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WINTER'S ENDING9

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

 

La fin de l'hiver (Winter's ending)

 

De Missy Good

 

Traduction : Fryda

 

 

*********

Partie 9A

*********

 

9ème et dernière partie

 

 

 

 

Gabrielle passa quelques minutes à regarder tranquillement le plafond après le départ de Cyrène, attendant que la rougeur quitte son visage, et repensant à ce qu’elle avait dit. Je me demande ce qu’aurait dit ma mère si elle était tombée sur nous… beuh. Gabrielle, arrête de penser à ça. Elle prit une inspiration prudente et essaya de s’installer plus confortablement, retournant son attention vers son journal.

 

Bon… maman sait au sujet de Solan. Je présume que je ferais mieux d’avertir Xena, non ? Je ne sais pas ce que j’aurais pu faire d’autre… Si j’avais dit que je ne savais pas de quoi elle parlait, elle aurait su que je mentais. Je suis vraiment nulle dans ce domaine… surtout avec elle. Je suis contente qu’elle ne soit pas vraiment en colère… Je ne suis pas sûre de savoir comment je réagirais si j’apprenais soudain que j’étais grand-mère… J’espère qu’elle se rend compte que Xena faisait ce qu’elle estimait juste pour Solan.

 

Même si je pense qu’elle avait raison… quand je pense à qui elle était vraiment à cette époque, et ce qu’elle faisait… C’était mieux pour Solan de ne pas faire partie de sa vie. Wow. C’est dur, non ? En y repensant, elle aurait pu dire la même chose pour moi, non ? Mais je n’aurais pas voulu rater ça… pour rien au monde. Alors ça a été une bonne chose finalement, malgré les pièges, et les trucs qui sont arrivés, et ce que j’ai… non, ce que nous avons traversé.

 

Peut-être que ça aurait pu bien tourner pour lui, aussi ? Peut-être que de l’avoir avec elle l’aurait fait changer plus vite. Peut-être pas. Peut-être qu’il aurait fini par être blessé, ou… mort. Ou pire… comme dans l’endroit où nous étions ces derniers jours.

 

Comme l’endroit où j’aurais fini sans elle. La vie a sa façon, je pense, d’équilibrer les choses. Peut-être que ça a été la meilleure chose pour nous deux. Il a grandi dans une famille chaleureuse, stable et aimante. Et j’ai été sauvée de la vente d’esclaves, et j’ai trouvé l’amour de ma vie. Hmm.

 

Un léger coup interrompit ses pensées et elle tourna la tête. « Oui ? » La porte s’ouvrit et Solan passa la tête et regarda partout. « Salut…. » Gabrielle sourit. « Viens ici. »

 

Il entra et referma la porte prudemment derrière lui, regardant partout avec une curiosité avide avant d’arriver près de son lit. « Salut. » Il lui sourit. « Comment tu vas ? »

 

Gabrielle posa sa plume et ferma son journal, lui donnant toute son attention. « Et bien… pas trop mal. Comment vont les autres ? »

 

Solan hocha la tête. « Bien. » Il leva les yeux de dessous ses longs cils clairs. « Ça te fait très mal ? »

 

Le barde soupira. « Oui. » Elle lança un regard désabusé. « Ça fait mal… mais pas autant que ça… Xena dit que ça va aller. »

 

Cela lui valut un sourire. « Alors c’est vrai, pas vrai ? » Il regarda autour de lui. « C’est là que vous vivez ? » Il fit le tour du lit et regarda partout. « C’est pas mal. »

 

« Merci. » Gabrielle rit. « Oui, c’est notre maison. » Elle sourit intérieurement à ces paroles.

 

Le garçon se mit sur la pointe des pieds et regarda le dessus de leur étagère de linge. « Wow… les animaux… où est-ce que vous les avez eus ? »

 

Le barde se mordit la lèvre. « C’est Xena qui les a faits. » Répondit-elle en regardant son visage.

 

Il ouvrit grand les yeux et tendit une petite main pour toucher le plus proche. « Wow ! C’est vrai ? » Il prit le petit cochon et le regarda. « C’est super… » Il reposa prudemment la sculpture et revint vers elle. « Je ne savais pas qu’elle pouvait faire des trucs comme ça. »

 

Moi non plus d’ailleurs… « Et bien, elle peut… Elle a fait la chaise, et cette table, tu sais. » Gabrielle fit un geste prudent de sa main gauche essayant de ne pas trop bousculer ses côtes.

 

Solan trottina vers la table et posa la main dessus, se pencha et regarda dessous. « Wow. » Il leva les yeux vers elle. « Je pensais que c’était une guerrière. »

 

Cela lui valut un doux rire de la part du barde. « Elle l’est, et tu le sais bien. Mais ce n’est pas tout ce qu’elle est. »

 

Il réfléchit à ces mots quelques instants. « Comme toi qui est une bonne conteuse, et qui est bonne avec ton bâton, c’est ça ? »

 

Gabrielle hocha la tête. « C’est ça. » Elle fit une pause. « Tu ne devrais pas considérer que quelqu’un ne peut pas faire quelque chose juste à cause des autres choses qu’il fait. »

 

Un fracas de bruit de pas sur le porche les fit se regarder. « Oh oh. » Murmura Solan en se rapprochant du lit. « Voilà les ennuis. »

 

La porte s’ouvrit et Cait passa la tête à l’intérieur. « Salut. »

 

Gabrielle masqua un sourire. « Bonjour Cait… entre. » Elle fit une pause. « Et amène tes amies. » On dirait bien que toute la bande est là… Je te revaudrai ça Xena.

 

Cait entra et tint la porte pour le reste des jeunes filles, la refermant avec précautions derrière elles. « Xena a dit qu’on pouvait te rendre visite. » Elle leur lança à toutes un regard sévère. « Mais qu’on ne devait pas te fatiguer. » Elle fit une pause dramatique. « Ou gare. »

 

Gabrielle réfréna un sourire en imaginant sa compagne lâcher l’ultimatum. « Bien, je vois ce qu’elle veut dire. » Un autre sursaut de douleur lui brûla le côté alors qu’elle essayait de bouger, et elle les vit tous tressaillir en réponse à sa propre grimace. « Je présume que j’aurais dû me baisser ce coup-là, hein ? »

 

Les filles s’avancèrent et s’installèrent sur le sol, les yeux fouillant toute la pièce. « C’était très courageux, de couper ce pont… » Dit Sharra. « Et qu’est-ce que tu allais faire ? »

 

Gabrielle prit une inspiration prudente et la laissa passer. « Hum… j’allais juste les combattre aussi longtemps que je le pouvais… pour m’assurer que vous étiez tous partis. » Elle leur jeta un regard noir. « Et je ne vous ai pas vu courir, pour autant que je sache.

 

Cait remua pour avancer, en tant que porte-parole. « Ben zut… on n’a pas eu le temps, vraiment. » Elle sourit. « Je venais juste d’arriver de ce côté et j’ai vu ces hommes arriver en face de toi, quand j’ai senti cette grande et bonne vieille main sur mon épaule et que j’ai failli m’évanouir. » Elle fit un petit sourire à Gabrielle. « Tu ne vois jamais les bons moments, hein ? »

 

« Les bons moments ? » Gabrielle rit d’un air perplexe. « Qu’est-ce que tu veux dire ? »

 

« Et bien. » Cait prit une inspiration joyeusement. Les filles gloussèrent, et même Solan mit les bras autour de ses jambes et attendit pour entendre l’histoire. De nouveau. « Comme je l’ai dit, j’avais cette grande main sur mon épaule, puis l’instant d’après, Xena enlève sa tunique… » Les filles gloussèrent, Solan leva les yeux, le barde masqua un sourire. « Et bam… elle enjambe la rambarde… et grimpe ce pont plus vite que la lumière. »

 

« Vraiment ? » Dit Gabrielle. Me maudissant à chaque pas, je parie…

 

« Vraiment. » L’assura Cait. « Puis… elle va au bas du pont, et se laisse juste tomber ! » Les filles soupirèrent, Solan garda un silence respectueux, et Gabrielle fit un doux mouvement de la tête. « Je n’imagine même pas comment elle a atterri, sur tous ces rochers, mais elle l’a fait. »

 

« Elle le fait toujours. Elle a un équilibre stupéfiant. » Murmura Gabrielle, à moitié pour elle-même. Bon sang… J’étais si contente de la voir, j’avais oublié de me demander comment elle avait passé cette crevasse, par Hadès.

