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Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Ton coeur est ton foyer

Home is where the Heart is

 

Melissa Good

 

Traductrice : Katell

 

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Partie 5B

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En retournant sur le chemin, elle réalisa que Cyrène se tenait dans l'ombre, la regardant. "Bonjour, maman", fit-elle doucement en s'approchant d'elle.

 

Cyrène s'avança et vint la serrer contre elle. "Je suis désolée, Gabrielle", murmura-t-elle à l'oreille du barde. "Désolée que ça soit arrivé. Tu ne mérites pas tant de malheurs."

 

Gabrielle lui rendit son étreinte, puis recula un peu et la regarda. "J'en suis venue à une… conclusion à propos de tout ça." Ses lèvres dessinèrent un demi-sourire un peu las. "Parfois, les choses arrivent. Et… c'est horrible quand elles arrivent. Mais en y repensant plus tard, on voit que… qu'elles sont arrivées pour une raison. C'est tout."

 

"C'est comme ça que tu parvient à vivre avec tout ça, ma chérie ?" murmura Cyrène, désolée.

 

"Il le faut bien", murmura le barde à son tour. "Parce que je sais… au plus profond de mon cœur, que s'il avait vécu, j'aurais… c'était une erreur, maman… et je le savais." Elle ferma les yeux et ses épaules s'affaissèrent. "Et je l'ai fait quand même. Alors il fallait bien que ça arrive." Elle fit une pause. "Parce que sinon…" Dans son esprit, elle vit soudain ce que la réalité aurait été… la lente mort de ses rêves, et le vide odieux en elle qu'elle savait ne pouvoir être rempli que par une seule personne. Le vide qu'elle avait commencé à ressentir, lors de la nuit qu'elle avait passée avec Perdicus. Elle s'était dit que ça disparaîtrait, après un moment. Mais à présent… en sachant ce qu'elle savait… un frisson la parcourut. "Mais j'ai pris la mauvaise décision. Et nous avons tous payé pour mon erreur."

 

"Oh, Gabrielle", fit Cyrène en la serrant à nouveau. "C'est ce que pense aussi ma fille ?"

 

Le barde renifle un peu et posa la tête contre l'épaule de Cyrène. "Non… elle dit que ce qui s'est passé est de la faute de Callisto, et qu'aucun d'entre nous ne devrait être tenu pour responsable."

 

"Elle a raison, tu sais", dit Cyrène, en lui tapotant doucement le dos. "Imagine ça, ma fille qui dit quelque chose de sensé."

 

Ceci lui valut un petit rire de la part de Gabrielle. "Hé…" protesta-t-elle. "Elle dit plein de choses sensées." Elle comprenait ce que faisait Cyrène et en était reconnaissante. "Elle voit les choses beaucoup plus clairement que moi, parfois." Prendre la défense de Xena était devenu un réflexe inconscient… même contre sa propre mère. Même si elle savait que Cyrène essayait seulement de lui changer les idées.

 

"Hmm…" Cyrène l'entoura de son bras et la dirigea vers le chemin. "Ça doit être sa taille. Elle a une meilleure vue de là-haut." Mais au fond d'elle-même, son cœur pleurait, pour ce jeune barde, et pour sa fille aussi. "Elle était là, pour ton mariage, n'est-ce pas, ma chérie ?"

 

Gabrielle hocha la tête. Et ferma les yeux un instant en repensant à ces adieux.

 

"Et je parie qu'elle t'a aussi donné sa bénédiction", insista Cyrène.

 

Le barde acquiesça à nouveau. Si seulement j'avais pu lire en elle comme je peux le faire maintenant. J'aurais deviné. Ça ne m'aurait pas dupé un seul instant, pas avec la façon dont battait son cœur. Je l'ai senti, lorsqu'elle m'a serrée dans ses bras. Le mien aussi battait fort.

 

Cyrène soupira. "Elle est vraiment bête, parfois."

 

Gabrielle renifla avec un petit rire de surprise. "Non, elle n'est pas bête." Puis sa gorge se serra et c'est à peine si elle put parler. "Elle n'a fait que ce qu'elle pensait être le mieux pour moi." Elle fit une pause. "C'est ce qu'elle fait toujours. Même lorsque ce n'est pas vraiment le mieux pour elle."

 

Cyrène lui serra les épaules. "C'est l'une des plus honnêtes définitions de l'amour que j'ai jamais entendues, Gabrielle."

 

Le barde sourit. "Je sais." Elles marchèrent en silence pendant un moment, puis : "Merci, maman."

 

"Je t'en prie, ma chérie. Et à propos, quand vas-tu me présenter à ta propre mère ? Je demanderais bien à Xena de le faire, mais tu sais comment ça se passe en général."

 

Elles échangèrent un coup d'œil et se mirent à rire. "En fait, elle a fait preuve de, hmm… beaucoup de diplomatie cette fois", fit Gabrielle en souriant. "A part quelques menaces et quelqu'un qui s'est retrouvé dans le tas de fumier." Elle soupira. "Allez, viens. Je vais te présenter."

 

 

 

Oh… ce que c'était marrant, pensa Gabrielle en montant l'escalier pour retourner dans leur chambre, après avoir fait les présentations chez ses parents. Dommage que Xena ait manqué ça. Ça lui aurait plu. Ça a plu à Lila en tout cas. Elle ouvrit la porte et jeta un coup d'œil à l'intérieur. Pas de Xena, mais elle était passée par là.

 

Gabrielle fit le tour de la chambre en souriant. On avait sorti sa robe et on l'avait parfaitement suspendue, tous les rubans et les bretelles bien arrangés et en ordre. Sur la table se trouvait son kit, et le sac dans lequel elle rangeait ses bijoux. A côté d'un petit panier qui contenait du pain, du fromage et des fruits, accompagnés d'une note posée sur le tout. Elle la prit et reconnut l'écriture ferme.

