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Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Ton coeur est ton foyer

Home is where the Heart is

 

Melissa Good

 

Traductrice : Katell

 

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Partie 1C

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Une fois à l'intérieur, Xena posa le bâton qu'elle tenait toujours à la main contre le mur et, inquiète, regarda Gabrielle baisser les yeux vers Arès qui lui avait réservé un accueil enthousiaste. Le barde se baissa lentement et ramassa le chiot, le serrant doucement dans ses bras et enfouissant son visage dans sa douce fourrure. "Roo ?" fit-il, mordillant son oreille. "Oh Arès…" fit-elle, dans un murmure. "Tu es si gentil et si doux… comment pourrait-on vouloir te faire du mal ?".

 

Xena sentit son souffle se couper. Bon sang… qu'est-ce que je vais lui dire ? Ce n'est pas… l'un de mes nombreux talents, et je suis plutôt perdue, là. "Gabrielle ?" dit-elle finalement, hésitante. Le barde leva des yeux un peu voilés. "Euh… montre-moi cette éraflure." Elle fourragea dans une sacoche, cherchant sa trousse de guérison, sachant parfaitement que Gabrielle était venue vers elle et se tenait maintenant à ses côtés. Elle leva les yeux vers le barde et essaya de lui adresser un sourire rassurant..

 

"J'aurais dû te le dire", murmura Gabrielle, ses yeux pleins d'angoisse. "J'aurais dû… je voulais le faire… Oh, dieux…" Ses genoux plièrent sous elle et Xena l'attrapa, la serrant contre elle et glissant contre le mur jusqu'à ce qu'elles soient toutes les deux par terre, les bras de la guerrière autour de sa compagne dont le corps était secoué de sanglots incontrôlables et hystériques..

 

Xena ferma les yeux et tint bon. Bon sang… qu'est-ce que je peux faire ? Ok… ok… pas de panique, Xena. Tu risques de faire empirer les choses. Respire, du calme… respire… c'est ça… "Je te tiens", murmura-t-elle, "Gabrielle, tout va bien. Je te tiens.".

 

Les larmes du barde finirent par se tarir, et elle ferma les yeux, reposant en silence dans les bras de Xena. J'ai dû lui ficher une peur bleue. La pensée traversa l'esprit éreinté de Gabrielle. Elle a horreur de ce genre de choses… mais j'en avais besoin… et il n'y avait personne d'autre vers qui me tourner. Ou vers qui je voudrais me tourner, de toute façon. Je n'arrive pas à croire que je lui ai fait ça, à lui. Elle leva les yeux vers le visage de Xena, à moitié éclairé par le soleil de l'après-midi qui traversait la petite fenêtre. "Désolée, tu es toute mouillée", dit-elle, plissant un peu les yeux en entendant à quel point sa voix était rauque..

 

Xena baissa les yeux vers elle et esquissa un petit sourire. "Pas grave", fit-elle, relâcha son étreinte d'une main et fouillant dans sa trousse, qui était tombée par terre lorsqu'elle avait attrapé le barde au vol. Elle tira un morceau de lin et essuya doucement les larmes sur le visage de Gabrielle. "Ça va mieux ?" demanda-t-elle, lui adressant un sourire encore plus grand lorsque le barde hocha la tête..

 

'Oui." Gabrielle s'éclaircit un peu la gorge. "Aïe.".

 

La guerrière sentit une vague de soulagement la traverser. Gabrielle était secouée, c'est vrai… mais ce regard d'horreur distante avait disparu, et elle semblait être de nouveau elle-même. "Attends", dit-elle et elle tendit la main vers la cheminée, posant le pot d'eau sur le feu, puis elle sortit quelques flacons de sa trousse et attrapa une tasse sur le table, par-dessus sa tête noire..

 

Gabrielle la regarda sans bouger, trop fatiguée pour faire ou dire quoique ce soit, alors que Xena assemblait avec efficacité les ingrédients dans la tasse, et versait l'eau chaude dessus. Une odeur agréable et chaude s'éleva de la tasse et fit sourire le barde. "Mmm… tu devrais faire des potions qui sentent aussi bon plus souvent", fit-elle doucement, alors que la guerrière lui passait la tasse avec un sourire. Elle colla son nez juste au-dessus du liquide et laissa l'odeur sucrée et mentholée envahir ses poumons. "Tu es sûre que c'est bon pour ce que j'ai ? Difficile à croire." Elle leva rapidement les yeux vers Xena qui se contenta d'acquiescer. Elle but une gorgée, la laissa envahir sa gorge avec plaisir, puis appuya la tête contre la poitrine de la guerrière. "C'est merveilleux", soupira-t-elle..

 

"Ça te fera du bien", répondit Xena, écartant doucement les cheveux qui lui tombaient dans les yeux. "Et… je me suis dit que tu avais besoin de te sentit mieux à l'intérieur aussi.".

 

Gabrielle sourit intérieurement et avala une grosse gorgée. "Tu as raison", admit-elle. "Et tu as aussi raison à propos de ma tête." Elle s'appuya en arrière contre le bras de Xena, et son expression redevint sérieuse. "Pardon.".

 

Les sourcils de Xena se levèrent. "Pour quoi ?".

 

Le barde ferma les yeux et haussa les épaules. "Pour ça… tout ça. Pour t'avoir traînée ici." Elle ouvrit les yeux et regarda par la fenêtre. "Je sais que tu as horreur de ce genre de choses. J'aurais dû te convaincre d'aller au festival.".

 

"Gabrielle." La voix de Xena, froide et directe, interrompit le barde. "Arrête ça, tout de suite.".

 

Gabrielle s'interrompit, et la regarda, surprise. "Non, vraiment… je crois…".

 

"Arrête", fut la réponse ferme. "Je ne plaisante pas. Il n'y a aucun autre endroit au monde où je voudrais être qu'ici, maintenant." Elle fixa Gabrielle avec intensité. "Tu n'as pas besoin de me demander pardon pour ça. Ce n'est pas de ta faute. Rien de tout ça. Tu n'as rien fait pour provoquer tout cela, tu m'entends ?".

