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TERRORS7

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Dar & Kerry

 

Terrors of the High Seas

Aventures en Haute Mer

 

 

Par Melissa Good

Traduction : Fryda

(fryda@orange.fr)

 

Voir les avertissements dans la partie 1

**********

Partie 7a

*********

Dar sifflotait en travaillant sur le pont arrière, nettoyant le bateau de leur épreuve de la veille. On était environ une heure avant l’aube. Le soleil se déversait sur son corps vêtu d’un maillot de bain, réchauffant ses omoplates en lui permettant d’apprécier la brise fraîche.

 

Kerry était coincée au lit, avec une tasse de thé chaud pour sa gorge toujours enflammée. Malgré cela, la jeune femme blonde avait semblé bien plus vive lorsqu’elles s’étaient éveillées et Dar se disait qu’elle ne resterait pas bien longtemps au lit.

 

Mais c’était bon. Avec un sourire, Dar finit sa tâche et rentra dans la cabine. L’odeur de café frais l’accueillit et comme elle s’y attendait, derrière la cuisine, elle trouva un des petits elfes du Père Noël en train de le faire. « Ah ah. »

 

Kerry leva les yeux et produisit un sourire lumineux pour sa compagne. « Joyeux Noël et Bon anniversaire, chérie. »

 

« Je pensais que tu te reposais. » Dar s’engouffra dans la cuisine derrière elle.

 

« Je le faisais », répondit Kerry. « Maintenant je cuisine. C’est un genre de succession de choses. » Elle tapota la poitrine Dar avec une cuillère de cuisson. « Je me sens beaucoup mieux. Maintenant tu vas par-là et tu me laisses finir mes pancakes. »

 

« Des pancakes ? » La voix de Dar s’éleva de surprise. « Mmm. » Elle inclina la tête et embrassa Kerry sur les lèvres.

 

« C’est une tradition. » Kerry leva la main et toucha la joue de Dar. « Maintenant file. »

 

Au lieu d’obéir, Dar glissa les bras autour de Kerry et la saisit dans une étreinte puissante, la soulevant du sol.

 

« Ouf. » Kerry apprécia le moment, savourant l’effet inattendu collatéral de sentir sa colonne se détendre et se réaligner. « Ooh… merci. » Elle sentit les mains de Dar lui masser le dos rudement alors qu’elle la reposait. Quand elle se pencha en arrière et leva les yeux, elle fut contente de voir le visage de Dar totalement ouvert et heureux, sans la tension inquiète de la veille.

 

Elle tapota le ventre de Dar à travers le maillot de bains fin, et lui fit un autre câlin, puis elle la poussa doucement de la cuisine pour pouvoir finir le petit-déjeuner.

 

Dar fit retraite à contrecœur vers le divan et se laissa tomber dedans, s’étirant sur le côté et croisant les chevilles. « Alors. Est-ce qu’on est d’accord pour abandonner DeSalliers et sa compagnie ? »

 

Kerry repoussa une mèche de cheveux. « Tu veux dire, juste partir et les laisser résoudre leurs problèmes ? »

 

« Mmhm. »

 

« Ouais. » La jeune femme blonde hocha la tête. « Je veux dire, il n’y a rien que nous puissions faire, n’est-ce pas ? »

 

Dar examina une légère cicatrice sur le haut de sa cuisse. « Pas vraiment », dit-elle. « Parfois ça paye de savoir quand il faut fermer le livre et juste partir. » Elle fit un sourire désinvolte à Kerry. « En plus cette querelle de famille est affreuse. »

 

Kerry avait eu l’occasion d’en savoir plus là-dessus que la plupart des gens. Elle se contenta de grogner son assentiment en versant de la pâte à crêpe sur la petite grille, mettant juste la bonne température pour que la substance crémeuse commence à faire des bulles sur les coins immédiatement. Elle tendit la main vers un plat et retira une poignée de pépites, les déversant de manière égale sur la pâte.

 

Elle pouvait imaginer la réaction de sa mère à son choix de petit-déjeuner. Pendant plus d’années qu’elle ne pouvait en compter, le petit-déjeuner à la maison avait été constitué de petits pains, peut-être d’un œuf dur, et d’un bol de céréales avec du lait écrémé. Bien sûr, ça lui avait juste donné l’envie d’attraper une barre de sucrerie avant la première période à l’école et résulté dans le développement d’un dégoût intense de barres de céréales à la noix et aux raisins.

 

Vivre avec Dar était différent. Si elle avait envie d’un milk-shake au petit-déjeuner, le seul commentaire qu’elle recevrait de sa compagne, serait probablement ‘Où est le mien ?’ Dar avait une attitude très tranquille et détendue envers son propre corps et cela s’étendait également à Kerry, ce qui avait diminué la timidité initiale de cette dernière considérablement.

 

Pour être honnête, la plupart du temps, elle et Dar mangeaient relativement sainement, et à sa grande surprise, la dernière fois que le Dr Steve avait vérifié son cholestérol, il avait baissé de quarante points en fait. Elle soupçonnait le temps passé en plus à la gym d’en être responsable, mais elle n’allait pas discuter. Pas quand elle pouvait enfin se faire plaisir sans s’inquiéter des commentaires autour de la table du dîner.

 

Ah bon. Elle retourna son attention à sa tâche. Les pancakes demandaient de la pratique. Kerry manœuvra le fin papier sous les crêpes et les retourna de manière experte, exposant joliment leur dessous doré. L’odeur de la pâte qui cuisait, en même temps que celle du chocolat, emplirent l’air, et elle sentit sa bouche saliver en réponse.

 

Et bien, au moins son appétit était de retour. C’était bon signe. Kerry tendit la main et tourna quelques tranches de bacon qui grésillaient à côté. Sa gorge l’embêtait toujours un peu et elle se sentait toujours ’décalée’, elle avait mal partout et sa tête lui semblait un peu brumeuse. Mais elle n’avait pas de fièvre et avait assez faim pour manger un poisson cru, alors elle se dit qu’elle allait sûrement mieux.