 

"Mange quelque chose ou tu vas t'effondrer pendant la cérémonie. Je ne plaisante pas. X."

 

Elle leva la note et la porta à ses lèvres. Dieux, ce que je l'aime, pensa-t-elle en riant. Le sentiment dépressif qu'elle avait ressenti depuis qu'elle avait décoré le temple disparut complètement, alors que, assise sur le rebord de la table, elle obéit aux instructions et choisit une large tranche de pain sur laquelle elle appliqua un gros morceau de fromage crémeux.

 

Elle avait presque terminé son encas lorsque la porte s'ouvrit en silence. Elle leva les yeux pour croiser ceux de Xena et lui adressa un sourire chaleureux. "Salut." Elle fit de la main un geste pour désigner la chambre. "Merci."

 

Un sourire de la guerrière, et un haussement d'épaule qui minimisait son œuvre. "Je me suis dit que tu aurais peut-être besoin d'un coup de main."

 

Gabrielle la regarda et posa son pain. "La seule chose dont j'ai besoin pour l'instant, c'est toi." Les mots étaient sortis avant qu'elle n'ait pu les arrêter.

 

Xena posa le paquet qu'elle portait et vint jusqu'à elle. "Toris m'a dit que ça n'allait pas fort… remarque, ce n'est pas comme si je ne le savais pas… viens là." Elle ouvrit les bras et les entoura autour de Gabrielle, serrant le barde contre elle.

 

Gabrielle fut reconnaissance de l'étreinte. "Dieux… ça fait du bien", murmura-t-elle dans l'épaule de Xena en respirant le parfum familier de savon aux herbes et de cuir, et celui de sa compagne. "Je croyais que tout allait bien… j'avais oublié le temple. Ça m'a rappelé des souvenirs."

 

"Ouais. A moi aussi", répondit Xena de façon inattendue. "Je n'ai pas de bons souvenirs de cet endroit-là." Elle évita le regard douloureux de Gabrielle. "Peut-être que le mariage d'aujourd'hui effacera tout ça." Et elle parvint à esquisser un sourire pour sa compagne. "Ecoute, si tu veux rester un peu après la cérémonie…"

 

"Non", fut la réponse immédiate et finale. "J'en ai vraiment assez de cet endroit. Je veux passer la nuit sous les étoiles. Seule, avec un loup, un cheval, et toi."

 

Xena sourit sans être vue. "Nos affaires sont prêtes", répondit-elle. "J'ai hâte d'y être moi aussi." Dieux… et comment. Elle en avait assez des esprits étroits, des petits villages et des petites intrigues. "Maman s'occupe de tout ici. Elle va rester quelques jours et arranger les choses avec Hécuba." Elle esquissa un sourire. "Tu parles d'une paire."

 

Elle relâcha enfin Gabrielle qui s'écarta juste assez pour la regarder. "Tu es merveilleuse."

 

Ce qui lui valut un sourire sardonique de la part de Xena. "Tu parles."

 

Gabrielle enroula ses mains dans le cuir souple et tira fermement. "Si."

 

"Va te débarbouiller", fit Xena en changeant le sujet. "Et enfile cette robe pour qu'on puisse aller à ce mariage." Elle fit une pause. "Allez."

 

"Oui, maman", fit Gabrielle en riant avant de voler une dernière étreinte.

 

"Tu vas voir ce que je vais te faire, morveuse", menaça Xena en passant un bras autour de la taille du barde avant de la soulever. "Je t'ai eue !"

 

"Xena !" s'exclama le barde en riant. "Repose-moi !"

 

"Nan, nan", fit la guerrière en secouant la tête. "Tu es coincée. Je vais t'amener au temple comme ça." Elle fit un pas vers la porte. "Je vais peut-être faire ça aussi." Et elle se mit à chatouiller le barde, qui poussa des hurlements outragés mais riait trop fort pour se débattre vraiment.

 

"Ohh… Ah ! Arrête…" Elle essaya de rendre la pareille à Xena, mais la guerrière ignora ses efforts et continua, passa la porte et s'engagea dans le couloir, en direction de la salle de bains. "Xena !!"

 

"Quelqu'un a dit quelque chose ?" fit Xena à elle-même. "Je dois rêver." Elle ouvrit la porte du pied et la ferma de la même façon derrière elle, puis elle attrapa les genoux de Gabrielle pour la bercer dans ses bras. "Défais ta tunique."

 

Gabrielle expira, mais obéit. "Qu'est-ce que tu fais ? Xena, ça va être très froid dans… oh. Oh." Elle s'enfonça doucement dans la baignoire et dans l'eau chaude parfumée. "Oh." Xena retira la tunique ouverte de son corps et la laissa flotter. "Oh", soupira-t-elle avant d'inspirer profondément la vapeur au parfum de jasmin. Puis elle leva vers Xena des yeux remplis d'adoration. "Tu es si mignonne."

 

Xena s'immobilisa alors qu'elle pliait la tunique du barde et posa les mains sur le rebord de la baignoire, levant les sourcils en étouffant un ricanement. "Mignonne ?"

 

"Hmm, hmm", fit Gabrielle en se mordant la lèvre pour ne pas rire. Elle éclaboussa un peu sa compagne. "Ne t'inquiète pas, je ne dirai à personne à quel point tu es gentille et mignonne. Et adorable. Promis."

 

Xena rougit. Ce qui provoqua un gloussement ravi chez Gabrielle. La guerrière fronça les sourcils. "Je pensais juste que…"

 

Une main se glissa hors de la baignoire et vint se poser sur la sienne. Le visage du barde devint sérieux. "Je sais. Et… dieux… merci. Pour tout. Vraiment, Xena."

