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hurricanewatch6B

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Avis de tempête

Hurricane Watch

 

 

par Missy Good

 

Traduction : Fryda

 

 

Pour les démentis, voir la première partie.

 

**********

Partie 6B

**********

Chapitre 61

 

La nuit tombait à peine lorsqu'elle quittèrent une longue route en pente en direction de la retraite tranquille que Dar avait choisie. C'était en dehors des routes principales dans les montagnes loin des lumières de la ville. Dar amena la voiture près du bâtiment principal au toit abaissé, et coupa le moteur. " Et bien, nous y sommes enfin. "

 

Kerry regardait par la fenêtre, étudiant la scène paisible avec intérêt. De petits chalets étaient éparpillés le long du sol en pente, posées dans des alcôves et entourées d'arbres ; des chemins couverts de cèdres menaient à chacun d'eux. " Ouaip… on peut le dire… bien que je me pose la question après que nous avons dû ranimer notre ami en livrée à l'hôtel. "

 

" Hé… ce n'est pas de ma faute s'il n'a pas supporté la vue d'un bout de peau ", objecta légèrement Dar.

 

" Un bout ? " Kerry gloussa. " Ta jambe était plus longue que son corps, Dar… mais je suis contente qu'on lui ait donné un bon pourboire. " Elle retourna son attention vers l'extérieur. " Mm… "

 

Au loin, elle pouvait voir des bâtiments plus grands et le motel devant lequel elles étaient garées, où des lumières jaunes sortaient des fenêtres, et des rayures de peinture dorée traversaient le sol légèrement gelé. " Ouah… c'est sympa ", dit-elle enfin, en faisant un sourire à sa compagne. " Viens. " Elle ouvrit la portière, réagissant un peu lorsque l'air froid, à l'odeur de pin la frappa au visage. " Brr. "

 

Dar sourit et ouvrit le coffre de l'intérieur, puis sortit du côté du conducteur et ferma la portière, faisant le tour pour prendre leurs sacs. Un portier portant une veste chaude apparut, et elle lui jeta les clés, puis mit les deux sacs sur son épaule et repoussa la tentative de Kerry de prendre le sien. " Ah ah… c'est bon. " Elle fit un signe à Kerry et rit lorsque la jeune blonde ouvrit la porte d'un geste large et s'inclina pour lui faire signe d'entrer. " Merci, m'dame. "

 

Elles entrèrent dans le le bâtiment principal qui était long et tournait à droite après la réception. Des bruits en provenance de l'autre côté du bâtiment indiquaient un restaurant probable, et Kerry pouvait voir un bar à peine éclairé juste devant, à moitié rempli de silhouettes diffuses. Elles allèrent jusqu'au comptoir et Dar donna tranquillement son nom à la préposée.

 

" Ah oui, Ms Roberts… Mon Dieu, nous ne vous avons pas vue depuis une éternité. " La préposée sourit et leva les yeux, repoussant des lunettes demi-lune sur son nez. " Je vous le jure, vous n'avez pas changée. "

 

Dar sourit poliment en entendant le compliment. " Merci, Milly… j'ai du mal à croire que vous vous souvenez de moi. "

 

Un sourcil poivre et sel se dressa à son attention. " Vous êtes plutôt mémorable, vous savez… nous vous avons réservé le chalet le plus éloigné… puisque vous avez dit que vous vouliez un endroit tranquille. " Elle leva les yeux vers Kerry. " Et vous avez amené une invitée cette fois-ci… c'est merveilleux. Bienvenue… Ms Stuart, c'est ça ? "

 

" Kerry. " La jeune blonde tendit la main par-dessus le comptoir. " Ravie de vous rencontrer… cet endroit a l'air fantastique. "

 

Millie se mit à rire. " Et bien, c'est ce que nous pensons aussi… nous sommes là depuis plus de cinquante ans. " Elle plia une brochure puis tendit deux clés à Dar. " Tenez… vous vous souvenez du chemin où vous voulez que je demande à Charles de vous emmener ? "

 

Dar fit une pause puis soupira. " Je me souviens du chemin… merci Millie. " Elle leva les yeux vers l'arrière de la pièce. " Quel est le plat du jour ? "

 

La femme aux cheveux gris se mit à rire. " C'est bien votre veine… c'est du roast-beef. "

 

Dar gloussa. " J'ai de la veine ", répéta-t-elle puis elle cogna doucement Kerry. " Viens… allons nous changer, ensuite je te montrerai les alentours… ils ont un feu de cheminée sympa à l'intérieur. "

 

" Je te suis ", dit Kerry, joyeusement, alors qu'elle suivait, les yeux posés sur tout avec intérêt. Ceci, se dit-elle, allait être génial. Dar connaissait l'endroit, et il contenait de bons souvenirs, décida Kerry, en voyant le sourire enfantin qui menaçait d'apparaître sur le visage de sa compagne. Elles auraient le temps de se détendre, et parler … quelque chose de rare depuis… Mon Dieu. Kerry réfléchit à cela. Elles n'avaient pas eu le temps de se distraire depuis le voyage à Disney World. Même à la maison, elles travaillaient constamment, sans compter les appels au milieu de la nuit, et les complications. Mais pas ici. Elles avaient laissé leurs portables enfermés dans le coffre, et après un peu d'insistance de sa part, les deux bipeurs. " Colleen a le numéro d'ici en cas d'urgence ", avait-elle argumenté. " Et Mark aussi… mais ils savent tous les deux qu'ils ne doivent pas l'utiliser sauf en cas de fin du monde. "

 

Dar avait réfléchi un moment puis avait haussé les épaules, et avait remis l'objet. " D'accord. "

 

