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LONGEST NIGHT7

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Une Si Longue Nuit

 

par Melissa Good

 

Traduction : Fryda

(2006)

 

 

*********

Partie 7A

*********

 

Pour les avertissements et démentis, voir 1ère partie

*****

 

« Alors… » Hercule regardait l’intérieur du chalet, une expression d’intérêt sur le visage. « C’est ici que tu vis, hein ? » Il était assis dans un fauteuil près du feu, sa chemise délacée, tandis qu’il regardait Xena mélanger quelque chose à une petite table toute proche.

 

Xena saupoudra une pincée d’herbe dans le mélange qu’elle préparait et hocha la tête. « Ouaip. »

 

Et bien. Le demi-dieu laissa son regard errer sur l’intérieur du chalet. « C’est agréable », dit-il en notant le grand lit à l’air confortable, et les couleurs chaudes des draps, couvertures et des tapis tissés éparpillés.

 

Xena regarda par-dessus son épaule et émit un rire bas et modeste. « Je ne me suis jamais considérée du genre domestique… mais ce n’est pas mal ici. » Elle finit sa tâche et alla vers lui, trempa ses longs doigts dans le baume qu’elle avait préparé et l’étala doucement sur les brûlures rouges cuisantes et irritées qui entouraient toujours le cou du demi dieu. « Ces trucs doivent te rendre cinglé. »

 

Hercule ferma les yeux à son toucher expérimenté, tressaillant à la piqûre du baume. « Ça tu peux le dire », grommela-t-il, plaisamment conscient de l’odeur piquante de la mixture, ainsi que de la senteur chaude et chatouilleuse du vêtement en laine que portait Xena.

 

« Je viens de le faire », lui rappela la guerrière pince-sans-rire, en repoussant ses cheveux mi-longs pour accéder aux brûlures de sa nuque. « Tu sais, tu aurais pu en parler plus tôt. « Sa voix lui chatouilla l’oreille. « Tu ne vas pas me faire ton numéro du héros silencieux et noble à moi, non ? »

 

Hercule sentit un sourire lui tirer les lèvres contre sa volonté, et il laissa sa tête reposer contre son ventre tandis qu’elle s’occupait de sa nuque. « Il faut en être pour savoir ce que c’est », répliqua-t-il en lui donnant une petite tape sur le genou, sentant le rire gronder en elle avant qu’il ne touche à peine son oreille. « Alors… tu as décidé de t’installer ici pour de bon ? »

 

Xena finit sa tâche et recula, remit sa chemise en place et lui lança un regard critique. « Je veux examiner ça plus tard… j’apporterai ce truc avec moi. » Elle jongla avec le récipient du baume d’une main. « On reste ici tout l’hiver, ouais. Après ça… » Elle haussa légèrement les épaules. « On va probablement tomber sur vous sur la route. »

 

Il hocha lentement la tête et se leva, puis se promena dans le chalet avec un regard légèrement curieux. Il s’arrêta près de la table et regarda les deux petits jouets en peluche posés l’un à côté de l’autre, il souleva le petit écureuil, le tourna et la regarda avec un large sourire.

 

Xena tressaillit. Oups. Voyons voir… est-ce que je peux m’en tirer avec un regard mielleux ? Elle essaya mais il se mit à rire. Nan… Elle soupira et leva légèrement les bras puis les laissa retomber. « C’est l’idée que se fait ma mère d’une blague. »

 

« Elle a un sacré sens de l’humour », dit le demi dieu, en posant le jouet pour recommencer à marcher. « Hé… ça c’est sympa… » Il passa le doigt sur les tentures tissées peintes sur le mur.

 

« C’est l’œuvre de Gabrielle », lui dit Xena d’un ton fier, tandis qu’elle rangeait ses affaires dans son kit de soins.

 

Il étudia les peintures un moment puis secoua légèrement la tête. « C’est une personne très spéciale. » Il alla vers la commode et rit légèrement en prenant la minuscule tortue sculptée au milieu de ses copains. « Ça aussi c’est son œuvre ? »

 

Xena sentit une légère rougeur arriver et elle fronça un peu les sourcils. « Hum… non. » Bon sang… qu’est-ce qui m’a pris de le traîner ici ? Elle lui jeta un coup d’œil furtif, et vit ses yeux souriants qui la regardaient, attentifs, un sourcil interrogateur dressé. Oh… merde de centaure, songea-t-elle. « C’est la mienne en fait », finit-elle par murmurer.

 

Hercule sentit sa mâchoire carrée tomber et il laissa passer un rire de surprise. « Et ben… et ben… parlez-moi de surprises. » Il posa la tortue et alla vers elle, poussant son épaule de la sienne avant de lui donner une légère tape sur le dos. « Relax… je ne le raconterai à personne. »

 

« Merci », grogna Xena. « Viens, on ferait mieux de rentrer…. Josclyn veut lancer la cérémonie. »

 

Hercule perdit brusquement sa bonne humeur et il baissa les yeux, avant de poser la main sur l’épaule de Xena. « Est-ce qu’on peut… s’asseoir et parler un instant avant ? »

 

Elle sentit sa tension et son estomac se noua en réponse. « Bien sûr. » Elle fit un geste vers le fauteuil près du feu et s’assit dans l’autre, penchée en avant les coudes sur ses genoux, les mains serrées entre. « Qu’est-ce qui se passe ? »

 

Le demi dieu s’adossa dans le fauteuil, sentant la paix de cet endroit telle une chose tangible. « Ecoute… je… j’ai trouvé quelque chose au sujet de ce collier », commença-t-il, puis il s’interrompit. « Je… pense que tu dois le savoir. »

 

Xena étudia son visage et y vit les traces d’épuisement. « Continue », dit-elle d’un ton neutre.

 

« Arès… ne t’a pas… dit toute la vérité », répondit tranquillement Hercule. « Ou bien… » Il leva une main lasse. « Il ne savait pas… je ne… sais pas en fait. Mais le fait est que… ce collier… m’a affecté… à cause de qui est mon père. »

 

Xena plissa le front. « Attends… il t’a affecté parce que Zeus est ton père ? » Ça n’a pas de sens. « Quelqu’un lui a pris quelque chose ? »

 

Hercule soupira. « Non… pas… exactement. Il m’a affecté parce que… je suis à demi dieu. » Il se pencha en avant. « Il n’affecte que les gens qui sont… comme moi. » Il s’interrompit. « Ou bien… bien sûr, totalement dieux. » Il se mâchouilla la lèvre. « C’est pour ça… qu’Arès était si inquiet. »

 

Oh. Xena se mordit la lèvre de concentration. « Je vois. »

 

« Ah oui ? » Demanda tranquillement Hercule. « Xena, j’ai parlé à Iolaus… je sais que ce truc t’a affectée d’une certaine façon. »

 

Xena étudia attentivement ses mains puissantes. « C’est… quelque chose qui m’a traversé l’esprit, Hercule. » Elle leva les yeux et croisa son regard directement. « Mais je pense que c’est juste une coïncidence dans ce cas. » Elle s’interrompit. « Après tout, je suis mortelle. » Elle courba les lèvres. « Je suis morte, tu te souviens ? » Son humeur virait au sombre. « Et je n’ai très certainement pas atterri au Mont Olympe. » Un souvenir fugace de la plage lui traversa l’esprit et elle sourit intérieurement.