 

Xena s'assit sur un tabouret bas à côté de la baignoire et posa son menton sur ses bras croisés sur le rebord. "Ça n'a pas été facile pour toi ici, Gabrielle. Je t'aurais… je t'aurais épargné tout ça, si j'avais pu." Ses yeux bleus s'emplirent d'une tristesse douloureuse.

 

"Ça en valait la peine, Xena", murmura le barde en touchant la joue de Xena du bout des doigts. "Lila, maman, Lennat, Tectdus, Alain… ça en valait la peine."

 

"Je savais que tu allais dire ça", fit doucement la guerrière. "Allez, je vais te laver les cheveux… on n'a pas beaucoup de temps."

 

 

 

 

Gabrielle se tenait devant le miroir, les sourcils froncés devant son reflet. "Je ne crois vraiment pas que…"

 

"Chh…" fit Xena en arrangeant sa manche. "Tu es magnifique." Et elle l'était ; la robe, composée de couches allant de gris clair à couleur d'ardoise, faisant ressortir son teint et faisait briller sa peau bronzée et ses cheveux blonds-roux.

 

"Non." Gabrielle se retourna et la regarda. "Je suis potable. Toi, par contre, tu es renversante." Elle caressa des yeux la magnifique longue tunique brodée bordeaux que portait Xena. "Mais évidemment, tu peux porter une serviette et être superbe, alors…"

 

"Tout le monde n'est pas de cet avis", ricana Xena en arrangeant le col de sa tunique avant de passant les mains dans ses cheveux sombres. La tunique était fuselée et rehaussait sa silhouette musclée avec une précision élégante, bougeant en même temps qu'elle et collant à son corps aux bons endroits. Pas mal, admit-elle quand même intérieurement. Enfin… puisqu'ils vont me fixer, autant leur donner quelque chose à fixer. Elle sourit devant son reflet et arrangea les bracelets au motif intriqué autour de ses poignets. "Au moins, ça couvre la plupart des cicatrices", dit-elle, mais ses yeux pétillaient.

 

Gabrielle jeta un coup d'œil dans le miroir et se trouva face à l'image qu'elles formaient, se tenant l'une à côté de l'autre dans la chaude lumière du soleil qui filtrait par la fenêtre. "En fait…" elle jeta un long regard vers Xena et rougit. "Quel tableau", fit-elle en acquiesçant vers leur reflet.

 

"Mmm." Xena haussa un sourcil à son attention. "On peut dire ça." Elle entoura le barde de ses bras et observa le résultat dans le miroir. Quel tableau, en effet.

 

Elles se regardèrent avant de sourire. "Ok… on ferait mieux d'y aller", dit enfin Gabrielle en donnant une dernière touche à sa robe.

 

"Hmm…" fit la guerrière. "Oh… encore une chose." Xena emprisonna tranquillement la main de Gabrielle et glissa doucement une bague à son doigt. Et elle savoura l'expression de pure surprise sur le visage du barde. "Je me suis dit que ça serait plus facile à transporter que cette maudite dague." Elle essaya d'être décontractée, mais sa voix se brisa, et elle se mit à rougir. Elle était plus nerveuse qu'elle ne le pensait.

 

Gabrielle ouvrit la bouche pour parler, mais rien ne sortit. Alors elle étudia la bague : c'était une version réduite de la chevalière de Xena, portant ses armes montées sur de l'or tressé en serpentin. "C'est… c'est magnifique", chuchota-t-elle enfin. Oh… dieux. C'est parfait. "Mais… je veux dire… tu n'avais pas à… je sais que tu…" Une courte pause. "Oh, Xena", souffla-t-elle de sa voix la plus douce.

 

"Uhm." Xena était plutôt mal à l'aise, ce qui n'était pas dans ses habitudes. "Ecoute… la cérémonie d'aujourd'hui, c'est… une sorte de contrat légal. Et… les Amazones ont une cérémonie qui… offre un… contrat social." Elle leva les yeux et croisa le regard de Gabrielle. "Je ne crois pas que ces choses-là… couvrent vraiment… ce que tu es pour moi."

 

Elle vit la mâchoire du barde se serrer et sa gorge avaler avec difficulté.

 

"Alors, il a fallu que j'improvise." Une pause. "Comme toujours… alors je… enfin, je me suis dit… je voulais te donner quelque chose qui…" Elle inspira. Dieux… c'était plus dur que ce à quoi elle s'attendait. "Quelque chose qui… enfin, qui indique à quel point… à quel point tu fais partie de moi." Voilà. Dieux. J'ai terminé des batailles en moins de temps, et avec beaucoup moins d'efforts. Et je l'avais même répété, ce petit discours… Elle baissa les yeux et termina doucement. "Parce que tu es une partie essentielle de ma vie, Gabrielle. Et je… je ne peux pas exprimer à quel point ça me rend heureuse."

 

Puis-je conserver ce moment à jamais ? Gabrielle s'entoura de ses bras. Je veux que ça ne s'arrête jamais, pour que je puisse l'emporter, dans les temps les plus difficiles et m'en souvenir, et il fera reculer les ténèbres et apaisera mon âme. Je veux me souvenir de chaque son, de chaque odeur… pour que le chant des oiseaux dehors, et le martèlement du forgeron, et l'odeur des nouvelles bougies de cire et la couleur de sa tunique et le regard dans ses yeux… tout… pour que tout me rappelle cet instant.

 

"S'il existait des mots pour exprimer ce que je ressens maintenant… je les dirais", fit doucement le barde. "Mais il n'y en a pas, alors je te dirai simplement que tu es ma vie." Elle fit une pause, sans jamais quitter les yeux de Xena. "Et mon foyer. Et que tu le seras toujours."

 

Elles goûtèrent le moment en silence, dans la chaleur du soleil qui s'écoulait sur leurs mains jointes et dansait sur le miroir, et laissèrent les émotions prendre leur place en elles.