Kerry tirait maintenant sur son col en suivant Dar par la porte principale, puis pour descendre le long d'un chemin en pente douce, ses baskets craquant doucement sur les morceaux de cèdres qui le bordaient. " Mm. " L'air était doux, et riche de la senteur du froid et du pin, et du bois sur lequel elles marchaient. " C'est génial. "

 

Dans la semi-pénombre, l'éclat des yeux de Dar était étonnant. " Je suis contente que tu aimes ", dit-elle d'une voix traînante. " J'avais l'habitude de prendre des vacances semestrielles ici… ce n'est pas cher mais c'est une affaire familiale… le mari de Millie était dans la Marine. "

 

Kerry hocha la tête, avant de regarder autour d'elle. " Ça a l'air bien entretenu ", dit-elle. " Ils ont l'air de bien te connaître. " Elle leva les yeux pour voir le sourire tranquille sur le visage de Dar. " Tu es venue ici quand la dernière fois ? "

 

Le sourire s'évanouit. " A Noël, il y a quelques années. " La réponse était calme. " Je venais… je venais juste de casser avec Elana… je présume que j'avais besoin de… temps pour moi. "

 

Kerry passa la main autour de son bras alors qu'elles marchaient l'une à côté de l'autre. " Et bien, j'espère que tu garderas un meilleur souvenir de cette visite ", dit-elle doucement. " Nous… on avait un endroit comme ça sur le lac où nous allions en été, c'était un peu comme ici. " Elle prit une inspiration, consciente de la concentration forte de Dar sur ses mots. " C'était sensé être des vacances en famille… mais en général, c'était le cirque… je veux dire qu'il y avait des gens qui arrivaient, qui partaient… des contrats… la presse… tu vois. "

 

" Mm. " Dar acquiesça, en prenant une fourchette sur le chemin.

 

" La voile était ce que je préférais… mais lorsque nous somme devenues plus vieilles, ma mère s'est assurée que nous n'ayons plus beaucoup de temps pour ça… elle organisait des fêtes, des trucs comme ça… on allait de résidence d'été en résidence d'été… je parlais à des gens avec lesquels je n'avais pas grand-chose en commun, même à cette époque. " Elle soupira. " Et il fallait s'habiller… c'était toujours un défi… Angie et moi, on paradait devant elle et souvent ma tante, pour être sûre qu'on était bien. "

 

" Ça n'a pas l'air très rigolo ", fit remarquer Dar, alors qu'elles arrivaient à un petit chalet entouré d'arbres avec un porche en bois. " Le plus près de cette situation que j'ai vécu, c'était ma mère qui s'assurait que les déchirures de mon jean n'allaient pas me faire arrêter dans un des comtés ruraux de la région. " Elle mit la main sur le dos de Kerry alors qu'elles montaient les trois marches basses, le bois faisant légèrement écho sous leurs pas. " J'ai toujours aimé celui-là. " Elle se retourna et hocha la tête. " Belle vue. "

 

Kerry se retourna également et hoqueta légèrement, en face d'un beau lac éclairé par la lune, reflétant un ciel d'étoiles brillantes. " Oh mon Dieu, oui. " Elle laissa passer un rire de ravissement. " C'est merveilleux, Dar. " Elle se retourna et donna un petit coup à sa compagne. " Très romantique… c'est ici que tu amènes toujours tes amies très spéciales ? "

 

Dar la fixa, un peu tristement. " Non… tu es la première. " Elle se retourna et traversa le porche, ouvrit la porte et fit un geste pour l'inviter à l'intérieur. " Ça a toujours été ma retraite très privée... je n'ai jamais pensé à amener quelqu'un ici avant. "

 

" Mm. " Kerry entra sans un mot, allumant la lumière à l'intérieur. " Oh. " Elle cligna des yeux de surprise. " C'est vraiment bien. " Le chalet était composé principalement d'une grande pièce, avec un lit bien fait contre le mur du fond sous une fenêtre, couvert d'une couette épaisse avec des nuances de rouge et de bleu marine. Il y avait des tapis aux dessins indiens sur le sol et un autre, une peau de mouton épaisse, devant la petite cheminée. Une presse à vêtements était posée devant le mur, et un couloir menait à une salle de bains luxueuse, qui comportait une baignoire profonde entourée de bois chaleureux. " Oh… je pense que j'aime bien ça. "

 

Dar rit doucement. " Oh oui… c'est pratique après une journée de cheval, surtout si tu n'y es pas habituée. Crois-moi. " Elle posa leurs sacs sur le lit et regarda autour d'elle. Rien n'avait changé, songea-t-elle, en allant vers le fenêtre pour regarder dehors vers le lac silencieux et murmurant.

 

" Ah… " Kerry explorait le comptoir contre le mur du fond. " Je vois que nous avons l'essentiel… du café, des cookies, et du chocolat chaud. " Elle regarda de plus près les provisions. " Des tasses et… voyons voir… des sachets de thé… oh… et des petits muffins… c'est vraiment mignon, Dar. "

 

La femme brune jeta un sac rempli près d'elle. " Et bien, on peut y ajouter notre petite réserve. " Elle sourit , sa bonne humeur revenue. " Je n'arrive pas à croire qu'on ait réussi à faire rentrer tout ce chocolat dans le sac. "

 

Kerry ricana et leva le sac en question. " Je ne peux pas croire qu'on ait tout apporté… on va être malades. " Elle renifla le sac. " Mm… d'un autre côté… " L'odeur riche était tentante et elle soupira. " Plus tard… d'abord le dîner ? "

 

" Ça me va ", approuva Dar. " Ces pizzas étaient minuscules. "

 

