, jetant un œil à sa fille qui repassait sa tunique.

 

"Non", répondit Gabrielle avec un petit rire. "Pas si terrible." Ça a totalement changé mon attitude envers cette robe, en tout cas, pensa-t-elle, souriant.

 

"Ça sera très joli." Hécuba se retourna et jeta un coup d'œil vers Xena. "Tu ne trouves pas ?"

 

Un sourire se dessina sur les lèvres de Xena. "Très joli", acquiesça-t-elle, solennellement, avant de se lever et de venir près de Gabrielle, en jetant un coup d'œil amusé à la couturière qui s'empressa de s'ôter de son chemin.

 

Hécuba rejoignit la petite femme à son établi et elles échangèrent quelques murmures, laissant Xena et Gabrielle attendre côte à côte.

 

"Tu sais…" fit Xena d'une voix traînante et basse. "Lila ne va pas être contente du tout."

 

Gabrielle leva les sourcils et se tourna vers sa compagne. "Hein ?" chuchota-t-elle, jetant un coup d'œil rapide vers sa mère.

 

"Ouais… ce n'est pas très gentil de la part de la demoiselle d'honneur d'être plus jolie que la mariée. C'est de très mauvais goût", fit-elle, taquine.

 

"Ouais, c'est ça", fit le barde, lui tapant gentiment le ventre du revers de main. "Arrête un peu, Xena."

 

Xena fit une pause et l'observa un long moment. "C'est toi qui devrais arrêter, Gabrielle. Je ne fais pas de compliments à la légère. Tu es magnifique dans cette robe."

 

Gabrielle inspira, prête à répondre, puis inspira encore, puis finit par fermer la bouche et baissa les yeux vers le sol, avec, elle le savait, un sourire des plus idiots sur les lèvres.

 

Xena ricana et ébouriffa ses cheveux.

 

"Bon, c'est réglé", fit Hécuba avec un soupir, puis elle avança vers elles. "Gabrielle, ça va ?"

 

"Très bien, très bien, merci. Oui", répondit le barde en hochant la tête. "On y va ?"

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