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TERRORS8

Page history last edited by Fausta88 14 years, 8 months ago

Dar & Kerry

 

Terrors of the High Seas

Aventures en Haute Mer

 

 

Par Melissa Good

Traduction : Fryda

(fryda@orange.fr)

 

Voir les avertissements dans la partie 1

**********

Partie 8a

*********

 

Kerry étira les jambes et les posa sur la rambarde du porche de leur chambre. La journée s’était levée brillante et ensoleillée, et elle avait décidé d’attendre le petit-déjeuner en tentant de faire un peu de poésie. Dar était partie chercher quelque chose à la boutique des articles divers de l’hôtel, et elle avait quelques minutes pour simplement regarder le port et apprécier la vue superbe.

 

Et ça l’était vraiment, superbe. En hauteur sur la pente, comme elles l’étaient, le port s’étendait sous elle, et tournait de chaque côté, faisant une coupe d’eau cristalline avec des vagues à peine visibles. Autour d’elle, elle pouvait entendre le bruissement des arbres, les cris des mouettes, les sons du port, mais peu du trafic ou de l’affairement des gens. L’air sentait surtout le feuillage et l’air salé et Kerry ressentait un bien-être paisible alors qu’elle se détendait dans le soleil chaud.

 

Avec un sourire, elle retourna son attention au livret posé en équilibre sur ses genoux et au stylo-plume lourd à pompe que Dar lui avait donné. Le stylo était fait de bois dur et chaud de l’avoir tenu, et il était bien équilibré alors qu’elle pliait les doigts autour. Pensivement elle regarda la page et puis écrivit deux lignes de plus aux nombreuses déjà notées.

 

Un coup porté à la porte, cependant, l’interrompit. Avec un soupir résigné, Kerry posa son livret et entra, alla à la porte et regarda par l’œilleton. « Oh merde. » Elle pensa d’abord ne pas répondre, en voyant la moitié détective féminine de DeSalliers là-dehors. Puis elle se dit qu’elle aurait probablement plus d’information de la femme que celle-ci n’en obtiendrait d’elle, alors elle ouvrit la porte. « Oui ? » Elle ne prétendit pas être amicale, cependant, et la femme fit un demi-pas en arrière.

 

« Oh, bonjour Kerry », dit la femme en se reprenant. « J’espérais pouvoir vous parler. »

 

« Pourquoi ? » Demanda Kerry brusquement.

 

« Juste parce que je pense qu’on peut s’entraider. »

 

Kerry ne put s’empêcher de se demander, brièvement, si la stupidité était contagieuse. Peut-être que Christina avait passé un peu trop de temps avec Bob. « Nous entraider à faire quoi ? » Demanda-t-elle. « Jusqu’ici, tout ce que vous avez fait c’est m’aider à avoir la migraine. »

 

Christina soupira. « Ecoutez, est-ce que je peux juste entrer parler ? »

 

« Non », répliqua Kerry. « Je ne suis pas sûre de savoir ce qu’il va falloir pour que vous vous mettiez dans la tête le fait que nous ne voulons rien avoir à voir avec vous, votre patron, votre mission stupide, ou les gens que vous représentez. Je n’ai plus d’options. Est-ce que je dois louer un avion publicitaire ? »

 

« Le fait est, chérie, que vous êtes impliquée. » L’attitude de Christina changea pour devenir plus dure. « Alors soit vous me laissez entrer et me donnez ce que je veux, soit… »

 

« Soit quoi ? » Kerry trouvait ça presque drôle. « Vous allez sortir un flingue ? »

 

« Non »

 

« Vous allez me la jouer Jackie Chan et commencer à hurler des haikus japonais tout en prenant des poses de kung-fu ? »

 

Christina ne répondit pas.

 

« Vous allez essayer de me frapper ? » Le nez de Kerry se plissa d’amusement. « Me menacer d’une plainte ? Quoi ? »

 

« Vous pensez que c’est un jeu, n’est-ce pas ? »

 

« Hé, c’est vous qui faites les menaces », dit Kerry en riant, puis elle devint sérieuse. « Vous allez m’écouter, piètre excuse pour un laquais de bas étage et cher payé. » Elle pointa du doigt. « Vous feriez mieux de juste repartir d’où vous venez. Arrêtez de nous enquiquiner. »

 

« Ou ? » Christina lui renvoya le commentaire.

 

« Ou j’appellerai le président de votre agence et je déposerai une plainte pour harcèlement sans justification », répliqua Kerry.

 

« Vous pensez que ça va l’intéresser ? » Dit Christina en riant.

 

« Quand le Vice-Président exécutif de la compagnie de laquelle il obtient toutes ses données informatiques le fera ? Ouais. » Kerry sourit. « Il s’y intéressera », assura-t-elle à une Christina qui ne souriait plus. « Et s’il ne m’écoute pas, il écoutera Dar » Elle regarda le visage de Christina. « Tch… on n’a pas fait ses devoirs à la maison, hein ? »

 

« Votre requête est revenue totalement négative. »

 

« Pas étonnant », dit Kerry en souriant. « Essayez avec le nom de Stuart. » Elle commença à fermer la porte. « Vous, d’un autre côté, vous nous avez fourni beaucoup d’information. Vous et votre petit partenaire devriez vraiment travailler plus, vous savez ? Votre dernier boulot a été un vrai désastre. »

 

Christina avait pris une teinte rouge brique.

 

« Alors ne m’enquiquinez pas, madame », l’avertit Kerry, très sérieusement. « Vous êtes un amateur. Ça m’offense que vous soyez payée pour être un amateur. Mon Labrador Retriever ferait un meilleur détective, et pour autant que je suis concernée, vous n’êtes qu’une poseuse tapageuse. Fichez le camp. »

 

Elle claqua la porte avec un sentiment de satisfaction coupable. « Pétasse. » Elle se retourna et commença à s’éloigner, puis se retourna quand elle entendit à nouveau un coup frappé à la porte. Avec un grognement, elle tournoya et ouvrit brutalement la porte, un flot d’invectives prêt à jaillir.