 

« Tu l’a dit, mais attends. » Répliqua Cait. « J’arrive au bon moment. » Ajouta-t-elle. « Les rapides tournoyaient, et rugissaient, et se fracassaient contre les rochers ! » Le visage de Cait rougit, au souvenir. « J’avais si peur… Je pensais qu’elle allait sûrement être brisée… Mais c’était comme si elle savait exactement où aller, et sauter, et plonger… une vague l’a attrapée et l’a poussée sur ce surplomb complètement acéré, mais elle a fait un de ces trucs de saut et elle est passée par-dessus. »

 

Gabrielle sentit sa gorge s’assécher. « Je ne me suis pas rendue compte… que c’était si terrible. » Réussit-elle à dire.

 

Solan se tortilla et s’appuya sur le lit, attrapant sa main. « Ne t’inquiète pas… cette vieille rivière n’allait pas l’arrêter. » Il ricana. « Pas de risque. »

 

« Pas de risque. » Répéta Cait. « Alors quand elle est sortie de l’autre côté, et qu’il n’y avait pas de moyen de monter de là où elle était… elle a replongé et elle s’est laissée porter un peu, puis elle a laissé une vague la soulever… et elle a attrapé ce petit surplomb. » Elle soupira. « Je pense que mon cœur s’est arrêté de battre. »

 

Le mien l’aurait fait, se maudit Gabrielle. Et cette eau devait être froide comme de la glace.

 

« Mais elle a tenu bon et elle s’est tirée de là. » Cait fit une pause. « Elle est si forte. » Elle eut le souvenir vivace de la forme de Xena éclairée par la lune, de l’eau argentée qui coulait à flots sur sa combinaison en cuir noir, éclairant les ombres mouvantes de ses muscles alors qu’elle se hissait sur la petite corniche.

 

Le barde hocha silencieusement la tête.

 

« Et elle a grimpé cette face rocheuse comme de rien… Je n’ai jamais rien vu de pareil. » Finit Cait triomphalement.

 

Trois jours sans dormir, songea Gabrielle. Après ce qui s’est passé avec Hercule, et une course effrénée depuis Amphipolis, et elle réussit à faire ça. Et elle n’en parle même pas. Elle n’y a sûrement même plus repensé. « C’est… » Gabrielle hésita, cherchant les mots justes. « une personne vraiment spéciale. »

 

Les jeunes filles lui souriaient. « Je parie que tu étais contente de la voir », dit Sharra, avec un sourire creusé de fossettes.

 

Le barde soupira. « Oh bon sang… tu l’as dit. » Admit-elle. « Je ne m’attendais pas à ce qu’elle arrive ici avant la semaine prochaine. » Elle leur fit un petit sourire. « Je présume que j’ai eu de la chance. »

 

Un petit silence tomba sur tous. « Gabrielle… » Demanda Elianas, avec hésitation. « Qu’est-ce qu’ils allaient faire si… »

 

Gabrielle réfléchit à la question. « Je ne sais pas. » Répondit-elle prudemment. « Ils étaient plutôt furieux… Je présume que ça aurait dépendu de s’ils voulaient toujours faire un bénéfice… ou… » Elle s’éclaircit la voix. « Ou s’ils étaient simplement si furieux qu’ils auraient passé leur colère sur moi. » Elle regarda tous leurs visages très solennels. « Mais vous, vous auriez été en sécurité, alors ça aurait été bien. »

 

« Pas pour moi. » Lança une voix très calme, vibrante depuis la porte.

 

Tout le monde se retourna et fixa Xena qui entrait dans le chalet, portant un plateau et accompagnée d’Arès. Les jeunes filles se retournèrent intimidées, sauf Cait, qui lui fit un sourire et se leva. « Allez, on est partis. » Elle agita la main. « On peut revenir demain. C’est tard. » Elle les mena dehors, même Solan, qui échangea un regarda amusé et entendu avec Xena, puis referma la porte derrière lui.

 

Gabrielle laissa passer un minuscule soupir de soulagement. « Tu arrives juste à temps. » Dit-elle d’une voix traînante et douce, en tendant la main vers sa compagne. « Je commençais à vraiment fatiguer. » Son visage se tendit et elle bougea un peu, essayant d’apaiser la douleur.

 

Xena posa son fardeau, et alla vers le lit, s’installa d’un côté du barde et prenant sa main tendue, elle y déposa un baiser. « Je le vois bien. » Commenta la guerrière. « J’ai apporté un peu plus d’herbes… beaucoup de nourriture… quelque chose de spécial de la part de maman… » Puis elle soupira.

 

« Oh. Elle est venue. » L’avertit Gabrielle d’un air désabusé. « A la pêche aux informations. »

 

Xena soupira à nouveau et roula sur le dos, fixant le plafond. « Je sais… elle m’a coincée dans la cuisine. »

 

« Oups ! » Gabrielle tressaillit, en tendant la main avec précaution pour masser doucement le ventre de sa compagne. « Désolée. »

 

Xena haussa les épaules. « Elle l’a bien pris… ça m’a surprise. » Son regard chercha celui de Gabrielle. « J’ai parlé à Kaleipus en venant ici… Il veut partir demain… On s’est en quelque sorte mis d’accord que j’emmènerais Solan pour une balade à cheval le matin. » Elle cligna des yeux. « Et que je lui dirais… je pense. »

 

« Hmm… Ok… » Le barde manœuvra plus près et continuant ses dessins légers, traça une ligne apaisante le long du corps de Xena. « On va trouver quelque chose. »

 

« Mmm… » Marmonna Xena. « Arrête ça… Tu vas m’endormir. » Elle cligna des yeux d’un air penaud vers Gabrielle. « Je suis encore un peu fatiguée… » Son expression prit un air désabusé. « Je dois sans doute vraiment vieillir. »

 

« Oh… non non non… » Gabrielle lui donna une petite tape. « Ne me la joue pas… Je viens juste d’avoir la Société d’Adoration de la Princesse Guerrière en ces murs qui me racontait les histoires de rapides et de grimpée de montagnes que j’ai ratées hier. »

 

« Oh. » Xena fit une pause. « Ça. » Elle fronça le front. « Ça n’était pas si terrible… »

 

Le barde revint à ses douces caresses « Tu sais, tu es plus dure avec toi-même que n’importe qui a le droit de l’être, Xena. » Elle secoua un peu la tête. « Combien de jours as-tu passés sans t’arrêter ? Et quand tu reviens, tu files vers les montagnes, et les rapides… et tu combats vingt hommes… et tout ça… et tu es en colère contre toi-même parce que tu es un peu fatiguée et que tu as un peu mal ? Lâche-moi un peu, OK ? »

 

« Oui, je sais. » Soupira Xena, en laissant passer un petit rire. « Désolée… c’est une vieille habitude. » Des armées de mercenaires ne t’ont pas ralentie. Tu restais sur le fil du rasoir ou tu mourrais. Mais ceci n’est pas une armée, et tu n’es plus un chef de guerre. Et tu es celle qui a décidé de ralentir l’entraînement… alors continue à te souvenir de ça, OK ? Comme ça tu ne la rendras pas folle. « Ces gamines racontent encore des histoires terrifiantes ? »

 

Gabrielle la fixa avec affection. « Tu sais bien qu’elles ont toutes le béguin pour toi, hein ? »

 

Un œil bleu s’ouvrit et la regarda. « Oh arrête un peu, Gabrielle. » Ricana-t-elle. « S’il y a quelqu’un pour qui elles ont le béguin, c’est toi, leur reine courageuse, pleine de ressources et si maligne. »

 

« Pas vrai. » Gabrielle passa la langue. « Tu n’as pas vu leurs visages quand tu es entrée ? Dieux, Xena… Tu n’as pas idée des fois. » Puis elle sourit. « Ou peut-être que je le reconnais facilement parce que j’étais à leur place il n’y a pas si longtemps. »