 

"Pourtant, j'ai bien dû faire quelque chose", fut sa réponse sinistre. "J'ai toujours essayé de comprendre ce que j'avais fait… pour ne plus le faire. J'ai arrêté de chercher après un moment." Sa voix se cassa. "Ça arrivait tellement souvent." Elle leva les yeux et vit l'expression angoissée sur le visage de Xena. Elle sentit la colère toute proche, juste sous la surface, une colère qui ne lui était pas destinée, mais qu'elle ressentait en son nom..

 

Ma protectrice…C'était une sensation chaleureuse qui avait commencé au creux de son estomac et qui envahissait maintenant tout son corps. Est-ce qu'elle sait à quel point c'est merveilleux de ressentir cela maintenant ? Non… probablement pas… peut-être que c'est le moment de lui dire… et de lui dire pourquoi cette gamine si têtue l'a suivie comme une puce sur un chien à travers la moitié de la Grèce. "Xena…".

 

"Oui ?" fit-elle, la voix un peu rauque..

 

Gabrielle inspira très profondément. "Tu as toujours voulu être une guerrière ?".

 

Xena l'observa, surprise, pendant un moment. "Oui. Je crois bien que oui." Elle rit un peu. "Lyceus et moi… on jouait avec des bâtons, comme si c'était des épées, et on courait partout, livrant des fausses batailles. On a toujours fait ça, depuis que je suis assez grande pour me souvenir.".

 

Le barde hocha lentement la tête. "C'est bien ce que je pensais. Et ta mère, elle en pensait quoi ?".

 

La guerrière réfléchit à la question. "A vrai dire, je crois qu'elle aurait préféré que je sois plus calme, mais elle ne m'a jamais interdit de faire ce que je voulais.".

 

"Et les autres ? Personne ne t'a interdit ?" insista Gabrielle, satisfaisant du même coup sa propre curiosité..

 

'Non", répondit-elle, comme le barde s'y attendait. "Non, personne. Mmm… enfin, si. Quelqu'un a essayé. Une fois.".

 

"Et ???".

 

"Je lui ai collé une raclée." La réponse un peu penaude de Xena fit rire le barde..

 

Gabrielle soupira. "Qu'est-ce que tu aurais fait si quelqu'un… que tu aimais… avait essayé de t'empêcher de devenir une guerrière ?" A présent son regard était sérieux et, en levant les yeux, elle vit que celui de Xena l'était aussi, puisqu'elle avait compris la tournure que prenait la conversation..

 

Xena hésita un long moment avant de répondre, parce qu'elle savait où voulait en venir Gabrielle, et parce que sa réponse pouvait révéler une grande partie de sa personnalité. "Qu'est-ce que j'aurais fait ?" Une pause, car elle regarda au plus profond d'elle-même et lui donna une réponse honnête. "Je n'aurais pas arrêté. Ça fait partie de moi… je n'aurais pas arrêté. Je me serais battue.".

 

"C'est bien ce que je pensais", répondit doucement le barde. "Parce que c'est l'une des choses que j'aime le plus en toi. Tu n'abandonnes jamais." Elle sourit doucement à sa compagne. "Tu es toujours en train de me dire que je suis ton inspiration lorsque tu fais des choses… je me demande si tu sais à quel point c'est vrai dans l'autre sens…".

 

Elle observa le visage de Xena, voyant l'étonnement sur son visage, son esprit de barde réfléchissant déjà à la façon dont elle décrirait le moment, le soleil doré qui illuminait la moitié de son visage et laissait l'autre dans l'obscurité, à part cette étincelle dans ses yeux. "J'ai toujours su comment inventer des histoires", commença-t-elle, détournant son regard de celui de Xena, et le posant sur la tête d'Arès qui s'était roulé en boule contre la cuisse de Xena. "J'adorais le faire… et je trouvais toujours des gens à qui les raconter… même les plus idiotes.".

 

Elle reposa la tête contre l'épaule de la guerrière silencieuse. "Mes premiers souvenirs de mon père sont… Il me faisait sauter sur ses genoux, quand j'étais toute petite. Il m'emmenait me promener avec lui." Elle leva les yeux vers Xena. "Il était tout mon univers.".

 

Un long silence cette fois, tandis qu'elle se calmait à nouveau. "Je ne sais pas quand cela a changé… mais un jour, comme ça, il…" Elle ferma les yeux. "… s'est mis en colère. Et il est resté en colère." Elle inspira longuement. "Peut-être que ce n'était que la bière, peut-être… qu'il voulait vraiment un garçon. Je ne sais pas." Elle se frotta les yeux. "Quand j'allais passer quelques jours chez mon oncle et ma tante, c'était fantastique. Je pouvais jouer, tu sais, et raconter des histoires, et être… normale." Elle avala avec difficulté. Et elle craqua presque lorsque Xena se pencha en avant et vint déposer un léger baiser sur son front. .

 

"Ce n'est pas la peine de…" commença la guerrière, mais elle fut interrompue lorsque Gabrielle posa ses doigts sur ses lèvres..

 

"Si… c'est la peine. Je veux que tu saches tout cela…" Elle eut un sourire sinistre. "A la maison, ce n'était pas pareil. Il n'aimait pas que je raconte des histoires ; il disait que c'était des idioties, et…" Elle fit une pause. "Après un moment, quand il m'attrapait, il…" Un long silence. "…faisait en sorte de me convaincre de ne pas recommencer." Son souffle devint court. "Je me souviens de la première fois… je… je…" Elle s'interrompit et resta sans bouger, avalant, essayant de ne pas s'écrouler. Puis les bras de Xena se resserrèrent autour d'elle, lui donnant une sensation de sécurité qui lui permit de se ressaisir après quelques inspirations tremblantes..

 

"Enfin, bref", continua-t-elle enfin, "après un moment, c'est devenu plus facile de… d'oublier les histoires. Ça faisait trop mal… et j'étais occupée… à devenir la parfaite petite villageoise, toute prête à marier." Ses yeux croisèrent ceux de Xena et y virent le mélange de tristesse, de douleur et de fureur. "J'avais l'impression d'être enfermée dans une boîte, et je n'avais aucun moyen d'en sortir. Tous les exemples autour de moi confirmaient ce qu'on m'avait dit. Les filles ne peuvent pas être des bardes. Les filles ne peuvent pas être fortes. Alors je restais là, en silence, à faire les tâches qu'on m'avait assignées." Sa voix était un peu rauque. "C'est ce que j'ai fait. Parce qu'il n'y avait pas d'autre choix. Mais cela faisait mal." Ses yeux se fermèrent rapidement. "Et je me sentais si… perdue."