 

Il hocha lentement la tête. « Et tu es revenue », répondit-il, en tendant la main pour prendre la sienne. « Comme ça, je ne trouve pas beaucoup de gens qui ont pu le faire. »

 

Elle haussa les épaules. « J’ai eu de la chance, et beaucoup d’aide. » Et un besoin submergeant et indéniable.

 

Il la regarda, les yeux tristes mais attentifs.

 

Xena regarda ses mains serrées, puis releva les yeux vers lui. « Je ne suis pas comme toi, Hercule… quand je me coupe, je saigne… quand les gens me frappent, j’ai mal. » Elle soupira. « J’ai des cicatrices pour le prouver. »

 

« Moi aussi », répondit Hercule calmement. « Mais je peux traverser les frontières entre la vie et la mort, mon corps guérit à une vitesse incroyable… je suis plus fort que n’importe qui que je connaisse… et les dieux se mêlent sans cesse de ma vie. » Il s’interrompit et lui fit un sourire nostalgique. « Ça te rappelle quelque chose ? »

 

Un haussement de sourcil noir. Il avait raison… et ça n’était pas quelque chose à laquelle elle n’avait pas pensé plus de fois qu’elle ne pouvait les compter. Même Gabrielle le ressentait… sauf que le barde l’appelait sa ‘magie’ spéciale. « Ouais », finit-elle par dire, avec un profond soupir. « En effet. » Une pensée sombre lui traversa l’esprit et la fit presque… presque rire ironiquement tout haut. « Mais… c’est de l’eau sous un pont… rien que je puisse changer », lui dit-elle. « Juste quelque chose avec quoi je dois vivre. »

 

Il baissa la tête. « Vrai. » Puis il lui lança un regard désabusé. « Ecoute… désolé d’évoquer ça aujourd’hui… mais…je n’ai pas vraiment eu une occasion de te parler depuis… »

 

Elle sourit. « Ne t’inquiète pas pour ça… comme j’ai dit… c’est quelque chose à quoi j’ai pensé. » Elle haussa légèrement les épaules. « En fait, Gabrielle et moi on en a parlé il y a quelques semaines. »

 

Quelques jours à peine après que le barde fut rentrée du campement des marchands d’esclaves, quand elles étaient blotties au lit après une longue session de traduction, la lente guérison des côtes du barde leur donnant une excuse pour passer de longues heures paresseuses ensemble. Comme si elles avaient besoin d’une excuse.

 

« Xena ? » Avait dit Gabrielle prudemment, depuis sa position blottie sur la poitrine de sa compagne.

 

« Mmm ? » Avait répondu Xena dans un murmure à demi ensommeillé, laissant sans honte le crépitement de la pluie glacée sur leur toit la bercer dans une brume rêveuse, et se laissant aller dans un sentiment de plaisir coupable.

 

« Je… réfléchissais », avait commencé à dire le barde, avec de l’incertitude dans la voix. « A… ton sujet. »

 

Xena avait ouvert un œil et regardé pensivement vers sa tête à l’or flamboyant. « Qu’est-ce que j’ai encore fait ? »

 

« Rien », avait répondu Gabrielle. « Mais je pensais à… combien tout ceci fait mal. » Les bras de Xena l’avaient enserrée un peu plus. « Merci… mais je ne peux pas m’empêcher de me sentir un peu déprimée au temps que ça prend pour guérir. » Elle avait tourné la tête et regardé sa compagne. « Parce que ce n’est pas comme ça pour toi. »

 

Xena l’avait regardée pensivement. « Non… je suppose que non. »

 

Le regard vert s’était cloué sur elle. « Et pourquoi ? » Elle avait levé les doigts et délicatement dessiné son visage. « Tu… je sais que tu travailles énormément, Xena… mais tu peux faire des choses que les autres ne peuvent pas… pourquoi ? Est-ce que tu es… » Sa voix avait faibli. « Je veux dire… »

 

Xena avait soupiré. « Je ne sais pas », avait-elle fini par dire honnêtement. « Est-ce que ça a de l’importance ? » Et c’était une question douloureuse et effrayante.

 

Gabrielle s’était nichée un peu plus. « Pas pour moi. » De l’affection chaleureuse colorait sa voix. « J’étais juste curieuse. » Elle avait soupiré et tressailli. « Quoi que ce soit, j’aimerais pouvoir te l’emprunter quelques heures. »

 

Et Xena avait souri d’un air désabusé et l’avait doucement enveloppée dans la chaleur, la ramenant dans un sommeil guérisseur. Ce qui… d’une manière étrange et mystique, semblait avoir fonctionné, malgré l’impatience du barde. Les côtes de Gabrielle avaient guéri bien plus vite qu’elles ne l’auraient dû…. Bien que Xena ne le lui avait pas dit.

 

Elle l’avait juste accepté, tout comme elle acceptait ses propres capacités. Et elle avait essayé de ne pas trop y penser.

 

« Ah oui ? » Répliqua Hercule. « Et qu’est-ce qu’elle en pense ? »

 

Xena haussa les épaules. « Elle… pense… que qu’elle qu’en soit la source, c’est une chose utile. »

 

Le demi dieu rit légèrement. « Pratique. » Il se leva et lui tendit la main. « Allez ma grande… allons te caser. » Il se frotta l’estomac. « Je veux goûter un peu de ce rôti que ta mère prépare… Par les dessous des dieux, Xena, et elle sait drôlement bien cuisiner. »

 

La guerrière rit et mit le bras autour de son large dos, tandis qu’ils attachaient leurs manteaux et se préparaient à se frayer un chemin vers l’auberge dans la neige qui tombait à gros flocons.

 

*******

 

Xena sentit la présence de sa compagne juste derrière la porte en bois de l’auberge et elle sourit en ouvrant, contente de sortir du vent agité qui tournoyait brutalement dans les mailles de son manteau et envoyait de la neige fondue sur sa nuque. C’était assurément Gabrielle, ses cheveux clairs capturant les scintillements des torches, et qui l’attendait. « Salut… » Elle se mit sur le côté pour laisser passer Hercule, et baissa la tête vers le barde. « Il fallait que je mette du baume sur son cou. »

 

Gabrielle entoura le bras de la guerrière de ses doigts. « A cause du collier ? » Demanda-t-elle à voix basse.