 

« Gabrielle… tu n’as jamais… » Xena fit une pause, et la regarda. « Pas comme ça ? »

 

Un doux rire de la part du barde. « Oh si. » Elle tendit la main et caressa le visage de Xena avec le bout sensible de ses doigts. « Tu n’as jamais remarqué comme je pouvais à peine te parler sans que ma langue ne soit liée ? » Elle regarda Xena inspirer pour protester. « Non… pas seulement te parler… des questions ou des trucs. Vraiment te parler ? » Elle s’interrompit. « Ou comment je rougissais quand je te regardais dans les yeux ? »

 

Xena pinça les lèvres. « Oui, j’avais remarqué. » Répondit-elle tranquillement. « Je pensais que ça n’était qu’un truc de gamine… que ça partirait avec le temps. » Son visage refléta une tristesse nostalgique. « Ou après que tu as remarqué que je n’étais pas… cette… héroïne… que tu semblais vouloir voir en moi. »

 

Gabrielle ferma les yeux et soupira. « Non… ça n’est jamais parti. » Répliqua-t-elle doucement. « Et puis un jour, j’ai levé les yeux vers toi… et ce fut comme si quelqu’un m’arrachait le cœur de la poitrine, le sentiment était si fort. » Elle fit une pause. « Et c’est alors que je me suis rendue compte que je n’étais plus une gamine, et que ça n’était pas un béguin. » Elle sourit en souvenir. « J’y repensais quand j’étais dans cette cage… juste pour passer le temps. »

 

Xena roula sur le côté et mit la tête sur sa main. « Dans la clairière. Avec les lucioles. »

 

Gabrielle ouvrit grand les yeux, et se concentra dans un émerveillement stupéfait, alors qu’un lent sourire éclairait son visage. « Tu savais. »

 

Xena roula hors du lit, prit le plateau de nourriture, et l’apporta avec elle jusqu’au lit. Elle se réinstalla et versa au barde une bonne portion de ragoût épais de poisson, lui posant le plat à main gauche, pour qu’elle puisse l’atteindre, avant de lui beurrer une tranche de pain. « Oui. » Finit-elle par répondre, consciente des yeux verts qui l’étudiaient. « Je savais. » Et pourquoi est-ce que je n’ai rien fait à ce sujet ? Elle allait grandir et oublier, n’est-ce pas ce que je m’étais dit ?

 

Gabrielle prit la tranche de pain et se contenta de la fixer. Puis elle leva les yeux vers le visage calme et tendu de sa compagne. « Pourquoi n’as-tu pas… » La raison lui parut évidente et elle garda le silence. Bien sûr… Gabrielle… elle ne doit pas avoir… et bien, tu savais que ça n’a pas été comme ça, au premier regard… Mais elle était vaguement déçue et un peu embarrassée. Je veux dire, les choses allaient bien, non ? Elle soupira, et regarda à nouveau sa compagne, qui poussait la nourriture dans son bol sans manger. « Xena ? »

 

« Oui ? » Xena finit par lever les yeux. « Désolée… Je… réfléchissais. » Elle fit une pause. « A la Thessalie. »

 

Le barde prit une bouchée de pain et mâcha lentement. « La Thessalie ? » Bon… c’était un changement de sujet abrupt… je présume qu’elle ne veut pas en parler. Elle ne veut probablement pas me vexer. « Ephiny en a parlé. » Dit-elle songeuse. « Je lui parlais de quand j’avais eu cette toux maladive… J’ai dit que tu ne m’aurais pas laissé partir, et elle a dit que c’était comme en Thessalie. » Une pause. « Qu’est-ce qu’elle voulait dire par-là ? » Elle prit une bouchée de ragoût et leva les yeux. Et s’arrêta de mâcher. « Xena ?? » Elle posa sa fourchette et attrapa la main de sa compagne, alarmée par l’expression perdue soudaine sur le visage de la guerrière. « Hé ! » Elle ignora la douleur soudaine dans sa poitrine et tendit l’autre bras pour la toucher.

 

La guerrière captura sa main, et la repoussa doucement contre son corps. « Ne fais pas ça… Tu tires sur tes côtes… Hum… désolée… J’étais… » Xena s’arrêta et se reprit. Tous ses instincts lui criaient de garder ça pour elle… de le retenir en elle. Tous ses instincts, sauf un. Elle s’y rattacha. « La Thessalie était… » Très bien. Il est temps qu’on parle de ça. Temps qu’elle sache.

 

Elle prit une inspiration et effleura le visage de Gabrielle du dos de ses phalanges. « Gabrielle, tu avais mon cœur… depuis bien longtemps déjà. » Plus longtemps, je pense, que tu ne t’en rends compte, mon barde. Plus longtemps que je n’ai eu le tien.

 

Oh. Le barde ressentit quelque chose de ferme l’envahir quand elle comprit ce que Xena disait. OK… peut-être qu’il y a eu quelque chose tout le temps.

 

« J’ai gardé… Je me suis dit que je devais juste garder ça pour moi… parce que tu étais… innocente, et douce… et bonne… et toutes les choses que je ne suis pas. Et je ne voulais pas que tu soies tachée. » La voix de Xena était tombée jusqu’à un murmure, et elle fixait les couvertures douces dans lesquelles le barde était blottie. « Je ne voulais pas que tu soies touchée par toute cette noirceur qui m’enveloppe. » Elle sentit les doigts doux du barde peigner ses cheveux et elle garda le silence un instant, chérissant le contact. « Je ne pouvais pas… ignorer cela plus longtemps en Thessalie…. Parce que quand je t’ai perdue… » Elle s’interrompit, fixant le vide. « Mon monde s’est arrêté. »

 

Elle entendit l’inspiration soudaine de Gabrielle. « J’aurais combattu chaque habitant du Tartare une douzaine de fois pour te ramener. » Elle leva les yeux, finalement, et croisa le regard vert brume, sobre qui la fixait avec angoisse. « Je n’étais plus moi-même, Gabrielle. » Elle déglutit. « Si tu n’étais pas revenue… Je ne sais pas ce que j’aurais fait… et je me suis rendue compte…. Cette nuit-là…. que c’était quelque chose qui allait changer ma vie. » Une pause. « Et je me suis aussi rendue compte… que je ne pouvais pas te laisser être une partie de ce que j’étais… même si ça me faisait mal… très mal. » Elle se mordit la lèvre. « Mais je n’ai jamais pu m’empêcher de t’aimer. » Elle soupira. « Quelle que soit la force que j’y mettais. » Je n’ai jamais vraiment essayé fort, n’est-ce pas ? C’était un sentiment unique, chaleureux et doux que je pouvais garder pour moi, pendant ces longues nuits à regarder les étoiles et à te regarder dormir. Mon petit secret.

 

Gabrielle avait oublié ses côtes, oublié le bol de ragoût… tout oublié sauf les mots qui se frayaient un chemin dans sa compréhension. Elle n’avait pas su… n’avait pas imaginé… son départ avec Perdicus prit soudain une nouvelle et poignante signification, alors qu’elle se rendait compte que ça n’avait pas été la désertion devant une amie… mais la rupture de leurs cœurs que Xena avait ressentie, qu’elle s’était volontairement écartée pour permettre ça. Parce que… le barde comprit soudain… Xena ne se donnait jamais à moitié. Quand vous l’aviez, vous aviez tout… le bon et le mauvais, l’obscurité et la lumière. Et tout cela venait accompagné d’une loyauté féroce et profonde qu’elle avait sans savoir… sans y réfléchir, ignorée. Combien cela avait-il dû la blesser ? Et pourtant… Xena ne la blâmerait jamais pour ça. « Je ne savais pas. » Murmura-t-elle, en sentant les larmes tranquilles rouler le long de ses joues. « Dieux, comme j’aurais aimé savoir. »

 

Xena tendit la main et effleura les larmes pour les écarter, avec un sourire triste. « Et bien, je suis meilleure pour garder les secrets que toi. » Elle repoussa doucement les cheveux défaits du barde hors de ses yeux. « En tous cas… dans la clairière…. Je l’ai vu dans tes yeux… Et je voulais tant te dire quelque chose. » Elle hésita. « J’ai juste… J’avais si peur pour toi que je n’ai pas pu. » Elle prit le pain et le remit dans la main du barde. « Allez, mange. » Elle laissa passer un long soupir. « Tu as posé la question… J’ai pensé que tu méritais une réponse. »

 

Gabrielle prit une bouchée de pain et mâcha lentement, en réfléchissant très fort. « Xena ? »

 

La guerrière avala la bouchée de ragoût qu’elle mangeait et leva les yeux. « Oui ? »

 

« Qu’est-ce qui t’a finalement décidée à laisser… les choses se produire ? » Demanda le barde, tranquillement. Sachant que cela avait été une décision consciente de la part de Xena. C’est probablement pas le bon moment pour demander ça… mais on ne parle pas souvent de nous. En quelque sorte… on fait avec, et je veux vraiment savoir ce qu’il en était.

