LA PIERRE DE CHRONOS

 

par DJWP

traduction : Kaktus

 

 

 

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Partie 4A

 

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Chapitre 12

 

" Alors maintenant, on fait quoi ? " demanda Ephiny en observant un groupe de femmes passer près de l'arbre derrière lequel elles se dissimulaient. Elles avaient monter leur camp non loin de la route principale menant à Golconda. Xena avait décidé d'envoyer un groupe d'éclaireuses évaluer la situation avant de pénétrer dans la ville avec un bataillon d'Amazones. Naturellement, la Conquérante avait insisté pour être de la partie, et puisque Xena y allait, alors Gabrielle aussi, et si Gabrielle partait... bref…

Ephiny aurait préféré se reposer après la marche fatigante depuis Muziris, mais voilà qu'elle se trouvait là avec Xena, Gabrielle, Yakut et quelques autres, dans la chaleur du soleil indien, en pleine heure de midi, se cachant derrière un arbre et jetant un coup d'œil sur la route.

Les tactiques militaires amazones de pointe… ne me faites pas rigoler.

 

La voie de communication était encombrée, par le trafic du jour de marché. Plusieurs groupes de femmes peu vêtues flânaient parmi les arbres et Ephiny se changea les idées en admirant les motifs complexes dessinés sur leur corps.

 

" On fait quoi ? On frappe à la porte de leur temple en disant 'Hé ! Donnez-nous votre bijou sacre' ? "

 

" Je pourrais le faire ainsi", répondit Xena, ignorant le regard appuyé qu'elle reçut de Gabrielle, " Mais on va faire autrement. "

 

" Quel est ton plan ? " demanda la guerrière amazone avec suspicion.

 

" Il est temps pour la Conquérante de faire une apparition. " Xena se cacha derrière l'arbre et passa un bras derrière son dos tentant d'atteindre une petite agrafe sur son armure.

 

" Attends, laisse-moi t'aider ", offrit Gabrielle en s'approchant pour le faire elle-même. Ephiny la devança. " Je vais le faire. " dit la guerrière blonde, donnant un coup de coude peu aimable à la princesse.

 

La barde se renfrogna mais s'écarta.

Xena tourna le dos à Ephiny, jetant un regard à l'Amazone par-dessus son épaule. " Envoie quelqu'un chercher tes guerrières. "

La demande de la Conquérante sonna comme un ordre aux oreilles d'Ephiny. Elle cessa sa tâche et fronça les sourcils. " Par Hadès ! Il n'est pas question que mes Amazones attaquent cette ville ! "

 

Xena soupira. " Ephiny, je ne projette aucune attaque. Xena la Conquérante va faire une visite officielle à la ville de Golconda. Elle ne peut pas flâner dans la ville, non escortée, comme si elle était une simple touriste. "

 

Ephiny tira d'un geste sec l'agrafe têtue. " Je ne veux pas que tu t'habitues à être escortée par les Amazones, Xena. " Celle-ci souleva le bras pour l'aider. " Je le fais seulement pour obtenir la pierre aussi rapidement que possible. "

 

" Nous le savons, Xena. " dit la barde, en offrant un sourire chaleureux à la guerrière. " N'est-ce pas ? "

Les yeux de la barde se rétrécirent alors qu'elle jetait un regard en direction d'Ephiny. La guerrière amazone répondit tirant violemment sur l'agrafe.

Xena réussit à soulever l'armure au-dessus de sa tête. Elle tira son long manteau de soie d'un paquet à ses pieds et se glissa dans le vêtement de fonction. " Ma présence nous obtiendra une audience avec leurs chefs plus rapidement que n'importe quoi d'autre. "

" Et ensuite ? "

 

" Ensuite, " dit Xena en plaçant la couronne de la Conquérante sur sa tête. " Nous demanderons à voir la pierre. "

" Et ensuite ? "

 

" Tu as toujours des questions en réserve, n'est-ce pas ? " indiqua calmement Xena pendant qu'elle ajustait la couronne sophistiquée sur ses cheveux. " Je ne connais pas chaque détail. Tout ce que je sais,

c'est que je dois entrer et mettre la main sur cette pierre... aussitôt que possible. "

 

Xena fit une pause en attachant l'avant de son long manteau, se demandant combien de temps elles avaient avant qu'Alti ne les rattrape. L'image de la sorcière incita la guerrière à nouer l'avant de sa tunique encore plus vite. " Yakut, que se passera-t-il quand je toucherai la pierre ? "

 

La jeune chamanesse haussa les épaules. Ce geste et le fait que la coiffure de chaman qu'elle portait était trop grande pour elle, fit réaliser à Xena combien elle était jeune et inexpérimentée. Mais c'était sa faute à elle, pensa Xena, car elle était celle qui avait détruit une grande partie des Amazones.

 

" Je ne suis pas sûre ", répondit Yakut, se sentant soudainement très mal à l'aise sous le regard scrutateur et intense de la Conquérante. " Je sais que la pierre est censée être

maudite. "

 

" Maudite ? " demanda Gabrielle. " Que veux-tu dire par maudite ? "

 

" Elle est protégée par un esprit. Je ne sais pas ce qui se produira si tu touches la pierre, Conquérante, mais je ne pense pas que ce soit une bonne idée. "

 

" Génial ", commenta Ephiny en levant les yeux au ciel.