 

Xena hocha la tête. « Oui… on est prête ? » Elle eut une sensation nerveuse bizarre au fond de son estomac qui la surprit. Bon sang… ne me dites pas que ce truc me fout la trouille… pas à mon âge pour l’amour d’Arès.

 

Le barde sourit. « Ouaip… on l’est… mais… » Elle tira Xena vers la cuisine. « Est-ce que… je peux… te parler seule un instant ? »

 

Xena se laissa entraîner dans la cuisine maintenant vide et calme. « Bien sûr… » Elle poussa doucement le barde contre le comptoir et l’embrassa, sentant le rire léger et surpris de Gabrielle contre ses lèvres. Puis elle se détendit et s’appuya contre l’armoire. « Alors… tu avais quelque chose à dire ? »

 

Gabrielle la regarda affectueusement. « Tu es vraiment une sale gamine. » Elle leva la main de Xena toujours emmêlée dans la sienne et effleura les phalanges de ses lèvres. « Je voulais… te donner quelque chose… et… je ne suis pas sûre que tu vas l’aimer, alors je préférais… hum… »

 

Elle sentit son visage serré entre deux mains puissantes et elle le pencha vers le haut. « Gabrielle… même si tu me donnais du crottin de centaure verni et pétrifié, j’adorerais ça. »

 

Les yeux du barde brillèrent d’un humour soudain et espiègle. « Vraiment ? »

 

Xena effleura la joue douce de sa compagne de ses doigts. « Vraiment. » Puis elle pencha la tête d’un air inquisiteur tandis qu’elle sentait sa main capturée et retenue, et qu’elle se retrouva noyée dans les yeux de Gabrielle ; les mains du barde bougèrent, et elle sentit un resserrement froid autour d’un doigt en même temps que le toucher chaud de sa compagne.

 

Elle baissa les yeux vers leurs mains réunies, et sentit ses genoux se dérober, l’obligeant à s’accrocher maladroitement au comptoir, tandis que Gabrielle la retenait fermement. Elle était vaguement consciente que le barde lui parlait, des mots isolés filtraient dans sa conscience surprise, mais… « Gabrielle. »

 

Le barde s’interrompit et attendit, ses yeux vert brume scrutant anxieusement le visage de Xena.

 

« C’est… beau… je ne… comment as-tu fait… » Elle finit par abandonner et se contenta de fermer les yeux et de tendre la main, pour attraper la chemise de Gabrielle et l’attirer vers elle. Elle enfouit son visage dans les cheveux à l’odeur sucrée de sa compagne et se contenta de la tenir.

 

« Je… je voulais… heu… » Gabrielle bredouilla légèrement. « Je sais que… tu n’aimes pas les bijoux… je sais… tu as dit que c’était à cause des combats et tout… mais… je voulais juste… je veux dire, tu n’as pas à … »

 

Elle sentit une main attraper sa nuque et la masser doucement, et elle s’interrompit, reconnaissant la douce pression pour ce qu’elle était. Elle laissa son corps se fondre dans celui de son âme sœur, et sentit un sourire joyeux démarrer sur ses lèvres. Je suppose que j’ai bien fait. Le moins elle parle, le plus elle ressent quelque chose… et quand elle s’arrête de parler, et qu’elle se contente de réagir… j’ai touché la cible.

 

Elles finirent par se relâcher, et Xena s’appuya à nouveau, gardant sa compagne légèrement enveloppée dans ses bras. « Merci. » Elle fit au barde un sourire éclatant. Je ne peux pas croire qu’elle ait fait ça.

 

Gabrielle lui sourit à son tour. « Ecoute… je sais que tu ne portes pas ce genre de chose. »

 

La guerrière lança un regard à l’anneau brillant sur sa main et rit doucement. « Je suppose que je vais m’y habituer. » Elle repoussa une mèche de cheveux dorée rebelle de la joue du barde. « Tu n’avais pas à faire ça, tu sais. »

 

Le barde recourba les lèvres en un sourire. « Je sais. » Elle joua paresseusement avec les lacets en satin sur la gorge de Xena. « Je… il n’y a rien de matériel qui puisse jamais exprimer cela… ce que tu signifies pour moi, et tu… le sais, n’est-ce pas ? » Elle vit le petit signe de tête de Xena et lui en fit un à son tour. « C’est juste… quelque chose que je voulais vraiment faire. »

 

Un coup frappé à la porte les fit sursauter un peu, puis sourire quand le panneau en bois s’ouvrit vers l’intérieur et que Cyrène passa la tête. « Salut maman », réussirent-elles à dire en chœur.

 

L’aubergiste se glissa entièrement dans la pièce et mit les mains sur ses hanches. « Excusez-moi ! » Dit-elle en ricanant légèrement. « Vous avez le reste de votre vie pour vous câliner… ça vous ennuie si on démarre la fête ? »

 

« Oh par les dieux », grogna légèrement Gabrielle, et elle se contenta d’enfouir son visage dans la chemise de Xena. « Je vais mourir. » Elle éclata dans un rire irrépressible.

 

Xena sentit une rougeur colorer son propre visage, mais elle garda son sang-froid et lança un regard ironique à sa mère. « Ok… ok… » Elle poussa légèrement le barde vers la porte. « Va, je te rejoins dans une minute. »

 

Gabrielle lui fit un sourire puis se repoussa et passa près de Cyrène, se mordillant la lèvre quand l’aubergiste lui donna une tape de connaisseuse.