 

Xena soupira et mordit le bout de sa cuillère pensivement. « C’est juste… C’est devenu si fort… Je ne pouvais plus… Gabrielle, c’était soit accepter, soit se séparer. »

 

Le barde déglutit et sentit son cœur battre en réaction.

 

« Et je ne pouvais pas affronter la pensée de vivre sans toi. » Fut la conclusion tranquille, presque introspective. « Alors cette nuit, à Cirron… après la bataille… Quand j’ai vu combien tu avais été inquiète… et que j’ai pensé à comment ça aurait pu se terminer autrement… et bien, j’ai juste… décidé que puisque nous étions si importantes l’une pour l’autre… c’était plutôt idiot de ne pas aller de l’avant et de laisser se produire quelque chose qui allait probablement nous rendre heureuses toutes les deux. »

 

Gabrielle la fixa sans un mot pendant un moment. « J’aurais pu te le dire bien avant. » Mais son regard s’adoucit avec une tendresse profonde. « Tu ne peux pas imaginer ce que j’ai ressenti après ça… de voir que tout ce que j’espérais commençait à arriver. »

 

Xena rit et prit une cuillerée de ragoût, laissant un sourire planer sur ses lèvres. « Oh… oui, je peux l’imaginer. » Elle croisa le regard de Gabrielle avec un clin d’œil. « Je sais comment je me suis sentie quand j’ai enfin pu faire certaines choses que je voulais faire depuis longtemps déjà. »

 

C’était juste un autre campement, après une autre journée à arranger les problèmes des autres. Mais c’était un endroit joli, une petite clairière qui serpentait doucement vers une mare profonde, remuée par une cascade calme qui tombait en gouttelettes et se frayait un chemin dans les rochers plus qu’elle ne se déversait sur elles. Le son de l’eau courante était apaisant et le temps était frais et sec, et l’odeur des bois embaumait autour d’elles.

 

« Mmm. » Gabrielle avait reniflé d’un air appréciateur, alors qu’elle s’installait avec ses parchemins, puis elle avait soupiré. « T’sais, j’aime bien aider les gens, mais bouger des tombereaux de cailloux ? Je te demande, Xena… est-ce que c’était juste ? » Elle avait lancé un regard agacé de comédie à la guerrière et s’était massé l’avant-bras. « Mes bras me tuent. »

 

Xena était affalée près du feu à recoudre sa combinaison en cuir et elle leva les yeux pour étudier le barde d’un air spéculatif pendant un instant. Elle répondait habituellement aux plaintes moqueuses de Gabrielle par un commentaire sarcastique… et elle pensait à quelques-uns qui pourraient s’appliquer ici. Mais son instinct la poussait à faire autre chose, et cette fois-ci, au lieu d’y mettre un frein, elle le laissa libre. Ce fut un sentiment presque étourdissant de liberté.

 

Elle se leva et posa la combinaison, puis alla à grandes enjambées vers leurs couchages, se laissant tomber tranquillement près du barde qui s’affairait à gribouiller. Gabrielle avait levé les yeux lorsqu’elle s’était installée, et Xena s’était laissé le plaisir de simplement apprécier la vue du visage du barde pendant un long moment, visage rehaussé par la lumière du feu et les ombres, ses yeux d’un marron ardent dans la lueur orangée. « Pose ça un instant. » Avait-elle demandé d’une voix calme, et elle avait attendu que Gabrielle, les yeux éclairés par la curiosité, pose ses parchemins et tourne totalement son attention vers sa compagne.

 

« Qu’est-ce qu’il y a ? » Avait demandé le barde doucement, en se mettant sur les coudes pour regarder Xena.

 

« Allonge-toi et mets les bras au-dessus de ta tête. » Avait dicté Xena, et après une pause étonnée, Gabrielle avait obéi. La guerrière s’était mise à genoux au-dessus du corps du barde, et commençant par le bas de son dos, elle avait travaillé sur les muscles tendus de sa compagne avec rapidité et expertise.

 

Après un moment de choc, Gabrielle s’était contentée de fermer les yeux et s’était abandonnée à l’expérience, émettant des murmures bas de contentement alors que la guerrière remontait le long de son dos et sur ses épaules, laissant une piste de chaleur relaxante derrière elle. Elle avait massé les bras étendus du barde, et avait fini par la nuque, sentant le subtil craquement lorsque la vertèbre s’était remise en place, et que Gabrielle soupirait de soulagement.

 

Puis elle avait légèrement tapoté le dos du barde et était retournée à son propre couchage, s’installant sur le dos, les mains croisées sur l’estomac avec un sourire satisfait, la tête un peu tournée pour voir un œil vert endormi la fixer à son tour. « C’est mieux ? » Demanda-t-elle nonchalamment.

 

« On peut bouger d’autres cailloux demain ? » Avait marmonné le barde, un sourire joyeux sur le visage. « Merci… c’était merveilleux. » Elle avait laissé sortir un profond soupir. « Je ne savais pas que tu savais faire ça. »

 

Xena l’avait regardée pensivement, puis avait haussé les épaules. « Dans notre métier… c’est un talent utile. » Elle avait essayé d’être le plus neutre possible. Elle pouvait voir arriver la prochaine question dans les yeux de Gabrielle, mais le barde ne la posa jamais, et Xena se dit qu’elle connaissait aussi bien la réponse qu’elle-même. Pourquoi maintenant ? Ouais. Elle savait.

 

Au lieu de ça, le barde avait tendu paresseusement la main et l’avait glissée sur l’épaule nue de Xena, ses doigts doux traçant les muscles juste sous la peau. « Je vois ce que tu veux dire. » Avait-elle murmuré, en fermant les yeux, mais elle avait laissé son bras enroulé autour de celui de la guerrière dans une prise solide. « Très utile. »

 

Xena avait souri pour elle-même, et abandonné ses tâches prévues avec joie, laissant les sons de la cascade et le craquement confortable du feu commencer à la bercer vers le sommeil. Elle aurait pu se lever, mais elle n’eut pas envie de briser la prise du barde, et au lieu de ça, elle avait posé son bras autour de l’épaule de Gabrielle, sentant les mèches douces des cheveux blonds-roux se mêler à ses doigts. Et après un moment, elle avait senti le mouvement subtil sous son bras quand Gabrielle avait légèrement tourné la tête, et qu’un contact des lèvres aussi léger qu’une plume était venu effleurer sa peau, avant que le barde ne se niche un peu plus et se détende.

 

La guerrière sourit au souvenir, alors qu’elles mangèrent en silence pendant un petit moment, Xena s’étant relevée pour remplir leurs deux bols deux fois, prendre la deuxième miche de pain, et poser un bol de chevreuil pour un Arès affamé. « Bon sang. » La guerrière rit un peu ironiquement. « Je présume que maman avait raison après tout. »

 

« A quel sujet ? » Marmonna Gabrielle la bouche pleine. Elle sauça son bol de son reste de pain et le mit dans sa bouche, mâchant et avalant, avant de se rallonger avec un grognement. « Dieux… je suis repue. »

 

« Elle a dit qu’on était une meute de loups affamés. » Répliqua sans rire la guerrière. Puis elle prit les assiettes et les posa de côté avant d’attraper un paquet vaguement carré posé sur le plateau. « Je parie que tu ne veux pas de ça, alors. » Dit-elle d’une voix traînante, en l’ouvrant et en l’agitant devant le barde.