 

En plus c’était l’anniversaire de Dar. Kerry se sentit sourire en se souvenant du cadeau qu’elle avait offert la veille. Elle jeta un coup d’œil vers le canapé, enchantée de voir Dar étudier sa nouvelle montre, un sourire tirant les coins de sa bouche alors qu’elle la faisait tourner entre ses doigts.

 

Elle retourna à sa plaque et prépara une autre assiette, transférant avec soin quatre crêpes chaudes et plusieurs tranches de bacon. Elle la mit de côté et posa le reste de la nourriture sur une seconde assiette, puis éteignit la plaque et mit deux couvercles sur les assiettes. « Sudiste, tu peux venir ici m’aider ? »

 

Dar gloussa et posa sa montre avant de venir à grands pas. « Tu sais si quelqu’un m’avait dit avant que je te rencontre que j’accepterais qu’on m’appelle comme ça, encore plus que j’aimerais ça, je l’aurais renvoyé dans ses buts. »

 

Kerry lui fit un sourire charmeur et lui tendit les assiettes. « Je vais prendre les petits pains et le café. »

 

« Et le sirop », lui rappela Dar, en posant les assiettes sur la table pour revenir vers Kerry et sortir une bouteille de jus du frigo.

 

Elles s’assirent et Dar souleva le couvercle de son assiette, reniflant l’odeur de la crêpe aux copeaux de chocolat. « Mm. »

 

Kerry versa avec soin un peu de sirop sur sa part et en prit une fourchetée. « Tu sais, si quelqu’un m’avait dit avant que je te rencontre que j’engloutirais des crêpes et du bacon sans aucune culpabilité, et que j’aimerais ça en plus, j’aurais juste ri », dit-elle. « Alors je pense qu’on est juste prêtes à faire des changements positifs dans la vie l’une de l’autre. » Elle cligna de l’œil vers Dar.

 

Dar se glissa plus près et elles échangèrent des parts de petit déjeuner. Kerry lécha un peu du sirop qui avait atterri Dieu sait comment sur son nez, et elles se firent un toast avec le café.

 

« Okay, alors si on ne part pas en croisade et que moi je reste la tête sous l’eau, ça n’est pas vraiment une bonne idée, qu’est-ce que tu avais en tête pour aujourd’hui ? » Demanda Kerry, après quelques minutes de dégustation tranquille. « Des courses ? »

 

Une balade sympa dans les boutiques éclectiques de Saint Thomas ? Dar trouva ça soudain intéressant, au moins pour la raison que ça fournirait une activité qui serait un bon compromis avec la santé de Kerry. « D’accord », acquiesça-t-elle. « Je vais aller rapidement chez Charlie et Bud quand on en aura fini avec le petit déjeuner et on y va. »

 

« Ooh… tu me laisses t’emmener faire des courses le jour de ton anniversaire. Tu es dans de beaux draps, Paladar », dit Kerry en riant, croquant un morceau de bacon. « Je vais te gâter jusqu’à la moelle. »

 

« Oh oh. » Dar se couvrit les yeux. « Dans quoi je me suis fourrée ? »

 

« Eh. »

 

************************************

 

Dar flânait sur la plage vers chez Bud et Charlie, se sentant détendue et un peu paresseuse après sa gourmandise préférée malgré la menace des courses suspendue au-dessus de sa tête. L’île était très calme, seules quelques mouettes remarquèrent sa présence alors qu’elle grimpait la pente vers le restaurant. Elle monta sur le porche et regarda par les portes voilées.

 

A l’intérieur, le restaurant était silencieux et tranquille, les chaises étaient posées sur les tables et les tapis empilés près de la porte.

 

Mais il était encore très tôt, alors Dar ne trouva pas ça inhabituel. Elle tira sur la poignée en acier expérimentalement, un peu surprise lorsque la porte s’ouvrit facilement vers elle. « Hello ? »

 

Sa voix fit écho dans la pièce vide, mais il n’y eut pas de réponse à son appel. Avec un léger haussement d’épaules, Dar entra et traversa le sol en bois, poussant la porte de la cuisine pour regarder à l’intérieur.

 

L’endroit était également vide, des pots pendaient immaculés et vides sur les crochets du plafond, et les fourneaux étaient froids et inutilisés. Dar traversa l’endroit étroit et passa les portes du fond pour se retrouver dans un petit couloir avec des pièces fermées de chaque côté. Elle savait que Bud et Charlie vivaient à l’arrière du restaurant, et là, soudain, il lui apparut que peut-être ils avaient fermé pour les vacances de Noël et qu’ils dormaient.

 

« Oups. » Elle repartit dans la cuisine, et regarda autour d’elle jusqu’à ce qu’elle trouve un carnet de commandes avec un crayon attaché. Elle le prit et pencha la tête par-dessus, écrivant pendant quelques minutes avant d’étudier le résultat, puis elle arracha la page du dessus.

 

Elle laissa le carnet où elle l’avait trouvé et alla vers les portes intérieures pour coller la note dessus, en direction des pièces intérieures. Quiconque arriverait depuis la cuisine la verrait, et elle sentait raisonnablement que soit Bud soit Charlie le ferait ce matin à un moment ou à un autre.

 

Elle regarda la note avec une certaine touche de perplexité, se souvenant de certains jours pluvieux quand Kerry et elle avait séché le travail. Bon, peut-être à un moment ou à un autre cet après-midi. Avec un sourire, elle se retourna et ressortit du restaurant par la porte arrière.

 

***********************************

 

Kerry regardait les charmantes rues de Charlotte Amalie avec un sourire, savourant les couleurs et l’exposition d’artisanat local. Elle portait un short sombre mi-long avec plus de poches qu’il n’était raisonnable et une chemise blanche immaculée rentrée dans le short, et elle se sentait la touriste parfaite et prête à faire du shopping.