 

Elle but une gorgée de thé un peu froid. "Et puis, un jour, je suis descendue à la rivière avec ma sœur et le reste des filles du village pour aller chercher de l'eau." Un petit sourire se dessina sur ses lèvres. "Un groupe de marchands d'esclaves nous a arrêtées. Je me souviens d'avoir pensé : Hé, Gabrielle, regarde un peu ça. C'est là que dans tes histoires, le héros débarque et sauve tout le monde." Sa voix redevint plus grave. "Mais je savais que dans la réalité, il n'y avait pas de héros, et que personne n'allait me sauver, et… je crois bien que ça m'était égal." Elle regarda par la fenêtre, se souvenant de cette journée, qui avait mal commencé, avec une raclée après le petit déjeuner, parce qu'elle avait cassé une assiette sous ses yeux, et qui avait empiré, avec l'attaque de ces brigands..

 

A présent, son sourire était plus grand, et elle inclina la tête en arrière pour regarder Xena, dont le visage était maintenant presque entièrement dans l'obscurité. A part les yeux, qui reflétaient les éclats du soleil. "Et puis j'ai eu la plus grosse surprise de ma vie." Elle secoua la tête. "Une héroïne a débarqué et nous a sauvées. Tout comme dans les histoires. Et non seulement tu étais une héroïne, mais tu as fait exploser toutes les règles qu'on m'avait enseignées à propos de ce que sont les gens, et de ce qu'ils peuvent devenir.".

 

"Xena, tu étais là, sans arme, sans peur, et tu t'es débarrassée de ces soldats comme s'ils n'avaient été que des mouches. Tu étais plus forte qu'eux, et plus intelligente, et mieux encore, tu te fichais de ce que tout le monde en pensait." Elle ferma les yeux et tapota le ventre de la guerrière. "Tu as changé ma vie, ce jour-là.".

 

Xena demeura silencieuse, écoutant, regardant, voyant de Gabrielle un côté auquel elle ne s'attendait pas. Une explication, enfin ; pourquoi elle avait quitté son village, sa famille, avait tout laissé derrière elle pour suivre un ancien seigneur de guerre à moitié dingue dans la nature, vers une vie difficile et sans doute une mort prématurée..

 

"J'ai su, à ce moment précis, que c'était ma seule chance. J'allais te suivre, que tu le veuilles ou non, aussi loin qu'il le faudrait, parce que c'était ma seule chance de devenir plus que ce que Potadeia m'autorisait à être." Gabrielle continua, inspirant profondément une nouvelle fois. "Alors c'est ce que j'ai fait. Et j'ai prié les dieux, tous les soirs, pour que tu ne me renvoies pas avant que j'aie pu en apprendre assez pour pouvoir me débrouiller toute seule." Encore ce sourire. "Et puis, un jour, je me suis rendue compte que je priais que tu ne me renvoies pas du tout, parce que je… je ne voulais pas te quitter.".

 

Elles se regardèrent en silence un moment. "Et puis, je me suis dit que c'était égoïste de ma part. Alors j'ai essayé… de rentrer à la maison… parce que je croyais que tu devais en avoir assez de moi." Gabrielle continuait, regardant toujours vers la fenêtre. "Et parce que je ne pensais pas que… enfin, bref.".

 

"Ça ne m'a jamais surpris quand tu partais", fit Xena, parlant pour la première fois depuis un long moment. "C'est juste que… je ne m'attendais pas à ce que tu reviennes. Je… je n'ai jamais vraiment compris pourquoi tu revenais… pas pendant longtemps, en tout cas. Je me disais qu'il y avait de bien meilleurs endroits pour toi, qu'avec moi." Il y avait dans ses yeux une douce tristesse qui toucha Gabrielle profondément..

 

"Je sais que c'est ce que tu pensais", murmura le barde. "Mais, le soir de mon mariage, j'étais allongée dans le noir… Perdicus s'était endormi, mais je ne pouvais pas… tout ce à quoi je pouvais penser, c'était toi, et à ce que j'avais vu dans tes yeux lorsque nous nous étions dit adieu." Elle leva les yeux. "Parce que c'était adieu, n'est-ce pas ? Je ne t'aurais plus jamais revue, pas vrai ?".

 

Xena inspira une fois, puis une deuxième fois. Puis elle avala. "C'est vrai. Je… Gabrielle, j'étais sincère quand je t'ai dit ça, mais je… je ne pouvais pas." Mon cœur t'appartenait déjà, mon barde, et la pensée de perdre ton amitié fit de cette nuit la pire que j'ai connue depuis très longtemps. Bien sûr, la nuit suivante fut encore pire, lorsque j'ai cru avoir perdu ton âme aux mains de Callisto après tout le reste.".

 

"Je le savais", répondit Gabrielle. "Je l'ai senti… et ça m'a fait si mal que je pouvais à peine respirer." Elle soupira. "Mais j'espérais qu'en faisant ça, je pourrais faire pour Maman, et Lila, ce que tu avais fait pour moi. Toute la différence." Elle secoua la tête. "Mais je n'aurais pas dû. Je n'étais pas prête, Xena. Je n'ai pas ta force.".

 

Elle termina sa tasse déjà presque vide et la fixa. "Je n'aimais pas qui j'étais à l'époque, Xena." A présent, elle croisa le regard de la guerrière, bien en face. "Mais j'aime qui je suis aujourd'hui. Et je ne serais jamais devenue cette personne si tu ne m'avais pas guidée." Une pause. "Alors, même si je n'étais pas…" Elle sourit doucement. "… désespérément amoureuse de toi, et même si tu n'étais pas ma meilleure amie… tu serais quand même la personne la plus importante de ma vie. Parce que tu m'as rendu mes rêves.".