 

Cyrène regarda la porte se refermer, puis s’approcha de Xena qui se tenait les bras croisés. « Vous n’avez pas besoin de vous cacher comme ça, tu sais… ce n’est pas comme si personne n’était au courant, non ? »

 

Xena soupira et lança un regard affectueux à sa mère. « Ouais… je sais… elle voulait juste me donner quelque chose… c’était un peu difficile dans ce cirque là-dehors. » Elle lâcha une inspiration, essayant de soulager le tiraillement sous ses côtes. « Je… j’étais… »

 

Cyrène se rapprocha puis enroula ses doigts autour de ceux de Xena et les écarta de sa poitrine. « Dieux », dit-elle en riant doucement. « Regardez-moi ça. » Puis elle remarqua le léger tremblement dans les longs doigts et leva les yeux. « Tu vas bien, ma chérie ? »

 

Xena serra sa main en un poing et déglutit. « Oui, je vais bien », répondit-elle d’une voix légèrement rauque. « Je suis juste un peu surprise. »

 

Sa mère la regarda tranquillement. « Et un peu nerveuse. » Elle donna une légère tape à sa fille. « C’est un beau cadeau, Xena. »

 

La guerrière remit sa main sur sa poitrine et fit un sourire pincé à sa mère. « Oui… ça l’est. » Puis elle prit une profonde inspiration. « Et bien, on ferait mieux d’y aller. »

 

Cyrène rit doucement entre ses dents et entoura la grande femme de ses bras. « Viens ici. » Pendant un instant, le corps de Xena resta rigide, puis elle se détendit, et rendit l’embrassade à sa mère. « C’est mieux. » L’aubergiste massa le dos de sa fille d’un geste apaisant. « Reste calme… je sais qu’il y a beaucoup de gens là-dehors, mais ça sera fini dans quelques minutes, et tu pourras retourner dans ton coin et lancer à nouveau des regards noirs à tout le monde. »

 

Elle sentit un mouvement quand Xena se mit à rire. « Tu me connais plutôt bien. » La guerrière soupira avec résignation, mais sa voix semblait plus calme.

 

Cyrène ricana. « Je sui ta mère après tout. » Elle lui donna une tape sur le dos et la relâcha. « En plus… je ressens la même chose. »

 

« Ah oui ? » Demanda Xena en mettant le bras autour de ses épaules pour la diriger vers la porte.

 

Sa mère agita la main. « Oh oui… le mien a été un vrai cirque… bien que… » Elle regarda par la porte vers la foule éclectique. « Je pense qu’il y avait moins de… hum… poils. » Elle s’interrompit pensivement. « Et pas d’amazones. »

 

****

 

Hécuba s’affairait autour de Gabrielle, qui se tenait tranquillement les bras croisés près de la table que Josclyn avait réquisitionnée. La femme brossait des grains de poussière inexistants sur la chemise de sa fille, et tirait sur sa ceinture. « C’est très joli », dit-elle d’un ton neutre, en regardant le barde de bas en haut. « Mais c’est assurément… hum… et bien, ça ne laisse pas beaucoup de place à l’imagination », finit-elle avec une touche de désapprobation.

 

« Oui, votre majesté », dit Ephiny d’un ton traînant en venant derrière pour lui tirer sur le col. « On était habitué à vous voir avec… euh… bien moins », la taquina-t-elle d’un air espiègle. « Ceci semble positivement… décadent. »

 

« Merci à vous », dit Gabrielle en soupirant, tout en levant les yeux au ciel et en échangeant des regards amusés avec Josclyn.

 

« Qu’est-ce qu’elle veut dire ? » Demanda Hécuba, intriguée, puis elle haussa les sourcils. « Oh… oui… cet autre vêtement que tu as l’air de beaucoup aimer. » Sa voix ne laissait aucun doute sur son opinion sur ledit vêtement. « Disgracieux. »

 

« Hé… ! » Dit le barde d’un ton de réprimande. « Qu’est-ce qu’il y a de disgracieux là-dedans ? C’est joli et frais en été. »

 

Sa mère claqua la langue. « Vraiment, Gabrielle… on peut… tout voir. »

 

Les Amazones tout autour chantonnèrent d’approbation en chœur. « Oui, on peut vraiment », dit Granella d’un ton traînant.

 

« Merci les filles », marmonna Gabrielle à travers ses dents serrées, tandis qu’elle prenait une teinte rouge sang. Dieux… qu’est-ce qui m’a pris de demander à mes parents ET aux Amazones de venir ? Est-ce que j’ai mangé du pain aux noix fermenté ce jour-là ou quoi ?

 

« Oooh… » Dit Ephiny en riant. « Regardez cette couleur… très impressionnante. » Ses yeux clairs dansaient. « En fait, j’ai toujours pensé que ce vêtement était le choix de Xena. »

 

Les rires fusaient maintenant et Gabrielle se dit qu’elle allait transpercer le sol de l’auberge. Elle se sentait intensément mal à l’aise sous les regards connaisseurs, malgré leur nature inoffensive, et elle se mordit la lèvre en voyant l’expression de sa mère s’assombrir.

 

Puis trois choses se produisirent. Les rires s’arrêtèrent brusquement, un silence tomba, et deux bras se glissèrent autour de son cou et la tinrent fermement.

 

« Je suis sûre que je n’ai entendu personne se moquer de ma meilleure amie. » Une pause. « PAS VRAI ? » La voix de Xena était soyeuse mais contenait une menace sombre, et son regard bleu glace les dardait. Même Ephiny écarquilla les yeux. Hécuba recula nerveusement d’un pas.

 

La Régente amazone se frotta le nez. « Hum… non… non… bien sûr que non. On… admirait juste les habits de Gabrielle. » Elle lança un regard d’excuse à cette dernière. « Pas vrai ? »

 

Gabrielle les laissa transpirer une minute, prenant une joie coupable à faire tourner la chance, puis elle se calma et sourit. « Oui, c’est bon. » Elle tapota légèrement la cuisse de Xena. Elles me taquinaient juste… pas de problème. »

 

Tout le monde reçut le Regard et le sourcil dressé puis Xena se détendit et se tourna vers Josclyn. « Prêt ? »

 

Le maire hocha la tête, pinça les lèvres pour réfréner un sourire tout en ouvrant son grand livre relié de cuir, et il mit légèrement les mains sur les pages jaunies.

 

Ephiny fit mine de s’essuyer le front tandis qu’elles se tournaient toutes les deux pour faire face au maire, et elle échangea un regard penaud avec Granella. « J’avais oublié cette fichue tendance protectrice », marmonna-t-elle doucement dans l’oreille d’Eponine. « Ooouuh… ce regard de glace n’a rien perdu. »

 

Eponine grogna son assentiment, puis elle s’appuya contre un pilier et sourit timidement quand Ephiny fit de même, et glissa un bras autour de sa taille, s’installant pour regarder la cérémonie. Elle fit de son mieux pour éviter les regards perçants qui passaient entre les autres Amazones, et regarda droit devant elle les autres invités se rassembler pour être témoins du rituel. Finalement, elle tourna la tête. « Tu es en train de scandaliser les enfants. » Sa voix n’était qu’un murmure.

 

Ephiny sourit. « Elles survivront », murmura-t-elle à son tour, en pinçant rapidement le nez d’Eponine. « Oups… et voilà les gros yeux de Granella… »

 

Xena arracha son attention distraite du murmure derrière elles, pour se concentrer sur la voix de Josclyn, qui lisait les obligations légales de l’union. Elle était très consciente de la silhouette mince et silencieuse de Gabrielle près d’elle. Très consciente du battement ridicule de son propre cœur, et des frissons qui faisaient trembler ses genoux. Ceci… échappe à mon contrôle, dit-elle sévèrement à son corps. J’ai affronté des dieux et des rois sans me décoiffer. Je ne vais *pas* m’évanouir dans l’auberge de ma propre mère à ma propre fichue cérémonie d’union devant chacun de mes fichus amis parce que je ne m’en remettrai jamais, jamais, jamais.