 

Enfin, Gabrielle sourit pensivement. "J'ai lu des écrits qui célébraient l'union de deux vies… de deux cœurs… Xena, aucun de ces écrits ne décrit ce que c'est que de se trouver au centre de l'union de deux âmes…" Elle secoua légèrement la tête. "Je me demande pourquoi…"

 

"Je ne sais pas", répondit Xena en levant la main pour effleurer ses lèvres du bout de ses doigts. "Sans doute parce que tu ne l'as pas encore écrit." Ses yeux brillèrent d'une lueur dorée. "Maintenant, tu vas pouvoir le faire."

 

"Je crois bien que oui", répondit-elle en riant doucement. "Allez, viens… si j'arrive en retard, j'en entendrai parler jusqu'à la fin de mes jours."

 

Xena lui donna son bras et leva les sourcils. Gabrielle glissa son bras sous celui de la guerrière et elles partirent pour le temple.

 

 

 

 

"Tout est prêt ?" demanda Cyrène en posant une main amicale sur le bras d'Hécuba. "Hécuba ?"

 

"Hmm ?" fit-elle, distraite. "Oh… dieux. Oui, pardon, Cyrène. Tu es vraiment un cadeau des dieux. Merci." Elle jeta un coup d'œil sur la femme aux cheveux sombres, en essayant toujours de s'habituer à l'idée que l'étrange et violente Xena avait… une mère. Et une mère très gentille, en plus, qui était venue calmement et s'était occupée de tous les détails que son esprit éreinté n'avait pas le courage d'affronter. Elle avait été vraiment….compétente. Et elle avait dit des choses vraiment très gentilles sur sa Gabrielle qui était arrivée tranquillement dans sa cuisine un peu plus tôt et avait dit : "Maman, je te présente Cyrène." Et elle avait quitté ses préparatifs un instant, étonnée, et était tombée sur une femme d'âge mûr, de taille moyenne, et aux yeux perçants qui se tenait près de sa fille.

 

Et elle l'avait tout de suite beaucoup aimée. Elles avaient parlé de… la vie dans les villages, de moissons, de marchands. Ses lèvres esquissèrent un sourire. De filles. Elle en avait appris beaucoup plus sur la personne avec qui Gabrielle avait décidé de partager sa vie… et maintenant qu'elle avait fini par accepter ce fait, c'était devenu plus facile de voir Xena sous un autre visage que celui d'un ex-seigneur de guerre. Mais elle avait toujours peur pour sa fille. Et elle avait découvert que Cyrène partageait ses craintes.

 

A présent, elles se tenaient dans le temple et attendaient. Hécuba jeta un coup d'œil autour d'elle et aima ce qu'elle vit. "Ils ont vraiment fait du beau travail avec les fleurs, tu ne trouves pas ?"

 

Cyrène hocha la tête et regarda les villageois commencer à entrer dans le temple, se regroupant en petits attroupements et parlant entre eux. La porte s'ouvrit et Gabrielle se glissa à l'intérieur, repérant sa sœur près de l'autel et vint jusqu'à elle.

 

"Oh, dieux… est-ce qu'elle n'est pas jolie ?" fit Hécuba avec un petit sourire surpris.

 

Cyrène eu un petit rire appréciatif. "Très belle", acquiesça-t-elle. Et c'était vrai que le barde aux cheveux blonds était jolie… le gris dégradé de sa robe faisait ressortir la couleur de ses cheveux ainsi que ses yeux verts. Et puis… sa posture était assurée… et il y avait en elle une lueur intérieure qui changeait vraiment de la tristesse tranquille que Cyrène avait vue plus tôt. Il s'est passé quelque chose… et si je connais bien ma fille, elle doit y être pour beaucoup,pensa l'aubergiste.

 

"Gabrielle !" appela Hécuba en avançant vers elle. Le barde changea de direction et vint les rejoindre. "Comme tu es jolie !"

 

"Merci", fit Gabrielle en souriant. "Ils ont bien repris la robe." Elle baissa les yeux et haussa légèrement les épaules.

 

Un sifflement admiratif retentit derrière elle et Toris vint bientôt glisser sa tête entre Gabrielle et Cyrène. "Eh ben… tu es superbe, Gabrielle." Il cligna de l'œil et elle lui rendit un sourire chaleureux.

 

Le barde tira sur sa manche et se recula un peu pour mieux le voir. "Tu n'es pas mal non plus, Toris. Cette couleur te va drôlement bien."

 

Toris rougit, ce qui contrasta nettement avec le bleu profond de sa tunique, un peu plus sombre que ses yeux. "Euh… merci."

 

Hécuba pencha la tête vers sa fille et soupira. "Et quel joli collier." Elle tourna un peu Gabrielle vers la lumière. "Quelle merveilleuse couleur."

 

"C'est ce que tout le monde dit", répliqua Gabrielle avec un sourire espiègle.

 

Cyrène rit et baissa distraitement les yeux, remarquant un petit mouvement du coin de l'œil. La main de Gabrielle bougeait un peu, ses doigts jouant inconsciemment avec une bague qui d'habitude n'habillait pas son doigt. Puis elle s'immobilisa un instant. Assez longtemps pour que Cyrène puisse mieux voir le bijou. Cette morveuse ! pensa-t-elle en riant intérieurement. Je n'arrive pas à croire qu'elle ne m'a pas dit qu'elle allait faire ça !

 

"Oh, Lila me fait signe… il faut que j'y aille", remarqua le barde avant de serrer sa mère dans ses bras. "A tout à l'heure."

 

Elle se retourna et alla rejoindre sa sœur qu'elle serra elle aussi dans ses bras. Lila tira un peu sur sa manche grise et dit quelque chose qui devait être sarcastique, parce que Gabrielle ouvrit les bras et haussa les épaules.

 

"Dieux." La voix de Toris se transforma en grincement, ce qui inquiéta Cyrène.