 

Et ravalé quand elle se retrouva face à une serveuse aux yeux de biche en uniforme. « Oh. » Elle recula. « Bonjour. Entrez. »

 

Christina ne se trouvait nulle part. Kerry se laissa un moment de regret pour son éclat, se demandant avec retard si elle n’aurait pas dû laisser la femme dire ce qu’elle avait à dire. Peut-être qu’elle aurait pu apprendre quelque chose d’elle.

 

Oh bon. Kerry regarda la serveuse poser le plateau. Trop tard maintenant. « Merci. » Elle s’avança, prit la note, la vérifia et la signa. « Tout a l’air très bien. »

 

La femme sourit timidement. « A votre service. Vous êtes de bonnes clientes », dit-elle. « Il y en a tant qui apportent leurs sandwiches, et qui salissent tout. »

 

Kerry lui sourit, sa bonne humeur restaurée. « Et bien, nous avons des sandwiches sur le bateau, mais une des bonnes choses quand on visite d’autres endroits c’est de tester leur culture et leur nourriture. On ne peut pas faire ça avec du beurre de cacahuètes. »

 

La femme approuva de la tête, puis se glissa vers la porte, reculant de surprise lorsqu’elle s’ouvrit vers l’intérieur pour laisser passer Dar « Oh. »

 

Dar regarda la femme avec un sourcil levé, puis se mit sur le côté pour laisser sortir la femme. Elle referma la porte derrière elle et alla vers Kerry, posant un sac coloré sur le fauteuil. « Salut. » Son regard bleu alla vers la table. « On dirait que j’arrive juste à temps. »

 

« Oui », approuva Kerry en levant les couvercles pour révéler des plats plutôt intrigants qui impliquaient des œufs, des fruits, des épices locales et des coquillages. « Tu viens juste de rater notre amie Christina. »

 

« Non, en fait. » Dar renifla d’un air appréciateur. « Elle m’a bousculée en se ruant hors de l’immeuble. » Elle choisit un morceau de papaye. « Mm. »

 

« Je pense que je l’ai rendue furieuse. »

 

« Bien. J’ai fait pire. Elle est tombée sur le cul », répliqua Dar. « Qu’est-ce qu’elle voulait ? »

 

Kerry s’assit. « Malheureusement, je n’en ai aucune idée. J’étais trop occupée à l’insulter pour trouver. » Elle lança un regard légèrement chargé de regrets à Dar. « Après coup, peut-être que ça n’était pas une si bonne idée. Elle voulait me parler, elle me disait qu’elle pouvait m’aider. »

 

« Aider à quoi ? » Demanda Dar en posant sa serviette de côté pour verser du jus de fruit de la passion à Kerry.

 

« Et ben, c’est ça que je sais pas », dit Kerry. « Je lui ai dit que c’était un imposteur, et je l’ai envoyée aux pelotes, en fait. Je lui ai dit que si elle nous laissait pas tranquilles, on allait appeler son patron. »

 

« Ah. » Dar scruta son bol de crevettes et d’œufs poivrés mousseux. « Et bien, je ne te blâme pas vraiment », admit-elle. « J’attends juste qu’il soit neuf heures du matin aux Etats-Unis avant d’appeler Wharton. Peut-être qu’après ça, ils vont disparaître tout simplement. » Elle ouvrit un petit pain roulé brun croustillant et le beurra. « Bon sang, ces gens sont vraiment une plaie. »

 

Kerry mâcha lentement un morceau de fruit-étoile. « Qu’est-ce que tu penses qu’il va faire ? » Demanda-t-elle. « Wharton, je veux dire ? Il semble plutôt rude. Est-ce qu’il y a un risque qu’il nous explose dans les mains, Dar ? »

 

« Eh. » Dar mit un morceau de son œuf sur son pain. « J’y pensais. Peut-être que je devrais rester anonyme au lieu de lui dire qui je suis. »

 

« Hm », murmura Kerry. « Dis-lui juste que tu es dans le coin et que tu as trouvé quelque chose ? Est-ce que ça sera suffisant pour qu’il renvoie DeSalliers et les jumeaux incroyables ? »

 

A la lumière du jour, Dar se posait maintenant la même question. Son plan de la veille au soir avait semblé simple et clair mais elle commençait à avoir des doutes. « Je ne sais pas », répondit-elle honnêtement. « Je me sentirais mieux si j’avais vraiment quelque chose dans ma manche avant de l’appeler, peut-être. »

 

« Tu veux aller voir les bureaux du gouvernement d’abord ? » Demanda Kerry. « Peut-être qu’on peut exhumer quelque chose et que tu peux le faxer. Peut-être que ce sera suffisant. »

 

Et après quoi ? « Okay. Ça me semble bien », approuva Dar. « Tu sais, Ker, je réfléchissais. Et si le vieux bonhomme était cinglé ? »

 

« La pensée m’a traversé l’esprit », admit Kerry. « Mais laisser sa fortune à une œuvre de charité ne me semble pas vraiment cinglé, Dar. S’il l’avait laissée à Greenpeace après avoir passé une vie à traîner un filet, peut-être, mais… j’ai vérifié les œuvres de charité. Le foyer des pêcheurs, les pompiers locaux de Boston… beaucoup de trucs communautaires », dit-elle. « Alors je ne sais pas, peut-être qu’il avait une raison d’écarter les enfants. »

 

Dar choisit une fraise, en mordit un bout et puis offrit le reste à Kerry. « L’argent détruit parfois une famille », observa-t-elle. « Ça change tout, n’est-ce pas ? »

 

Kerry ne répondit pas immédiatement. « Je présume que oui », dit-elle. « Dans ma famille, c’était quelque chose de normal. » Elle semblait un peu surprise. « Personne ne pensait vraiment à l’argent comme en faisant partie. C’était le pouvoir qui attirait l’attention. » Un léger rire sortit de sa gorge. « Tu sais quoi ? On exécute le testament de mon père cette semaine, et je n’ai jamais réfléchi une seule fois au fait d’être évincée. »