 

Des doigts vinrent doucement se mêler aux siens, et elle se concentra sur la chaude sensation, laissant la présence rassurante de son âme sœur opérer sa magie, la calmant et apportant une note de paix à son esprit légèrement noué. Le battement de son cœur ralentit et le confinement de la pièce diminua, et elle put se concentrer sur ce que Josclyn disait.

 

Gabrielle regardait sa compagne du coin de l’œil avec une note d’inquiétude amusée. La main serrée dans la sienne avait été froide, ce qui était inhabituel pour sa compagne au sang chaud. Dieux… je pense qu’elle est nerveuse. C’est une première. Elle vit Xena se détendre visiblement un peu, tandis qu’elle massait les doigts de la guerrière. Ouais… et on est très serré là-dedans… ça n’arrange pas les choses. Elle pressa la main enroulée dans la sienne et fut récompensée par la relaxation perceptible des épaules de Xena.

 

« Gabrielle, en tant que nouvelle venue dans notre village, je vais t’expliquer comment nous procédons. » Josclyn lui lança un regard amical. « Ça, ce sont les documents officiels de votre union. » Il montra les deux pages de parchemin. « Ils énoncent les obligations et les responsabilités que le pas que tu va franchir implique… et quels sont tes droits. »

 

Le barde hocha la tête, ayant déjà vu tout ceci avec Xena dans les jours précédents. « Je sais », dit-elle en souriant d’un air espiègle. « Où est-ce que je signe ? »

 

Josclyn lui sourit. « Es-tu d’accord pour prendre la responsabilité de ta compagne ici présente pendant toute ta vie ? »

 

Les yeux de Gabrielle eurent une lueur intérieure. « Encore plus longtemps que ça. » Elle sentit la poigne sur ses doigts se resserrer et elle sourit.

 

Le maire lui fit un petit signe de tête. « Es-tu d’accord pour partager la responsabilité légale pendant votre vie ensemble, et tous contrats ou accords dans lesquels tu décides d’entrer ? »

 

Ça… Gabrielle en sentit le poids s’installer sur elle, sachant qu’elle pourrait ne pas connaître, ou soupçonner la largeur ou la profondeur des choses que Xena avait faites, ou ferait dans le futur. Mais il n’y avait réellement qu’une seule réponse. « Oui », dit-elle calmement, fermement, et elle reçut un autre signe de tête de la part de Josclyn.

 

Il poussa doucement le parchemin vers elle et lui tendit une plume, qu’elle prit émerveillée entre ses doigts, se penchant un peu pour inscrire son nom d’une main ferme. C’était un sentiment curieux… se dit-elle, après s’être redressée, lui rendant la plume, et écoutant tranquillement Xena faire les mêmes réponses aux mêmes questions. Puis la guerrière relâcha sa main pour prendre la plume et signer le parchemin, faisant tourner l’objet entre ses doigts avant de le rendre, et tout fut terminé. Juste comme ça, s’émerveilla-t-elle.

 

Et puis elle tendait la main, et Xena faisait de même, et Josclyn prenait une inspiration profonde pour la partie la plus symbolique de la cérémonie. Il prit une petite dague, avec sa lame brillante et éclatante et hésita, regardant Xena pour avoir sa permission. Très conscient de qui il approchait une lame nue.

 

La guerrière hocha tranquillement la tête et le regarda, avec seulement un minuscule tressaillement tandis qu’il prenait sa main dans la sienne et faisait rapidement une entaille dans sa paume. Puis il fit de même avec Gabrielle, dont la mâchoire se serra à la pression, mais qui n’émit aucun son.

 

Elles se serrèrent les mains, mêlant les gouttes de sang, et Josclyn prit le linge blanc, et en enveloppa leurs doigts dans un bandage serré. « C’est notre coutume », dit-il doucement. « Tandis que vos sangs sont unis, vos cœurs le sont également, et tout comme ce tissu unit vos mains, que les Parques tissent et unissent vos vies pour aussi longtemps que vous vivrez. »

 

Xena pouvait sentir la brûlure acérée de la coupure, et elle se concentra dessus, ignorant le faible tremblement qui démarrait dans ses genoux et qui remontait. Le lin fut frais, puis chaud tandis qu’il s’imprégnait de la chaleur de leur sang, et elle sentit les doigts de Gabrielle serrer les siens dans un doux réconfort. Elle s’aperçut qu’elle ne parvenait pas à se concentrer au-delà de sa compagne, et elle laissa son monde se rétrécir, jusqu’à ce qu’il n’inclut plus qu’elle-même, Gabrielle, et le murmure finissant de Josclyn, qui prononçait des mots que son cerveau reconnaissait assurément, mais qui n’avaient aucune persistance dans ses oreilles.

 

Puis elle se retrouva dans un étang de silence attentif, et les yeux vert brume de Gabrielle étaient posés sur elle, le barde tourné de telle façon qu’elles se faisaient face… et on en était au pire cauchemar de Gabrielle, celui qu’elle avait confessé dans un murmure, et Xena l’avait gentiment taquinée, lui rappelant qu’elle avait déjà embrassé le barde devant une foule de gens.

 

Mais ceci était différent, comme Xena s’en rendait compte également. Et c’était maintenant son tour de rassurer sa compagne, et de faire de la fin de cette cérémonie, un moment aussi doux et merveilleux que le reste.

 

Elle laissa leurs mains jointes tomber sur le côté, et elle leva sa main libre, entremêlant ses doigts dans les cheveux d’or flamboyant de Gabrielle et captura son regard. Elle regarda le barde laisser la pièce s’effacer tandis qu’elle concentrait son attention sur Xena, et qu’elle appuyait sa joue dans la paume qui lui caressait le visage. Et elle baissa la tête et l’embrassa ; elle vit les yeux du barde ciller et se fermer tandis qu’elle répondait au toucher familier et que sa main libre venait s’enrouler autour de sa taille, un pouce hésitant glissant sur la cage thoracique de la guerrière.

 

Elle prit son temps, elles le firent toutes les deux, laissant la foule attentive se dissoudre dans une brume qui les laissa seules, plongées dans le regard de l’autre pendant un long moment paisible et absolu.

 

Puis le bruit d’applaudissements et d’acclamations monta lentement, et elles se regardèrent, échangeant des regards ironiques, tandis que la foule s’agglutinait autour d’elles et que les mains se tendaient pour leur témoigner des félicitations amicales.