 

Dar marchait à grands pas près d’elle, portant un short de cycliste bien collant et un débardeur rouge vif. Avec ses lunettes de soleil et ses cheveux noirs attachés en queue de cheval, elle avait l’air d’une publicité ambulante pour une mauvaise attitude.

 

Kerry adorait ça. Elle regardait en permanence les gens qui jetaient des coups d’œil à Dar, qui traversait la foule avec un air de franc mépris. Elle portait un léger sac à dos, dans lequel se trouvaient le pc portable et les téléphones mobiles, depuis que la marina n’était plus ce que Dar considérait comme très sûre, et les bretelles tiraient le tissu de son tee-shirt en arrière de son corps musclé.

 

Très butch. Le sourire de Kerry fit plisser son nez et elle réfréna un rire.

 

« Qu’est-ce qu’il y a de si drôle ? » Demanda Dar, en la regardant de dessus ses lunettes enveloppantes.

 

« Rien », la rassura Kerry. « Cet endroit est si mignon. » Elle montra le marché. « Tu veux voir si on peut trouver de ces paniers en paille ? Je pense que ta mère en aimerait pour mettre ses trucs de peinture. »

 

Dar regarda les marchandises empilées. « J’te suis », répondit-elle. « Hé, peut-être que je peux trouver des boucles d’oreille tant qu’on est là. »

 

Okay. Kerry lui prit le bras. Pas si butch après tout. « Et pourquoi pas quelques-uns de ces coquillages miniatures sympas ? Ils seraient bien sur toi. »

 

« Tu crois ? »

 

« Absolument. »

 

************************************

 

Elles finirent dans un petit café extérieur sur la rue qui donnait sur le port après une rude après-midi de courses. Le sac à dos de Dar s’était alourdi de plusieurs paquets et Kerry avait un sac en chanvre tissé à ses pieds. « C’est sympa », commenta Dar en sirotant un cappuccino odorant. La brise arrivait vers l’intérieur et elle étira ses longues jambes pour l’apprécier.

 

Kerry avait les deux mains autour d’une tasse de thé chaud. « Ça c’est sûr », acquiesça-t-elle. « Hé, tu veux passer la nuit ici au Blackbeard’s Castle ? Ça a l’air vraiment chouette. »

 

Dar pencha la tête en arrière et regarda la colline au-dessus d’elles. « Ouais », dit-elle en souriant. « Ça avait l’air d’un endroit marrant c’est sûr. » Elle se retourna pour regarder Kerry, repérant le soupir difficilement masqué. « Tu manques de pêche ? »

 

Bon sang. Kerry s’éclaircit la gorge. « Mon virus me gêne toujours, je pense », admit-elle.

 

« Alors on part à l’auberge. » Dar posa un billet sur la table et tendit la main. « On appelle un taxi et on se prend une chambre en haut de cette colline. » Elle saisit un mouvement au coin de son œil, mais alors qu’elle se tournait, plusieurs hommes passèrent tout près et causèrent une distraction, et le temps qu’elle se reconcentre sur le point, il n’y avait rien.

 

Ça n’était probablement que le serveur, se dit Dar en mettant le sac sur ses épaules et en repoussant sa chaise. Elle sortit le téléphone et vérifia, ne vit aucune activité et elle plissa le front. « Ne me dis pas qu’ils sont toujours au lit. »

 

« Hein ? » Kerry pencha la tête.

 

« J’ai demandé à Bud de m’appeler quand il se lèverait. Je dois lui demander quelque chose », expliqua Dar. « Il n’a pas appelé. »

 

« Je pensais qu’ils n’avaient pas le téléphone ? » Dit Kerry alors qu’elles marchaient dans la rue vers le croisement. « C’est ce qu’ils ont dit à Bob. »

 

« C’est ce qu’il a dit à Bob », répéta Dar ironiquement. « Ils ont un téléphone portable. Ils n’aiment pas l’utiliser c’est tout. Ils payent à la minute. » Elle secoua la tête puis chercha un numéro dans la mémoire de son téléphone et le composa. Ça sonna plusieurs fois et lui répondit poliment que le client qu’elle essayait de joindre était indisponible. Dar ferma le téléphone. « Il l’a probablement éteint. »

 

« Qu’est-ce que tu voulais lui demander ? » Kerry alors qu’elles s’arrêtaient et qu’elle levait la main pour héler un taxi. De manière incroyable, la voiture ralentit pour s’arrêter, son conducteur passant la tête pour les regarder avec une expression joyeuse. « Salut », le salua Kerry. « On aimerait aller au Castle ? »

 

« Où que vous vouliez aller, belles dames, je vous conduis », répliqua l’homme immédiatement. « Venez, venez. »

 

« Merci. » Kerry ouvrit la portière. « Je pense », ajouta-t-elle entre ses dents.

 

Dar se contenta de repousser légèrement ses lunettes de soleil et suivit. Alors qu’elle refermait la portière derrière elle, elle saisit de nouveau quelque chose du coin de l’œil et cette fois-ci elle se tourna rapidement pour voir ce que c’était.

 

Rien. Le coin de rue derrière elle était vide. Dar fronça les sourcils et se remit de face, croisant les bras sur le paquet qu’elle avait sorti de son sac à dos et se demanda si la boisson au rhum qu’elle avait prise à la dernière boutique ne lui faisait pas voir des choses.

 

Ou les imaginer.