 

Qui couina. « Du pain aux noix… Pourquoi tu ne m’as pas dit que maman avait envoyé ça ? » Elle lança un regard lésé à la guerrière.

 

Sa compagne sourit et se détendit sur les coussins près d’elle. « Parce que je voulais que tu te mettes d’abord ce ragoût dans l’estomac… Et que je sais que tu aurais tout mangé si je te l’avais donné. »

 

Gabrielle lui tira la langue et attrapa le paquet, mais elle ne nia pas l’accusation. « A t’entendre, on croirait que je suis un petit cochon », murmura-t-elle, en lançant un regard en coin à Xena. La guerrière sourit, puis se glissa derrière elle et la berça doucement, laissant la chaleur de leur connexion les traverser, sentant le corps de Gabrielle se détendre contre elle avec un abandon infini.

 

« C’est pas grave. » Xena glissa un bras prudent derrière le corps douloureux de sa compagne et lui tapota gentiment le ventre. « Tu es mon petit cochon à moi. » Dieux… Je ne peux pas croire que je viens de dire ça. Je me dissous dans la sentimentalité.

 

« Ah oui ? » Le barde gloussa. « Souviens-toi de ça tant que je ne peux rien faire jusqu’à ce que mes côtes guérissent et que ta mère continue à me goinfrer. » Elle ouvrit le paquet de pain aux noix et en prit une tranche, mordit une bouchée et offrit la tranche à Xena. « Mmm… » Elle ferma les yeux et soupira joyeusement en mâchant.

 

« Je croyais que tu étais repue », la taquina gentiment Xena, en prenant une bouchée elle-même.

 

« C’est un autre estomac », la rassura le barde, avec un clin d’œil. « Bon… » Elle lança un regard tranquille à Xena. « Tu as une histoire à me raconter ? »

 

Xena essaya de ressentir de l’appréhension à cette idée, mais allongée là, avec Gabrielle blottie dans ses bras, l’expérience perdit de son horreur brutale et lui permit de prendre du recul pour la raconter avec moins de difficulté qu’elle ne l’avait anticipée. En plus, elle commença à la raconter à Gabrielle par sa conversation avec Iolaus.

 

« C’est pas vrai. Tu n’as pas dit ça. » Le barde éclata de rire.

 

« J’ai bien peur que si », admit Xena. « Tu aurais dû voir sa tête. On aurait dit que je l’avais frappé avec un poisson mort. »

 

« Oh… dieux. » Le barde soupira, ferma les yeux et laissa sa tête retomber contre la poitrine chaude de Xena. « Il va me faire cet énorme sourire stupide qui dit ‘Ben ça, ce que tu es mignonne quand tu souris’, la prochaine fois qu’il me voit, non ? »

 

« Ouais. » Xena sourit. « En parlant de ça… Ils sont sûrement dans le coin… Tu sais que tu ne peux pas voyager pendant un petit moment. Qu’est-ce que tu veux faire avec les Amazones ? »

 

Le barde soupira. « Je parlerai à Ephiny demain. » Elle lança un regard à Xena. « Je vais aller la voir demain, d’accord ? »

 

Les doigts de Xena passèrent très doucement et Gabrielle essaya de ne pas crier. « Mmm… pendant un petit moment…. Je t’emmènerai là-bas. » Elle raconta le reste de l’histoire en détails calmes et précis.

 

« J’ai ressenti ça », dit le barde tranquillement, quand elle parla du collier. « Je pense qu’à ce moment-là, j’ai cessé de m’inquiéter pour moi et que j’ai commencé à m’inquiéter pour toi. »

 

Xena soupira. « J’étais aussi un peu inquiète pour moi. » Elle secoua la tête. « C’était fichtrement près, Gabrielle. » Elle fixa ses mains. « La seule chose qui m’a empêchée de tomber… dans ce puits, était le fait que je savais… que tu étais dehors quelque part. » Elle fit une pause. « Que tu avais des ennuis… et que tu avais besoin de moi. » Elle laissa passer un souffle tremblant. « Presque. »

 

Gabrielle emmêla ses doigts à ceux de Xena. « Presque ne compte pas », dit-elle calmement. « Je pense que quelqu’un m’a dit ça il n’y a pas si longtemps. » Elle étudia le visage de Xena. « Tu as fait ce qu’il fallait. »

 

Un lent hochement de tête. « Je présume que oui. »

 

« Xena ? » La voix de Gabrielle contenait une note de force tranquille.

 

« Oui ? » Répondit la guerrière en la fixant, d’un air interrogateur.

 

« Si tu l’avais… laissé t’emporter… » Le barde enroula ses doigts autour de la main de Xena. « Je serais venue te trouver… et je t’aurais ramenée. »

 

Le regard bleu croisa le vert. Aurait-elle pu ? Par les dieux, que je n’aie jamais à le vérifier… mais si quelqu’un pouvait, ce serait elle. « Je sais ça », répondit Xena, avec un petit sourire. « Mais je me sens malade pour Hercule. »

 

« Ouille. » Gabrielle tressaillit. « Pauvre Herc… Il a dû avoir une attaque quand il s’est réveillé. » Elle secoua la tête. « Ça a dû être terrible pour lui d’apprendre qu’il avait fait tout ça. »

 

Xena soupira. « Oui… Il était plutôt choqué. » Elle regarda Gabrielle pensivement. « Mais il avait Iolaus pour l’aider à traverser tout ça… Il était presque fou… C’était un peu… » Elle pinça les lèvres en cherchant le mot pour décrire la situation. « Mignon. »

 

Les sourcils de Gabrielle montèrent brutalement à ce choix de mot. « Mignon ??? »

 

Sa compagne rit légèrement. « Oui… tout paniqué et inquiet comme ça… »

 

« Vraiment », dit Gabrielle, en la fixant d’un air spéculatif.

 

« Ouais », confirma Xena avec un sourire espiègle.

 

« Intéressant. » Le barde hocha la tête.

 

« Très », approuva sa compagne.

 

Gabrielle mit ça de côté pour l’étudier plus tard, puis elle poussa Xena dans les côtes. « Je t’avais dit que tu gagnerais. »

 

« Gabrielle… » Gronda Xena. « Ce n’était pas un combat juste… Il n‘était pas lui-même. » Elle reposa doucement le barde et se leva du lit, pour aller vers l’endroit où elle avait laissé les herbes fraîches. « Je vais te donner de ça. » Elle baissa les yeux. « Pas vrai, Arès ? »

 

« Argrrhooo ? » Le loup dressa la tête et la regarda, puis il se leva et poussa son genou tout en la léchant. « Agrrrooooohhoo ? »

 

Xena mit le pot d’eau à chauffer et s’assit dans le fauteuil près du feu, jouant avec Arès en caressant sa fourrure.

 

« Hé. » Gabrielle roula un peu sur son côté pour regarder sa compagne. »

 

Le regard bleu croisa le sien, interrogateur.

 

« Laisse tomber le truc pour dormir », demanda le barde.

 

Un sourcil noir grimpa. Puis Xena rit. « Allons, Gabrielle… Ce n’est pas que je ne veux pas… Tu sais ce que je veux dire. »

 

Gabrielle sourit. « Je parie que ça me ferait beaucoup de bien », dit-elle d’un ton enjôleur. « Allez… tu sais bien que tu en a envie. »

 

« Gabrielle ! » La guerrière laissa passer un rire agacé.