 

Xena s'avança avec colère vers la jeune chamanesse. " Que dis-tu ? Que nous sommes venues jusqu'ici et que je ne peux même pas toucher la pierre ? "

 

" Hé ! " Yakut recula, les mains levées devant elle. La coiffe trop grande lui tomba sur le front. " Ephiny m'a ordonné de trouver une pierre semblable à la pierre de Chronos. Celle-ci est la plus proche qui existe. Le troisième œil de Lakshmi se trouve dans la tête de la statue de Sita et veille sur nos destinées. J'ai supposé que si quelque chose n'allait pas avec la tienne, ce troisième œil devait en connaître la raison. "

 

Comme l'intensité dans le regard de la Conquérante ne diminuait pas, Yakut fit la moue. " Ces choses-là ne viennent pas avec des instructions écrites, tu sais. "

 

Xena plissa ses yeux. " Bien. Si ce n'est pas une bonne idée de la toucher, que dois-je faire alors ? "

 

Yakut releva sa coiffe avec l'extrémité de son doigt. " Si tu peux t'en approcher assez prêt, essaie de regarder dans la pierre et tu verras bien si quelque chose se produit. "

 

La Conquérante hocha la tête. " Voici donc le plan. Je demande audience dans le temple. Je leur dirai que je suis venue pour

rendre hommage à Vishnu , à Shiva, à Krishna ou à un autre. Une fois que je serai dans le temple, je m'inclinerai devant la statue et offrirai… " Xena regarda autour d'elle, cherchant quelque chose qui pourrait constituer une offrande. Ses yeux tombèrent sur le collier attrayant autour du cou d'Ephiny. Elle le lui retira avant qu'Ephiny puisse même ciller. " J'offrirai ceci. "

 

" Hé ! " hurla Ephiny, frottant la place maintenant vide sur son cou. " C'est mon collier ! "

 

" Il est très joli ", indiqua Xena en admirant l'éclat du bijou.

 

" Pourquoi ne pas offrir ta jolie couronne à toi? "

 

Xena fronça les sourcils, scandalisée par la suggestion. " Cette couronne est un symbole de mon empire. "

 

" Ce collier était un cadeau de Gabrielle ! "

 

Xena regarda le bijou avec encore plus d'appréciation. " Vraiment ? Il est très beau. "

 

Gabrielle secoua la tête avec amusement. Ces deux-là finiraient par la rendre folle.

" Ephiny, laisse-la utiliser le collier. Je t'en donnerai un autre. "

 

" C'est celui-là que j'aime ! "

 

" Je t'en donnerai un autre ! "

 

La guerrière blonde lança un regard mauvais à la Conquérante. " Bien. Juste une question, Conquérante. Que se passera-t-il s'ils ne te laissent pas regarder la pierre ? "

 

Xena poussa un profond soupir ne voulant même pas penser à la réponse. " Nous verrons ça au moment voulu. "

 

" Tu ne penses pas à assiéger cette ville pour l'obtenir ? "

 

" Ça ne fait pas partie du plan. Mais il y a quelque chose dont nous allons avoir besoin si tout fonctionne. " Xena s'éloigna du groupe. " Je reviens tout de suite. "

 

" Et où vas-tu ? " Ephiny tendit le cou derrière le tronc de l'arbre, essayant de voir ce que Xena allait faire.

 

Xena s'avança sur la route et passa les mains sur le devant de son superbe manteau de soie, dans l'espoir d'en atténuer les plis.

 

" La Conquérante ne peut pas entrer à pied dans une ville pour une visite royale. Je dois arriver sur quelque chose d'un peu plus majestueux. "

 

" Plus majestueux ? Plus majestueux ? Quoi de plus majestueux que d'être escortée par des Amazones ? Ça a marché à Clysma. "

 

Xena surveillait les passants le long de la route. Il y avait des négociants et des voyageurs de toute sorte utilisant plusieurs modes de transport, mais aucun ne sembla satisfaire les besoins de la Conquérante.

 

Ephiny s'impatienta. " Si tu cherches ton carrosse, il est resté à Corinthe. "

 

" Non ", répondit Xena, en regardant autour d'elle. " Je recherche quelque chose de bien plus impressionnant. " Ses yeux bleus étincelèrent quand elle découvrit la réponse parfaite avançant lourdement vers elles sur la route.

 

" Ça ! " annonça-t-elle joyeusement en pointant du doigt. " C'est exactement ce que nous recherchons. "

 

L'objet en question apparut lentement à leur vue, par-dessus les têtes des nombreux piétons voyageant le long de la route.

 

Les sourcils d'Ephiny se dressèrent presque au-dessus de sa tête. Gabrielle ouvrit et referma la bouche, sans voix. Et Yakut sursauta si fort que sa coiffe tomba en avant et recouvrit complètement son visage.

 

*****************

 

" Je dois admettre qu'elle sait comment faire une entrée. " commenta Ephiny, jetant un coup d'œil autour d'elle, depuis où elle se trouvait.

 

" Je trouve aussi. " répondit Gabrielle, prenant la liberté d'un long et élogieux regard à la vision incroyable que représentait Xena, la Conquérante. Les vêtements colorés et les coiffes de plume des Amazones ajoutaient au spectacle du cortège qui pénétrait dans la ville de Golconda.