 

« Qu’est-ce que tu ferais si tu ne l’étais pas » Demanda Dar avec curiosité. « Je veux dire, si tu découvrais que tu recevais quelque chose ? »

 

« Je le donnerais à une œuvre », répondit Kerry instantanément. « Je ne… veux rien de lui. D’eux. » Elle étudia sa fourchette. « J’ai tout ce que j’ai toujours voulu ou eu besoin avec toi. »

 

Dar tendit la main et prit celle de Kerry. « Ker, tu sais que je pense la même chose. Mais ne sois pas choquée si tu finis avec quelque chose dans ce testament après tout », dit-elle calmement. « Mais ça pourrait ne pas être de l’argent. »

 

Kerry garda brièvement le silence, puis leva les yeux et croisa le regard de Dar. « Tu sais quelque chose ou tu devines juste ? » Demanda-t-elle calmement.

 

« Je devine juste », dit Dar en secouant la tête.

 

« Ou bien c’est parce que tu as le père que tu as, que tu donnes un peu de crédit au mien ? » Kerry posa le menton sur sa main. « Les gens sont des salauds, Dar. La paternité ne leur donne pas la noblesse s’ils ne l’ont pas en eux. »

 

« C’est vrai », dit Dar. « Mais la plupart des gens ne sont pas totalement bons ou mauvais. On ne sait jamais. » Elle sortit du sujet, voyant l’inconfort de Kerry. « En tous cas, je pense qu’une visite en ville est probablement une bonne idée. Je vais attendre de contacter Wharton jusqu’à ce qu’on ait plus de données. »

 

Kerry n’était pas prête à relâcher la conversation cependant. « Tu penses vraiment que mon père avait des qualités pour le racheter ? » Demanda-t-elle sérieusement à Dar.

 

« Je pense qu’il était ton père, et c’est une qualité suffisante pour le racheter à mes yeux », répliqua Dar.

 

Kerry soupira. « Je le pensais aussi », dit-elle. « Peut-être qu’une part de moi veut encore le croire. Mais… si je crois ça, alors ça rend encore plus difficile pour moi d’accepter ce que j’ai fait. »

 

« Mm. » Dar frictionna les doigts de Kerry avec le sien.

 

« Alors c’est plus facile pour moi de croire le contraire », continua Kerry. « Je préfère le haïr que de me haïr moi. » Elle soupira lourdement. « Alors, franchement, j’espère recevoir un sac de charbon, si je reçois quelque chose, Dar. »

 

Ah. « Je t’ai eue. » Dar lui pressa la main.

 

« Peut-être qu’après qu’un peu de temps aura passé, je sentirai les choses différemment. Mais là maintenant, je ne peux pas gérer ça. »

 

« D’accord. »

 

Kerry la regarda. « C’est plutôt poule mouillée non ? »

 

« Non. »

 

Un rire ironique. « Si ça l’est », dit Kerry. « Mais tu sais, c’est la première fois que je suis capable de parler de ça depuis qu’il est mort, alors peut-être que ça va si c’est poule mouillée pendant un moment. » Et ça l’était, elle s’en rendait compte. C’était comme si elle avait reculé d’un pas, et gagné au moins une minuscule mesure de perspective. Est-ce que ça faisait partie d’un processus de guérison ?

 

Peut-être. Kerry se sentit obscurément mieux tout d’un coup et elle prit sa fourchette pour attaquer le reste de son petit-déjeuner.

 

« Il faut que j’aille à la banque », se souvint soudain Dar. « Bon sang, j’ai oublié ça. Sortir cet argent. » Elle prit une bouchée d’œufs et la mâcha. « Il faut que je fasse ça avant qu’on aille à la chasse aux informations. »

 

« Je ne peux pas croire que tu les as laissé accepter que tu fasses ça », dit Kerry en souriant. « Mais je suis contente. »

 

« Et bien, ça va être un prêt, ils ne vont pas me laisser leur faire un cadeau », dit Dar. « Mais les termes seront fichtrement bien meilleurs que ceux qu’ils avaient. » Elle secoua la tête. « Tu veux venir avec moi ? »

 

« J’te parie que je veux. » Kerry finit son jus de fruits et se leva. « Je reviens tout de suite. »

 

Dar la regarda filer dans la salle de bains, puis elle se concentra sur son assiette à vider alors que le bruit de l’eau qui coule filtrait vers elle. La décision de faire de la recherche de données avant de se confronter à leur adversaire putatif était, elle le pensait, une bonne idée. Elles pourraient trouver des faits. Dar aimait les faits. Elle les mettait dans sa poche et les utilisait comme des fléchettes, les sortant d’un coup et clouant les gens avec au moment où ils s’y attendaient le moins.

 

Les faits, c’était bien. Dar vida sa tasse de café. Ça ne l’embêtait pas de bluffer, mais bluffer était toujours plus facile quand on avait quelque chose de solide sur quoi s’appuyer. Elle se leva et s’essuya les lèvres, puis elle laissa tomber sa serviette sur la table. Son sac à dos se tenait silencieusement dans le coin ; elle y alla et le souleva, puis elle le glissa sur ses épaules. Kerry sortit et la rejoignit à la porte et elles quittèrent la chambre, à la recherche de faits.

 

Ou d’ennuis. Ou peut-être des deux.

 

**********************************

 

Dar tint la porte de la Chase Bank ouverte pour que Kerry puisse entrer et elle la suivit à l’intérieur. La banque était sur le chemin du commissariat et du tribunal, alors elles avaient décidé de s’y arrêter d’abord. Dar retira ses lunettes de soleil et regarda autour d’elle, puis elle alla vers un petit comptoir où se tenait une réceptionniste.