 

"Quoi ??" fit-elle en se tournant vers lui, et réalisant que son regard était fixé sur l'autre côté de la salle. Elle se tourna et vit ce qu'il regardait, et leva les deux sourcils. Oh… dieux.

 

Xena était entrée dans la pièce par une porte latérale, et avançait dans le temple dans leur direction, traversant des rayons de soleil qui filtraient par les fenêtres et faisaient briller chaque repli de soie de sa tunique bordeaux, ainsi que les bracelets entrelacés qu'elle portait aux poignets. Elle avançait avec une force inconsciente que le tissu moulant ne faisait rien pour cacher.

 

Elle doit bien… pensa Cyrène, elle doit bien savoir que tout le monde a les yeux braqués sur elle. Un rapide mouvement de la tête et elle en eut la confirmation… et vit le petit coup de coude que Lila donna à sa sœur qui se contenta d'afficher un petit sourire satisfait. Et elle sentit en elle une poussée de fierté maternelle.

 

"Salut", fit Xena en regarda sa mère puis son frère. "Il y a quelque chose qui ne va pas ?"

 

"Oh… je vais te dire un truc… si tu n'étais pas ma sœur…" grogna Toris en se glissant près d'elle et en caressant du bout des doigts le doux tissu.

 

"Tu ferais quoi, Toris ?" répliqua Xena en levant un sourcils à son intention, accompagné d'un sourire féroce. "Hmm ??"

 

"Mmm… quelque chose qui me garantirait sans doute un voyage gratuit dans la hutte du guérisseur", répondit son frère en agitant ses sourcils. "Tu es vraiment canon, là dedans, sœurette."

 

Xena sourit. "Merci. Tu n'es pas mal non plus." Elle lui tapota les côtes. "Toi aussi, maman."

 

Cyrène ricana. "Hmm. Les deux plus beaux de toute la salle, et vous savez quoi ? Je suis leur mère."

 

"Maman !" soupirèrent-ils tous les deux de concert.

 

Cyrène sourit.

 

 

 

 

"Par Héra, Gabrielle… tu es magnifique. Beaucoup mieux que moi", fit Lila d'un ton taquin alors que sa sœur venait vers elle près de l'autel. "Depuis quand es-tu aussi belle ?"

 

"Lila !" s'exclama le barde en riant. "Arrête, tu veux." Elle jeta un coup d'œil autour d'elle et inspira profondément. Et elle repoussa les souvenirs de cet endroit, pour plus tard. C'était la journée de Lila et elle refusait d'avoir des pensées tristes pendant cette journée-là. "En plus, tu es vraiment belle, toi aussi."

 

"Non, vraiment", protesta Lila, en la tournant vers la lumière. "Je ne plaisante pas." D'un ton plus doux. "Tu as l'air… tu as l'air différent."

 

"Nan", fit le barde en souriant joyeusement. "Ce n'est que moi." Elle regarda autour d'elle. "Où est Lennat ?"

 

Lila leva les yeux au ciel. "Il reçoit des instructions de dernière minute de la part de notre père et de Tectdus."

 

"Mmm… et c'est une bonne chose ?" demanda Gabrielle en croisant les bras sur la poitrine, levant les sourcils.

 

"Oh, Lennat sait ce qu'il veut", gloussa-t-elle. "Et Tectdus est très gentil, alors…" Elle s'interrompit et tendit la main, saisissant celle de sa sœur et la tirant vers elle. "Gabrielle !!"

 

"Hé… qu'est-ce que… oh." Le barde abandonna sa main et essaya de ne pas rougir. "Oui… euh…"

 

"C'est vraiment magnifique", s'extasia Lila en examina le sceau. "Est-ce que c'est…" Elle leva les yeux vers sa sœur. "Bien sûr que oui." Elle sourit et s'interrompit, alors qu'elles se regardaient. "J'espère… dieux, j'espère que ma vie avec Lennat me rendra aussi heureuse que tu en as l'air en ce moment."

 

Gabrielle ferma les yeux et laissa la sensation de douce chaleur l'envahir à nouveau. Puis elle rouvrit les yeux et regarda sa sœur. "Je l'espère aussi."

 

"Ouais, eh bien je… dieux, Bree." Lila écarquilla les yeux et donna un petit coup sec dans les côtes de sa sœur. "Whoa…"

 

Ouais, whoa. Gabrielle inspira à nouveau. C'est à moi. Puis les yeux bleus l'appelèrent depuis l'autre côté du temple et capturèrent son regard, avec un clignement de conspiration. Et elle se rendit compte qu'elle avait cet incroyable sourire idiot sur le visage en voyant le pétillement dans les yeux de Xena et son sourire étincelant. "Elle n'est pas mal, hein ? " fit-elle à l'attention de Lila en regagnant le contrôle de son sourire.

 

Lila la regarda puis se mit à rire. "Eh bien, elle vient de scier la moitié du village sur place. Entre elle et Toris, tu as réussi à couvrir toutes les possibilités."

 

Gabrielle émit un petit rire et regarda Xena rejoindre sa famille sur le côté du temple. "Ouais… ils font vraiment la paire, ces deux-là." Et elle reçut un second clin d'œil de sa compagne, qu'elle lui rendit, avec un sourire.

 

Puis la porte s'ouvrit et Lennat traversa les grandes dalles de pierre, suivi de Tectdus et de Métrus, et enfin d'Hérodotus. Les villageois se turent et commencèrent à se rassembler autour de l'autel où se tenait déjà le prêtre.

 

Lennat vint se placer aux côtés de Lila, prit sa main et, la portant à ses lèvres, l'embrassa. Ils se tournèrent pour faire face à l'autel et le prêtre les rejoignit, posant des guirlandes de fleurs sur leurs têtes et les arrosant d'herbes parfumées.