 

**********************************

 

« Oh c’est adorable. » Kerry jeta un coup d’œil à leur petite chambre avec approbation. « Je suis contente qu’ils n’aient pas eu de chambre dans la grande résidence, Dar ; ceci est bien, bien plus mignon. » Elles séjournaient dans la petite auberge qui entourait la taverne, avec une vue sur le port. Kerry s’avança vers le lit somptueux à baldaquins et elle s’assit, rebondissant légèrement, puis se laissant tomber les bras en croix. « Ouf. »

 

Dar posa son paquet et mit les mains sur les hanches alors qu’elle inspectait leurs quartiers assignés. « Joli », acquiesça-t-elle avec un sourire. « Je vais te dire un truc. Tu restes ici et tu te détends et je vais au bateau chercher des vêtements de rechange pour nous deux », dit-elle. « Commande du thé chaud et apprécie la vue. »

 

Kerry pensa à discuter. Puis son sens commun prit le pas et elle remua les doigts en direction de Dar dans une approbation paisible. « T’es géniale. »

 

Avec un sourire de plaisir, Dar lui rendit son geste et se retourna avant de sortir et de refermer la porte derrière elle.

 

« Ahh. » Kerry soupira, contente de rester tranquillement allongée. Alors que la journée avançait, son corps protestait de plus en plus même si elle appréciait la sortie courses. Maintenant la perspective d’une soirée tranquille dans cette mignonne petite chambre s’offrait à elle. Il y avait un petit balcon avec une table, et elle soupçonnait qu’elles auraient un dîner léger, une bouteille de vin et toutes les deux faisaient exactement la bonne taille pour ce coin.

 

Une bonne façon de terminer la journée d’anniversaire de Dar, se dit-elle. Un sourire passa sur son visage alors qu’elle pensait à sa compagne, et combien elle avait apprécié leur journée à se balader toutes les deux.

 

Peut-être bien que si elle se sentait mieux demain, elle remplirait sa part du marché, et qu’elles feraient du cheval dans les collines. Elle avait vu de la pub pour une écurie à l’air sympa au comptoir d’enregistrement de l’hôtel.

 

Ouais. Une balade sympa à cheval, peut-être un pique-nique… peut-être qu’elles trouveraient un coin sympa et qu’elle écrirait un poème dessus. Kerry imagina une étendue de forêt verte et odorante, avec des oiseaux qui chantaient autour d’elle. Elle pouvait presque sentir la riche odeur de la terre.

 

Ouais.

 

Avec un bâillement, elle roula sur le ventre et rampa jusqu’au bord du lit, prit le menu couvert de cuir des services de l’hôtel et l’ouvrit. « Ah. » Elle repéra la section des thés, contente de voir qu’il y avait plus d’un choix. « Mangue. Essayons ça. » Elle prit le téléphone et composa le numéro.

 

**********************************

 

Dar décida d’éviter le taxi, préférant courir vers le bateau. La foule s’amenuisait à mesure que le soleil se couchait et les cafés à côté desquels elle passait commençaient à se mettre en place pour le dîner. L’air contenait une nuance d’un mélange éclectique de nourriture, de fumée de noyer et d’une touche de tomate et ail, ainsi que d’une pincée d’épices. Dar inspira tout ceci d’un air appréciateur et reconnut qu’elle était fichtrement contente qu’elles aient décidé de laisser Bob et ses problèmes de famille loin derrière.

 

DeSalliers l’avait vraiment agacée, admit Dar pour elle-même. Ça ne l’aurait pas gênée de le faire tomber de son piédestal, mais l’homme avait été embauché pour faire un boulot, et bien qu’elle n’aimait pas particulièrement son style, ses méthodes étaient efficaces et très orientées affaires. Et Dar l’admit. C’est comme ça que la plupart des gens te décrivent, non ? Elle rit doucement à ce portrait d’elle-même qu’elle acceptait.

 

L’histoire de Bob lui avait semblé trop apprêtée, se dit-elle, alors que son chemin l’emmenait sur une pente particulièrement forte vers le quai. Est-ce qu’elle acceptait vraiment cette émergence confortable d’une preuve après tout ce temps ? Il lui semblait plutôt que Bob manquait d’argent, et qu’il s’était acoquiné avec toutes les autres familles ayant droit et avait monté une histoire pour causer des ennuis. Il s’était sûrement arrangé pour obtenir de l’argent s’il pouvait remuer assez de chaos.

 

Bien sûr… Dar évita un homme en motocyclette. Il se pourrait aussi qu’elle n’aimait pas Bob parce qu’il essayait de draguer Kerry. Elle se demanda brièvement s’il avait simplement vu une jolie fille qui l’intéressait, ou bien s’il était attiré par Kerry à cause de ses ressources financières évidentes.

 

Elle prit un tournant et courut entre deux immeubles. Alors qu’elle passait une benne à ordures, un éclair de mouvement lui fit tourner la tête, mais avant qu’elle puisse réagir, un corps la frappait et la poussait contre le mur. « Hé ! »

 

Des mains l’agrippèrent et la poussèrent à nouveau contre le mur, puis un poids solide la cloua, et elle reçut une bouffée de souffle pas très agréable dans la figure. « Très bien, sale garce. Ne bouge pas. »

 

Dar cligna des yeux, un visage lourd et grêlé devint clair. Son attaquant avait l’avant-bras contre sa gorge et son poids la retenait contre le mur. Ses sens, tout d’abord choqués, revinrent et elle sentit son esprit se remettre en place. « Qui êtes-vous, merde ? » Demanda-t-elle.

 

« La ferme. » L’homme lui poussa à nouveau la gorge, lui coupant l’air. « Je demande, tu réponds. »

 

Une bouffée de rouge obscurcit sa vision de manière inattendue, et Dar sentit sa colère monter avant de pouvoir la retenir. Un long grognement sortit de sa gorge et son corps se convulsa, se poussant contre le mur et s’arquant avec toute sa force. Elle mit les mains sur la poitrine de l’homme et poussa rudement, le refoulant d’elle juste assez longtemps pour qu’elle puisse sautiller vers l’avant.

 

Il jura et lutta avec elle, attrapant sa gorge à deux mains, mais il commit l’erreur de laisser Dar se pencher en avant en même temps qu’il écartait les jambes pour son équilibre. Celle-ci amena immédiatement son genou vers le haut avec une force explosive, frappant son entrejambe de sa rotule.