 

« Bonjour. » La réceptionniste les accueillit avec un sourire professionnel. « Que puis-je faire pour vous aujourd’hui, mesdames ? »

 

« Je dois récupérer un transfert de fonds », expliqua Dar. « Il a été généré hier soir. »

 

« Bien sûr. » La femme jeta un coup d’œil derrière elle, vers un bureau seul avec un jeune homme. « M. Steel ? Etes-vous libre ? »

 

L’homme leva les yeux. « Oui. »

 

Dar et Kerry s’avancèrent et s’assirent au bureau de l’homme. Dar prit son permis de conduire de son porte-feuille et le lui tendit. « J’ai demandé un transfert de fonds hier soir », répéta-t-elle. « De Floride. »

 

M. Steel prit le permis et le posa sur le bureau, puis il entra le nom de Dar dans son ordinateur. Il attendit et hocha la tête. « Oui, Ms Roberts, nous l’avons. » Il se rapprocha de l’écran. « Pour… dix mille dollars américains »

 

« Ouaip. »

 

« Aimeriez-vous un chèque, madame ? »

 

Un chèque. Dar se souvint de Guido le Pingre et soupira intérieurement. « En liquide », répondit-elle. » Donnez-moi des billets de cent. »

 

L’employé de banque fronça les sourcils. « Madame, ce n’est pas une bonne idée de transporter autant de liquide sur votre personne », objecta-t-il. « Vraiment. »

 

« Je sais », acquiesça Dar. « Mais je ne le transporterai pas longtemps, espérons »

 

L’homme n’aimait toujours pas ça, mais il pianota une requête et frappa ‘entrée’. « D’accord, je vais le chercher. » Il se leva et alla vers une porte verrouillée, entra un code et disparut.

 

Kerry regarda autour d’elle dans la banque vide, avec son guichet unique. « C’est calme. »

 

« Mm. » Dar se carra dans son fauteuil. La porte d’entrée de la banque s’ouvrit et deux hommes entrèrent, dépassant la réceptionniste pour se diriger vers le guichet. Ils étaient grands et quelque chose de familier à leur sujet fit grincer l’esprit de Dar.

 

L’homme portait la mode typique de l’île, le short de type surfer et une chemise colorée large. Il portait des sandales de pont et une casquette de base-ball. Il transportait également un sac de banque usé.

 

Dar fronça les sourcils. Beaucoup de gens sur cette île ressemblaient précisément à ce type. Alors quoi ? La démarche ? L’attitude…

 

« Dar. » La voix de Kerry brisa sa concentration.

 

« Ouais ? »

 

Kerry baissa considérablement son ton. « Je pense que c’est un des pirates qui nous ont attaquées hier. »

 

Oh. Beuh. « Je présume que c’est pour ça qu’il me semblait familier », murmura Dar en retour.

 

Elles regardèrent l’homme qui poussait plusieurs choses vers le guichetier, et semblait détendu et à l’aise. Le guichetier les prit et s’en occupa, souriant à l’homme et semblant le connaître.

 

« Qu’est-ce qu’on va faire ? » Murmura Kerry. « Si on l’a reconnu, il va probablement nous reconnaître. »

 

Dar jaugea la distance entre eux. « Il ne l’a pas fait en entrant », dit-elle. « Retournons-nous simplement et voyons ce qui va se passer. »

 

Kerry bougea dans son fauteuil et regarda Dar. « D’accord, mais qu’est-ce qu’on va faire après ? »

 

« Peut-être qu’on peut trouver son nom. »

 

« Et le rapporter à la police ? » Kerry jeta un rapide coup d’œil derrière elle puis son regard revint devant. « Dar, c’est visiblement quelqu’un de connu ici. »

 

« Oui oui. » Dar ne semblait pas surprise.

 

La porte intérieure s’ouvrit et l’employé réapparut. Il portait une petite boîte et regarda alentours tout en revenant à son bureau. Son regard tomba sur les deux hommes. « Ah. Bonjour M. Chasiki. »

 

L’homme se retourna en entendant son nom et sourit puis son regard passa à côté de lui et se concentra sur le visage de Dar.

 

Oh oh. Dar réfléchit vite, croisant brièvement son regard, puis elle continua, espérant qu’elle projetait un air de profond désintérêt. Elle avait vu la reconnaissance quand il l’avait regardée.

 

« Ouais, oui », répondit l’homme à l’employé. « Des super fêtes ouais ? » Sa voix était tendue.

 

« Très bonnes, merci. » L’employé s’assit et posa la boîte au milieu de son bureau. Il sortit des formulaires et en remplit quelques-uns. « Très bien, Ms Roberts. Je vais remplir ceci et tout sera réglé. »

 

« Merci. » Dar posa ses coudes sur le bureau et résista au besoin de se retourner pour regarder le pirate. Près d’elle, Kerry se penchait en arrière, les bras croisés, le dos presque tourné vers le guichet. La jeune femme blonde avait l’air tendu, une ride sur le front.

 

« Et voilà. Signez ici s’il vous plait. » M. Steel indiqua un endroit sur le formulaire. « J’ai une copie de votre permis de conduire, et je vous rends ça. » Il lui tendit la carte.

 

Dar prit le crayon et étudia le formulaire, les oreilles dressées lorsqu’elle entendit des bruits de pas approchant d’eux. Ils s’arrêtèrent juste derrière elle et elle regarda le regard de l’employé du coin de l’œil, le voyant se lever par-dessus son épaule avec curiosité. Elle signa son nom sur le formulaire.

 

« Vous avez besoin de quelque chose, monsieur ? » Demanda l’employé.

 

« Nan. Je réfléchissais. » Le pirate avait parlé juste derrière elles. « Plus tard.

 

Les bruits de pas s’éloignèrent et la porte s’ouvrit derrière elle, laissant entrer le bruit du vent et de la rue.