 

Elle soupira et posa la tête sur la poitrine de Xena, sentant les bras puissants s'enrouler autour d'elle, avec une intensité farouche, et elle entendit la guerrière avaler à plusieurs reprises sans essayer de parler. "Ça fait longtemps que je voulais te dire ça", marmonna-t-elle. "Mais mon père… je… je ne pouvais pas… je suis désolée, Xena… Pardon… je… voulais essayer de les aider.".

 

"Chh… ce n'est pas grave", fit la guerrière, d'une voix un peu rauque. "Ce n'est pas grave.".

 

"Si…" répliqua Gabrielle. "C'est grave…" Ses mains se serrèrent sur le cuir de la combinaison de Xena. "J'aurais dû… Perdicus m'aimait, je le sais. Et, d'une certaine façon, je l'aimais aussi. Il était gentil, et il avait besoin de moi, et…" Elle resta silencieuse un moment. "Mais ce que je ressentais pour toi était déjà tellement plus profond, à des endroits auxquels il n'aurait jamais pensé, sans parler d'essayer de les atteindre. Et j'étais allongée près de lui, cette nuit-là, et je savais, et cela faisait mal… et j'ai compris que l'une des raisons pour lesquelles je faisais cela, c'était… je me suis dit que si je rentrais à la maison et que je ne faisais pas d'histoires, alors peut-être… peut-être mon père me sourirait." Ses yeux se remplirent à nouveau de larmes. "Xena, je n'y peux rien. C'est mon père et je l'aime. Même si lui…" Elle ne termina pas sa phrase. "Et… je voulais tellement qu'il approuve mes décisions que j'ai presque… non, je l'ai fait… j'ai sacrifié ce que j'avais de plus cher au monde." Elle avala. "La personne la plus chère. Et je me sens si… je me déteste quand j'y repense.".

 

"Oh, Gabrielle", souffla Xena, caressant doucement ses cheveux, voyant les larmes qui coulaient sur le cuir sombre. "Ce n'est pas de ta faute.".

 

"Si, c'est de ma faute", fit le barde d'une voix rauque. "C'est à cause de moi que Perdicus est mort. A cause de moi.".

 

"Non", fut la réponse, ferme et rapide. "Non, regarde-moi." Xena relâcha une main et releva la le visage de Gabrielle, la forçant à la regarder dans les yeux, essayant de repousser ses propres émotions qui menaçaient de la submerger lorsqu'elle vit le regard désespéré du barde. "Ecoute-moi bien, mon barde… ce n'était pas de ta faute." Gabrielle demeura silencieuse, la regardant. "La seule que l'on puisse blâmer, c'est Callisto, Gabrielle. Pas toi, et pas moi." Ça m'a prit un bon moment pour l'accepter, pas vrai ? "Et… je ne t'en veux pas d'avoir choisi de vivre avec lui. Tu avais ma bénédiction. Vraiment… il faut que tu me croies.".

 

Le barde cligna des yeux. "Dis-moi que cela ne t'a pas fait mal", fut sa réponse, à peine un murmure, avec une expression gelée..

 

Xena inspira, et la regarda. Elle savait, en voyant Gabrielle soudainement fermer les yeux, que sa réponse était affichée sur son visage avant même qu'elle n'ouvre la bouche. "Je ne peux pas te dire ça", admit-elle. "Tu le sais bien…" Elle s'interrompit, le souvenir douloureux de cet instant lui revenant à l'esprit. "Oui, ça m'a fait mal", dit-elle finalement, croisant le regard angoissé du barde. "Te laisser là-bas, c'était… très dur pour moi." Elle fit une pause. "Mais ça en aurait valu la peine, pour moi, juste pour te voir heureuse. Et, Gabrielle, c'est la seule chose qui m'importe.".

 

Gabrielle avala avec difficulté. "On ne devrait pas faire de mal aux gens qu'on aime, Xena. Ce n'est pas bien." Son regard glissa de nouveau vers la fenêtre. "Alors, sans doute, mon père… si seulement je savais ce que j'ai fait pour qu'il me haïsse autant.".

 

Et c'était là tout le problème, comprit Xena, parce qu'elle ne pouvait pas imaginer que quelqu'un… n'importe qui… puisse faire du mal à quelqu'un comme… OK… OK… respire, Xena. Tu ne peux l'aider si tu t'effondres toi aussi… elle compte sur toi… pour expliquer tout cela. Dieux. Qu'est-ce que je vais lui dire ? Rien que de penser à ce qu'elle devait ressentir, si petite, si innocente, avec quelqu'un qui… comment a-t-elle pu faire confiance à qui que ce soit, après ça ?.

 

Elle l'a fait... Cette pensée envahissait son esprit, aboutissant à sa conclusion logique, tandis qu'elle murmurait des mots apaisants à la silhouette silencieuse et immobile de sa compagne. Elle l'a fait parce que son besoin d'aimer et d'être aimée est plus fort que son besoin de haïr. C'est ce à quoi elle s'accroche. Dieux. Et je connais la réponse à au moins l'une de ses questions."Gabrielle." Xena parla d'une voix grave et intense, et le barde leva les yeux vers elle. "Je veux que tu m'écoutes bien.".

 

Gabrielle roula la tête sur le côté, et la regarda, attendant. "Je t'écoute", dit-elle d'une voix fatiguée..

 

"Bien", fit Xena. "Je crois que tu sais que je suis vraiment en colère, pas vrai ?".

 

"Oui", répondit le barde..

 

"OK. Je ne peux pas… Gabrielle, je me comprends à peine moi-même, alors les autres… mais je sais une chose… et je veux que tu le saches aussi : lorsque quelqu'un fait du mal à quelqu'un d'autre, quelqu'un comme toi, quelqu'un qui n'a rien fait de mal à personne, eh bien, cette personne ne te déteste pas Gabrielle. Cette personne déteste quelque chose en elle-même. Et… c'est une partie d'elle-même qu'elle frappe. Pas toi. Jamais toi… Tu n'étais qu'une enfant, Gabrielle. Une enfant magnifique, qui voyait des choses que les autres ne voyaient pas. Tu n'as jamais rien fait pour mériter cela.".

 

Gabrielle la regarda en silence un très long moment, fixant son visage, le souffle court. "Ce n'est pas possible", murmura-t-elle finalement, mais sa voix suppliait Xena de la convaincre..