 

******

 

Elles subirent les embrassades de tout le monde, et même Gabrielle ressentait les subtiles protestations de son tempérament habituellement ouvert lorsqu’elles finirent par traverser la pièce jusqu’à une aire passablement dégagée. Un coup d’œil sur le côté lui apprit que sa compagne endurait l’épreuve par la seule force de sa volonté, son expression apparemment calme, presque amicale, trahie par la tension que le barde pouvait sentir irradier dans leurs mains toujours jointes, et Gabrielle la poussa doucement vers la table dressée pour elles. « Viens… » Elle ne reçut aucune protestation de sa compagne silencieuse, qui la suivit volontiers vers le coin relativement tranquille et s’installa près d’elle sur le large banc capitonné près du mur.

 

Elle attendit que Xena s’adosse tandis qu’elle acceptait deux chopes de la part d’un serveur souriant et les posait sur la table. « Merci. » Elle sourit en regardant les yeux de l’homme petit et trapu et il rit. Son regard passa la pièce en revue, notant les groupes de gens qui parlaient, commençant à se diriger vers les tables, et les serveurs qui s’affairaient dans la pièce à poser des plateaux et des tasses. Les chevrons de l’auberge avaient été drapés dans les mêmes couleurs que celles qui flottaient sur leur chalet, et la montée des sons joyeux la firent soupirer d’aise. Cela ne s’était pas du tout passé comme elle l’avait imaginé… et pas du tout comme l’avait été son mariage avec Perdicus.

 

Peut-être parce que… dans la plupart des cérémonies d’union, les deux personnes qui sont unies espèrent fusionner leurs vies séparées en une seule… et dans la sienne, ça n’était plus du tout une question, ce qui rendait la cérémonie plus une affirmation qu’une promesse.

 

Sa main la piquait légèrement, et elle la plia dans son enveloppe de lin, et sourit quand les doigts de Xena se resserrèrent, la faisant lever les yeux vers sa compagne. « Tu vas bien ? » Murmura-t-elle, à voix basse, en se rapprochant de Xena.

 

Les yeux bleus clignèrent plusieurs fois, puis un coin de la bouche de Xena se recourba en un sourire. « Ouais… c’est juste que… je me suis rendu compte quand ils ont fait ceci… » Elle leva leurs mains jointes. « Que tout ceci est… très réel. »

 

Gabrielle se glissa plus près, le front légèrement plissé. « Qu’est-ce que tu pensais que c’était avant ? » Demanda-t-elle, en gardant un ton léger dans sa voix. « Une répétition ? »

 

Xena la regarda. « Un rêve », répondit-elle doucement.

 

« Oh non », répliqua le barde dans un murmure. « C’est très, très réel. » Elle sourit et posa la tête sur l’épaule de Xena, laissant passer un soupir heureux. « C’est la chose la plus réelle qui me soit jamais arrivée. »

 

Cela amena un sourire sur les lèvres de la guerrière, et elle posa la joue sur le dessus de la tête de sa compagne. « Oh oui », dit-elle dans un souffle, à la fin d’un léger rire tandis que la riche chaleur de leur connexion la submergeait. Ceci… Elle le sentit monter en bulles. C’était le bonheur. Elle ferma les yeux et le laissa venir à la surface, flottant sur elle de façon si intense, que cela bloqua tout le reste, sauf la chaleur solide du corps de Gabrielle pressé contre le sien, et à ce moment-là, elle se ficha du passé, ou du futur, tandis qu’ils s’effaçaient dans une brume ouatée et que l’instant présent prenait fermement le premier plan.

 

Elle sentit un léger coup dans ses côtes et ouvrit les yeux pour regarder Gabrielle. « Hein ? »

 

Le barde rit. « Tu n’es pas en train de t’endormir sur moi, hein ? » Ses yeux brillaient avec espièglerie. « Tu n’y survivrais pas, mon amour. »

 

Xena rit d’un air désabusé, laissant son regard balayer la foule. « Tu as raison », admit-elle. » Mais non… je ne sommeillais pas… je réfléchissais. »

 

« Oui oui », la taquina Gabrielle. « Alors… rappelle-moi encore, combien de temps on doit garder ça ? » Elle leva leurs mains jointes. « Pas que je me plaigne, hein ? »

 

La guerrière étendit les jambes et sentit son corps se détendre. « Hmm… et bien je suppose qu’on doit rester attachées ensemble jusqu’à ce que… » Elle laissa la phrase traîner, et se contenta de faire un signe de tête vers la porte. « Tu sais. »

 

« Ah. Je vois », dit Gabrielle d’un air songeur.

 

« C’est… supposé être comme ça que les jeunes couples unis… » Xena sentit un étourdissement chaud faire frissonner sa colonne vertébrale à ces mots, et elle se réprimanda elle-même d’un air outré. Allons, quoi… on n’est pas des gamines ! « Hum… bref, comme ça ils apprennent à commencer à travailler en équipe. » Elle leva leurs mains et sourit. « Ça peut poser des problèmes… marcher… manger… ce genre de choses. »

 

Gabrielle dressa ses sourcils clairs et rit. « Pas pour nous. » Elle tendit la main et attrapa celle de Xena. « Je pense qu’on a déjà de la pratique en tant qu’équipe. »

 

« Mmm… » Sa compagne acquiesça. « Je ne pense pas qu’ils nous avaient en tête quand ils ont écrit cette coutume. » Elle haussa légèrement les épaules. « Et bien… je suis… » Elle regarda la tête de Gabrielle, posée fermement contre son épaule. « On pourrait filer si tu veux. »

 

Les cheveux dorés flamboyants bougèrent tandis qu’elle secouait la tête. « Nan. » L’étincelle espiègle réapparut. « J’ai l’intention de danser, de faire la fête, et de m’amuser comme une folle ce soir… et si tu es attachée à moi… je suppose que tu devras le faire aussi. »

 

Un sourcil noir et dangereux se recourba. « Oh vraiment ? Tu penses que tu peux me traîner sur ce plancher, petit barde ? »

 

Gabrielle sourit d’un air diabolique. « Hé… je ne suis plus si petite… et ouaip, je le pense. »

 

Xena se réinstalla avec un sourire. « Et bien… ça va être amusant de te regarder essayer. » Mais elle cligna de l’œil vers sa compagne. Elle leva les yeux quand une rafale de vent fit du bruit sur les poutres de l’auberge et son front s’agrandit à nouveau. « On dirait bien que c’est une bonne chose d’être à l’intérieur en tous cas. »

 

********

 

« C’était sympa », dit Ephiny à Toris, qui déplaçait quelques chaises. « C’est une tradition… intéressante. »