 

Dar repoussa le papier vers l’employé. « Et voilà. » Elle se pencha en arrière, sentant la tension diminuer dans ses épaules. « C’est toujours calme comme ça ici ? »

 

M. Steel prit le papier. « Oh, la plupart du temps » ; dit-il. « Les vendredis, jours de paye, c’est un peu agité. » Il sourit puis regarda Dar avec curiosité. « Je vous demande pardon, Ms Roberts, mais est-ce que vous connaissez M. Chasiki, le monsieur qui était ici ? »

 

Dar jeta un coup d’œil vers Kerry. Les yeux de celle-ci s’écarquillèrent légèrement, et ses sourcils clairs se dressèrent. « Il me semble un peu familier », temporisa-t-elle. « Pourquoi ? »

 

« Oh, il vous fixait, et je me demandais », dit l’employé sans plus.

 

Dar se retourna et fixa la porte fermée, puis revint vers lui. Elle haussa les épaules. « Qui est-ce ? »

 

L’homme haussa les épaules à son tour. « Il est connu pour être un coureur de jupons », dit-il. « Un peu filou, mais généreux. » Il tendit la boite. « Et voilà, Ms Roberts. J’espère que vous ferez bien attention et que vous mettrez ceci quelque part rapidement. Ça n’est vraiment pas une bonne idée de le transporter. »

 

Dar se leva et souleva son sac à dos, puis ouvrit la boite et transféra les tas de billets enliassés. « Merci pour l’avertissement. » Elle termina et referma son sac, lui tendant la boite. « ‘J'ai été contente de traiter avec vous. » Elle mit le sac sur ses épaules et l’ajusta, tirant fort sur les bretelles. « Ker ? »

 

Kerry fit un bref sourire à l’employé, se leva et rejoignit Dar pour se diriger vers la porte. Elle posa la main sur le bras de sa compagne alors qu’elles sortaient de la banque, toutes deux regardant à gauche et à droite alors que le soleil les frappait. « Dar, c’était vraiment sinistre. »

 

« C’était vraiment sinistre », reconnut Dar. « Allez. Je veux trouver Bud et me débarrasser de ce liquide avant de faire autre chose. » Ses sens étaient en pelote. « La dernière chose dont on a besoin, c’est que ce connard nous suive et nous dévalise. »

 

Kerry regarda alentours avec nervosité. « Tu penses vraiment qu’il pourrait le faire ? »

 

« Je préfère ne pas le savoir », lui dit Dar en prenant son téléphone pour l’ouvrir. Elle composa le numéro de Bud. Après deux sonneries, il décrocha. « Bud, c’est Dar. » Elle parlait sèchement. « Est-ce que tu as joint ton ami ? » Elle attendit la réponse. « Bien. On retourne à l’hôtel maintenant. » Elle ferma le téléphone et l’accrocha à sa ceinture. « On va s’occuper de ça et ensuite… »

 

« De le voir a, comme qui dirait, jeté une pièce dans ce fatras, hein ? » Demanda Kerry. « Au moins on connaît son nom maintenant. »

 

« Et il a le mien », lui rappela Dar. « Kerry, je ne sais pas si aller voir la police ici est une bonne idée. » Elle commença à se diriger vers l’hôtel. « Je ne sais pas si on peut faire confiance aux gens ici. Si on va voir les flics et qu’ils sont dans l’affaire, alors quoi ? Ils vont vouloir le protéger. »

 

« Beurk », dit Kerry en soupirant.

 

Dar secoua la tête et elles traversèrent la rue pour se diriger vers la longue pente qui grimpait. Elles marchaient depuis quelques minutes à peine quand Dar entendit des bruits de pas derrière elles. Elle fit un tour du regard appréciateur derrière elle, et comme de bien entendu, deux hommes flânaient sur la côte après elle. « Merde. »

 

Kerry regarda. « Mince alors ! » Marmonna-t-elle. « Peut-être qu’ils ne nous suivent pas, Dar. Il se pourrait qu’on soit juste un peu paranoïaques. »

 

C’était vrai. Dar fit un écart, alors que l’odeur de café et de beignet chaud l’atteignait. Elle tira Kerry dans une boutique près de laquelle elles passaient et alla au comptoir. « Deux johnnycakes et deux cafés, s’il vous plait. » (NdlT : Johnnycake : petit gâteau à base de farine de maïs servi au petit déjeuner. Il semble qu’à l’origine il portait le nom de Journey (voyage) cake, parce qu’on pouvait le transporter partout.)

 

L’homme derrière le comptoir leur tendit leur commande de bonne grâce, acceptant l’argent de Dar avant de lui rendre la monnaie. Dar prit un des gâteaux et tendit le sien à Kerry, puis elle prit son café. Elle avança l’air de rien vers l’entrée et s’y appuya, dans l’attente. Kerry vint tranquillement derrière elle.

 

Au début ce fut le silence. Puis les deux hommes passèrent abruptement devant la boutique, se parlant tranquillement sans lancer même un coup d’œil à Dar.

 

Kerry relâcha sa respiration retenue et prit un morceau de son gâteau. « Mm », murmura-t-elle.

 

« Bien vu », la complimenta Dar. « Allons-y. »

 

Elles sortirent de la boutique et continuèrent à remonter la rue. « C’est un bon exercice pour la matinée », commenta Kerry, presque étourdie par le soulagement.

 

« Oh oui », approuva Dar. Elle finit son gâteau et se frotta les doigts, puis prit une gorgée de son café. « Beuh. Dèg’. » Elle s’arrêta pile et chercha une poubelle.

 

« Je me demandais quand tu te rendrais compte que tu l’avais pris sans crème ni sucre », dit Kerry en souriant. « Je me disais qu’on allait jeter ce truc à la figure de ces types, je n’ai jamais imaginé que tu puisses le boire. »

 

« Ouais ouais. » Dar jeta le breuvage délictueux et reprit sa grimpée. Elle était toujours mal à l’aise et l’auberge en haut de la côte semblait vraiment très loin.

 

A trois quarts du sommet, elle entendit de nouveau des bruits de pas. Elle jeta un coup d’œil à Kerry et elles regardèrent toutes deux alentours. Six hommes leur arrivaient dessus. Elles se regardèrent. « On court », murmura Kerry en augmentant son pas en une course.