 

Il hoqueta et la relâcha, tendant la main par pur réflexe. Dar saisit l’opportunité de passer près de lui et de tournoyer, puis elle se tourna de côté et frappa du pied sur ses fesses, l’envoyant valser dans le mur tête la première.

 

Elle tournoya lorsqu’elle sentit autre chose arriver, et ses mains se serrèrent en poings au niveau de ses épaules lorsqu’elle repéra l’autre homme tout près.

 

Il leva les mains à son tour mais les paumes ouvertes. « Ouah, tigresse. »

 

Dar lui jeta un regard noir. « Vous ne savez pas quand laisser les gens tranquilles, merde ? » Demanda-t-elle. « Qu’est-ce qu’il vous faut, DeSalliers ? Un ordre de la cour ou quoi ? »

 

« Et bien, bon sang, Roberts. Vous déboulez dans mes affaires, qu’est-ce que je suis supposé faire ? » Répondit DeSalliers. « Si vous vous occupiez des vôtres, et que vous libériez le chemin, je serais content de ne plus avoir à poser le regard sur vous ! »

 

Dar posa les mains sur les hanches. « Vous êtes taré », dit-elle platement. « Vous voulez votre coin sur l’océan ? Bien. On part. On est venues ici et on n’a pas pensé à vous de toute la fichue journée. Alors de quoi parlez-vous ? »

 

DeSalliers la regarda d’un air soupçonneux. « Vous faites les boutiques pour trouver ce que je cherche. »

 

Dar leva les yeux au ciel. « Nous faisions les boutiques pour une paire de boucles d’oreilles. C’est ça vos affaires ? Je ne l’aurais jamais deviné. » Elle recula d’un pas, pour garder l’autre homme en vue, parce qu’il se remettait debout.

 

« Vous mentez. »

 

« Vous êtes un connard. Je présume qu’on est à égalité », lança Dar. « Maintenant sortez de mon chemin avant que j’appelle les flics. » Elle le montra du doigt. « On ne veut rien de ce que vous êtes en train de chercher. »

 

« Combien il vous a offert ? » Contra DeSalliers, comme s’il n’avait pas entendu un mot de ce qu’elle avait dit. « Je double. »

 

Dar lui jeta un regard furieux. « Vous m’emmerdez vraiment », avertit-elle.

 

« Je triple. Combien ça fait ? »

 

Ça en venait au point où c’était, bizarrement, drôle. « D’accord. » Dar leva les mains. « J’abandonne. »

 

DeSalliers croisa les bras. « Je savais que je pourrais trouver votre prix »

 

« Le français, ça marche pas », continua Dar. « Dans quelle langue vous voulez que je vous dise d’aller vous faire voir la prochaine fois, laquelle vous comprenez ? » Demanda-t-elle. « Sprechen Sie Deutsch ? Habla Usted español? Sprakar ni svenska ? » Elle leva la main gauche, le doigt du milieu levé. « Le langage des signes américain ? Quoi ? »

 

Avec un mouvement soudain, elle se rapprocha de lui, lui attrapa la chemise, et tordit les mains avant qu’il ait le temps de s’extraire. Elle le souleva, le surprenant de sa force, et elle le poussa contre la benne à ordures. « JE NE VEUX RIEN A VOIR A FAIRE AVEC VOS AFFAIRES ! ! ! « Hurla-t-elle à pleins poumons. « VOUS ME COMPRENEZ MONSIEUR ? ? »

 

Ses yeux étaient agrandis comme des soucoupes. Des soucoupes volantes en fait. « Roberts, je ne crois pas que vous vouliez faire ça. »

 

« Tout ce que je veux. » La voix de Dar tomba jusqu’à un bas grondement. « C’est aller chercher des vêtements, retourner à mon hôtel, et passer la nuit à me bécoter avec ma compagne. » Elle se mit nez à nez avec lui. « Et vous, monsieur, êtes tout ce qu’il y a entre moi et ce que je veux. » Elle le secoua. « VOUS… êtes celui qui ne veut pas faire ça. Faites-moi confiance. »

 

« Patron, vous voulez que je la bute ? » La brute derrière elle parla d’une voix légèrement rauque.

 

« Range ça, espèce d’idiot », lança DeSalliers nerveusement. « Elle peut probablement attraper la balle. »

 

Dar ricana. Elle relâcha la chemise de l’homme et le laissa contre la benne à ordures. Elle regarda la brute par-dessus son épaule, et il jonglait avec un petit pistolet avec incertitude. Avec une secousse de la tête, elle tourna le regard vers DeSalliers. « Qu’est-ce qu’il va falloir pour vous convaincre que je ne veux rien de ça ? » Demanda-t-elle d’un ton normal. « On a été impliquées par accident. Je me suis désimpliquée par choix. »

 

Il l’étudia. « Très bien », dit-il. « Expliquez-moi pourquoi vos gens ont sauté sur mes hommes à Saint Richard hier soir, et peut-être que je vous croirai. »

 

« Mes gens ? » Dar le fixa.

 

« Dommage qu’on ait dû les blesser. » DeSalliers lui fit un fin sourire. « Ils n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient. Peut-être que vous... » Son long doigt tapa Dar dans la poitrine. « … devriez tirer une leçon de ça. » Son ton était devenu plus sombre. « Ecoutez-moi Roberts. Restez hors de mon chemin. Si vous revenez, je vous sors. De manière définitive. »

 

Sur ces mots, il se retourna et partit l’air hautain, son sbire sur les talons.

 

Dar le fixa. « Mes gens ? » Murmura-t-elle. « Merde, qu’est-ce qu… » Son esprit revint au restaurant vide, et à une maison calme et tranquille ce matin. Elle sortit son téléphone et se souvint du numéro de Bud et Charlie et le composa.