 

La guerrière prit son visage dans sa main et lui sourit tristement. "C'est la vérité, mon barde." Elle fit une pause, et vit la pensée courir derrière ces yeux verts. " Ce n'est sûrement pas à moi de donner des définitions du bien et du mal, mais pour moi… pour moi, Gabrielle, tu es tout ce qu'il y a de bien." Elle hésita. "Parce que je sais ce que c'est que de se haïr, à tel point qu'on agresse tout le monde. N'importe qui. On veut qu'ils souffrent autant que soi.".

 

Le barde réfléchit pendant un long moment, se reposant là, dans le soleil rouge qui envahissait la chambre, et dessinait sur elle une lumière qui couvrait la moitié de son corps et celui de Xena. Elle entendait le bruit régulier du marteau du forgeron dehors. Elle sentait l'odeur poussiéreuse du bois dans la chambre, et les effluves de la viande qui cuisait en bas, à l'auberge. Elle sentait la caresse calme et sûre des bras de Xena, et la douce chatouille du souffle de la guerrière contre son oreille, là où sa tête reposait sur l'une de ses épaules. "Ça va… me prendre un moment pour m'y habituer", dit-elle enfin, énonçant les mots lentement, comme si elle les goûtait. "Ça va me prendre du temps." Puis elle leva les yeux vers ceux de Xena, les observant..

 

Xena haussa les épaules et sourit. "On a toute une vie.".

 

Enfin, elle tira de la jeune femme un vrai sourire. "N'oublie pas de me le rappeler souvent, d'accord ? répondit doucement Gabrielle, tendant la main et caressant le bras de Xena. Doucement, tout doucement, son univers reprenait forme, ancré dans la chaleur qui l'enveloppait. Je crois… que ça va aller, pensa-t-elle, amusée.

 

"Et puis, tu n'aurais pas pu abandonner tes rêves aussi vite, mon barde", ajouta Xena, penchant la tête vers Gabrielle. "Tu t'es offerte à la place de Lila, si je me souviens bien… c'est qui m'a frappé la première fois que je t'ai vue." Un sourire se dessina lentement sur ses lèvres. "J'étais impressionnée par l'héroïsme de cette petite villageoise qui osait tenir tête à tous ces brigands.".

 

Gabrielle rit doucement. "C'était idiot." Elle rougit un peu. "Impressionnée, vraiment ?".

 

"Oh, oui", approuva Xena, la serrant un peu plus contre elle. "Vraiment." Elle redevint sérieuse. "J'étais prête à tout laisser tomber, Gabrielle. J'en avais assez de me battre… mais tu m'as rappelé qu'il y a toujours quelque chose pour lequel se battre.".

 

Le barde ne répondit pas, mais ses yeux retrouvèrent leur étincelle naturelle, et un petit sourire apparut sur ses lèvres. Xena pencha la tête et jeta un coup d'œil à la tasse qu'elle tenait toujours à la main. "C'est vide ?".

 

"Mmm…. Ouais", fit Gabrielle en levant les yeux..

 

"Tant mieux", répondit Xena, croisant son regard. "Parce que voulais te dire que je t'aime et la dernière fois, je me suis fait trempée.".

 

Gabrielle ne put retenir un petit rire. "Aïe," fit-elle, en plissant les yeux. "Ne me fais pas rire.".

 

Les yeux de Xena se remplirent d'inquiétude. "Pourquoi ? Est-ce qu'il a…" Sa main toucha la poitrine du barde et elle tressaillit. "Bon sang", jura-t-elle. "Attends." Puis elle se leva, soulevant Gabrielle du même coup et alla jusqu'au lit, déposant le barde doucement. "Tu aurais dû me le dire…".

 

"Et manquer un 'je t'aime' ?" Gabrielle eut un sourire fatigué. "Pas question." Elle se détendit lorsque Xena ouvrit sa tunique et toucha doucement sa peau du bout des doigts. "Aïe," fit le barde, lorsqu'elle effleura un point particulièrement douloureux..

 

"Pardon", marmonna Xena. "Tu as de la chance. C'est juste des bleus, je crois. Rien de cassé." Elle leva les yeux vers le visage de Gabrielle. "Je vais te mettre un bandage et tu vas prendre quelque chose, et ensuite tu vas dormir un peu.".

 

"Ça me va tout à fait", admit le barde. "Si tu savais le mal de crâne que j'ai.".

 

Xena poussa les cheveux blonds roux de ses yeux. "Oui, je sais", soupira-t-elle, tristement. "Je sais." Elle alla chercher sa trousse et revint avec des bandages de lin, qu'elle étendit avec précaution, les enduisant d'huile qu'elle avait extraite d'un pot. Puis elle aida le barde à s'asseoir et enroula le bandage autour d'elle, avant de le coincer proprement. "Voilà.".

 

"Hé, c'est tout chaud", remarqua Gabrielle en touchant le tissu. "Qu'est-ce que c'est ?".

 

Xena ramassa l'huile qui restait et y jeta un coup d'œil. "C'est un mélange d'huiles… ça fait bouger ton sang plus vite quand tu es blessée. Ça t'aide à guérir plus vite.".

 

"Vraiment ?" demanda Gabrielle, intriguée malgré tout. "C'est ça, ton secret ??" Elle poussa la guerrière du coude, amusée..

 

Xena ricana. "Non, chez moi, c'est naturel. Mais ça ne fait jamais de mal d'en mettre un peu." Elle retourna vers la table et prépara une autre mixture dans la tasse de Gabrielle, hésitant, puis secouant la tête, elle ajouta encore quelques ingrédients qu'elle n'incluait d'habitude pas au breuvage. Elle versa de l'eau chaude dessus, mélangeant un peu, puis l'apporta au barde qui attendait, assise tranquillement. "Tiens", dit-elle, et elle lui tendit. "Bois tout.".

 

Gabrielle acquiesça et avala une gorgée. "Attends… deux fois dans la même journée, tu me donnes à boire quelque chose de bon qui sort de ce sac ? Je dois être en train de rêver." Elle adressa à Xena un regard faussement stupéfait..