 

Dar la rejoignit et elles mirent de la puissance dans leur pas. Elles entendirent les hommes derrière elles accélérer également. Encore vingt pas, cependant, et elles seraient à la hauteur de l’auberge.

 

Dix, puis elles entendirent les hommes les rattraper.

 

Cinq et Dar put entendre les respirations haletantes.

 

Puis elles s’arrêtèrent devant l’auberge. Dar repéra Bud qui les attendait devant la porte et elle se dirigea vers lui, Kerry accrochée à ses basques comme une puce sur un chien.

 

Les pas derrière elles s’arrêtèrent. Dar ralentit et risqua un coup d’œil derrière elle, pour voir les hommes agglutinés au sommet, apparemment dans une discussion. Bud les regardait avec curiosité alors qu’elles approchaient, penchant la tête lorsqu’elles arrivèrent près de lui.

 

« Qu’est-ce qui se passe ? » Bud regarda derrière elles vers les hommes.

 

« On te racontera plus tard », dit Dar. « On entre. »

 

Bud fixait par-dessus son épaule. Il plissa les yeux. Dar se retourna pour regarder mais les six hommes redescendaient les marches et furent hors de vue un moment plus tard. Elle regarda Bud de nouveau. « Tu connais ces types ? »

 

Bud la regarda.

 

« Entrons », répéta Dar.

 

******************************

 

Guido le Pingre attendait lorsqu’ils entrèrent dans le lobby. Il repéra Bud et poussa le gros gorille qui l’accompagnait, puis son regard tomba sur Dar. Un sourire relativement désagréable passa sur son visage alors que Dar, Kerry et Bud arrivaient près d’eux. « T’as amené tes p’tites copines ? T’as viré de bord, Buddy ? »

 

« Tu veux ton fric ? Alors ferme-la », répliqua Bud d’un ton bourru. Il montra une petite pièce avec quelques fauteuils.

 

« Oh, alors maintenant tu me dis de la fermer ? » Ricana Guido. « Espèce de petit merdeux. »

 

Dar était déjà très à cran. Sa colère était au point de rupture et pendant un instant, elle sentit tout sens commun la quitter alors qu’elle s’avançait vers l’homme mauvais à l’air graisseux. Elle venait de faire deux pas quand elle sentit une main agripper sa chemise par-derrière, et puis une autre poigne ferme sur l’arrière de son short.

 

« Il n’en vaut pas la peine », dit Kerry d’un ton plutôt normal. « Tu vas juste te salir les mains, et il va te falloir une semaine pour enlever la puanteur. »

 

Guido se tourna et la regarda puis pencha la tête et vit le visage de Dar rigide et coléreux en face de lui. Il donna l’impression de vraiment vouloir rire, mais un second regard le convainquit de plutôt aller dans la pièce derrière Bud. « M’étonne pas que t’aies des nanas pour protéger ton cul de tantouze. »

 

Le visage de Bud se figea. « T’as les papiers ? »

 

« T’as le fric ? » Lança Guido.

 

Bud regarda Dar. Guido se tourna. « Oh, bien. Eh ben, minette, j’prends pas les foutues cartes Platine. »

 

Dar l’étudia. Puis elle décrocha le sac de son dos et le posa sur la petite table de la pièce. « Tu as raison », dit-elle à Kerry. « Absolument pas la peine. » Elle sortit plusieurs liasses de billets de cent et les lança vers Guido. Ils l’atteignirent dans la poitrine et il les attrapa. Elle en sortit trois ou quatre de plus et les balança également.

 

« Hé ! » Guido en rata une et elle rebondit sur le sol. « Arrête ça, abrutie ! »

 

Dar jeta les deux derniers paquets vers lui. Ils le frappèrent au visage. Dar lui tourna le dos et referma son sac, essayant de laisser ses nerfs à vif se calmer avant de se retourner à nouveau pour continuer la conversation. Elle entendit le froissement quand il captura les billets enliassés.

 

« Où sont les papiers ? » Demanda Bud d’une voix neutre.

 

« Accroche-toi à ta bite. Tu d’vrais avoir l’habitude », marmonna Guido. « Faut que j’compte ça. »

 

Dar se retourna et s’assit dans le fauteuil le plus proche, ses genoux lâchant prise alors que l’adrénaline arrêtait de monter. Kerry s’installa sur l’accoudoir et Dar enroula une main autour de son genou, le contact apaisant ses nerfs. Guido avait donné la plus grande partie des liasses à sa brute, et il en comptait une laborieusement. La brute regardait Dar avec un regard austère.

 

Bud s’assit dans un des autres fauteuils, le regard dirigé vers le sol.

 

Kerry mit la main sur la nuque de Dar, ses doigts bougeant doucement sur les muscles rigides. Elle pouvait presque sentir la tension vibrer dans sa compagne, et bien qu’elle comprit totalement la rage silencieuse de Dar, elle l’avait déjà exprimée pour des choses bien plus justifiées que ce petit connard graisseux. « Si vous devez retirer vos chaussures, dites-le-moi que je puisse ouvrir la fenêtre », dit-elle d’un air tranquille.

 

Guido leva les yeux vers elle. « La ferme. »

 

« Pourquoi ? » Demanda Kerry. « Je parle aux animaux depuis mon enfance. Mais la plupart d’entre eux avaient meilleure allure que vous. »

 

« Tu cherches les coups, minette ? »

 

Kerry lui fit un sourire charmeur. « A vous deux vous ne faites pas le quart de l’homme qu’il faudrait pour ça. »

 

Dar gloussa et se frotta le dessus du nez.

 

« Tu as une grande gueule », dit la brute à Kerry.