 

La vision d'un régiment de guerrières Amazones passant les portes de la ville n'était rien comparée à l'image de Xena, la Conquérante, montant un éléphant au centre de l'escorte. Elle s'était installée sur le grand animal comme si elle l'avait fait toute sa vie, accompagnant le mouvement des pas lourds d'une façon innée.

 

La foule de la ville s'écartait pour laisser passer le cortège, formant deux lignes sur tout le trajet jusqu'au centre de Golconda. Même Ephiny releva la tête avec fierté en entendant leurs acclamations et leurs cris.

 

Xena regarda vers Gabrielle et adressa un clin d'œil heureux à la barde. La princesse amazone lui répondit par un sourire lumineux. Elle se redressa afin de maintenir sa propre aura majestueuse. D'une main, elle tenait son bâton qui frappait contre le sol au même rythme que les pas lents de l'éléphant. L'autre était posée à l'extrémité d'une des magnifiques et longues oreilles de l'animal. La peau en était étonnamment douce.

 

Xena baissa le regard vers la barde et l'observa du coin de l'œil, appréciant sa façon de redresser la tête et de marcher avec son bâton. C'était l'incarnation d'une vraie princesse amazone, marchant fièrement, ses cheveux dorés brillant sous l'éclat du soleil, … jusqu'à ce que l'éléphant prenne soudain la liberté de la chatouiller doucement avec sa longue trompe.

 

" Hé ! " Gabrielle cria de surprise, frappant de la main la trompe semblable à un serpent. L'éléphant dut aimer cela car il recommença à la chatouiller.

 

" Ça suffit, arrête ! " La barde écarta la trompe.

 

Xena rit et tapota la tête de l'éléphant. Elle ne pouvait pas le blâmer d'aimer ça.

 

Le cortège s'arrêta devant ce qui ne pouvait être que le grand temple de la ville de Golconda. Une longue rangée d'escaliers faits du plus pur marbre blanc conduisait à sa grande entrée. Les sculptures le long des colonnes et à travers la façade étaient complexes dans leurs détails, dépeignant Rama et Sita et tous les dieux hindous dans leurs diverses représentations. Des tapisseries éloquentes pendaient des balcons de marbre, attirant le regard vers le toit sphérique qui se recourbait en une flèche et pointait vers les cieux, indiquant le chemin du nirvana.

 

Xena sentit l'éléphant qui stoppait et elle prit un moment pour étudier discrètement les environs. Il y avait des gardes partout : alignés devant le temple, le long des toits des bâtiments adjacents, et d'autres dispersés près des murs de la forteresse de la ville. Cet endroit était fortement protégé, le temple étant évidemment important.

 

Sur un ordre d'Ephiny, les Amazones formant l'escorte levèrent leurs épées, exécutant une série de mouvements complexes qui attirèrent l'attention. Xena haussa un sourcil. L'effet était très impressionnant.

 

La leader des Amazones fit un pas en avant et salua le contingent des hommes en robe blanche qui se trouvaient devant l'entrée du temple supposant qu' ils étaient les leaders.

 

" Xena, la Conquérante ! " annonça-t-elle d' une voix forte et impérieuse, saluant les leaders une fois de plus puis se retournant alors pour saluer la Conquérante. Elle haïssait cette partie du travail, mais elle devait le faire.

 

L'annonce provoqua une vague de chuchotements dans la foule sur la place.

 

Xena attendit calmement sur l'éléphant, consciente que c'était un moment important. L'Inde était une partie éloignée de son

empire, pas aussi retirée que la Chine, mais pas aussi fortement alliée non plus. Bien que ce pays lui appartienne, il restait à voir comment les personnes de cette petite ville réagiraient à sa présence.

 

Les prêtres parurent incertains. Le soleil se reflétait brillamment sur leurs longues robes blanches pendant qu'ils se regardaient les uns les autres d'un air inquiet. Xena attendait toujours patiemment, laissant la majesté du spectacle prendre la décision pour eux. Il se passa un peu de temps puis tous les hommes se mirent à genoux et s'inclinèrent devant leur souveraine.

 

Le reste de l'audience suivit.

Xena poussa un soupir de soulagement puis émit une série de sons qui mirent l'éléphant en mouvement. Gabrielle et Ephiny s'écartèrent alors que la bête pliait les pattes avant et se mettait à genoux.

Xena glissa de son dos avec élégance, défroissa sa robe longue, puis s'avança vers les escaliers pour parler avec les dirigeants de la ville.

 

Elle tira sur la robe longue de la chamanesse en passant près d'elle.

 

" Viens avec moi ", commanda-t-elle à voix basse.

 

Les yeux de Yakut s'arrondirent. " Tu veux que je vienne avec toi ? "

Mais la question se répercuta sur le dos vêtu de soie de la Conquérante qui était déjà à mi-chemin des escaliers. Ephiny fit un signe de tête à la chamanesse, et Yakut se dépêcha de la suivre.

 

Xena emprunta les escaliers menant au temple, sachant que la longueur de sa robe donnait l'impression qu'elle flottait au-dessus du sol. Elle avait utilisé cette illusion à de maintes reprises.

 

Atteignant le sommet de l'escalier, elle s'arrêta devant le groupe de prêtres. Ils la regardaient avec une expression que Xena identifia facilement : de la crainte. La guerrière se retint de sourire.