" Quelles pizzas… oh, celles-là. C'est vrai. " Kerry retira son sweat-shirt et passa un pull épais par la tête, arrangeant les bords sur son jean. " Ouais… c'est bien que je n'en aie pas commandé des petites… on aurait dû en faire des dessous de verre "

 

" On aurait tout aussi bien pu le faire avec celles-là ", se plaignit Dar, en se changeant pour un pull épais aussi, et en se frottant les mains. " Il fait froid ici, Kerry. "

 

La jeune blonde se retourna et posa la brosse qu'elle se passait dans les cheveux ; elle alla vers Dar et lui prit les mains dans les siennes pour les presser contre son corps. " Oh… ma pauvre petite fleur de serre. " Elle gloussa en voyant les yeux bleus s'agrandir d'outrage. " Vous les sudistes… quelles petites natures... il va falloir te trouver des gants. " Elle embrassa doucement les doigts de Dar. " Merci de m'avoir invitée ici, à propos. "

 

Dar lui sourit, visiblement charmée. " Je suis contente que tu aimes. "

 

" Tiens… penche-toi. " Kerry relâcha une main et reprit sa brosse, la passant dans les boucles sombres de Dar pour les ordonner un peu. Les cheveux soyeux craquèrent à cause de l'air sec et restèrent collés à la brosse, s'enroulant également autour de ses mains. " Zut… un bon truc avec Miami… on n'a pas souvent ce genre de truc. " Elle se libéra patiemment, croisant les yeux bleus qui la regardaient avec un sourire alors qu'elle lissait les mèches ébouriffées. " Ça te va bien, les tresses… tu veux essayer demain ? "

 

Dar cligna des yeux, visiblement surprise par la question. " Hum… OK. " Elle se redressa lorsque Kerry eut fini. " Si je peux t'en faire aussi… " Elle mit doucement les cheveux blonds en arrière en une queue de cheval, étudiant l'effet.

 

Kerry sourit, elle aima la sensation des doigts de Dar dans ses cheveux, alors qu'ils effleuraient son cuir chevelu sensible. " D'accord ", accepta-t-elle joyeusement. " On est en vacances, non ? On peut faire tout ce qu'on veut. "

 

" Ouais. " Dar passa un bras autour de son épaule et la poussa vers la porte. " Viens… ils ont un très bon roast-beef. "

 

" Ah oui ? " Kerry passa volontiers un bras autour de sa taille. " Avec de la sauce ? "

 

" Oui, oui… et de la purée d'enfer ", promit Dar. " Et de la crème glacée maison pour le dessert. "

 

Kerry laissa passer un petit gémissement. " Oh, oh… je vais avoir des ennuis ", se lamenta-t-elle. " Je ne résiste pas à la glace maison. "

 

" Ouais… moi non plus. ", admit Dar d'un air penaud. " Mais on est en vacances, tu te souviens ? "

 

" Mm…. C'est juste… et combien d'ennuis peut-on s'attirer en deux jours, de toutes façons ? "

 

 

 

Chapitre 62

 

" Dar ? " La voix de Kerry flotta dans l'obscurité, alors qu'elles rentraient après le dîner. Il faisait encore plus froid et le ciel semblait acéré, la noirceur d'encre parsemée de points de lumière si nombreux qu'on pouvait à peine voir les constellations.

 

" Oui ? " La grande femme marchait à grandes enjambées avec contentement, suçant de la menthe.

 

" Si j'explose, est-ce que c'est couvert par l'assurance ? ", demanda Kerry nonchalamment. " Bon sang, ce que c'était bon… ce chef est positivement dangereux. "

 

" N'explose pas ", objecta Dar. " Tu as une idée de la quantité de paperasses que je devrais remplir si une employée explosait pendant un voyage d'affaires ? Je devrais passer des heures et des heures dans le fichier central. " Elle s'interrompit et passa sa menthe d'un côté à l'autre de sa bouche. " Sans mentionner le fait de devoir expliquer à Mari, comment moi, une dirigeante de la compagnie, j'ai laissé une telle chose se produire. "

 

" Laissé ? " Kerry ricana. " Tu m'as gavée de cerises au marasquin… tu as m'aidée et encouragée. "

 

Un rire léger. " Hmmm… c'est vrai… peut-être que je pourrais dire que je faisais de la recherche et développement. " Elle glissa un bras autour de Kerry et pencha la tête, l'embrassant doucement. " Bon… on a le choix… on peut grimper dans la montagne pour faire du ski… ou aller faire une petite randonnée … ou sortir au lac… ou faire un peu de cheval… qu'est-ce que tu en dis ? "

 

" Et bien. " Kerry la conduisit sur l'escalier qui menait à leur chalet. " Je pense qu'on devrait laisser un peu de repos à ton genou et éviter le ski. " Elle tapota la partie du corps en question. " Et ça vaut aussi pour la randonnée… alors, on peut peut-être faire du cheval le matin et aller faire un tour sur le lac l'après-midi ? "

 

Ça devrait marcher. Dar ouvrit la porte et soupira. " Ça me va. " Elle était toujours allée se promener seule là-haut, jusqu'à des petites grottes dans une solitude pensive. Cela serait étrange d'avoir Kerry avec elle.