 

Le barde baissa les yeux et joua avec les couvertures. « Désolée », ajouta-t-elle tranquillement. « Je… » Elle laissa lentement passer un souffle. « Ils m’ont attachée… dehors… Il faisait froid et il pleuvait… et l’une des choses qui gardait mon esprit loin de tout ça, c’était de me souvenir de ce que c’était d’être avec toi. » Elle ferma les yeux d’un air las, juste pour les rouvrir un instant plus tard quand Xena se glissa dans le lit près d’elle, ses mains chaudes lui tenant le visage, ses yeux bleus vifs et intenses. « J’ai eu de la chance là-bas… hein, Xena ? Des choses bien pires auraient pu m’arriver, pas vrai ? »

 

Xena ne répondit pas. Au lieu de ça, elle captura les lèvres du barde, et n’arrêta pas ses attentions aimables jusqu’à ce qu’elle sente les mains de Gabrielle s’emmêler dans sa chemise et sa respiration devenir plus rude. Puis elle fit une pause et fixa les yeux verts maintenant rêveurs. « Tu me laisses faire tout le travail, OK ? »

 

« D’accord… » Murmura le barde. « Mais ne te sens pas obligée… Je veux dire… »

 

« Gabrielle. » La voix de Xena était profonde et le timbre gratta ses tympans. « Tu as toujours vu la douceur et la beauté en ça… Je sais que c’est vrai. » Elle caressa le visage du barde. « Ça me blesserait beaucoup que quelqu’un te l’enlève… Tu me comprends ? » Me comprends-tu ? S’ils avaient… Ce que j’ai fait à Rurik aurait été le moindre de ce que je leur aurais fait… Tu t’en rends compte, mon barde ? Rien ne m’aurait arrêtée. Rien.

 

« Oui », murmura Gabrielle, en laissant ses doigts tracer le profil droit au-dessus d’elle. « Je comprends très bien. » Elle pinça les lèvres en un sourire. « Ma protectrice et ma championne. »

 

Xena lui sourit en retour. « Toujours. » Elle l’embrassa. « Et pour toujours. » Elle sentit les mains du barde qui débouclaient sa tunique. « Peu importe ce qui arrive. »

 

Et alors que le contact familier apaisait la douleur et l’envoyait aux tréfonds de son esprit, Gabrielle sentit les morceaux éclatés de sa sécurité - interne - se remettre lentement en place. Tout allait bien. Elle était sortie d’un endroit vraiment effrayant… et elle était à nouveau en sécurité. C’était une guérison d’un autre ordre, et alors qu’elle plongeait dans le sommeil un moment plus tard, le barde sentit les mots d’un poème se former de manière floue dans son esprit, pour la décrire.

 

Elle ouvrit un œil vert brume, et apprécia la force qui l’entourait ; elle passa un moment à simplement mémoriser ce sentiment. La poitrine de Xena se soulevait et se baissait avec régularité sous elle, et elle entendait sous son oreille le battement puissant du cœur de la guerrière dans son rythme doux de sommeil, un rythme qui s’accordait au sien, et la berça paisiblement jusque dans un profond sommeil.

 

********************

 

« Ouille. » Le barde soupira en bougeant imprudemment un bras. « Ok… c’est mieux. » Elle prit une inspiration avec précaution, alors que Xena finissait d’attacher des bandages frais autour de sa poitrine. Elle se tenait près du feu, une main posée sur le manteau du foyer, essayant de se réchauffer pendant que sa compagne finissait sa tâche.

 

Xena l’étudia de près. « Tu es sûre que tu ne veux pas rester ici et te reposer ? » Elle toucha les bleus qui disparaissaient doucement sur le visage du barde. « Tu es vraiment pâle. »

 

Gabrielle repoussa le désir d’accepter au fond de son esprit et soupira. « Oui, j’en suis sûre. Je veux vraiment voir Eph, et bouger un peu… Je suis courbaturée d’être restée allongée si longtemps. » Elle se laissa tomber doucement contre la poitrine de Xena, et la guerrière glissa ses longs bras autour d’elle, laissant tomber ses mains au bas du dos de Gabrielle pour travailler prudemment les muscles tendus qu’elle y trouva.

 

« Ooooohhhh… » Grogna Gabrielle, en enfouissant sa tête dans l’épaule de Xena. « Oui… juste là. »

 

La guerrière remonta le long du dos de sa compagne, puis la largeur de ses épaules, pour finir à la base de sa nuque. « Tu te sens mieux ? »

 

Gabrielle mit le nez dans son cou et mordilla doucement la chemise douce que portait la guerrière. « Si je dis non, est-ce que tu vas continuer ? » Répliqua-t-elle, taquine, puis elle soupira. « Oui, merci. Je me sens vraiment mieux. » Elle se redressa à contrecœur et passa la tête dans la chemise que Xena avait choisie dans la commode et qu’elle lui tendait. Elle réussit à enfiler les manches, puis sortit ses cheveux hors du col alors que Xena attachait la ceinture un peu lâche. « Tu es vraiment jolie », dit-elle à la guerrière, en passant le doigt sur la tunique de laine rouge cramoisi qui drapait joliment le corps de sa compagne. « Cette couleur te va bien. »

 

Xena lui fit un demi-sourire. « Merci. » Elle brossa une des manches. « Je ne l’ai pas portée depuis un bon moment », reconnut-elle. « En général il fait trop chaud pour la porter. »

 

Gabrielle se rapprocha et prit une profonde inspiration. « Mmm… Tu l’as emballée avec des herbes, non ? » La légère senteur combinait la menthe, l’eucalyptus et le pin, et elle chatouilla les sens du barde. « J’aime bien ça. »

 

« Ouais », confirma la guerrière. « Assieds-toi… Je vais t’aider à enfiler tes bottes. »

 

Le barde soupira et s’assit prudemment. « Je déteste être si… ouille. Inutile. » Elle fit une pause et tira sur une mèche des cheveux noirs de Xena. « Hé… C’est pour ça que tu as toujours cet air de ‘C’est rien’, n’est-ce pas ? Tu détestes demander de l’aide. »

 

Les yeux bleus de Xena brillèrent d’amusement. « Tu m’as démasquée », répondit-elle sans rire, en laçant soigneusement la botte gauche du barde. « Mon secret est dévoilé. »

 

Gabrielle rit. « Ouille », grogna-t-elle. « Ne me fais pas rire… ça fait mal. » Elle posa doucement la main droite sur son estomac en regardant les mouvements de Xena. « Tu sais ce que tu vas lui dire ? » Demanda-t-elle d’une voix tranquille, en regardant les lignes rosées de la lumière matinale peindre des dessins sur le dos de la guerrière. Elles avaient discuté de ce sujet depuis qu’elles étaient éveillées, Gabrielle blottie paisiblement contre le corps chaud de Xena.

 

La guerrière prit une profonde inspiration puis leva les yeux. « Je pense. » Elle se leva et tendit la main au barde. « Viens. »

 

Gabrielle se laissa doucement aider à se mettre debout et retint la main de sa compagne. « Nerveuse ? » Demanda-t-elle avec sympathie.

 

Un pincement de la bouche la trahit. « Oui. » Un regard bleu inquiet chercha le sien. « Un peu. » Elle fit une pause. « Ça se voit, hein ? »

 

Le barde secoua la tête et lui tapota l’estomac. « Je le sens. » Elle fit un sourire à sa compagne. « Soit c’est ça, soit je suis nerveuse à ta place. » Elle étreignit doucement Xena. « Vas-y doucement…. Tout ira bien. »

 

Xena soupira et posa son menton sur la tête du barde. « Merci. » Elle a raison. Je suis aussi nerveuse qu’un poulet dans le repaire d’un renard. C’est dégoûtant… Je peux affronter une douzaine d’hommes armés et ne rien ressentir… mais un petit garçon ? Dieux. Elle laissa passer un long soupir et se redressa. « Allez… Je vais t’emmener à l’auberge…. Maman devrait avoir préparé le petit déjeuner à cette heure-ci. »

 

« Ça me paraît bien. » Gabrielle réfréna un bâillement. « Viens, Arès. »

 

Elles quittèrent le chalet, quittant la chaleur intérieure pour l’air froid et sec du petit matin. Le soleil se montrait juste par-dessus les arbres, lâchant un vernis couleur ambre sur la cour, et éclaboussant leur chemin de lignes de lumière. Gabrielle pencha la tête et prit une inspiration prudente. « Mmm… » Elle sourit. « Ça sent le pain frais. »

 

Xena mit la main sur son dos et la guida sur les marches jusqu’à l’auberge puis tint la porte et elles entrèrent. A l’intérieur, la pièce était peu éclairée et tranquille, le feu de la nuit envoyait des craquements paresseux, qu’on entendait par-dessus les légers bruits en provenance de la cuisine. « On dirait bien que tout le monde est encore au lit », dit Xena avec un sourire.