 

"Ouais, c'est ça", fit Xena, laissant échapper son masque de bonne humeur. "Je voulais juste rendre cette journée un peu moins désagréable pour toi." Elle se retourna vers la table, mais sentit une main attraper sa combinaison, et elle s'arrêta. Elle essaya de contrôler ses émotions avant de se retourner..

 

Elle n'y parvint pas entièrement, à en voir la réaction dans les yeux verts de Gabrielle. Le barde posa la tasse sur la table de nuit, et se leva, entourant sa compagne de ses deux bras en un seul mouvement. Elle sentit la guerrière retourner l'étreinte, un peu plus doucement. "Merci", dit-elle simplement..

 

Xena inspira, avec difficulté. "Te voir souffrir, et ne pas pouvoir… faire quelque chose… c'est dur pour moi, Gabrielle", parvint-elle à articuler..

 

Le barde hocha la tête contre sa poitrine. "Je sais. Mais… je suis vraiment contente que tu sois là. J'ai… j'ai besoin de toi." La vérité, toute simple..

 

Elles se tinrent ainsi encore un moment, puis Xena leva la tête et expira longuement. "OK, tu retournes au lit, maintenant", fit-elle, relâchant le barde, qui s'assit et se réinstalla sur le lit avec un soupir..

 

Xena lui tendit la tasse, un sourcil levé, et la regarda jusqu'à ce qu'elle ait tout fini, et qu'elle lui la lui rende vide. "C'était pas la peine de me surveiller", fit le barde, sarcastique. "C'était bon." Elle cligna des yeux. "Oh là.".

 

"Ouais. Oh là", fit Xena en ricanant, puis elle la poussa sur l'oreiller. "Allez, au lit, votre majesté.".

 

Le barde essaya de se concentrer sur elle, mais abandonna bientôt, et laissa ses yeux se fermer. Xena la regarda jusqu'à ce qu'elle voie les muscles de son corps se détendre, et son souffle se ralentir et devenir plus profond. Elle tendit la main pour effleurer tout doucement la joue du barde, là où les coups avaient fait des marques sur sa peau claire. Puis elle laissa sa main retomber et retourna à la table, s'effondrant sur la chaise et posant ses coudes sur ses genoux..

 

Oh dieux… La colère et la frustration étaient presque trop fortes. Mais elle parvint à les surmonter, se redressant un peu sur la chaise, renversant la tête en arrière pour regarder le plafond pendant un long moment. Elle dut combattre sa colère devant l'injustice, l'horreur surgie du passé pour agresser sa compagne. Elle voulait tout recommencer, pour y être, à cette époque, et empêcher tout cela d'arriver. Elle ne méritait pas cela. De toutes les personnes que j'ai rencontrées dans ma vie, c'est celle qui le méritait le moins. Elle pensa à la douce enfant que Gabrielle avait dû être, toute blonde avec de grands yeux verts. Racontant des histoires à ses amis qui ouvraient des yeux tout aussi grands. Et être battue pour cela. C'était trop. Xena enfouit son visage dans ses mains et serra les dents. Qu'il soit maudit. Un grognement sourd s'échappa de sa poitrine et, comme pour lui répondre, Arès l'imita, se rapprochant doucement de sa botte et clignant des yeux vers elle..

 

Xena le regarda, cet animal qu'elle avait sauvé des griffes d'une panthère. Puis ses yeux se posèrent sur sa compagne endormie, qui, dans les derniers rayons du soleil couchant, avait à peine l'air plus âgée qu'une enfant. Peut-être… Lentement, la pensée se forma dans son esprit, irrésistiblement. Peut-être le monde a-t-il besoin de gens comme moi. Comme ce que je suis aujourd'hui. Des gens qui protègent les gens comme elle. Et les petites choses comme lui. Je me demande. Lentement, elle sentit la colère la quitter, laissant derrière elle une grande lassitude émotionnelle..

 

Elle prit le chiot dans ses bras et, se laissant glisser sur la chaise, elle s'appuya en arrière et le déposa sur sa poitrine, où il s'écroula en haletant. "Du calme, mon vieux", murmura-t-elle, tout en caressant sa fourrure. "Tu deviens gros, pas vrai ?" Elle attrapa une de ses pattes et l'examina, levant un sourcil. Ça allait être un gros loup, pas de doute là-dessus. La guerrière laissa retomber sa tête contre le mur et ferma les yeux, mentalement épuisée..

 

Et elle se réveilla en sursaut, quelques heures plus tard, dans l'obscurité la plus totale, Arès tranquillement endormie sur sa poitrine. "Dieux." Elle plissa les yeux, frottant son cou endolori. "Quelle idiote." Elle souleva le chiot endormi et le posa par terre, se leva et s'étira en bâillant. "Ferait mieux d'allumer quelques torches là-dedans", murmura-t-elle doucement à l'attention du chiot qui pencha la tête sur le côté en la regardant. Elle remua un peu le feu, puis alluma les deux torches de la chambre qui se retrouva ainsi baignée dans une douce lumière orangée ; enfin, elle alla jusqu'au lit et jeta un coup d'œil à sa compagne toujours endormie. .

 

Satisfaite, elle fit des yeux le tour de la chambre, puis rangea sa trousse de médecine, et se préparait à descendre pour aller chercher quelque chose à manger lorsqu'elle entendit une voix qui lui était vaguement familière dans les escaliers..

 

"Génial", dit-elle, à voix haute, et Arès leva la tête vers elle. Xena soupira, puis alla se rasseoir sur la chaise, appuyant sa botte contre l'âtre. Un léger coup à la porte. "Entrez", dit-elle, pas trop fort. La porte s'ouvrit et Lila glissa la tête à l'intérieur, clignant des yeux devant la faible lumière, avant de la voir assise à la table. Elle se recula, puis la porte s'ouvrit à nouveau et elle entra, suivie d'Hécuba..

 

Les deux femmes la regardèrent un long moment. Elle en fit de même, ne les accueillant pas, mais ne les menaçant pas non plus. Enfin, Lila se décida et s'avança un peu plus dans la chambre, plusieurs sacs à la main, avant de regarder Xena avec une expression interrogatrice. "Là-bas", répondit Xena, faisant un geste vers l'endroit où elle avait posé le reste de leurs affaires. Du coin de l'œil, elle remarqua un mouvement et se tourna pour regarder Hécuba marcher en silence vers le lit, et se tenir là, regardant sa fille. Elle leva une main vers le barde endormie, mais s'arrêta en entendant un grognement à ses pieds..