 

Elles entrèrent et Dar passa quelques minutes dans la salle de bains avant de ressortir pour trouver Kerry efficacement en train de placer du bois dans la cheminée. " Qu'est-ce que tu fais ? "

 

Posée sur un genou, Kerry se retourna et la regarda. " Je fais du feu. " Elle mit une autre bûche, puis de l'allume-feu. " Je sais que c'est un concept qui t'est étranger, Dar, mais ça peut être très confortable. "

 

" Ça ne m'est pas étranger ", protesta la femme brune. " Je suis déjà sortie de Miami, tu te souviens ? " Elle étudia ce que faisait Kerry. " C'est juste que je n'ai jamais eu à … hum… " Elle remua les mains d'un air descriptif. " en faire un. " Elle s'agenouilla. " Qu'est-ce que c'est que ça ? "

 

" De la mousse. " Kerry l'enfourna entre les bûches. " Ça fait brûler les bûches. " Elle regarda autour d'elle. " Tu vois des allumettes ? "

 

" Hum… non… mais je pense que tu peux utiliser ça. " Dar prit une pierre à feu et un petit marteau sur le manteau de cheminée et les lui offrit. " Pas vrai ? "

 

Kerry gloussa. " Pas dans ce siècle, Dar. " Elle se leva et mit les mains sur ses hanches. " Je pense que nous avons… hé ! "

 

Dar avait étudié les objets, puis penché la tête, et positionné le marteau, frottant la pierre à feu avec une efficacité dévastatrice, envoyant une pluie d'étincelles sur l'allume-feu bien posé. Qui prit gentiment feu et commença à brûler, des petites fumerolles en sortant. Dar étendit les mains avec un air insupportablement contente d'elle. " Comme ça ? "

 

" Fils de… ", dit Kerry d'un ton stupéfait. " Je n'ai jamais vu un être humain du vingtième siècle réussir à faire ça avant. " Elle regarda sa chef. " Et quels autres talents cachés tu as ? "

 

Dar gloussa, remit les outils à leur place et sortit du chemin pendant que Kerry soufflait doucement sur les flammes, et les ramassa en une brume craquante. C'était sympa, se dit-elle, en regardant la lumière vacillante et en tendant les mains vers sa chaleur naissante. Derrière elle il y avait un divan bas, couvert de coussins colorés, et elle s'installa dans un coin,, remuant pour trouver un endroit confortable et levant les yeux lorsque Kerry la rejoignit ; la jeune blonde mit une jambe sous elle en s'asseyant.

 

Elles regardèrent le feu grandir, dans un silence amical qui fut brisé par un mouvement de Kerry, qui prit une inspiration et étudia ses mains, avant de lever les yeux vers Dar. " Je pense qu'on va s'amuser ce week-end ", commença-t-elle à dire, avec précaution, préparant ses mots avec soin.

 

Les lèvres de Dar se tirèrent en un sourire. " Je l'espère… la semaine a été longue, hein ? "

 

" Oui… oui, tu peux le dire ", approuva sa compagne calmement. " Il s'est passé beaucoup de choses. "

 

" Mm. " Un très léger murmure.

 

" Je veux un week-end amusant… je pense que nous en avons besoin toutes les deux. " Kerry sentit qu'elle perdait un peu le contrôle des mots. " Je veux dire… bon… il y a quelque chose dont je voulais te parler avant que nous… je… " Elle s'arrêta, sentant quelque chose, et elle leva les yeux, pour voir une expression de crainte vite voilée dans les yeux de Dar. Son train de pensée dérailla par réflexe. " Pourquoi tu fais ça ? " demanda-t-elle à la place.

 

" Fais quoi ? " répliqua la grande femme, avec une nonchalance forcée.

 

" Pourquoi tu t'attends au pire, tout le temps ? " demanda Kerry.

 

Une rapide secousse de la tête. " Ce n'est pas vrai… qu'est-ce que tu veux dire ? "

 

" Si, tout le temps … je l'ai vu sur ton visage tout de suite… tu ne sais pas ce que je vais te dire, mais tu penses que c'est quelque chose de désagréable… pourquoi, Dar ?" demanda Kerry, très doucement. " J'ai fait quelque chose qui t'inquiète? "

 

Dar eut l'air piégée. Elle tourna la tête et croisa les doigts, les longues phalanges s'emmêlant d'inquiétude. Elle ne s'était pas attendue à ce que Kerry pose la question. Pas comme ça… pas…

 

Pas si vite. " Je… tu n'as rien fait, Kerry ", finit-elle par marmonner. " C'est mon complexe… ça n'a rien à voir avec toi. "

 

" Bien sûr que si. " Kerry se fraya un chemin avec précaution, posant nonchalamment la main sur le genou de Dar. " Si ça fait partie de toi, ça a tout à voir avec moi. " Elle pouvait sentir Dar s'éloigner, et la femme brune soupira d'un air malheureux, croisant les bras, les mains sous ses côtés. " S'il te plaît, parle-moi ", demanda-t-elle, simplement. " Je veux comprendre… je ne veux pas te blesser. "

 

Cela prit un long moment, pendant lequel Dar regardait les flammes, leur lumière vacillante éclairant ses traits anguleux dans un détail exotique. Puis elle prit apparemment une décision, hochant légèrement la tête. Qu'elle tourna, et les yeux bleu ambré regardèrent Kerry sérieusement. " Il n'y a pas de réponse simple. " Elle soupira. " Je ne suis pas très bonne pour parler de moi… j'essaie de ne pas penser à pourquoi je fais ce que je fais la plupart du temps, c'est bien trop étrange. "

 

" Mm ", murmura Kerry pour l'encourager, espérant que lorsque Dar aurait fini de lui dire ce qu'elle avait à lui dire, elle aurait le cran de parler de sa propre affaire.

 

" Je pense que tu sais que je… je n'ai pas vraiment réussi dans mes relations ", continua Dar, embarrassée. " je ne sais pas… c'est probablement ma faute… je suis si obsédée… je suis tellement prise par le travail, et… " Elle s'arrêta et haussa un peu les épaules. " Enfin… je… je pense que j'étais dans ma dernière année de fac… je venais de choisir mon orientation… c'était un choc… " Elle échangea des petits sourires grimaçants avec Kerry. " A tout point de vue… je ne sais pas, je pense que j'ai dû être une rêveuse quand j'étais gamine… j'espérais toujours… que les choses soient comme dans les livres, je pense que je… " Elle s'arrêta, essayant de trouver les mots.