 

Gabrielle rit. « Oh… Je crois voir que je vais me faire taquiner à ce sujet. » Elle donna une petite poussée à Xena. « Ces Amazones paresseuses… »

 

La porte de la cuisine s’ouvrit et Cyrène passa la tête, les repérant. « Et bien ! » Elle eut un large sourire. « Quelle plaisante surprise. » Elle s’avança dans la pièce, et laissa la porte se balancer pour se refermer derrière elle. « Hé, ma jolie. » Elle tendit la main pour toucher le côté de Gabrielle, et lui tapota l’épaule avec prudence. « Comment te sens-tu ? »

 

Le barde sourit. « Bien mieux, merci », rassura-t-elle l’aubergiste. « Ça sent super bon ici. »

 

Cyrène rit. « Tu dois te sentir mieux », taquina-t-elle, puis elle leur lança un regard ironiquement amusé. « J’ai bien peur que ça risque d’être un peu calme ici ce matin… On a eu une… Hum… » Elle fit une pause en mâchouillant sa lèvre pensivement. « Célébration… hier soir. »

 

Gabrielle pencha la tête d’une manière intriguée, puis se retourna quand elle sentit Xena commencer à rire. « Quoi ? »

 

« Maman. » La guerrière mit les mains sur ses hanches. « Est-ce que tu as soûlé les Amazones ? »

 

« Moi ? » Cyrène pointa sa poitrine de son pouce. « Qu’est-ce qui te fait croire que j’ai quelque chose à voir avec ça ? » Elle lança un regard vexé à sa fille. « Je ne leur ai pas fait boire la moitié d’un tonneau de bière. »

 

Des tressaillements identiques sur les visages de Xena et Gabrielle la firent exploser de rire. « La moitié d’un tonneau,??? » Grogna Gabrielle. « Maman ! » Elle se couvrit les yeux d’une main. « Comment as-tu pu ? »

 

Cyrène eut un sourire narquois. « Je t’assure que je n’ai rien à voir avec ça. » Elle fit une pause. « Néanmoins… Tu as raté ton frère en train de danser sur une table avec cette gentille Amazone. » Elle réfléchit. « Celle avec les cheveux noirs. Tu vois qui je veux dire. »

 

Xena s’appuya sur un pilier et grogna. « Oh dieux…. », marmonna-t-elle. « Je suis contente d’être allée me coucher. » Elle secoua la tête vers sa mère. « Quelqu’un a été blessé ? »

 

L’aubergiste ricana. « Non. » Elle les tira doucement vers la cuisine. « Venez… On vient juste de sortir du pain du four. » Elle tint la porte pour elles et les suivit dans la cuisine légèrement pleine de vapeur qui sentait le pain cuit frais, et où Eustase posait avec précaution des miches fraîches sur les casiers de refroidissement. « Eustase, regarde qui j’ai trouvé. »

 

La cuisinière leva les yeux et rayonna. « Par les dieux… bonjour ! » Elle prit une des pelles en bois de boulanger avec déjà deux miches de pain et les poussa vers elles. « Et j’ai deux de ces jolis pains en cours de cuisson. Allez-y… »

 

Cyrène prit un chiffon et les deux miches de pain pour les poser sur la table de la cuisine, avant de faire signe à Xena et Gabrielle de s’asseoir. « Personne n’a été blessé… » Continua-t-elle en séparant les miches pour les recouvrir de beurre d’herbe, avant de leur passer. « Il y a eu… Bon, je suppose qu’on peut appeler ça du bras de fer. » Elle fit une pause, réfléchissant, puis secoua la tête. « Ça a un peu dégénéré. »

 

Gabrielle savourait le pain, les yeux fermés, et à ces mots, elle les ouvrit brusquement. « Dégénéré ? » Demanda-t-elle en prenant une autre bouchée. « C’est merveilleux, à propos. » Elle sourit à Eustase. « Merci. »

 

La cuisinière rayonna. « Ma meilleure cliente. » Elle commença à se retourner puis jeta un coup d’œil derrière elle. « Et je suis vraiment, sincèrement contente que tu ailles bien, ma douce. »

 

Gabrielle lui rendit son sourire puis lança un regard à Cyrène. « Dégénéré ? » Demanda-t-elle à nouveau, sentant la main de Xena se poser doucement sur son genou. Elle enroula ses doigts autour de ceux de la guerrière et pressa, sentant la chaleur lorsque Xena lui rendit ce geste.

 

« Et bien. » L’aubergiste soupira. « On avait ces pâtisseries fourrées à la crème hier soir. »

 

« Celles où quand on les presse… » Lança Xena.

 

« Oui », répondit sa mère.

 

« Désolée. » Gabrielle tressaillit. « Je vais avoir une petite conversation avec elles. » Elle lança un regard à Xena, et la guerrière hocha la tête presque imperceptiblement en retour. « Je vais voir Ephiny… et peut-être que je peux convaincre maman de me donner une autre miche de pain », dit-elle, en faisant un sourire penaud à Cyrène.

 

Xena hocha la tête et se leva une fois son pain fini. « Je reviens dans un petit moment. » Son regard croisa celui du barde, et Gabrielle lui fit un petit clin d’œil, et épela silencieusement. « Bonne chance. » Xena hocha la tête et tapota le bras de sa mère. « Ta bière est dangereuse, maman », murmura-t-elle en quittant la cuisine par la porte de derrière, pour aller d’un pas ferme vers l’écurie éclairée par le soleil.

 

Gabrielle leva les yeux alors qu’Eustase posait une assiette devant elle, avec une autre miche de pain fumante et une sélection de tranches de viande. « Je blaguais, tu sais. » Elle sourit à la cuisinière qui fit un clin d’œil. « Mais comme tu le proposes… » Elle manœuvra le petit pain avec précaution de sa main gauche. « Ouille… »

 

Eustase rit et lui tapota la main, puis lui prit le pain et le brisa en deux, avant de le recouvrir de beurre. « Tiens… »

 

Le barde lui fit un sourire. « Merci… C’est un peu difficile. » Elle glissa la viande sur le pain et prit une bouchée, se penchant en arrière avec un soupir.

 

Cyrène revint de près du feu et s’installa en face du barde, posa une tasse devant elle et en prit une pour elle-même. « Tu as l’air bien mieux ce matin », dit-elle en faisant un sourire à Gabrielle. « Mais ça fait toujours mal, hein ? »

 

Un léger hochement de tête du barde en réponse. « Ouais… ça fait mal », admit-elle tranquillement, alors qu’elle prenait la tasse et en buvait une gorgée. « Je ne peux pas te dire combien de fois j’ai entendu ta fille ignorer une blessure pareille comme si ça n’était rien. » Elle fit une pause et leva les yeux au ciel. « Ça ne l’est pas. »

 

L’aubergiste laissa passer un léger rire. « C’est tout elle, ça. Elle prétendait toujours que tout allait bien… Elle me rendait folle. Surtout quand cette petite galopine saignait sur le sol de ma cuisine. »

 

Le barde sourit. « Oh oui. » Elle prit une bouchée de son sandwich. « Voyons voir… C’est juste une égratignure, c’est ça ? » Dit avec la bonne intonation.

 

Cyrène se mit à rire. « Parfait. » Elle soupira. « Espèce d’entêtée. »

 

Gabrielle hocha tranquillement la tête. « Très. » Elle fit une pause. « Mais elle ne me la fait plus à moi. J’arrive toujours à deviner. » Elle soupira. « Je repense au passé parfois, et je me rends compte du nombre de fois où je pensais qu’elle était de mauvaise humeur… Ce n’était pas ça. C’était parce qu’elle souffrait vraiment et ne voulait simplement pas que je le sache. » Et je me souviens de la première fois qu’elle l’a fait.

 

C’était un autre village après tant de villages minuscules et poussiéreux sujets aux attaques incessantes d’un chef de guerre particulièrement brutal. Xena les avait surpris et attaqué, sans tenir compte de leur nombre supérieur. Comme d’habitude.