 

" Xena ", dit un des prêtres en s'inclinant.

 

" C'est Conquérante pour vous ", répondit Xena dans leur propre langue. Elle sentit la présence de Yakut qui trébuchait derrière elle mais ne lança aucun regard à la jeune chamanesse.

 

" Ta présence nous honore ", offrit un autre prêtre, en s'inclinant lui aussi.

 

Xena hocha la tête et examina rapidement les sculptures et les illustrations qui ornaient le marbre tout autour d'eux.

 

" Je suis venue remercier Sita, " dit-elle faisant signe à Yakut de leur montrer le collier, " Lakshmi a été bon avec moi. "

 

La jeune chamanesse regarda Xena d'un air indécis, n'ayant pas compris un mot de cette langue.

 

" Le collier, Yakut, montre-leur le collier. "

 

" Oh. "Yakut passa une main sous son manteau en peau et en sortit l'offrande, qu'elle montra aux prêtres. Le premier d'entre eux regarda le collier sans expression.

 

" Ce sont des pierres précieuses rares en Grèce, un symbole du courage amazone. Une offre appropriée pour Sita, je pense. "

 

Tous les prêtres sourirent. Xena sourit. Yakut sourit, bien qu'elle n'ait aucune idée du pourquoi.

 

" Tu ne peux pas entrer dans le temple , dit le prêtre placé au centre, toujours souriant.

 

" Tu ne peux pas entrer ", confirma un autre.

 

" J'ai fait un long chemin... " commença Xena, mais le prêtre au centre leva sa main.

 

" Aucune femme ne le peut. C'est un blasphème. "

 

Xena perdit son sourire et regarda Yakut. La jeune chamanesse était toujours en train de sourire, ne comprenant pas un seul mot.

Elle se tourna à nouveau vers les prêtres, son expression un peu moins enchantée. " Mais vous avez une statue de Sita à l'intérieur et Sita est une femme... "

 

" Sita est un avatar (NDLT : en mythologie hindouiste, chaque incarnation du dieu Vishnou est appelée ainsi) et est consacrée et bénie plus que les autres. "

 

" Tu ne peux pas entrer dans le temple. "

" C'est un blasphème. "

 

L'expression tendue sur le visage de la Conquérante fit perdre son sourire à Yakut. " Conquérante... il y a un problème ? " demanda-t-elle doucement.

 

Xena s'efforça de détendre son visage, essayant très fort d'empêcher sa main de saisir le couteau caché à l'intérieur de son manteau et de tous les écharper. A la place, elle regarda sa compagne.

 

" Ils ont dit demain. Nous devons attendre jusqu'à demain. "

 

Yakut remit le collier sous son manteau et haussa les épaules. " Oh, bien, ce n'est pas si mal. "

 

Xena tourna le dos aux prêtres et redescendit les escaliers. Yakut, surprise par ce brusque départ, trébucha derrière elle quelques secondes plus tard.

 

*****

 

Xena frottait rageusement la pierre à aiguiser contre le bord de son épée.

 

" Je devrais déjà avoir cette pierre dans les mains ! " S'emporta-t-elle, regardant fixement dans l'obscurité de la forêt. Elle donna un autre coup sur l'épée. "J'aurais dû entrer et la prendre. "

 

La pierre à aiguiser stoppa son mouvement. C'était exactement ce qu'elle avait besoin de faire. Elle ne pouvait pas dire à Gabrielle et aux Amazones qu'on lui avait refusé l'accès et elle ne pouvait pas non plus attendre jusqu'au lendemain pour essayer de nouveau. Alti était sur leurs talons et il n'était pas question que cette sorcière mette la main sur le Troisième Oeil De Lakshmi.

 

Xena interrompit son aiguisage et écouta les sons des Amazones qui faisaient de l'ordre après le repas du soir. La vaisselle était faite, les épées aiguisées, et les conversations commençaient autour des petits feux de camp dispersés partout dans la forêt. Ç'avait été une longue marche d'une journée pour arriver ici et une procession stressante dans Golconda. Elles allaient s'endormir rapidement.

 

Et quand la dernière des Amazones serait au lit pour la nuit, Xena se chargerait de régler la situation comme elle aurait du le faire en premier lieu.

 

Malédiction ou pas, elle allait se glisser dans ce temple et prendre la pierre. Une fois qu'elle serait entre ses mains, aux dieux de décider de la suite.

 

"Xena ?" Une voix douce appela dans la nuit.

 

"Ici", répondit Xena, rangeant la pierre à aiguiser dans son sac.

 

Gabrielle sortit des buissons et pénétra dans la petite clairière où Xena s'était retirée après le dîner.

 

" Salut. " La barde sourit. " J'ai pensé que tu aimerais un peu de compagnie. "

" Bien sûr. Assieds-toi. "Xena se déplaça un peu sur le rondin où elle était assise, faisant de la place pour Gabrielle. " Je suis étonnée qu'Ephiny te laisse te promener seule dans les bois. "

 

" Elle aiguise son épée ", sourit Gabrielle. " C'est aussi ce que tu faisais ? "

 

" Ouais. Les vieilles habitudes de guerrière ont la vie dure. "

 

Elles se sourirent mutuellement, découvrant toutes les deux avec surprise l'aisance de leur rapports.