 

Alain, les yeux écarquillés, se tenait près de Lennat, très nerveux, et encore tout rose du bain qu'il venait de prendre. "Mon frère !" chuchota-t-il à l'attention de personne en particulier, puisqu'on venait de lui apprendre la vérité. "Eh ben." Il leva les yeux et regarda du côté de Xena, puis lui sourit.

 

Elle lui fit un clin d'œil. Ce qui le rendit très heureux et le fit soupirer de plaisir. Ses histoires préférées étaient celles dans lesquelles la petite Bree lui parlait de héros. Il rebondit sur ses pieds une ou deux fois. Maintenant, il connaissait un vrai héros. Il avait une image, maintenant, rien qu'à lui… une image qu'il gardait pour lui pour s'en souvenir à jamais.

 

Hérodotus ne pipait mot, présence ronchonne derrière sa fille et Lennat. Son visage était immobile et fermé, et ne laissait paraître aucune réaction, même lorsque ses yeux quittèrent brièvement l'autel pour se poser sur Gabrielle. Et ils s'arrêtèrent là, parce qu'il savait que sinon, s'il laissait son regard dépasser l'élégante silhouette de sa fille, il aurait croisé deux yeux bleu glacé dont l'intensité était trop forte pour lui.

 

Qu'elle soit maudite, grogna-t-il en pensée. Je veux la haïr. Oh… ce que je veux la haïr. Mais son esprit repensait sans cesse à la veille… et ne le laissait pas en paix. Aucun répit, même avec assez de bière pour le plonger dans l'oubli ; il voyait sans cesse ce maudit minotaure foncer droit sur lui. Balançant cette maudite masse vers lui… et sachant que sa fin était proche.

 

Et puis cette maudite bonne femme… cette maudite bonne femme. Elle avait sauté devant le minotaure et prit le coup qui lui était destiné. Il l'avait vue… il avait vu l'expression de douleur intense sur son visage… même s'il essayait désespérément de l'oublier. Il avait entendu le craquement horrible alors qu'ils s'étaient tous les deux écrasés sur l'arbre près de l'endroit où il se tenait. Il l'avait vue…il ne savait pas comment… se relever et… il n'avait jamais pensé à ce que ça serait d'être un guerrier… il n'avait jamais pensé au-delà des épées qui brillent et des victoires… jamais pensé ce que c'était de jeter son corps, jour après jour, fois après fois, contre des ennemis qui, pour certains, étaient plus grands et plus rapides et plus forts que vous. Elle s'était jetée sur cette bête sans se préoccuper d'elle - sachant qu'elle seule se trouvait entre elle… et lui. Elle avait fait passer sa vie à lui avant la sienne. Et son esprit ne trouvait à présent qu'une seule définition pour la qualifier.

 

Il était furieux. Contre lui-même. Contre elle. Contre les maudites images qu'elle avait plantées dans son esprit, après toutes ces années, et qui remuaient en lui quelque chose qu'il voulait tant garder enfoui. Tant oublier. La partie de lui-même qu'il voyait avec tant de douleur dans sa fille aînée. Les dieux te maudissent, Xena. Tu n'éveilleras pas cette voix en moi, pas maintenant. Plus maintenant.

 

Mais elle était là. Et lui chuchotant à l'oreille. Il voulait tant lui céder - Hécuba lui avait demandé ce qui s'était passé lorsqu'il était rentré… et il s'était mordu la lèvre pour ne pas… Le besoin de peindre avec des mots les images qui étaient à présent ancrées dans son esprit. Le besoin qu'ils pensaient tous avoir éliminé en lui, il y avait tant d'années, le besoin qu'il avait lui-même tué à force d'amertume et d'alcool.

 

Résolu, il repoussa ces pensées. Et il retourna son attention vers le prêtre et la cérémonie qui se déroulait devant lui. Ça passerait après un moment. Ça passait toujours. Mais cette maudite bonne femme.

 

"On dirait qu'il a avalé un hérisson", marmonna Cyrène de façon presque inaudible, sachant que Xena l'entendrait.

 

"Mmm", répondit-elle à peine plus fort.

 

"Je ne peux pas lui pardonner, Xena. Je ne peux pas… je peux parler à Hécuba, mais…" continua-t-elle, ne quittant pas des yeux la cérémonie. "Il ne changera jamais."

 

Elle sentit soudain une main se poser sur son épaule et la chaleur qui l'accompagnait lorsque Xena se pencha vers son oreille. "Tout le monde peut changer."

 

Elle tourna légèrement la tête et croisa le regard sérieux de sa fille. Qui était la preuve vivante de ce fait. Son esprit réfléchit un instant. Etait-ce là la vérité ? Avait-elle changé au cours des deux dernières années… ou avait-elle simplement éveillé de nouveau une partie d'elle-même depuis si longtemps disparue ? Cyrène se souvint de la gamine qui insistait pour défendre de façon agressive les chiens errants du village et elle sourit. "C'est impossible, Xena."

 

"Demande-lui de te raconter une histoire", répondit sa fille en chuchotant. Puis Xena se redressa et heurta l'épaule de Toris qui écoutait avec attention les époux échanger leurs vœux. Il jeta un coup d'œil vers elle et sans crier gare, glissa son bras autour des épaules de sa sœur.

 

Ce qui lui valut un sourcil levé.

 

"Parce que je peux le faire et ne pas me faire briser les côtes", répondit-il avec un petit air suffisant. Puis il grimaça en la sentant bouger.

 

"Du calme", fit-elle en ricanant et elle lui rendit son geste, entourant son bras autour de sa taille. "Je ne vais pas te coller par terre au milieu d'un mariage."

 

Ils se regardèrent et sourirent, puis se tournèrent à nouveau vers la cérémonie, alors que Lennat levait les guirlandes de leurs cous, les entourant sur leurs mains jointes devant eux ; Xena vit les épaules de Gabrielle tressaillir un peu et une poussée de sympathie l'envahit. Tiens bon, mon amour. C'est presque fini.