 

Ça sonna trois fois, puis une messagerie vocale. Dar attendit le bip, puis parla. « Hé. Ici Dar. Appelez-moi quand vous recevrez ceci ; il faut que je vous parle les gars. » Elle hésita puis raccrocha, referma le téléphone et le tapota contre sa poitrine. « Ça va ressembler à un mauvais épisode de Twilight Zone », marmonna-t-elle.

 

Après un instant d’indécision, elle se dirigea vers le bateau. Elle allait prendre leurs vêtements puis retourner à l’hôtel et mettre Kerry au courant.

 

Et ensuite ?

 

Mon Dieu. Dar secoua la tête dans une perplexité honnête. Bon Dieu quoi après ?

 

***********************************

 

Kerry ne se souvenait pas vraiment de s’être endormie. Un instant elle regardait le petit guide des sorties qu’elle avait trouvé dans la chambre, l’instant d’après, elle sentait une main chaude sur son épaule. Elle roula sur le dos et cligna des yeux en voyant Dar. « Oh Mon Dieu. Je suis tombée dans les pommes. »

 

Dar s’assit sur le lit près d’elle. « Apparemment. » Elle repoussa doucement les cheveux de Kerry et mit la main sur son front. Il était frais. « Ça aurait été mieux que je reste et que je me joigne à toi. »

 

« Oh oh. » Kerry la regarda, voyant l’agitation dans son expression. « Qu’est-ce qu’il y a eu ? »

 

« DeSalliers. »

 

« Encore ? Qu’est-ce qui se passe avec ce fichu type ? »

 

Dar se laissa tomber près de Kerry et étendit les bras sur les couvertures. « C’est un abruti égocentrique, mégalomaniaque. »

 

« Et bien, oui, mais à part ça. »

 

« Lui et l’un de ses sbires m’ont pourchassée vers le bateau. Il pense toujours qu’on fait partie de ce stupide jeu auquel il joue. »

 

« Pourchassée ? » Kerry se redressa, bien réveillée, les yeux agrandis et arrondis.

 

« Doucement, marmotte », dit Dar d’une voix traînante, légèrement amusée à la férocité toujours étonnante dont Kerry faisait preuve quand il s’agissait d’elle. « Ouais, on s’est crié dessus, et il est parti. » Elle soupira. « Le problème, c’est qu’il a aussi évoqué le fait qu’il est tombé sur des amis à nous, et qu’ils ont été blessés. » Elle leva son téléphone. « J’ai laissé un message à Bud, mais pas de réponse. »

 

« Beurk. » Kerry commença à s’inquiéter. « Dar, ce n’est pas drôle. Je pense que cette fois on devrait appeler les flics. »

 

Dar hocha la tête. « Moi aussi », dit-elle. « Je me suis arrêtée au commissariat en revenant ici. »

 

« Et ? » Kerry se réinstalla près d’elle.

 

« C’est Noël. » Dar lui lança un regard ironique. « Il n’y avait qu’une personne et il faisait le ménage. Je pense que les autres sont en patrouille. » Elle s’interrompit. « Du moins je l’espère. »

 

« Merde. » Kerry fronça les sourcils. « Est-ce qu’on peut appeler quelqu’un d’autre ? »

 

« Tous les bureaux de l’état sont fermés. » Dar pianota sur les couvertures. « Je ne sais pas si on peut faire quelque chose avant demain. Mais j’aimerais que Bud m’appelle. »

 

« Stupide crétin. »

 

Dar leva les sourcils. « Il n’est pas si mauvais. »

 

« Je parlais de DeSalliers », la reprit Kerry. « Est-ce qu’on devrait retourner à l’île de Bud et Charlie ? Et Rufus ? » Elle se mit sur le côté. « Dar, ça craint. »

 

« Je sais. » Dar fixa le plafond, réfléchissant. « On pourrait y retourner, mais si eux n’y vont pas ? C’est un grand océan, et il y a des douzaines d’îles par-là. »

 

Kerry soupira. « Non, ça craint parce que, bon sang, je voulais célébrer ton anniversaire avec toi ce soir », se plaignit-elle, en tirant sur le tissu sous elle. « Bon Dieu, ça semble si égoïste, non ? » Un léger rire sortit de sa gorge.

 

Dar tendit la main et lui massa le dos du bout de ses doigts. « Nan. »

 

« Urmph. » Kerry arqua la nuque. « Si », grogna-t-elle.

 

« Et bien. » Dar se blottit un peu plus et mit le nez dans le visage de Kerry. « ‘C'est de ma faute, alors tu es excusée. »

 

Kerry glissa les bras autour de Dar et la rapprocha, détectant un soupçon de fumée de bois sur ses vêtements. Elle mit la tête dans l’épaule de Dar et soupira, ne voulant que le confort de la présence de sa compagne.

 

Dar était plus que contente de lui rendre ce service. Elle massa doucement le bas du dos de Kerry tout en fixant le plafond, essayant de savoir quoi faire ensuite. Il faisait presque nuit dehors, et avec la seule lampe de chevet allumée, la pièce se mit dans un demi-jour paisible.

 

Si calme, que le téléphone de Dar qui résonna faillit les faire sauter du lit. « Merde. » Dar tâtonna pour trouver le téléphone. Elle l’ouvrit et le porta à son oreille. « Oui ? »

 

Kerry remit la tête sur l’épaule de Dar, essayant de calmer son cœur pour qu’il ne grimpe pas à ses oreilles. Elle était à demi-endormie, dans cet endroit brumeux juste avant de plonger complètement, et son corps ressentait une sorte de choc à avoir été brusquement sorti de cet état.

 

« Oui. » La voix de Dar était sérieuse. « Très bien. On arrive tout de suite. » Elle plia le téléphone et le posa sur le lit, laissant passer une longue expiration.

 

« Qu’est-ce qui se passe ? » Demanda Kerry.