Kerry se contenta de lui caresser la jambe, doucement.

 

" Je… hum… je crois que je suis tombée amoureuse. " Dar le dit comme si elle n'était pas sûre. " Et… j'étais cette gamine idéaliste, et j'avais lu… surtout des contes de fées… je présume que je pensais que c'est comme ça que ça allait se passer… j'ai tout mis dans ça… je me disais que j'avais trouvé mon avenir. " Elle repensa à cet automne doré avec nostalgie. " C'était… je me souviens d'avoir été tellement heureuse que c'était presque du délire. " Une pause. " C'est stupide. Je sais. "

 

Kerry ferma les yeux avec une compréhension empathique.

 

" Enfin… je hum… ça a été génial pendant un moment… elle était plus vieille que moi… très jolie… bonne en classe… je ne pouvais pas le croire… c'était comme si j'appartenais à quelque chose... à quelqu'un pour la première fois de ma vie. " La voix de Dar était douce, presque abstraite. " Je me disais qu'elle ressentait la même chose… alors un jour… je me souviens que c'était un samedi… nous étions censées aller au cinéma. "

 

Kerry prit une noix dans le plat et la tourna dans ses doigts, son corps tendu à l'idée de ce qui allait arriver. " Oui ? "

 

Dar haussa les épaules. " Je lui ai dit ce que je ressentais… que je voulais passer le restant de ma vie avec elle. "

 

Kerry leva les yeux, et lut une douleur venue de loin sur le visage de sa compagne. " Et ? "

 

La réponse fut presque dite avec nonchalance. " Elle a ri. "

 

Le craquement aigu les surprit, faisant un peu bondir Dar. Elle regarda Kerry, qui cligna des yeux, et regarda sa main, dont des écorces de noix tombaient. Elle ouvrit son poing fermé pour révéler une noix écrasée et soupira. " Désolée. "

 

Un petit sourire tendu vint sur les lèvres de Dar. " Enfin… elle a commencé à me dire combien j'étais nulle sous tous les aspects… et comment elle ne voudrait pas être vue avec moi ailleurs que dans les bars du coin où on jouait au billard. " Dar regarda ses mains. " Elle a dit que je n'avais pas de classe, ce qui était vrai, et que j'étais inculte, ce qui était vrai aussi, et que je n'aurais jamais de relation basée sur autre chose que le sexe parce que je n'étais pas capable d'autre chose émotionnellement. " Cette dernière tirade dite avec une grimace désabusée. " Et elle avait raison. "

 

" Non ", lança Kerry avec colère. " C'était une petite conne avec moins de cervelle que Dieu a donné à un hérisson mort, Dar. "

 

La grande femme rit doucement. " Je le sais… maintenant je le sais ", déclara doucement Dar. " Mais la gamine que j'étais à l'époque, non. " Elle eut l'air perdu, et très pâle. " Et je la croyais… je pense que quelque part, je la crois encore ", admit-elle d'une voix basse. " Alors voilà d'où vient cette réaction, Kerry… une partie de moi se souvient de ce qu'elle a dit… et que les choses ne sont jamais permanentes… et que les gens se servent des autres jusqu'à ce qu'ils soient prêts à changer. " Une pause. " Je présume que je.. intellectuellement j'ai compris, mais émotionnellement, j'attends toujours le pire. " Elle finit de parler en regardant tranquillement les flammes. Elle décida de ne pas parler à Kerry de la petite prière qu'elle disait chaque nuit, lorsqu'elles s'endormaient. " Et toi… qu'est-ce qui te tracasse ? " demanda-t-elle, doucement, sachant que c'était le cas depuis un moment maintenant. Au moins elle en parle, songea Dar. Au moins elle me donne une chance d'arranger les choses… si c'est ce qui ne va pas. Elle regarda Kerry tirer sur sa manche et remarqua le tremblement léger de ses mains. Si c'est aussi simple.

 

" Dar. " Kerry prit sa main sentant le froid, et l'embrassa doucement. " Je présume que ça m'amène à mon… petit problème. " Elle s'éclaircit nerveusement la voix. " Je… hum… j'ai vraiment réfléchi à … des choses… et à ce que je… à ce dont j'ai besoin pour vivre… ma vie, je pense. "

 

Dar la fixa, avec une expression ouverte et hantée. " Oui ? " Sa voix se brisa et elle se demandait ce qui allait arriver.

 

" Et… tu vois, j'ai ce… je ne suis pas sûre de savoir comment tu appellerais ça… peut-être que c'est la façon dont j'ai été élevée… je ne sais vraiment pas. " Elle inspira de nouveau. " Mon Dieu, c'est vraiment pas facile… je ne sais pas ce qui ne va pas chez moi… je pourrais juste vider mon sac. " Elle se leva et fit les cent pas, essayant visiblement de se détendre. " D'accord. " Elle se retourna et vit les yeux bleus arrondis d'appréhension. " Oh Dar… ne me regarde pas comme ça… on dirait que je vais te dire que je suis en fait un mec, ou un truc comme ça. "

 

Cela brisa la tension et Dar réfréna un rire de soulagement. " Désolée… mais la façon dont tu fais les cent pas… Mon Dieu, Kerry, ça me stresse rien qu'à te regarder… qu'est-ce qui ne va pas ? " Elle déglutit. " Je pensais que peut-être… je pensais que tu étais peut-être encore en colère pour la semaine dernière… ou… "

 

" La semaine der… oh. " Kerry soupira en y réfléchissant. " Tu sais ce qui me tracassait ? " demanda-t-elle sérieusement. " Tu ne m'en as pas parlé . "

 

Dar cligna des yeux. " Pas parlé… pas parlé de quoi ? "

 

" Tu as démissionné… tu as tout simplement démissionné par ma faute et tu ne m'en as pas parlé ", lui dit Kerry, en ponctuant chaque mot d'un coup sur la poitrine. " Ça m'a rendue furieuse. "

 

" C'est vrai ? "

 

" Bien sûr que oui ", l'assura Kerry. " Nous sommes partenaires, non ? "

 

Un hochement de tête.