 

Elle baissa les yeux et vit un bébé-loup, bien campé sur ses pattes devant elle, montrant ses crocs dans une grimace infantile. Elle regarda l'animal avec surprise, puis tourna la tête vers Xena. Et quelque chose dans son regard fondit. "Je vois qu'elle a plus d'un protecteur", fit-elle..

 

Ce qui lui valut un demi-sourire de la part de Xena. "Oui. Elle les collectionne." La guerrière vit les épaules de Lila se détendre un peu. "Assieds-toi, Lila." D'un geste, elle désigna à la jeune fille une chaise en face d'elle. "La journée a été longue." Je ne peux pas changer le passé, mais si au moins j'arrive à parler avec sa famille, ça lui fera plaisir, pas vrai ?.

 

"Ça oui", répondit Lila, puis elle prit la chaise offerte et s'assit, observant la grande femme brune en face d'elle..

 

"Viens là, mon vieux", appela Xena, et le chiot courut vers elle. "Vas-y." D'un signe de tête, elle montra Gabrielle à Hécuba..

 

Celle-ci acquiesça, puis se retourna vers sa fille, poussant doucement les cheveux qui tombaient sur son visage, observant en silence sa silhouette endormie..

 

"Comment s'appelle-t-il ?" demanda Lila, regardant le chiot sous la table. "Il est mignon." Elle adressa à Xena un regard hésitant..

 

Xena soupira, et eut un petit haussement d'épaules. "Arès." Et elle leva les mains devant l'expression choquée de Lila. "Je sais, je sais. Mauvaise idée.".

 

Lila sourit. "Je parie qu'il ne serait pas content s'il le savait.".

 

Xena leva un sourcil. "Il le sait. Il s'en fiche. Si ça avait été un chien, alors là… j'aurais sûrement eu des ennuis. Mais…".

 

La jeune fille brune laissa échapper un petit rire. "Tu plaisantes ?" demanda-t-elle. "Tu le connais vraiment ?".

 

La guerrière hocha la tête. "Gabrielle aussi le connaît." Elle avait à présent attiré l'attention d'Hécuba. "Elle connaît aussi Cupidon et Aphrodite.".

 

Hécuba revint vers elles et s'assit sur la troisième chaise, plus près de Xena que de sa fille. Elle prit son temps pour observer la guerrière, de la tête aux pieds, très lentement, sans se cacher. "Métrus est livide", dit-elle finalement, avec précaution. "Il n'aime pas beaucoup être mis à terre comme un veau dans un pré." Elle fit une pause. "Tu aurais vraiment tué mon mari si tu étais entrée quand il était en train de la frapper ?" Ses yeux pâles soutinrent le regard de Xena avec intensité. "C'est son père. Quoiqu'il arrive.".

 

Xena inspira profondément, puis posa le menton dans sa main, réfléchissant. "Non", répondit-elle tranquillement. "Parce que c'est son père. Et que ça lui aurait fait trop de mal." Ses yeux étincelèrent dans la lumière du feu. "Mais si tu veux savoir si je lui aurais fait regretter de l'avoir touchée, alors, là, oui.".

 

Hécuba hocha lentement la tête. "Ça fait tellement longtemps que quelqu'un n'est pas venu à notre défense, j'avais oublié ce que c'était." Elle se leva et, après une hésitation, posa la main sur l'avant-bras puissant de Xena, qui reposait sur la table. "Je… suis contente que Gabrielle ait trouvé quelqu'un qui soit prête à la défendre." Puis elle retrouva ses manières plus brusques et désigna d'un signe de tête le panier qu'elle avait posé sur la table. "J'ai apporté à dîner.".

 

Xena sourit. "Ça lui fera plaisir.".

 

Hécuba grogna, puis avança jusqu'à la porte avant de se retourner vers la guerrière. "Il y en a un peu plus, si tu veux." Puis elle sortit, manquant le sourcil levé de Xena..

 

Lila soupira. "Ce n'est pas facile pour elle", commenta-t-elle, comme si elle était vraiment à l'aise avec Xena. "Je crois que c'est une offre de paix.".

 

"Mmm, mm", fit Xena, se détendant un peu, et adressant un petit sourire à Lila. "C'est la paix, alors ?".

 

Lila baissa les yeux vers la table, puis les releva. "Elle n'arrêtait pas de parler de la raclée que tu as collée à Métrus. Et le guérisseur du village est venu et lui a répété en gros ce que tu lui avais déjà dit, et puis ensuite, elle n'arrêtait pas de parler de ça." Elle haussa les épaules. "Alors, oui, je crois que c'est la paix." Elle s'éclaircit un peu la gorge. "Ecoute…".

 

"Du calme", fit Xena, leva la main. "Je sais.".

 

Lila acquiesça, comme si c'était une chose normale. "Comment va-t-elle ?" Sa voix était tombée un peu, et elle jeta un coup d'œil vers sa sœur. "Est-ce que…".

 

Xena soupira. "Elle va bien. Un peu secouée, mais à part ça, ça va." Ses yeux croisèrent le regard de Lila. "C'est plus là-dedans que ça fait mal." Elle tapota son front. "Là plus qu'ailleurs, je crois.".

 

"Oui", murmura la jeune fille. "C'est vrai.".

 

Xena lui adressa un regard plein de compassion. "Lila… je suis désolée pour tout ce que vous avez enduré.".

 

La jeune fille brune la regarda. "C'était pire pour elle." Encore un coup d'œil vers Gabrielle. "Elle était plus âgée… Papa pensait qu'elle devait être plus pragmatique… et ne pas passer son temps à inventer des histoires." Elle haussa les épaules. "Moi, je voulais juste grandir, me marier, avoir des enfants, tu sais. Normal, quoi." Elle leva les yeux. "Lennat et moi… on a parlé de s'enfuir. Il ne veut pas vraiment le faire." Elle fit une pause. "Moi non plus, d'ailleurs. Mais…".

 

"Ça serait dur pour ta mère", commenta Xena. Ça me va bien de dire ça… .