 

Et comme d’habitude, elle avait vaincu, même si ça avait dû passer par un empilement et une empoignade vicieuse où elle avait dû se débarrasser d’au moins trois d’entre eux avec une force brute.

 

Gabrielle avait pensé que c’était peut-être la chaleur, où le fait qu’ils n’étaient qu’un groupe d’animaux sans cervelle, et cruels, ou… elle ne savait pas quoi. Mais Xena était ressorti de la bataille d’une humeur massacrante, d’un caractère emporté même avec le barde, même si Gabrielle n’avait rien fait à sa connaissance pour mériter ça.

 

Le campement, ce soir-là, avait été particulièrement silencieux ; elles avaient mangé ce qu’elles avaient dans leurs bagages, ce que Gabrielle avait préparé avant que Xena n’ait l’occasion de partir chasser. Et elle avait reçu un regard neutre en réponse qui avait commencé à la faire réfléchir. Le barde s’était installée sur son couchage avec ses parchemins, mais son attention avait vagabondé sans répit vers sa compagne, qui était à ses tâches habituelles, à aiguiser son épée, puis à prendre sa trousse de réparation pour son armure, avant de travailler un peu sur l’armure d’épaule qui s’était tordue pendant le combat.

 

Elle en avait finalement eu assez de ce silence maussade et elle s’était levée, avait traversé le campement pour s’asseoir près de Xena, ses coudes sur ses genoux relevés, fixant la guerrière avec patience.

 

« Quoi ? » Avait dit Xena, en la clouant de son regard bleu acéré.

 

« Salut », avait dit le barde, en retenant sa propre colère avec difficulté. « Comment ça va ? »

 

Un haussement d’épaules. « Bien. » Puis un froncement de sourcils. « Pourquoi ? »

 

Gabrielle avait un peu soupiré. « OK… qu’est-ce que j’ai fait ? » Finit-elle par demander. « Ça a dû être un sacré truc, vu comme tu te comportes. » Elle se durcit pour la réponse coléreuse qu’elle s’attendait à recevoir, mais elle décida que c’était mieux que cette fichue bouderie.

 

Mais Xena avait baissé les yeux, et elle avait reposé l’armure sur laquelle elle travaillait, puis s’était frotté les yeux de manière fatiguée. « Désolée… Ce n’est pas toi », répondit-elle d’une voix calme, puis elle s’interrompit un long moment, sa mâchoire bougeant un peu comme si elle luttait pour dire quelque chose. Ou ne pas le dire. Elle finit par soupirer et tourna la tête pour croiser le regard attentif de Gabrielle. « J’ai juste… mal. » Une admission sans précédent. « Et ça me met de mauvaise humeur… Je ne voulais pas passer ma colère sur toi. »

 

La réponse de Gabrielle sortit de ses tripes, alors qu’elle tendait les mains et enserrait le bras de la guerrière pour se glisser plus près. « Qu’est-ce qui s’est passé ? »

 

Maintenant, avec ses défenses baissées, le barde pouvait voir les lignes tendues de douleur sur le visage de Xena, et lorsque la guerrière prit une inspiration pour lui répondre, elle vit le tressaillement. « Allez… Viens par ici et couche-toi. » La panique lui fit battre le cœur, surtout quand sa compagne ne discuta pas pour la première fois, mais se laissa emmener à leurs couchages au lieu de ça et s’installa sur le sien, posant la tête sur le manteau plié qu’elle utilisait comme oreiller, avant de fermer les yeux. Et Gabrielle pouvait voir les muscles de sa mâchoire soudain saillir sur sa peau bronzée alors qu’elle la serrait.

 

« Xena… » avait-elle dit doucement, en ayant mal pour elle. Elle avait tendu une main prudente pour caresser doucement le bras de la guerrière, sentant le mouvement tendu du muscle sous la peau, jusqu’à ce que Xena ouvre enfin les yeux et la fixe.

 

« C’est rien… de terrible… » Elle avait soupiré. « Je me suis étiré quelque chose… » Une main toucha son côté. « Ça me fait mal de respirer… de bouger. » Son visage montrait maintenant du regret. « Désolée que tu aies pensé que c’était quelque chose que tu avais fait… dieux… Gabrielle… Je ne voulais pas te faire ça. » Elle se reprit. « Tout va bien… ça fait juste un peu mal. »

 

Gabrielle avait souri en retour. « Ne t’inquiète pas pour ça. » Sachant que, au moins pendant un minuscule, un court instant, elle était rentrée à nouveau. « Reste allongée. » Elle s’était levée et avait pris une des outres pour aller à la source, la remplir d’eau glacée et la rapporter à l’endroit où se reposait la guerrière. « Quand je me suis fait mal à la jambe… tu as dit que le froid, ça aidait. » Elle leva l’outre et dressa les sourcils.

 

Cela lui valut un sourire de Xena. « Tu as une bonne mémoire », admit-elle alors que le barde s’était laissé tomber près d’elle et que leurs regards s’étaient croisés. « Côté droit, juste sous mes côtes. » Sans même faire le moindre geste pour lui prendre l’outre des mains, une douce confiance qui réchauffa Gabrielle.

 

Elle avait placé l’outre avec précaution contre son corps, et vit le petit hochement de tête quand elle le plaça au bon endroit, dès la première fois. Puis elle tira sur la couverture et l’ajusta autour des épaules de Xena, sans quitter la guerrière des yeux. « Comment c’est ? »

 

Xena avait pincé les lèvres dans un sourire à contrecœur. « Parfait. » Puis le regard bleu s’était considérablement réchauffé. « Merci de me supporter. » Elle avait levé son bras et ébouriffé les cheveux de Gabrielle dans une affection joyeuse.

 

« Hé… » Gabrielle avait souri. « C’est à ça que servent les amis, non ? »

 

« C’est vrai », répondit tranquillement Xena. « Ça fait si longtemps que j’ai en quelque sorte oublié comment c’était. »

 

Gabrielle avait senti sa poitrine se serrer, sut que ce qu’elle ressentait se voyait dans ses yeux, et sur son visage. « Je continuerai à te le rappeler », promit-elle dans un murmure. Elle sentit le contact si fantomatique des doigts sur son visage, qui, chaleureusement, soudainement, devint bien trop réel.

 

Et elle avait accepté la demande insistante de son corps et s’était laissée aller à la pression, juste assez pour que Xena le ressente. Et la guerrière ne s’était pas écartée.

 

« Gabrielle ? » La voix de Cyrène coupa doucement court à ses souvenirs, et elle leva brusquement les yeux. « Dieux… Désolée. » Elle rit légèrement. « Je réfléchissais. »

 

« J’imagine bien à quel sujet », répliqua l’aubergiste sur un ton drôle, en riant lorsque le barde rougit. « Ah, Gabrielle… apprécie-le. »

 

Le regard vert croisa le sien avec franchise. « C’est ce que je fais. » Le barde laissa passer un rire léger, puis elle vida sa tasse d’un coup. « Je pense que je vais aller réveiller Ephiny…. Et avoir un mot avec ses Amazones. »

 

Cyrène se leva et sortit un petit plateau. « Tu penses que tu pourrais lui apporter un peu de soupe ? Si c’est trop lourd à porter, je le ferai. » Elle fit une pause. « Ses Amazones ? » Ses sourcils noirs se recourbèrent alors qu’elle regardait la jeune femme mince qui se tenait droite avec prudence.

 

Le regard de Gabrielle se concentra sur elle. « Je pense que je peux y arriver », répondit-elle tranquillement. « Et oui, ses Amazones. Elles peuvent m’emprunter de temps en temps, mais je sais où est ma place. » Elle prit le plateau de Cyrène avec prudence. « Merci, maman. »

 

L’aubergiste lui fit une étreinte prudente. « Prends soin de toi, ma chérie. » Elle hésita. « Où est partie ma fille ? »

 

Le barde sourit. « Elle parle à Solan. »

 

Le visage de Cyrène s’éclaira. « Vraiment ? »

 

Un hochement de tête de la part de Gabrielle. « Vraiment. » Elle prit le plateau et poussa la porte pour l’ouvrir avec le coude, pour entrer dans la pièce principale toujours tranquille.

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