 

" Xena ", commença Gabrielle. " Yakut m'a dit que tu avais parlé aux prêtres hindous dans leur propre langue. "

 

" Ouais, et alors ? "

 

" C'est très impressionnant. Combien de langues parles-tu ? "

 

Xena mordilla sa lèvre supérieure et regarda à travers les arbres.

"Je ne sais pas. Je ne les ai jamais comptées. J'ai essayé d'apprendre toutes les langues... "

 

" De tous les pays que tu as conquis ? "

 

" De tous les endroits où je suis allée. J'aime apprendre des langues différentes. Ça me vient facilement. J'étais déjà douée pour ça étant enfant. "

 

Gabrielle se mit à rire doucement.

 

" Qu'est-ce qui est si drôle ? " demanda Xena.

 

" Je ne sais pas. C'est difficile d'imaginer la Conquérante en enfant. "

Xena prit le fourreau en cuir et fit glisser son épée à l'intérieur."Je suis un être humain, malgré tout. Je suis née et j'ai grandi comme tout le monde, bien que ma mère voudrait probablement le nier. "

 

" Je suis désolée, " dit Gabrielle, se sentant soudainement mal. " J'essayais seulement de te taquiner. Mais en vérité, il y a des gens qui croient que tu n'es pas humaine. "

 

" Qui pensent que je suis un monstre impitoyable formé d'argile ? Qu'Arès lui-même m'a insufflé la vie et placée sur terre pour semer la désolation partout où je passe ? "

 

Gabrielle hocha la tête lentement.

 

" J'ai entendu cette histoire. Il fut un temps où je l'ai presque crue moi-même. La vérité, Gabrielle, c'est que j'ai du sang dans les veines, comme tout le monde. Si tu me coupes, je saigne. Et une épée dans mon cœur me tuera aussi sûrement qu'elle tuerait quelqu'un d'autre. " Xena regarda l'épée dans sa main puis la jeta par terre.

 

" Tu vas toucher cette pierre, n'est-ce pas ? " demanda Gabrielle soudainement. " Tu vas aller là-bas demain et prendre la pierre directement sur la statue, malédiction ou pas. J'ai raison ? "

 

Xena leva la tête, surprise, et regarda fixement la barde. " Oui ", répondit-elle simplement. " Je dois le faire. "

 

" Pourquoi, Xena ? Pourquoi risquer ta vie d'une telle façon ? "

 

Xena haussa son sourcil. " Si tu crois à peine en mon histoire de pierre, alors comment peux-tu croire en sa malédiction ? "

 

" Je n'y crois pas ", répondit Gabrielle, " mais je crois qu' il y aura une salle pleine de gardes qui seront heureux de te plonger une épée dans le cœur. "

 

" Ils devront m'attraper d'abord. "

 

" Tu n'auras nulle part où aller... là-dedans. " Gabrielle soupira et posa ses mains sur ses genoux. " Xena, une fois que tu auras pris cette pierre sur la tête de la statue, si elle ne te fait pas disparaître et retourner d'où tu viens, tu te retrouveras face à une salle pleine de gardes hindous. Trop de gardes je pense, tu seras seule contre eux. Ils te tueront, Xena. Y as-tu pensé ? "

 

" Au moins, Ephiny n'aura plus à le faire elle-même. "

 

" Ce n'est pas drôle. Personne ne veut te tuer. "

 

Xena ricana.

 

" Je ne la laisserai pas faire. "

 

" Vraiment ? Peut-être que je devrais t'emmener là-bas avec moi pour me protéger. "

 

Gabrielle sourit. " J'y entrerais sans hésiter mais d'une façon ou

d'une autre je ne pense pas qu'Ephiny me laisserait y aller. "

 

" Merci d'y avoir pensé, Gabrielle. Mais je ne te laisserais pas le faire non plus. "

 

La barde hocha la tête. " Je sais. " Elle s'approcha plus près de la guerrière. " Xena, pourquoi risquer cela ? Peut-être que c'est comme ça que ça doit être, c'est pour ça que les choses ont changé. Pourquoi ne pas laisser les choses comme elles sont maintenant ? "

 

Xena se tourna sur le rondin de façon à faire face à la barde. " Gabrielle, pourquoi es-tu si déterminée à vouloir garder les choses ainsi ? Je pensais qu'entre tous, tu serais celle qui voudrait le plus voir le règne de Xena la Conquérante prendre fin. "

 

" Parce que le règne de Xena la Conquérante est déjà terminé. Tu n'es plus la même personne, tu n'a plus à régner de la même manière. Tu peux faire beaucoup de bien maintenant, j'en suis sûre. Ce dont je ne suis pas sûre, c'est ce qui arrivera si tu meurs. Le monde est plein de chefs militaires qui souhaitent le dominer. N'importe lequel d'entre eux serait bien pire que toi. Cette femme effrayante, Alti, est la première qui me vient à l'esprit. "

 

" Si Ephiny t'entendait, elle te considérerait comme une traîtresse. "

 

" Ephiny peut voir la différence en toi. Elle ne veut simplement pas l'admettre. "

 

Xena se détourna sur le rondin. Même ici, où Xena était la Conquérante, Gabrielle trouvait encore le moyen de croire en elle. " Il y a d'autres raisons ... des choses que tu ne connais pas, Gabrielle. "

 

" Dis-les moi alors. "

 

" Je ne peux pas."