 

Lila acquiesça, fatiguée. "Je sais." Elle posa les mains sur la table et poussa. "Au moins, ça sera calme, ce soir", remarqua-t-elle. "Quelle qu'en soit la cause." Un signe de tête vers le panier. "Il y a en a largement assez pour deux. Je reviendrai la voir demain.".

 

Xena lui fit un petit signe. "Je lui dirai que vous êtes passées. Attention en retournant chez toi.".

 

Un sourire se dessina sur les lèvres de Lila, alors qu'elle voyait pour la première fois la compagne de sa sœur comme autre chose qu'un seigneur de guerre assoiffé de sang. "Merci", répondit-elle. "Tu sais, tu n'es pas si mauvaise, Xena.".

 

Ce qui lui valut un sourcil levé pour toute réponse. "Je peux être très mauvaise si besoin est", répliqua la guerrière, mais elle ajouta un petit sourire en coin, ce qui retira le sérieux de la déclaration. "Mais j'essaie d'être gentille, histoire de faire plaisir à ta sœur.".

 

"Vraiment ?" fit Lila, essayant de ne pas rire. "Alors pas de sacrifices de bébés…".

 

"Seulement les mois avec trois pleines lunes", confirma Xena, laissant son sourire gagner son regard, tout en croisant celui de Lila. "A moins que Gabrielle ne soit à court d'inspiration pour ses histoires. Tu sais." Un clin d'œil..

 

"Je vois." Elles se regardèrent une seconde, puis se mirent à rire. Je crois… que je commence à voir ce que Bree voit en elle, pensa Lila, amusée. Puis une pensée traversa soudainement son esprit. Et Bree a raison : ils sont vraiment d'un bleu merveilleux."Bon, j'y vais." Mais elle souriait toujours en descendant les escaliers et en rentrant chez elle..

 

Xena regarda la porte à présent refermée avec amusement. Puis elle se leva, s'étira à nouveau et alla à la fenêtre, où elle resta un moment, regardant dehors, perdue dans ses pensées, profitant de la fraîcheur de la nuit. Enfin, elle se retourna vers la table, souleva le torchon qui couvrait le panier et examina le contenu. Ça pourra attendre demain matin, décida-t-elle, puis elle jeta un coup d'œil vers le barde endormi. Je devrais sortir et faire quelques exercice d'entraînement. Ouais, c'est ça. On y croit, pensa-t-elle, se moquant d'elle-même. Le seul problème c'est que je n'ai envie de rien faire à part me glisser dans ce lit auprès d'elle. Dieux… quelle sentimentale, je deviens. Elle sourit sardoniquement, puis soupira. D'un autre côté, je ne veux pas qu'elle se réveille et qu'elle se retrouve toute seule. Ouais, c'est une bonne excuse, ça, Xena. Au moins, c'est la vérité..

 

Riant doucement, elle se déshabilla et enfila une longue chemise de lin, puis rangea son armure avec précaution. Enfin, elle éteignit les deux torches, et se glissa en silence dans le lit auprès de Gabrielle. Pourtant, même dans son sommeil le plus profond, Gabrielle était sensible à sa présence et, peu de temps après qu'elle se soit glissée dans le lit, le barde ouvrit des yeux vert brume ensommeillés et la regarda..

 

"Salut." Les lèvres du barde dessinèrent un sourire..

 

"Je ne voulais pas te réveiller", fit Xena, en lui rendant son sourire..

 

"C'est pas grave. Je suis contente que tu l'aies fait", fut la réponse murmurée..

 

Xena rit un peu. "Comment te sens-tu ?".

 

Gabrielle dut réfléchir une minute à la question. "Fatiguée", admit-elle, roulant dans le lit pour venir se blottir contre le corps de la guerrière. "Ça fait mal." Puis elle laissa échapper un soupir de contentement lorsque Xena l'entoura de ses longs bras. "Mmm… c'est beaucoup mieux.".

 

"Ah ouais ?" fit Xena. "Ta mère et ta sœur sont passées.".

 

Gabrielle cligna des yeux, à moitié endormie; "Ah oui ? Elles vont bien ?".

 

"Oui", assura la guerrière. "Ta mère a apporté à dîner pour… toutes les deux, à vrai dire.".

 

Combattant les effets du somnifère, le barde rouvrit les yeux et fixa Xena. "Ma mère t'a apporté à dîner ?".

 

Xena acquiesça. "Et ta sœur a dit que je n'étais pas si mauvaise après tout.".

 

Gabrielle recula un peu la tête et leva lentement la main, agrippant la chemise de Xena. "Et tu m'as laissé dormir et manquer ça ?".

 

"Désolée", fit la guerrière en souriant. "C'était pas prévu.".

 

"Il va falloir que je me venge", menaça Gabrielle, mais ce n'était qu'un grommellement ensommeillé, alors qu'elle se laissait glisser dans la chaleur de leur Lien. "Plus tard.".

 

La douleur était toujours là, mais elle disparaissait peu à peu, vers les recoins sombres où elle vivait d'habitude. Gabrielle réalisa que cette douleur n'avait aucune chance contre la douce paix de ce sentiment qui flottait entre elles, et elle laissa son cœur s'ouvrir. "Mmm", marmonna-t-elle, laissant les émotions la submerger, à travers l'odeur du lin séché au soleil, du cuir et de l'essence indéfinissable de Xena elle-même. Elle inspira profondément puis expira. "Beaucoup mieux." Et les lèvres de Xena, effleurant les siennes, permirent à son âme meurtrie de trouver la paix. "En sécurité", soupira-t-elle, et elle retomba dans un profond sommeil..

 

Xena sourit, sentant le sommeil la gagner elle aussi, mais elle réalisa qu'elle se sentait elle aussi en paix, et elle en profita un moment. Une chaleur étourdissante la traversa, amenant sur ses lèvres un sourire qu'elle ne pouvait retenir. Quoiqu'il m'arrive, qu'il nous arrive, je suis heureuse d'avoir eu la chance de connaître ça. Elle décida, dans les ténèbres, d'abandonner ses dernières réserves. Jessan, tu avais raison après tout. Ce truc est fantastique. Et, sur cette pensée, elle s'endormit. .

 

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