 

" Les choses que tu fais me touchent, Dar… ça m'a particulièrement touchée… j'aurais dû prendre part à la décision ", lui dit Kerry. " Ou… au moins… tu aurais pu me donner une chance d'essayer de te faire changer d'avis. "

 

Dar garda le silence, réfléchissant aux mots de sa compagne. Faire participer Kerry à la décision ne lui était jamais vraiment venu à l'esprit. Elle avait considéré que c'était à elle de la prendre, comme d'habitude. C'était son boulot, et sa carrière après tout, non ? On ne pouvait pas s'attendre à ce qu'elle prenne une décision en comité, même un comité aussi proche et intime qu' entre Kerry et elle.

 

Cela serait impensable. Elle leva le regard vers les yeux verts sérieux qui la regardaient. " Ça a été une réaction sur le vif, Kerry… j'avais les faits, je connaissais mes options… et je l'ai prise. " Elle regarda la lueur de déception colorer le regard de la jeune blonde. " Je ne peux pas garantir que je ne le referais pas, dans les mêmes circonstances " Elle s'arrêta un moment, puis soupira. " Mais j'essaierai de garder à l'esprit que j'ai une responsabilité envers toi… et que tu as un droit de regard sur ce qui m'arrive. " Une autre pause. " Nous arrive. "

 

Ça ira pour l'instant, décida Kerry. " D'accord. " Elle réarrangea les cheveux désordonnés sur le front de Dar. " C'est dur pour toi, non ? "

 

Dar hocha la tête. " Très dur. " Elle soupira. " Mais j'essaierai. " Une pause. " Bon… c'est ça qui te tracassait ? " Elle se sentit un peu fière d'avoir deviné… la communication n'avait jamais été son fort et elle le savait.

 

" Hum… non. " Kerry s'arrêta, lui faisant face. C'est maintenant ou jamais… lâche-toi, Kerry, et vas-y ! Elle hésita, puis fit deux pas en avant, et s'agenouilla aux pieds de Dar, posant une main sur le genou de la grande femme pour garder l'équilibre. " Il y a ce truc au sujet de l'engagement. "

 

Un double battement de cœur. Mon Dieu… elle sait que je n'ai jamais été dans une relation à long terme… peut-être qu'elle… mon Dieu. Les yeux de Dar balayèrent son visage avec vivacité, puis un sourcil se leva légèrement. " Ah bon ? " murmura-t-elle doucement. " Hum… je veux dire que… ben… oui, je sais que tu es très… hum… tu sembles avoir été ce genre de personne très engagée et très loyale… Kerry, de quoi s'agit-il exactement ? " Si sa compagne avait un problème avec elle, elle voulait le savoir tout de suite. " Dis-moi les choses clairement. "

 

La jeune blonde se gratta la mâchoire. " Hum. " Maintenant qu'elle y pensait, tout commençait à lui paraître idiot, et elle hésita, tiraillée entre continuer et… " Ça va te paraître plutôt dingue… " dit-elle en temporisant. " Et… je veux que tu saches que c'est juste…… juste quelque chose que je… " Elle s'arrêta, et fouilla dans sa poche, pour en retirer quelque chose et elle concentra son attention sur les arbres minuscules brodés qui dansaient sur la poitrine de Dar. " OK… écoute… " Elle mit son poing fermé sur l'estomac de Dar, regardant toujours le sweat-shirt avec attention. " J'ai essayé de trouver un moyen de te faire savoir… combien tu comptes pour moi… et combien notre relation compte pour moi. "

 

" D'accord ", répondit Dar, visiblement en eaux profondes. " Tu sais, Kerry… c'est très important pour moi aussi… je pense que tu le sais… ça a changé toute ma vie. "

 

Kerry regarda le sweater. " Dans le bon sens ? " murmura-t-elle.

 

Les longs doigts attrapèrent son menton et penchèrent sa tête en arrière, et elle n'eut plus d'autre choix que de croiser les yeux maintenant devenus sérieux de Dar. " Est-ce que cette question est sincère ? " répliqua Dar " J'espère que non… j'espère que tu connais déjà la réponse. " Elle s'interrompit. " Oui… c'est la meilleure chose qui me soit jamais arrivée. "

 

Kerry réussit à hocher la tête. " Tant mieux ", bredouilla-t-elle doucement, en enroulant les doigts de Dar autour de la petite boîte qu'elle avait sortie de sa poche. " Parce que pour moi… c'est toute ma vie… et je veux que tu le saches… je veux que tu saches que même si nous ne pouvons pas passer devant M. le maire et le dire, je veux que ça dure à jamais, Dar… tout ça… dans la maladie comme dans la richesse comme dans la pauvreté, dans le bonheur comme dans les épreuves… et que la mort jamais ne nous sépare… " Ses mots rencontrèrent un silence choqué. " Ce genre de truc. " Une longue pause. " D'accord ? " Bon. C'était la demande en mariage la plus stupide dans toute l'histoire du monde lesbien, non ? Peut-être qu'elle aurait dû télécharger ces scripts d'entraînement depuis Internet … Elle regarda sa compagne d'un air malheureux.