 

« C’est vrai. Tu as un petit pois à la place du cerveau », répondit Kerry. « Et je peux toujours me taire, moi. »

 

« Hein ? »

 

« Très bien. » Guido finit de compter une liasse. Il en prit une autre et la pressa de son pouce et de son index, la comparant avec celle dans sa main. Elles étaient exactement égales. Il répéta le procédé avec le reste, puis les tendit à la brute. « Eh niaiseuse. Qu’est-ce qu’il t’a promis pour ça ? Me dis pas du bon temps. » Guido sortit une liasse de papiers de sa poche arrière et la lança à Bud. « T’es vraiment chanceux, pédé. Encore une semaine et on aurait foutu le feu à ce trou à merde. »

 

« Je présume je le suis », répondit Bud doucement.

 

« Pas autant que lui », fit remarquer Dar platement en lançant un regard direct et froid à Guido.

 

Celui-ci ricana. « C’est nul de faire des affaires avec vous. M’appelez plus. » Il fit signe à la brute de partir, après avoir fourré le liquide dans un sac plastique que celui-ci avait dans sa poche. Ils sortirent sans un regard, en direction de la porte de sortie de l’hôtel.

 

Dar laissa exhala lentement. « Ça craignait. » Elle prononça les mots avec précision.

 

« Mm. Contente que ce soit fini », approuva Kerry en bougeant les mains pour donner une sérieuse attention aux épaules de Dar. « Ça me fait souhaiter d’avoir incrusté des paquets d’encre dans les billets. »

 

Bud lui jeta un coup d’œil. « Vous êtes foutrement drôle. »

 

Kerry sourit en retour. « Je suis vraiment, vraiment contente qu’on ait fait ça pour vous », dit-elle honnêtement à Bud. « Personne ne devrait avoir à traiter avec des connards comme ça. » Elle sentit les muscles de Dar se détendre sous ses mains.

 

Bud regarda de nouveau les papiers, secouant lentement la tête. « C’était un mauvais choix à faire », admit-il. « Je déteste recevoir de l’aide de quelqu’un. »

 

« Ouais. » Dar parla enfin. « Je connais ça. » Elle étira ses jambes et s’affaissa dans son fauteuil. « Moi non plus je sais pas faire ça », dit-elle. « Demander de l’aide, je veux dire. »

 

Bud lui jeta un coup d’œil, puis regarda Kerry qui massait toujours laborieusement. « Vrai. »

 

Dar saisit le regard. « Elle ne compte pas », dit-elle. « En plus elle n’attend pas qu’on lui demande. »

 

Kerry se pencha en avant et embrassa Dar sur la tête. « Okay », dit-elle. « Maintenant c’est fini. »

 

Bud bougea, lui lançant un regard prudent.

 

« Parle-moi des pirates », lui dit Dar. « J’ai repéré le gars qui dirigeait le bateau pirate qui a essayé de nous aborder à la banque. Il faisait un dépôt. »

 

Bud mâchouilla sa lèvre. « On peut parler en haut ? » Finit-il par dire. « Charlie est supposé appeler d’ici peu. »

 

En haut. Dar se sentait épuisée. Une cafetière de café fort, et un milk-shake sympa, c’était ce qu’elle voulait vraiment, et elle se dit que le service de chambre pourrait probablement lui fournir ça. « Bien sûr. » Elle se leva, regarda Kerry quand celle-ci prit le sac à dos. « Hé. »

 

« C’est bon, chérie. » Kerry l’embrassa sur l’épaule. « Je peux m’en occuper, vraiment. »

 

En fait, Dar s’en rendit compte, Kerry gérait tout le truc bien mieux qu’elle. Elle réfléchit à ça alors qu’ils montaient les quelques marches vers les chambres de l’auberge. Est-ce qu’elle laissait le stress la déborder ? Est-ce qu’elle était trop hors de son élément ? Tu ferais mieux de t’éclaircir ta fichue tête et d’arrêter de réagir à tout. Qu’est-ce qui ne va pas chez toi, bon sang, Dar ?

 

« Hé Dar ? » Kerry jeta un coup d’œil derrière elle. « Est-ce que tu vas essayer d’appeler Wharton ? »

 

Dar étudia un point au milieu des omoplates de Kerry. « Attendons d’être à la chambre, que je m’assoie et que je réfléchisse », dit-elle. « Je ne veux pas compliquer tout ce fichu truc encore plus qu’il ne l’est. »

 

« D’accord. » Kerry hocha la tête. « Bien, parce que j’avais un mauvais pressentiment à l’idée de l’appeler. Il est juste… une quantité trop inconnue. Tout ce truc devient bizarre. »

 

Dar se sentit légèrement soulagée. « Oh, alors c’est pas seulement moi ? » Marmonna-t-elle alors qu’ils s’arrêtaient devant leur chambre et qu’elle déverrouillait la porte avec la grande clé en acier. Kerry ouvrit la porte et entra puis se figea.

 

« Merde de merde. »

 

Bud regarda autour de l’épaule de Dar alors que celle-ci entrait dans la pièce derrière Kerry.

 

La chambre était totalement chamboulée. Tout avait été fichu par terre comme si une tornade était passée dans la pièce.

 

« Bon Dieu », dit Bud. « Ils ont mis le bordel dans vos affaires ? »

 

Kerry laissa passer un souffle de dégoût. « On n’avait rien ici. » Elle leva les mains pleine d’exaspération et les laissa retomber. « Un sac, avec deux paires de pyjamas et du dentifrice. »

 

Dar traversa la pièce, secouant la tête. Elle alla vers le téléphone de la chambre et le prit, attendant que l’opérateur réponde. « Il faut que je parle au directeur. » Il y eut une pause. « Votre nom ? M. Brack. Bien, M. Brack, nous avons un problème. Notre chambre a été vandalisée. » Une autre pause. « La porte n’était pas fracturée. Alors qui que ce soit dans votre personnel qui a été payé pour laisser entrer quelqu’un ici… »

 

Kerry pouvait entendre une voix protester tout du long de l’autre côté de la pièce.