 

« Charlie », murmura Dar après un moment. « Il est à l’hôpital, ici à Saint Thomas. » Elle tourna la tête et regarda Kerry. « Ça n’est pas joli. »

 

Kerry aurait pu passer tout le reste de sa vie sans revoir un hôpital. Elle donna une tape sur le côté à Dar et se souleva sur un coude. « On y va alors », dit-elle. « Qu’on aime ça ou pas, on est dedans, non ? »

 

Dar se redressa. « On dirait bien, ouais. » Elle se leva du lit et accrocha le téléphone à sa ceinture. « Tu peux rester ici si tu veux Ker. Si tu ne te sens pas bien, pas besoin que toutes les deux… ah. »

 

Kerry s’était levée et passait sa brosse dans ses cheveux. « Ma douce, si je ne peux pas passer la nuit avec toi dans ce lit, alors je vais prendre ce que je peux. » Elle jeta la brosse à Dar. « En plus j’aime bien Charlie. J’espère qu’il va bien. »

 

Dar se brossa les cheveux, espérant de même.

 

****************************

 

L’hôpital était affairé. C’était un ensemble relativement petit de bâtiments, pas très éloigné de la ville dans laquelle elles avaient séjourné. Dar entra la première et elles allèrent au comptoir d’accueil. Elles donnèrent le nom de Charlie et on les dirigea vers les étages.

 

Sortant au second, Dar repéra Bud près du bout du couloir. Elle appela à voix basse et il se retourna, fermant le téléphone dans lequel il parlait pour venir vers elles.

 

Kerry prit une inspiration. Le visage de Bud était à demi-couvert d’un horrible bleu, bien qu’il en semblait inconscient. Sa chemise était déchirée, exposant son épaule, et le dos de sa main était fortement éraflé.

 

« Qu’est-ce qui s’est passé ? » Demanda calmement Dar.

 

Bud regarda le long du couloir, puis leur fit signe d’aller vers un groupe de fauteuils. Il s’assit et posa ses coudes sur ses genoux. Il étudia le sol pendant que Dar s’asseyait près de lui. « Tu as déjà entendu parler de quelque chose de trop stupide pour la Marine ? »

 

Dar réfréna un rire désabusé. « J’ai entendu ça à la maison une fois ou deux, ouais. »

 

« Ben. » La voix de Bud était très douce. « J’ai fait quelque chose de trop stupide pour la Marine. » Il regarda le dos de sa main. « J’ai posé ma chope dans un endroit où elle devait pas être, et Charlie a été blessé à cause de ça. »

 

Sa douleur était très évidente. Kerry s’installa dans la chaise de l’autre côté de lui, et mit la main sur son dos, le massant avec sympathie. « Je suis désolée. »

 

« Pas autant que moi », dit Bud. « Et vous savez quoi, ça me fait mal au cul d’admettre que j’ai été si stupide. » Il tourna la tête et regarda Dar. « J’aurais dû accepter ton offre. Le pire que j’en aurais eu c’est des brûlures d’estomac pendant une semaine. »

 

Dar réussit à produire une expression de relative sympathie. « Dans quoi tu t’es mis ? »

 

Bud sembla lutter avec lui-même pendant encore un instant, puis il secoua la tête. « Ce foutu gamin nous a offert un tonneau de fric pour aller plonger sur ce site. On l’a fait. »

 

« L’épave ? » Demanda Kerry. « Le gamin… vous voulez dire, Bob ? »

 

Bud opina. « C’était une plongée de nuit, on entre, on sort… ça me semblait pas dangereux. Pas un gros truc », dit-il. « Ils nous ont attrapés là-bas, mais on est montés sur le bateau et on a filé. »

 

« Ils vous ont suivis ? » Hasarda Dar.

 

« Ils nous ont chassés tout le long jusqu’ici », dit Bud en hochant la tête. « On voulait pas rentrer à la maison », dit-il dans un souffle. « Ils nous ont pris. » Son regard alla vers un groupe de portes. « Ils avaient des tuyaux et des battes. Charlie a un rein écrasé. Il ne pouvait pas s’enfuir à cause de sa jambe, et moi… »

 

« Tu es resté avec lui », dit Kerry.

 

« Quelque chose comme ça, ouais », admit Bud. « Ce gamin à la con s’est enfui. Il nous a laissés là et a pris le bateau. »

 

Kerry plissa les yeux. « C’est puant. »

 

Dar se massa les tempes. « Combien il vous a offert ? » Demanda-t-elle tranquillement.

 

« Ça a pas vraiment d’importance », marmonna Bud.

 

« COMBIEN. » Il était étonnant de voir combien de force Dar pouvait projeter dans sa voix sans augmenter le volume.

 

Bud cligna des yeux. « Dix mille. Pourquoi ? »

 

« C’est le prix du problème chez vous ? »

 

Bud opina.

 

Dar vérifia sa montre puis composa un numéro sur son téléphone. Elle attendit qu’il se connecte, puis elle commença à taper des chiffres, se penchant en arrière concentrée sur ce qu’elle faisait.

 

« Alors, comment va Charlie ? » Demanda Kerry.

 

Bud détourna les yeux de la forme bouillonnante de Dar. « Il a été frappé partout. Ils ont arraché sa prothèse. Ils l’ont ceinturé au rein. C’est ça l’emmerdement. Il avait des problèmes avec celui-là. »

 

Dar lui tapa sur le genou. « Tout est en ordre avec cet endroit ? » Elle montra l’hôpital.

 

Bud se redressa. « Je cherche pas d’aide », lui lança-t-il. « On va bien. »

 

Dar se pencha plus près de lui et plissa les yeux. « Si je dois, je peux appeler cet endroit et savoir si vous avez une assurance ou pas. Alors réponds juste à cette foutue question et me fais pas perdre mon temps. »

 

Bud baissa les yeux.