 

Il y eut un bruit léger, presque incohérent lorsque Dar recommença à respirer. " K… " Sa voix disparut dans un grincement inaudible, et elle s'éclaircit consciemment la gorge avant de réessayer. " K… Kerry est-ce que… est-ce que tu viens de… " Une autre inspiration. " m… me demander en mariage ?

 

Kerry mâchouilla sa lèvre, essayant désespérément de préparer sa réponse. " Hum… oui… c'est ça. " Elle baissa les yeux. " A genoux et tout et tout. " Au moins, elle s'est rendu compte de ce que c'était… bon point, Kerry. Elle regarda le visage de sa compagne essayer de faire passer plusieurs émotions à la fois. " Je… ce que je voulais que tu saches vraiment, Dar… c'est que… tu ne vas pas te réveiller un beau matin et ne pas me trouver là. "

 

Dar leva la main très lentement et la fit glisser le long de la joue de Kerry, prenant sa nuque dans le creux de sa main avec une douceur presque hésitante. " Je ne suis pas sûre de bien savoir ce que j'ai fait pour mériter ça, mais je ne peux pas imaginer une autre chose au monde qui me rende plus heureuse que d'accepter. " Elle tira Kerry à elle. " Viens ici. " Elle prit dans ses bras la jeune femme hautement soulagée, qui grimpa pratiquement sur ses genoux et lui fit une énorme étreinte. " Tu sais, que tu n'avais pas besoin de faire ça… "

 

" Si ", marmonna Kerry dans la laine de son sweater. " Si… parce que je veux que tu comprennes que tu es coincée avec moi, Dar… tu ne vas pas pouvoir te débarrasser de moi, d'accord ? Sauf si tu… je ne sais pas… me jette du haut d'une falaise ou un truc comme ça. "

 

Dar laissa passer un rire douloureux, essayant d'ignorer la larme qui se frayait un chemin sur son visage. " Il n'y a pas de falaise à Miami, Kerry ", répliqua-t-elle doucement. " Mais s'il y en avait, et que tu tombais… je sauterais pour te rattraper. " Elle berça la tête de la jeune femme, lui caressant les cheveux et pressant sa joue contre leur douceur. " Dieu soit loué que tu aies eu le cran de faire ça… ça m'aurait pris soit la moitié d'une vie, soit la moitié d'une bouteille pour le faire. "

 

Kerry regarda vers elle, et elle vit les larmes briller dans la lumière du foyer. " Vraiment ? "

 

Un hochement de tête hésitant. " Je m'étais fait une promesse… de ne jamais plus risquer mes sentiments comme quand j'étais cette pauvre gamine stupide. " Une autre larme coula. " Je ne me rendais pas compte que lorsque ça arriverait… je n'aurais pas le choix. " Dar la regarda avec agitation. " Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie. "

 

Kerry essuya doucement les larmes, sentant un soulagement presque insurmontable la traverser. C'était ce dont elle avait eu peur… que Dar ne veuille pas… ou ne puisse pas… se permettre d'accepter le risque de l'engagement que Kerry lui offrait. Mais peut-être avait-elle raison…. Peut-être n'avait-elle pas le choix.

 

Peut-être que Kerry non plus ne l'avait pas.

 

Elle n'était pas sûre d'en vouloir. Est-ce que tu vas au moins l'ouvrir ? " demanda-t-elle timidement. " Ça m'a pris une éternité pour choisir… j'en voulais un peu comme la mienne, mais ils n'en font plus des comme ça. "

 

Dar glissa la main devant elle et lui tendit. " Tu l'ouvres ? "

 

Kerry s'appuya contre elle, les jambes étalées sur celles de Dar et elle s'assit tranquillement sur ses genoux. " D'accord… " Elle prit la boîte et l'ouvrit, regardant les yeux de Dar accrocher les lueurs du feu reflétées par l'anneau. " C'était un peu… je veux dire… c'est difficile de te choisir une bague, tu sais ? "

 

Dar regarda l'objet, ses yeux suivant le motif Celtique qui entourait un discret diamant carré. " c'est magnifique ", réussit-elle à dire. " Mon Dieu, Kerry… il ne fallait pas… ça a dû te coûter une… "

 

" Je n'en ai aucune idée ", répondit Kerry simplement. " Je n'ai pas regardé les prix… et je n'ai pas encore reçu la facture. "

 

Dar la regarda, la mâchoire légèrement pendante.

 

" Ne t'inquiète pas, c'était moins que la limite de la carte de crédit, Dar ", répliqua-t-elle, en mettant un doigt sur le menton de sa compagne pour lui fermer la bouche. " Arrête… on dirait que j'ai apporté un stade de foot complet. "

 

" Qu… quelle était la limite de cette carte ? " bredouilla Dar. " Bon Dieu… "

 

" Hum… " Kerry était aux anges, maintenant qu'elle connaissait les sentiments de Dar. " Et bien, je ne sais pas vraiment… c'était peut-être la Platinium… il faut que je vérifie. " Elle gloussa presque quand les yeux bleus s'écarquillèrent encore plus. " Oh… calme-toi. " Elle se pencha et déposa un léger baiser sur les lèvres de Dar. " Ce n'était pas si terrible. " Une pause, alors qu'un sourire hésitant s'installait sur la bouche de la jeune brune. " Je crois. "

 

" Kerry. " Dar se rendit compte qu'on était en train de se moquer d'elle. " Bon… " dit-elle doucement d'une voix traînante. " Au moins tu n'auras rien à dire quand je te donnerai la tienne, alors. " Un sourire lent et sexy apparut. " Parce que je n'ai pas regardé les étiquettes non plus, mais je sais que le jour suivant, j'ai reçu au bureau un bouquet de vingt-quatre roses de la part du gars qui me l'a vendue. "

 

Kerry en resta bouche bée ?. " Hein. " Elle leva les yeux d'un air coupable. " Alors c'est de là qu'elles venaient. "

 

" Oui, je pense qu'il… " Dar s'arrêta et regarda sa compagne de près, dont la nuque rougissait lentement. " Tu pensais… quoi ? "

 

Kerry ne savait pas où regarder, alors elle laissa simplement sa tête retomber et ne répondit pas.