 

L’homme aux cheveux noirs leva les yeux et lui fit signe de s’asseoir. « Ouais… je n’étais pas sûr qu’elle allait accepter toute la procédure… je veux dire… le truc d’emballer les mains est plutôt quelque chose de drôle, parce qu’habituellement les deux personnes… ben… ne se connaissent pas aussi bien, et être attaché à quelqu’un toute la nuit… » Il jeta un coup d’œil vers l’endroit tout proche où sa sœur et sa compagne étaient assises. « Mais je ne pense pas que ce soit un problème dans ce cas. »

 

Ephiny sourit tranquillement à la douce lueur dans les yeux bleus, et à l’expression de joie sans entrave sur le visage de Gabrielle tandis qu’elle reposait la tête sur l’épaule de la guerrière. Elles se tournèrent pour se regarder et l’émotion était si puissante entre elles que c’en était presque physique, et Ephiny pouvait parfaitement la ressentir. Elle soupira. « On ne voit pas ça si souvent, Toris. »

 

Celui-ci sourit brièvement. « Non… vraiment pas. » Il rit. « J’ai toujours dit que si ma sœur était vaincue… ce ne serait pas par la force des armes. »

 

Ephiny regarda les deux femmes pensivement en s’asseyant, et elle sentit qu’Eponine s’asseyait près d’elle. « Non… » Elle croisa le regard bleu de Toris. « Ce n’était pas une défaite. » Elle pinça les lèvres. « C’était une reddition volontaire. »

 

Un bruit les fit tous se retourner, et regarder la porte de la cuisine qui s’ouvrait brusquement tandis qu’Hercule passait ses larges épaules, suivi par un Jessan souriant. Le demi dieu brossait des flocons de neige de sa chemise épaisse, et il leur fit un signe de la tête tout en tirant sa chaise au bout de la table pour s’y asseoir. « Salut ; »

 

Jessan rejoignit Elaini à la table à côté, et resta patiemment assis tandis que sa compagne tirait des brins de paille de sa fourrure dorée. « Alors… vous avez sorti le cochon ? » Demanda Elaini l’air de rien. « Heu… » Elle se rendit compte que ça sonnait bizarrement. « Je veux dire… vous avez aidé… oh… par les bottes d’Arès. »

 

Jessan s’adossa et croisa les bras. « Tu sais, je pense que j’aime pas ça du tout. » Il regarda Hercule qui cligna des yeux. « Comment ça se fait que tout le monde pense toujours que les grands gars comme nous ne sont bons que pour le dur labeur ? Comme de traîner un cochon hors d’un trou dans le sol ? »

 

Hercule tordit la bouche. « Tu sais quoi, t’as raison. » Et Xena aussi, songea-t-il, quand elle lui avait dit que les choses auraient pu être pires. Savoir… décida-t-il fermement, c’était mieux que de s’interroger… au moins il pouvait être reconnaissant de ça… ça n’avait pas été aussi moche que son esprit l’avait imaginé. « Comment tu sais qu’on n’était pas là-dedans pour… heu… cuire des gâteaux. »

 

Iolaus se pencha en avant et posa ses avant-bras courts sur la table. « Toi… cuire des gâteaux ? »

 

Le demi dieu croisa les bras sur son torse musclé. « Oui, Iolaus. »

 

Un tout petit silence. « Et bé. » Le jeune homme blond se gratta la tête. « Si on est attaqué, on a des munitions alors. »

 

Cela lui valut des rires alentours, même de Xena et Gabrielle qui écoutaient d’une oreille absente.

 

« Est-ce que tu… lui as parlé ? » Murmura le barde à sa compagne.

 

Xena hocha la tête. « Ouais… je l’ai fait… je pense que c’est bon maintenant… je l’ai un peu bousculé. »

 

« Vraiment ? » Dit Gabrielle d’un ton songeur tout en prenant son verre de bière pour le siroter lentement.

 

« Ouais… et oh, à propos… ils ne le sont pas », dit Xena en reniflant pensivement.

 

Un crachotement et elle sentit des gouttes de bière la frapper tandis que le barde s’étouffait avec sa boisson. « Hé… doucement… » Xena lui tapota le dos, inquiète. « Ça va ? »

 

Gabrielle s’éclaircit la gorge, lançant un sourire rassurant au groupe qui la regardait. « Oui… oui… pas de problème… j’ai juste bu trop vite. » Elle pencha la tête contre l’épaule de Xena à nouveau et baissa la voix. « Je vais te tuer pour ça. »

 

« Moi ? » Demanda Xena d’un ton plaintif. « Bon sang… tout ce que j’ai fait, c’est passer une petite information, et qu’est-ce que ça me vaut ? Je le garderai pour moi la prochaine fois. » Elle prit son verre de bière et sirota, tout en regardant sa mère diriger la foule de serveurs.

 

« Est-ce que… tu lui as… posé la question ? » Murmura le barde avec curiosité.

 

Xena haussa les épaules. « Nan… il a répondu tout seul… je lui donnais des trucs sur comment communiquer quand… »

 

Gabrielle la frappa sur la poitrine de sa main libre. « WHOA ! ! ! ! ! ! »

 

Tout le monde se retourna et regarda, Xena figée en train de boire, et le barde avec le poing bien serré dans la laine riche de la chemise de sa compagne. La guerrière avala et leur lança un regard sévère. « C’est bon… elle s’excite juste un peu de temps en temps. » Ignorant les doigts qui pianotaient avec désinvolture sur sa clavicule. « Hé… regardez ce cochon. »

 

Les regards se tournèrent dans cette direction et elle sourit avec espièglerie à Gabrielle qui se mordait la lèvre, scandalisée. » Hé… tu es vraiment mignonne quand tu es furieuse. »

 

Le barde émit un son bas, grondant et menaçant qui reçut immédiatement un écho chez Arès, blotti aux pieds de Xena. « Je… vais… dire… à… chaque… personne… dans… cette… pièce… » Dit Gabrielle dans un souffle. « L’endroit exact où tu es chatouilleuse, et je parie que… je parie qu’on a assez de gens ici pour te tenir et te rendre la vie… »

 

Elle fut stoppée par un baiser qui réclama son âme avec sa soudaineté chaleureuse. Gabrielle sentit son corps répondre avec un abandon sensuel, qui lui fit oublier où elle était pendant un long et merveilleux moment. Puis elle se recula et prit une inspiration, et se lécha les lèvres pensivement. « Pourquoi est-ce qu’on fait toujours ça au milieu d’une foule. » Consciente de la note rauque dans sa voix, et du lent mouvement de la main de Xena sur le haut de sa cuisse.