 

Gabrielle la saisit par l'épaule et la força à se retourner. " Pourquoi ? Pourquoi pas ? J'espère que tu ne risques pas ta vie parce que je te manque comme amie ? "

 

Xena regarda vers le sol d'un air coupable. " Mon amie me manque, oui. "

 

" Mais tu n'as pas besoin de voyager dans le temps pour trouver ton amie, Xena. Ton amie est juste ici, assise à côté de toi. "

 

" Vraiment ? "

 

La barde sourit malicieusement. " Oui, vraiment. " Mais le sourire chaleureux s'effaça. " Xena, ne me dis pas, s'il te plaît que tu es prête à risquer le destin du monde ... à cause de moi ? "

 

Xena resta silencieuse pendant un instant, essayant de penser à toutes les raisons de ramener les choses telles qu'elles étaient. Il y avait plus de raisons que simplement le désir de retrouver sa compagne, c'était certain. Mais en vérité, aux yeux de la guerrière, rien n'était aussi important. Mais elle ne pouvait pas dire cela à Gabrielle.

 

" Ce n'est pas juste à cause de toi. Il y a des vies là-bas qui ont été changées. Certaines pour le meilleur, je l'admets, mais d'autres non. Le plus important, c'est un homme nommé Hercule... "

 

" Hercule ? "

 

" Tu ne reconnais pas son nom parce qu'il n'existe pas ici, mais il était un héros dans le monde entier et plus que cela pour moi. Quand je l'ai rencontré, j'étais en train de conquérir le monde et de devenir ce que je suis maintenant. Il m'a montré un chemin différent et grâce à lui, mon existence a été changée pour toujours. Je ne sais pas ce qui est arrivé pour qu'il disparaisse ainsi de la face du monde, mais si Iolaus a risqué de voyager dans le temps pour voler la Pierre de Chronos, ce n'était rien de bon."

 

" Il a aidé ce monde d'une façon que tu ne peux imaginer, Gabrielle. Pour lui, je me dois d'essayer de remettre les choses en place. Mais ce qui est plus important encore, je le dois à chacun. Ce monde n'est pas censé être gouverné par une personne et une personne seule. Rien de bon ne peut en résulter, et peu importe qui le gouverne. "

 

Aussi fantastique que cela puisse paraître, Gabrielle savait que tout ce que Xena disait était vrai. " Alors, demain, tu vas prendre le Troisième Oeil de Lakshmi entre tes mains. "

 

Xena hocha la tête. " Soit je serai capable d'employer son pouvoir pour réparer cette déchirure du temps, soit je me retrouverai dans une salle pleine de fanatiques hindous avec leur pierre sacrée dans mes mains. Si ce n'est pas une malédiction, je ne sais pas ce qui l'est. "

 

" Peut-être que je devrais entrer là-dedans avec toi... "

 

" Non. "

 

" Je pourrais les distraire avec mes histoires de barde… "

 

" Non. "

 

" Je pourrais leur expliquer ce qui est arrivé... "

 

" Non ! "

 

" Envoyer un signal à Ephiny si les choses tournent mal ... "

 

" J'ai dit non ! "

 

Gabrielle, en colère, croisa ses bras. " Xena, je ne vais pas rester assise ici et te laisser te faire tuer. "

 

" Je ne vais pas être tuée. J'espère juste que cette pierre marchera comme la Pierre de Chronos. "

 

" Et t'enverra dans le temps pour d'une façon ou d'une autre

changer à nouveau les choses ? "

 

" Ouais. "

 

" Si ça marche, je n'oublierai pas ceci , n'est-ce pas ? T'oublier toi, je veux dire ? "

 

Xena sourit, son regard se réchauffant en voyant le visage concerné de Gabrielle. " Je ne sais pas si l'une ou l'autre d'entre nous se rappellera de quoi que ce soit. Mais il y a une chose que je sais avec certitude, peu importe notre destinée, tu ne m'oublieras pas. Et je ne pourrai jamais t'oublier. "

 

Gabrielle refléta un sourire identique et plaça sa paume sur la peau chaude de la cuisse de Xena. Ce contact envoya un frisson dans le corps de la guerrière, telle la caresse du soleil un jour chaud d'été. Elle aurait dû discrètement retirer sa jambe et briser le contact mais la sensation était trop agréable.

 

Le sourire de Xena diminua un peu alors qu'elle haussait un sourcil. " N'est-ce pas le moment où Ephiny devrait surgir ? "

 

" Je me suis assurée qu'elle serait occupée pour un bon moment après le dîner. "

 

" Vraiment ? " commenta Xena, laissant la main de la barde reposer au même endroit. " Et qu'as-tu fait pour l'empêcher de te suivre ? "

 

"J'ai échangé son épée contre une autre toute émoussée. Elle va l'aiguiser pendant des heures. "

 

" Gabrielle, une guerrière connaît sa propre épée. "

 

" Oui, oui, " répondit la barde, en secouant la tête. " Toi, tu peux te permettre d'avoir une épée personnelle mais les nôtres sont

des épées d'Amazone standard. "

 

" Toutes les épées sont les mêmes ? "

 

" Oui. Toutes les armes. "

 

" Toutes ?Même les bâtons ? "

 

Gabrielle hocha la tête. " Entièrement. Du bas jusqu'en haut. "

 

" Mais j'ai vu ton bâton. Le tien est différent des autres. "

 

" C'est parce que je suis spéciale. "

 

" Tu l'es certainement, " remarqua Xena doucement, plaçant sa grande main sur la plus petite toujours sur sa cuisse. " Je ne suis pas si sûre que ton plan marche, Gabrielle. Une guerrière comme Ephiny connaît sa propre épée. Nous ferions mieux de revenir au camp, avant qu'elle n'envoie une patrouille entière à ta recherche. De plus, demain va être un grand jour et nous avons besoin de repos. "

 

" Oh, d'accord ", dit la barde avec un soupir déçu.