 

Elle vit le barde inspirer profondément et redresser les épaules et la tête dans un mouvement que Xena connaissait si bien. C'est bien, pensa-t-elle en souriant.

 

Et puis la cérémonie prit fin et les mariés furent arrosés de pétales de fleurs, et bénis par l'intermédiaire de symboles de la fertilité de la terre. Lennat et Lila levèrent leurs bras pour se protéger de la pluie de pétales et coururent vers la porte en riant.

 

Et, alors qu'ils passaient le seuil en disant au revoir de la main, Xena revécut l'un de ses pires cauchemars. Même après tout ce temps, et sa relation avec Gabrielle étant devenue ce qu'elle était… cela faisait toujours mal. Le sentiment d'abandon qui avait laissé un tel vide en elle qu'elle avait… pour un moment si long, cette nuit-là… qu'elle avait presque… presque… Elle ferma les yeux, et laissa passer le souvenir. Bon sang… ça avait été une longue nuit. Et je n'avais pas pleuré autant depuis… Lyceus. Elle inspira profondément et sentit une main se poser sur son bras.

 

"Xena ?" La voix de Cyrène était très basse et un peu inquiète, alors qu'elle observait le visage de sa fille. "Ma chérie ?"

 

"Ça va, maman. Juste des mauvais souvenirs", fit Xena en laissant le cauchemar reprendre sa place au plus profond de ses pensées. "Belle cérémonie, hein ?"

 

Cyrène se força à sourire, devinant de quels souvenirs parlait Xena. "Très jolie", soupira-t-elle. Devrait-elle pousser la chose plus avant ? Non… pas besoin de remuer tout ça. "Hé…" Elle la poussa un peu du bout du doigt sur le ventre. "C'est une jolie bague que porte Gabrielle."

 

"Oof", fit Xena comme si le coup avait été réel, puis elle rougit un peu et baissa les yeux vers le sol en pierre. "Ouais, euh…"

 

"C'est mon nom que j'entends ?" fit la douce voix de Gabrielle alors qu'elle se glissait aux côtés de Xena et s'appuyait contre son épaule. "De quoi m'accuse-t-on encore ?"

 

"Toi ?" fit Xena en ricanant, sentant sa bonne humeur revenir. "Personne ne t'accuse jamais de rien ! Moi, au contraire…"

 

Elles se sourirent et Xena sentit le doux mouvement réconfortant de la main du barde contre son dos. Elle a sans doute senti ça, il y a une minute. Elle soupira. Laisse filer, Xena. C'est du passé. Pense au présent.

 

"Si vous êtes vraiment déterminées à partir", fit Cyrène gentiment, "vous feriez mieux de manger d'abord quelque chose."

 

"Maman, j'adore tes priorités", répondit Gabrielle avec un sourire satisfait qu'elle ne put contrôler. "Surtout quand c'est toi qui es aux fourneaux."

 

Cyrène gloussa un peu. "Ça peut s'arranger…. On y va ?" Elle leur fit signe de sortir et attrapa Toris au passage, le tirant vers la sortir, afin de laisser Xena et Gabrielle marcher quelques pas derrière eux.

 

Elles se regardèrent.

 

"Subtile", firent-elles à l'unisson.

 

Elles sortirent et puis Gabrielle ralentit un peu et tira sur la manche de Xena jusqu'à ce qu'elles s'arrêtent, à peu près à l'endroit où, pensa Xena, elles s'étaient dit au revoir la dernière fois.

 

Gabrielle fit une pause, de toute évidence réfléchissant à ce qu'elle allait dire, puis inspirant profondément. Elle leva les yeux vers Xena un long moment, puis soupira. "Pardon." Elle ferma les yeux et laissa tomber sa tête. "Pardon", dit-elle à nouveau, et cette fois, ce n'était qu'un murmure.

 

"Non." Xena leva ses deux mains et prit doucement le visage de Gabrielle entre elles, lui levant un peu la tête. "J'aurais dû te le dire."

 

Les yeux verts croisèrent les siens. "Il y avait quelque chose à dire ?" dit-elle avec un doux émerveillement dans la voix.

 

Xena acquiesça, laissant un léger sourire se dessiner sur ses lèvres. "Depuis longtemps."

 

Gabrielle inspira. "Combien de temps ?"

 

Le sourire s'agrandit. "Depuis le moment où je t'ai vue."

 

Le barde se pencha en avant et appuya doucement la tête contre la poitrine de Xena. "Je me sens mieux", soupira-t-elle. "Moi aussi."

 

Xena la serra dans ses bras et elles restèrent ainsi un moment, en silence.

 

Enfin, Gabrielle redressa la tête et eut un regard amusé. "Allez viens… allons manger un morceau, boire un verre de quelque chose un peu fort et fichons le camp d'ici. J'en ai vraiment plus que marre."

 

Xena ricana un peu et elles sortirent, bras dessus, bras dessous.

 

 

 

 

"Soyez bien prudentes", fit Cyrène un peu plus tard, en accrochant un sac supplémentaire à la selle d'Argo. "Voilà votre dîner."

 

"Maman", soupira Xena en riant, puis elle secoua la tête. "Merci." Elle serra Cyrène dans ses bras. "On fera attention. On veut passer chez les Amazones en revenant de la côte… on s'arrêtera peut-être à la maison."

 

Cyrène mit ses deux mains sur ses hanches. "Comment ça, peut-être ??"

 

Toris ricana et lui donna un coup de poing dans l'épaule. "J'ai hâte de vous revoir." Ce qui lui valut une étreinte de sa sœur, et le laissa un peu surpris. "Hé… tu vas pas te mettre à pleurer, non plus ?" L'étreinte se transforma en prise qui le souleva jusqu'à ce que ses pieds ne touchent plus le sol. "Euh… désolé. J'ai rien dit", toussa-t-il alors qu'elle le reposait par terre.