 

« Ils sont tous occupés avec le cochon », dit la guerrière en riant doucement.

 

« Mmm… je parie que non », réfuta Gabrielle qui connaissait son public.

 

« Je parie que si », répliqua Xena.

 

« Cinq dinars », répondit immédiatement le barde.

 

« Conclu », approuva Xena joyeusement.

 

Gabrielle regarda puis lança un regard inquisiteur à sa compagne. « Comment tu savais. »

 

Un haussement de sourcils noirs. « J’ai… beaucoup… de talents, Gabrielle. »

 

Le barde rit. « Tu n’attendais que ça pour le dire, hein ? » Elle soupira, se blottit un peu plus, et tourna la tête pour regarder les serveurs apporter des plats de la viande odorante. Elle pencha lentement la tête. « Ouais… je n’ai jamais vraiment pensé qu’ils l’étaient. » Elle étudia Hercule et Iolaus avec des yeux légèrement inquisiteurs. « Mais je ne peux pas croire qu’il te l’a dit. »

 

Xena sirota sa bière. « Et bien… il est un peu inquiet à propos de son image. »

 

Gabrielle cligna des yeux. « Quoi ? Oh… » Elle rit doucement. « Je vois… c’est ce truc du macho coriace. » Elle y réfléchit un moment. « Tu penses que ça les rend dingues de savoir que le type le plus coriace ici c’est toi ? »

 

Ce fut le tour de la bière de Xena de voler.

 

Le barde leva les yeux et sourit. « J’t’ai eue. »

 

******

 

Xena sentit qu’on tirait sa manche et baissa les yeux. « Hé… » Elle eut un sourire à la vue de son fils. « Tu t’amuses bien ? »

 

Solan hocha vigoureusement la tête. « Cait m’apprend tout plein de trucs. »

 

Xena tressaillit intérieurement. Oh… bon sang… ça pourrait bien être dangereux, ça. « Ah oui ? » Demanda-t-elle. « Comme quoi ? »

 

Le garçonnet grimpa sur le banc et se blottit près d’elle, se penchant pour voir ce que faisait Gabrielle. Satisfait de voir que le barde était occupé à parler à sa sœur, il retourna son attention vers sa mère. « Humm… des trucs sympas… comme… » Il regarda alentours et baissa la voix. « Comment attacher une selle pour qu’elle tombe quand on essaie de monter dessus. »

 

Cait… tu vas servir de repas aux bacchae, jura silencieusement la guerrière. Il n’a PAS besoin d’aide pour être rusé. « C’est bien… heu… tu ne vas pas faire ça avec la selle d’Argo, hein ? »

 

Il écarquilla ses yeux bleus. « Sûrement pas ! » Une courte pause. « En plus… tu vas vérifier. »

 

Xena haussa un sourcil puis se détendit dans un sourire. « Tu as raison. » Oh… le monde n’est pas près pour ça. Pas pour deux d’entre nous. Elle glissa son bras libre derrière lui pour le serrer, à son plaisir évident.

 

Solan resta tranquille un moment, jouant avec le tissu de sa chemise avant de la regarder à nouveau. « Tu es vraiment jolie aujourd’hui. » Il fit une pause. « Toute rayonnante. »

 

La guerrière lui sourit. « Merci. » Elle repoussa nonchalamment les cheveux de son front. « Tu es plutôt joli toi aussi. » Puis son esprit revint à ce qu’il avait dit et elle s’arrêta. Rayonnante ? Par les dieux…

 

« Hé Solan… » La voix de Gabrielle brisa le cours de sa pensée tandis que le barde se penchait pour ébouriffer les cheveux du garçonnet.

 

Il lui sourit. « Salut maman… tu vas me raconter des histoires ce soir ? »

 

Gabrielle rit légèrement. « Heu… et bien, on m’a dit que j’étais dispensée ce soir. » Elle lança un coup d’œil à sa compagne qui riait. « Parce que je… j’ai tendance à pas mal utiliser mes mains, et euh… » Elle leva leurs mains jointes et fit un sourire à Solan.

 

L’après-midi avait été amusante, songea le barde. Et leurs mains jointes leur avaient donné une parfaite excuse pour la passer pratiquement sur les genoux l’une de l’autre tandis qu’elles prenaient leur tour pour nourrir l’autre. Mais… se dit Gabrielle avec un sourire, elle était contente que ce lien ait pris sa main gauche et la droite de Xena… parce que la coordination de la guerrière avec sa main gauche était bien meilleure que la sienne.

 

Et le rôti de porc avait été… Gabrielle soupira d’aise. Fantastique… au point qu’elle était sûre que si elle essayait de manger encore une bouchée, elle claquerait comme une bulle de savon. Juste là, elle ne voulait rien d’autre que de poser la tête sur l’épaule de Xena et faire un somme, mais son regard balaya la pièce d’un air désabusé. Beuh… pas le moment. Les musiciens s’installaient et un espace était dégagé au milieu de l’auberge pour danser. Elle regarda paresseusement les singeries des Amazones à la table à côté, où la bière coulait… à flots.

 

Xena remarqua la même chose, parce qu’elle poussa légèrement sa compagne. « Hé… majesté… je peux demander une faveur ? »

 

Le barde pencha la tête et lança un regard intrigué à Xena. « J’ai hâte d’entendre ça. Vas-y. » Elle sourit à Solan qui gloussa en retour.

 

La guerrière soupira. « Ecoute… elles vont être soules. » Elle montra le groupe des Amazones du menton. « Et tu sais comment ça finit. »

 

« Mmm… » Gabrielle chantonna pensivement. « Oh… oui, ok, je vois ce que tu veux dire… Eponine surtout… qui veut défier tout le monde. »

 

Les yeux de Xena étincelèrent. « Tu as une nuit de libre… j’ai une nuit de libre, ok ? »

 

Le barde contracta ses sourcils clairs. « Hein ? ? ? » Puis elle rit. « Oh… d’accord… j’ai compris… je ne raconte pas d’histoires, tu ne bats personne, c’est ça ? » Elle hocha la tête. « Ok… ok… si quelqu’un te défie, je lui dis de déguerpir. » Elle y réfléchit. « Bien que… ça pourrait être une bonne occasion pour toi de prouver que tu peux battre n’importe qui avec une main liée dans le dos. » Les yeux verts brillèrent dans sa direction.

 

« Gabrielle. » Xena lui lança son Regard.

 

« Juste une idée comme ça. » Le barde rit. « Pas que j’ai des doutes, hein ? »

 

« Moi non plus », approuva Solan.

 

« Roo. » Arès passa la tête de dessous la table et lécha le genou de Xena.

 

Celle-ci soupira et leva les yeux au ciel.

 

*****

 

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