 

Xena donna une petite tape sur la main si douce puis se leva. " Allez, viens. Avant qu'Ephiny nous fasse un caca nerveux. "

 

 

 

Puis elle s'arrêta et réfléchit. "Je veux dire avant qu'elle pique une crise," corrigea-t-elle en riant et elle tendit la main à Gabrielle.

 

Quand Gabrielle la saisit, Xena l'aida à se lever et l'emmena en direction du campement.

 

*****

 

 

"OÙ EST MON ÉPÉE ? "

 

Xena et Gabrielle tressaillirent en entendant le cri. Elles marchèrent en direction du campement essayant de sembler aussi innocentes que possible.

 

" Quelqu'un m'a donné une épée émoussée ! Qui a échangé mon épée ? GABRIELLE ? "

 

L'Amazone tourna sur ses talons, fouillant tout le campement, les yeux brillants de colère. " GABRIELLE ! "

 

Ephiny se figea, fixant son amie qui sortait du bois la main dans la main avec la Conquérante. La main dans la main ?

 

Les yeux d'Ephiny s'écarquillèrent de colère.

 

Gabrielle lâcha la main comme si c'était une pomme de terre brûlante.

Quand le regard furieux s'arrêta sur Xena, la guerrière leva ses paumes devant elle. " Ne me regarde pas comme ça. Je ne l'ai pas prise. " La Conquérante passa aussi rapidement que possible devant une Ephiny qui fumait de rage.

 

La guerrière amazone se tourna alors vers la princesse. " Que faisiez-vous ? "

 

" Nous parlions de demain. "

 

" Oh, vous parliez de demain, hein ? " demanda Ephiny, croisant ses bras. " Et je suppose que vous devez vous tenir la main pour ça ? "

 

" Non, Xena n'aurait sans doute pas dû me prendre la main et me laisser traverser seule tous ces rondins et ces rochers dans l'obscurité ! "

 

" Hmmpf. "

 

" Hummpf toi-même. Ecoute, je suis fatiguée Ephiny. Et si on allait se coucher ? Ça a été une longue journée. "

 

La barde s'en alla vers leur tente, sans autre commentaire.

 

" Elle a été longue mais certainement pas ennuyeuse ", remarqua Ephiny, observant la barde qui s'éloignait. " Hé ! T'as intérêt à me rendre mon épée ! "

 

 

 

 

 

CHAPITRE 13

 

Alti se tenait debout au bord de la colline, regardant la vallée en-dessous. Dans le lointain, elle pouvait voir non seulement les feux de Golconda, mais aussi le scintillement de plusieurs petits feux de camp dispersés partout dans la forêt juste à l'ouest de la porte de la ville. Plus important, elle pouvait sentir un parfum d'Amazones qui flottait dans l'air. La sorcière respira profondément, remplissant ses poumons avec les senteurs de la nuit sombre.

 

" Je peux les respirer, Xena. Mais toi ... je peux te sentir. " chuchota la chamanesse d'une voix rauque. " Tu as quelques heures d'avance sur moi, mais je vais arriver à ce diamant avant toi. "

Alti regarda le ciel sombre et étudia la position de la lune.

" C'est le moment ", annonça-t-elle aux esprits agités dans les arbres. " SATRINA ! "

 

Alti tourna le dos à la vue, faisant face à son propre campement. " SATRINA ! " hurla-t-elle, sa voix dure semblant faire frémir les feuilles au-dessus d'elle. Elle vit l'ombre de l'esclave sortir d'une tente et regarder vers la colline d'un air interrogateur.

" VIENS ICI ! "

 

Satrina laissa tomber le volet de la tente et se dirigea vers la colline dans la fraîcheur de la nuit. Elle ne perdit pas de temps, courant pour répondre à l'appel de la chamanesse.

" Tu m'as appelée, Alti ? " dit l'esclave un peu hors d'haleine en arrivant au sommet du tertre.

 

Alti lui sourit de manière séduisante.

" Viens ici, Satrina, " dit-elle en lui faisant signe de son long doigt. " Je veux te montrer quelque chose. "

L'esclave s'avança à pas hésitants vers la sorcière, reculant quand la femme plaça un bras autour de ses épaules.

 

" C'est le moment d'avoir une petite conversation ", chuchota la voix rauque d'Alti dans l'oreille de Satrina.

 

" A propos de quoi ? " demanda l'esclave. Elle essaya de garder ses yeux fixés sur la sorcière, mais Alti la tira par les épaules la mettant face à la vallée en-dessous d'elles.

 

" A propos de ton avenir ", répondit Alti.

 

Satrina regarda à travers l'obscurité et sourit. C'était cela. C'était ce qu'elle espérait. Alti allait la prendre sous son aile.