 

Xena soupira. "Porte-toi bien, Toris. Attention en rentrant à la maison… je n'aime pas trop l'idée de ces bandes de pillards dans le coin."

 

Toris sourit. "Il va sans doute falloir que tu restes dans les parages pour être sûre qu'on n'a pas de problème, alors, hein ?"

 

"Toris…" fit-elle avec un grognement menaçant.

 

Il tapota la joue de sa sœur. "Je plaisante."

 

Xena leva les yeux au ciel et finit d'attacher les sacs supplémentaires sur Argo. Elle se pencha et récupéra Arès, avant de le placer dans son sac de transport. "Tu seras bientôt assez grand pour courir derrière nous, hein, mon vieux ?" fit-elle à l'attention du loup.

 

"Roo !" protesta-t-il et il commença à mâchouiller son pouce. Elle jeta un œil par-dessus le dos d'Argo, gardant un œil sur le petit groupe de gens autour de Gabrielle. Sa famille, à laquelle Xena avait déjà fait ses adieux - plutôt cordialement, d'ailleurs.

 

"Fais bien attention, d'accord, Bree ?" Lila lui serra les mains et lui adressa un regard inquiet. "Tu promets ?"

 

Un sourire tranquille de la part du barde. "Je te le promets." Elle serra Lila dans ses bras, puis sa mère. "Prends bien soin de toi, maman", dit-elle un peu tristement, en sachant qu'elle ne reverrait sûrement pas Potadeia de si tôt.

 

"Porte-toi bien, ma fille", répondit Hécuba en soupirant. "Sois prudente."

 

Gabrielle hocha la tête et se retourna pour rejoindre Xena. Et se trouva face à face avec son père. Elle leva la tête et le regarda, attendant. Elle vit, par-dessus son épaule, deux yeux bleus très vifs qui la regardaient avec intensité. Elle sentit un sentiment chaleureux couler sur elle comme une pluie d'été. Il ne peut pas me faire de mal. Plus maintenant. "Papa", fit-elle d'un ton froid.

 

"Gabrielle", répondit-il en étudiant son visage. Il se reconnut pendant un instant, dans ces traits-là. "Porte-toi bien." Une pause. "Viens, je te raccompagne jusqu'à ton amie." Aucun sous-entendu désagréable dans le mot. Aucune indication de ses sentiments.

 

Elle hocha la tête et ils se mirent en marche.

 

"Parfois, on dit des choses… à la hâte… qu'on regrette ensuite", commenta Hérodotus, en mettant ses mains derrière son dos et en regardant partout, sauf sa fille. Ni les yeux de Xena, qui se rapprochaient de plus en plus.

 

"Parfois", fit Gabrielle en le regardant.

 

"J'ai dit des choses…" fit son père, en inspirant. "Veux-tu…"

 

Gabrielle s'arrêta et le regarda. "Je ne m'en souviens pas."

 

Hérodotus acquiesça. " Très bien."

 

Ils s'arrêtèrent devant Argo et Hérodotus croisa, par-dessus le dos de la jument, le regard de Xena. Il cligna des yeux. Pas elle. "Je ne t'aime pas", dit-il brusquement.

 

Xena leva un sourcil. "Je ne t'aime pas beaucoup non plus, Hérodotus."

 

Lentement, il hocha la tête. Puis il contourna Argo et vint se planter devant elle, avant de la dévisager de la tête aux pieds.

 

Et il tendit son bras, que la guerrière prit, plutôt surprise. "Tant qu'on se comprend." Il relâcha son bras et se recula, jetant un dernier regard vers Gabrielle avant de se retourner et de repartir vers la noce. Il ne se retourna pas.

 

Elles se regardèrent, étonnées, et un peu hésitantes. "Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?" se demanda Gabrielle.

 

Xena haussa les épaules. "Je préfère ne pas savoir." Elle se hissa sur la selle d'Argo et attendit que Gabrielle ait fini d'échanger des étreintes chaleureuses avec Cyrène et Toris.

 

"Merci d'être venus", chuchota-t-elle à l'oreille de Cyrène. "Ça veut dire vraiment beaucoup pour moi."

 

Cyrène lui tapota doucement le dos. "On n'aurait manqué ça pour rien au monde."

 

Le barde hocha la tête et vint aux côtés d'Argo, puis leva les yeux.

 

Xena sourit et tendit son bras, hissant Gabrielle derrière elle.

 

Elles dirent au revoir de la main et Xena, d'un petit coup de genou, lança Argo au petit galop ; elles virent bientôt le village laisser la place aux champs, puis à la campagne.

 

"Alors. Tu as déjà pensé à faire carrière dans la diplomatie ?" demanda Gabrielle sur le ton de la conversation.

 

"Hein ?" s'exclama Xena en se retournant à moitié sur la selle. "Oh… ouais… je suis drôlement diplomate, c'est sûr. Hé, Monsieur le Conseiller, annule ta guerre ou je te broie le bras. C'est ça…"

 

"Non, sérieusement. Je crois que tu serais vraiment bonne. Tu pourrais galoper dans la campagne avec ce groupe d'assistants et envoyer des messages diplomatiques dans tout le pays."

 

"Gabrielle !"

 

"Non, hein ?"

 

"Non."

 

Le barde soupira. "Et consultante de mode. Cet ensemble que tu portais…"

 

"Gabrielle…" Cette fois, c'était un grognement sourd. "J'aime ce que je fais."

 

Gabrielle sourit. "Tant mieux." Elle se pencha en avant et effleura des lèvres le dos de Xena. "J'aime ce que tu fais, moi aussi."

 

Leur rire retentit derrière elles alors que Xena lançait Argo dans un grand galop et affolait un attroupement de canards dans la prairie devant elles.

 

Fin

 

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