 

« C’est ce que je pensais. » Dar se leva. « Okay. J’en ai marre. Ce stupide fils de pute de DeSalliers est convaincu que je suis dans ce truc, il va avoir ce qu’il cherche. » Elle mit les mains sur ses hanches. « On peut voir Charlie ? »

 

Bud donnait l’impression que le changement de sujet lui donnait un coup de fouet. Il mit la main sur sa mâchoire. « Ouais, je pense. »

 

« Bien », dit Dar. « Tu as un endroit où rester ici ? »

 

Bud secoua la tête.

 

« On s’occupe de Rufus ? »

 

« Ouais. Il reste avec un copain. »

 

Kerry sortit une feuille de papier de sa poche et se leva, se dirigeant vers un publiphone proche. « Je vais appeler l’hôtel », dit-elle à Dar. « Tu veux que je commence à faire le tour pour dénicher notre ami Bob ? »

 

« Attends qu’on soit rentrées à la chambre », lui dit Dar. « J’ai besoin de mon ordinateur. »

 

Bud les regarda tour à tour, un peu surpris. « Qu’est-ce que vous faites ? »

 

« Nous », lui dit Kerry en couvrant le combiné, « faisons ce que nous avons à faire. » Elle jeta un coup d’œil à l’expression féroce de Dar, puis revint au téléphone. « Oui ? Oui. Nous avons une chambre, je sais. J’en aimerais une seconde. »

 

Dar attendit que Kerry ait fini. Elle entrèrent dans la chambre de Charlie, s’avançant calmement vers la machinerie qui clignotait doucement et qui l’entourait.

 

Dar ferma les yeux. La rossée que son ami avait prise était hideuse. DeSalliers, espèce de salaud. Tu ne sais pas ce que tu viens de déclencher. Elle posa les mains sur le rail en acier, et fixa la forme meurtrie de Charlie. « Salut. »

 

Ses yeux n’étaient que des fentes. Mais ils s’ouvrirent un peu pour voir Dar.

 

Bud prit doucement les mains de Charlie dans ses mains, pour les frictionner. « J’ai appelé les Marines, Punky. »

 

Un soupçon de sourire tira les lèvres de Charlie. « Je vois ça. »

 

« Doucement. » Dar se pencha sur les rails. « Je prends les choses en mains maintenant, et je dicte les règles », dit-elle. « Ils t’ont donné de bons médicaments ? »

 

Charlie hocha légèrement la tête.

 

« Bien. » Dar nota son numéro de téléphone sur un carnet posé sur la petite table de chevet. « Si tu as besoin de quoi que ce soit, appelle. » Elle posa le stylo. « Je vais voir à l’accueil quand je sortirai. On va s’occuper de toi. »

 

« M… » Bud se redressa.

 

Dar se contenta de le regarder. Bud se relâcha, avec un soupir fatigué. « J’ai lancé un transfert de fonds pour demain », continua Dar. « On va s’occuper de ton oncle Guido, ensuite je me consacre à DeSalliers. »

 

« Qu’est-ce que tu vas faire ? » Demanda Bud.

 

« D’abord, trouver la vérité. Ensuite je vais lui donner exactement ce qu’il demande », dit Dar. « Tu vas rester ici un moment ? » Demanda-t-elle à Bud.

 

Bud hocha la tête.

 

« L’auberge à Blackbeard’s Castle. On a une chambre pour toi », lui dit Dar.

 

Charlie émit un son étouffé qui ressemblait vaguement à un rire.

 

« Toi tais-toi », grogna Bud à son intention. « Je peux rester ici. »

 

Kerry se pencha en avant et pressa le bras de Charlie. « Chasse-le, okay ? »

 

Charlie hocha la tête, riant toujours. « Ils me font des tests ou des trucs comme ça. Ils vérifient mes tripes », expliqua-t-il. « Bon Dieu, s’ils en ont fini avec ça, je le traîne moi-même hors d’ici. » Ses yeux bleuis allèrent au visage de Dar. « Bon sang si on dirait pas ton père quand tu parles. »

 

Dar se carra. « Merci. » Elle lui fit un signe de tête affable. « Allez, Ker. Allons allumer quelques feux. »

 

Kerry haussa les sourcils. Bud et Charlie aussi, mais pour lui ça semblait difficile à dire.

 

Dar pencha la tête. « Quoi ? »

 

Kerry fit le tour du lit et prit le bras de Dar. « Tu peux allumer mes feux quand tu veux, chérie », assura-t-elle à Dar. « Mais tu n’as pas besoin d’ameuter tout le monde. »

 

Dar ouvrit la bouche pour répondre et vit les sourires narquois. Elle referma la mâchoire, et se recomposa, s’enveloppant dans sa dignité comme dans une cape alors qu’elle suivait Kerry hors de la chambre.

 

Bud fixa la porte d’un œil noir pendant un instant, puis il relâcha un soupir. « Merde, je déteste faire ça. »

 

« Buddy, Buddy, Buddy… » Charlie lui pressa la main. « C’est une amie, ouais ? »

 

Bud fixa les draps blanchis.

 

« On a d’autres amis qui feraient ce qu’elle fait ? »

 

« Ça me met en rogne », continua Bud. « J’ai pas besoin de charité ! »

 

« Bud. » La voix de Charlie s’adoucit et il caressa la joue de Bud. « Pour elle, c’est pas de la charité », dit-il. « Elle fait partie de la Marine. De la famille. C’est profond, tu le sais. Si quelqu’un de l’époque nous demandait la même chose, et qu’on pouvait, on le ferait pas ? »

 

« Presque tout le monde », marmonna Bud. « Mais… » Il s’affaissa légèrement. « Ouais. »

 

Charlie lui ébouriffa les cheveux avec affection. « Et bien, alors ils vont me laisser sortir d’ici, parce que je suis maudit si je vais pas avec toi à l’auberge de Blackbeard. »

 

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