La sorcière caressa les épaules de l'esclave, une sombre lueur miroitant dans ses yeux. " Je sais que tu as toujours voulu avoir le même pouvoir que Xena, n'est-ce pas ? "

 

Satrina hocha la tête.

 

Alti se déplaça pour chuchoter dans son autre oreille. " Tu l'as servie, tu l'as étudiée, tu as même couché avec elle, espérant apprendre tout ce que tu pourrais. Tu lui as donné ton corps, alimentant ses sombres fantasmes, croyant secrètement qu'avec le contact de ta peau contre la sienne... "Alti passa un ongle pointu le long de la peau lisse du cou de l'esclave, " ... tu pourrais parvenir à absorber ce pouvoir et le faire tien. J'ai raison, Satrina ? "

 

L'esclave hocha de nouveau la tête, essayant de contrôler la chair de poule que le contact d'Alti avait produit.

 

" Je pense que tu dois te rendre compte maintenant que Xena est égoïste avec son pouvoir. Elle ne partage cette partie d'elle-même avec personne. Moi, par contre, je vis pour partager ce pouvoir. La question est ... que veux-tu partager, Satrina ? "

 

Satrina sourit. Finalement, elle allait obtenir ce qu'elle désirait depuis toujours. Enfin, le secret qui donnait à des femmes comme Xena et Alti leur incroyable pouvoir allait lui appartenir. Pour cela, elle donnerait à la sorcière tout ce qu'elle voudrait.

 

" Je peux te servir bien mieux que Xena ne l'a jamais fait, Alti ", dit Satrina, pressant son corps contre celui de la sorcière, comme une promesse des services à venir.

" Oh, je sais que tu le feras. " Le souffle chaud d'Alti chatouilla l'oreille de Satrina, envoyant un frisson au fond de sa colonne vertébrale.

 

" Dis-moi ce que tu veux et je le ferai. " Satrina pencha la tête de côté, donnant à la sorcière le plein accès à son cou savoureux.

 

Les yeux d'Alti brillèrent avec anticipation. " Ce que je veux ? "

Elle glissa une main mince et gercée sur l'épaule de Satrina, laissant ses doigts osseux se saisir d'un sein doux pour le presser.

 

" Tu me donneras tout ce que je veux ? " Les doigts de la sorcière jouèrent avec le mamelon pendant un moment avant de le pincer durement.

 

" Ouiiii " gémit Satrina en se pressant plus encore contre la chamanesse, balançant ses hanches d'une manière séduisante.

La main d'Alti abandonna le sein et Satrina gémit à la perte du contact.

 

" Je vais te dire ce que je veux, " chuchota Alti, appuyant durement ses lèvres sèches contre son cou. " Je veux ton âme ! "

 

Le couteau était si pointu que Satrina sentit le flux et la chaleur de son propre sang avant la douleur lancinante de la blessure. Sa bouche s'ouvrit pour crier, mais Alti avait déjà tranché sa gorge et ses cordes vocales. L'esclave leva les mains, poussant un cri silencieux en voyant son propre sang se déverser sur elle.

 

La dernière pensée de Satrina fut de l'étonnement face à la couleur sombre de son sang dans la nuit.

 

Alti rattrapa le corps qui tombait, l'aidant à glisser sur le sol froid. Elle se mit à genoux et travailla rapidement, employant le couteau pour ouvrir la poitrine. Puis elle plongea les mains dans l'entaille pour saisir l'os. D'un coup sec, elle brisa les côtes. La vitesse était essentielle. Ses yeux rougeoyèrent de plaisir en découvrant le cœur, battant toujours à grands coups lents et occasionnels.

 

La sorcière écarta l'entaille dans la poitrine de Satrina et en retira le cœur des deux mains. Elle mordit dans l'organe au moment de son ultime battement. Un souffle de vie emplit la chamanesse, sa puissance se projetant dans son corps et la rejetant sur l'herbe. Elle se tordit en convulsions, résistant à la forte envie de vomir et observa avec un regard imperturbable le ciel sombre au-dessus d'elle, tandis qu'elle commençait à perdre le contrôle.

 

Son corps se convulsa de nouveau puis un calme étrange passa dans ses membres. Elle ne sentait plus rien, ne pouvait plus bouger. Elle pouvait seulement voir le ciel noir et entendre le son raffermi de sa propre respiration sifflant à ses oreilles.

 

Au moment où elle pensait qu'elle allait rester dans cette paix pour l'éternité, une violente douleur traversa son corps. Comme si une main impie avait déchiré son propre cœur dans sa poitrine, elle se retrouva soudain en train de flotter au-dessus d'elle-même, planant parmi les feuilles des arbres et regardant le cadavre de Satrina et sa propre forme sombre.

 

A cette vue, Alti se mit à rire, un rire saccadé, rempli de gravier, qui se répercuta dans le bois et qui provoqua les hurlements des loups se trouvant à proximité.

 

Elle savait qu'elle n'était pas morte, mais séparée d'elle-même et seulement pendant un court laps de temps. Elle avait beaucoup plus à faire et elle ferait mieux d'y arriver.

 

Avec un hurlement insidieux, la forme d'Alti brilla brièvement puis fila à travers le bois, montant en flèche au-dessus des arbres et s'élança en cercles jubilatoires, pour se diriger à toute vitesse vers la ville de Golconda.

 

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