 

« Pourriez-vous monter ici et expliquer comment ils sont entrés autrement ? » Demanda Dar. « Bien. A tout de suite » Elle laissa tomber le téléphone dans son support. « Si ces salauds ses sont approchés du bateau, ils sont cuits. »

 

« Je vais vérifier. » Kerry commença à se diriger vers la porte mais fut arrêtée brutalement. « Ouahh !!! » Elle se retourna pour trouver Dar qui la retenait par l’arrière de sa chemise.

 

« Pas toute seule », lui dit Dar calmement. « Et avant que tu ne le dises, oui, je sais que tu es une grande fille et que tu peux t’occuper de toi, et que je suis une nigaude trop protectrice. »

 

Kerry serra la mâchoire et son visage se plissa dans un sourire très ironique.

 

« J’y vais. » Bud les interrompit et alla vers la porte, sortant avant que Dar ne puisse répliquer.

 

« M… » Dar regarda la porte fermée. « Bon Dieu. »

 

« Je parie qu’il voulait pas trop parler de pirates », dit Kerry en soupirant. « Dar, tu veux bien jeter un coup d’œil à cet endroit ? Quelle bande de tarés ! » Elle alla vers leur sac unique et l’examina. Le contenu en avait été sorti, puis jeté sans soin, et elle sentit son sang bouillir à cette pensée.

 

On entendit un léger coup à la porte, et Dar y alla, l’ouvrit pour trouver le directeur de l’hôtel et un homme dans l’uniforme de garde de la sécurité qui se tenaient là. Elle recula et leur fit signe d’entrer. « Venez. »

 

Les yeux du directeur s’agrandirent à la vue de l’état de la chambre. Les deux hommes entrèrent et regardèrent autour d’eux. « C’est… » Commença le directeur, puis il s’arrêta. « Je n’ai jamais… »

 

Le garde de sécurité semblait tout aussi abasourdi. « Monsieur… » Il s’éclaircit la gorge. « Madame, quand avez-vous découvert ceci ? »

 

« Soixante secondes avant de vous appeler », déclara Dar. « Je veux une explication. » Elle croisa les bras sur sa poitrine et lança un regard froid au directeur.

 

Celui-ci se reprit. « Personne, sauf la sécurité et le ménage, n’a les clés », dit-il. « On a vérifié les livres de la sécurité et personne n’a été autorisé dans cette chambre. J’ai appelé la responsable des femmes de ménage, et peut-être qu’elle pourra nous éclairer sur ce qui s’est passé. »

 

« Oh ! »

 

Ils se retournèrent tous pour voir une petite femme ridée dans l’encadrement de la porte, vêtue d’un uniforme bien repassé et gris. Dar devina qu’il s’agissait de la femme de ménage. La femme entra lentement et regarda autour d’elle, les yeux écarquillés. « Qu’est-ce qui s’est passé ici ? Pourquoi on a fait ça ? » Elle regarda Dar. « Pourquoi vous avez fait ça à la chambre de cette gentille dame ? »

 

Le directeur prit une inspiration. « Constantina, cette chambre est enregistrée au nom de ces deux dames ici présentes. Qu’est-ce que vous voulez dire ? »

 

La femme recula avec consternation. « Ces dames-là ? Oh… mais… » Elle se tordit les doigts. « Oh monsieur, je suis vraiment désolée. Une femme vraiment très gentille est venue me voir quand je faisais le ménage et elle a dit qu’elle avait laissé sa clé à l’intérieur de la chambre. Vous savez que beaucoup de clients font ça, alors… » Son regard balaya la pièce. « Elle a dit que c’était sa chambre. »

 

« Et vous n’avez pas vérifié ? » Dit le directeur en fronçant les sourcils.

 

« C’était une gentille femme, monsieur ! » Protesta la femme de ménage. « Des beaux habits, des bagues et pourquoi je n’aurais pas cru qu’elle me disait la vérité ? »

 

Le directeur donna l’impression d’avoir avalé un cafard, et qu’il rampait dans son estomac. « Constantina, allez dans mon bureau et attendez-moi là-bas », dit-il, avec une calme retenue. « Jan, s’il vous plait, apportez votre appareil-photo et prenez des clichés de tout. » Il se tourna vers Dar et Kerry. « Il faut que je vous déménage dans une nouvelle chambre immédiatement pendant que nous démarrons notre enquête. Je vais aussi appeler la police. »

 

La femme de ménage écarquilla les yeux.

 

« On peut vous donner l’identité probable de la personne que vous recherchez », dit Kerry. « On a été harcelées par des gens depuis notre arrivée dans les îles », ajouta-t-elle. « J’aimerais avoir l’occasion d’en discuter avec la police aussi. »

 

Le directeur hocha la tête. « Certainement. Constantina, s’il vous plait. » Il attrapa le bras de la femme et l’emmena dehors. « Le concierge va venir vous changer de chambre dans un instant. »

 

« C’est bon. On a juste ça. » Dar souleva le sac. « Tous les dommages ont été faits à votre hôtel, pas à nos possessions. »

 

Un tic facial commença à apparaître sur le visage du directeur. Il sortit et emmena ses deux employés avec lui.

 

Pendant un instant, la pièce resta silencieuse Dar et Kerry se regardèrent, puis levèrent les mains en même temps pour les laisser retomber. « C’est dingue », dit Dar en soupirant. « C’est tout simplement dingue. »

 

Kerry plissa les yeux. « Tu as le numéro de téléphone de ce type, Wharton »

 

Dar la regarda avec prudence. « De son bureau, oui. »

 

« Donne. »

 

Dar retira une feuille de papier de sa poche arrière et prit son propre téléphone portable. « Je vais m’en occuper. » Elle prit une inspiration et se recomposa.

 

« Dar… »

 

« Je sais », la coupa celle-ci. « Je sais que tu peux faire ça, mais je veux vraiment, vraiment le faire. »

 

Kerry se laissa faire.

 

Dar ouvrit le téléphone et composa. Elle mit le portable à son oreille.

 

Une voix basse et grondante lui répondit.

 

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