 

" Kerrison. " La voix douce l'appela et elle leva les yeux à contrecœur. " Tu aurais pu simplement me poser la question. "

 

La jeune blonde soupira. " La jalousie est une émotion embarrassante, sans mentionner qu'elle est généralement dégoûtante ", admit-elle. " Je n'étais pas très fière de ce que je ressentais. "

 

Dar leva leurs mains jointes et effleura les phalanges de Kerry de ses lèvres. " Non… je sais bien… c'est hum… " Elle frotta la main à laquelle elle ne pouvait résister contre sa joue. " C'est très flatteur ", proposa-t-elle. " De mon point de vue, j'entends. "

 

Le regard de Kerry s'adoucit et s'embruma. " Alors tu pensais à rendre ceci plus formel, hein ? "

 

Dar laissa tomber son regard, ses doigts traçant un dessin léger et nonchalant. " Moi aussi, j'ai ce truc à propos de l'engagement ", finit-elle par répondre, faisant bouger sa gorge. " Je pense que j'ai découvert que j'aimais vraiment faire partie de la vie de quelqu'un d'autre. " Elle fit une pause puis montra son sac. " Tu me passes ça ? "

 

Kerry lui tendit, la regardant fouiller à l'intérieur pour en retirer un petit sac en velours. " Tu la transportes… " Elle bredouilla. " A… avec toi ? "

 

Dar regarda le sac puis leva les yeux et hocha la tête. " Oui… si je pouvais trouver le courage de faire ça… je voulais être prête. " Elle tendit la main. " Vas-y ", ajouta-t-elle simplement. " Je ne suis pas très bonne pour choisir des trucs pour les autres… faire les magasins pour ça, ça a été… une expérience intéressante. " Elle se rappela la conversation. " C'est pour vous, madame ? " " Non… c'est pour quelqu'un d'aussi différent de moi qu'on puisse l'être tout en étant de la même espèce. "

Kerry prit le sac, un peu surprise de son poids, et elle dénoua le cordon en velours, secouant doucement le sac au-dessus de sa main jusqu'à ce qu'une bague en tombe.

 

La pièce devint très silencieuse. " Oh. " Kerry soupira légèrement, respirant avec difficulté. Elle était si jolie. Elle tenait dans sa main, scintillant vers elle, un anneau massif mais élégant, qui se terminait en une rose, dont les pétales délicats entouraient un diamant brillant et de forme arrondie. Elle le poussa légèrement du doigt et regarda l'intérieur de l'anneau où elle repéra des signes gravés. " Dar, qu… " Elle leva les yeux alors que la peau sous son bras devenait très chaude, et elle fut choquée de voir le rougissement profond sur le visage de sa compagne. Les yeux bleus étaient fermement fixés sur le foyer et les narines de Dar étaient légèrement écartées. Elle baissa les yeux de nouveau vers la bague, puis pencha un peu plus la tête.

 

A toi pour toujours

Avec les mots, quelque chose alerta la conscience de Kerry, avec une certitude qui lui donna le vertige. " Dar ", réussit-elle à murmurer.

 

" Oui. " La réponse était claire, et prononcée avec précision.

 

" Je crois que je vais m'évanouir. " Kerry sentit une poigne puissante la rattraper, et elle se laissa tomber, une main serrant fort la bague. Elle flotta un moment dans une brume plaisante, entendant le rire doux et affectueux quelque part dans sa tête. " C'est tellement beau. "

 

" La bague ? " murmura Dar dans son oreille.

 

" Les mots ", la corrigea Kerry.

 

" Oh. "

 

" La bague est superbe aussi. "

 

" Alors… tu l'aimes ? "

 

De douces lèvres lui répondirent.

 

 

 

Chapitre 63

 

 

Tout était trop tranquille. Dar pencha la tête alors qu'une branche d'arbre effleurait la fenêtre, avec un léger grattement. Elle avait oublié combien c'était calme ici, sans le bruit omniprésent du trafic ou des avions.

 

Ou de l'air conditionné. Elle jeta un coup d'œil au plafond avec un léger amusement. L'air conditionné donnait un bruit neutre auquel la plupart des Floridiens étaient subliminalement habitués. Son absence était presque inconfortable, alors que le silence s'abattait sur ses oreilles juste brisé par la respiration légère de Kerry.

 

Sa respiration légère et adorable, qui était aussi chaleureuse que la peau sur le cœur de Dar, alors que la jeune blonde était nichée contre son côté droit, la tête posée sur l'épaule de Dar, et un bras bien enroulé autour de son estomac.

 

C'était agréable et confortable, et elle avait découvert, plus à son étonnement personnel, qu'elle aimait vraiment, vraiment ces câlins.

 

Une révélation. Ses parents avaient été tout sauf physiquement affectueux, même l'un pour l'autre, Dar avait vu une étreinte occasionnelle. Une petite tape sur le dos, bien sûr. Une petite claque sur la jambe, la méthode préférée de son père pour attirer son attention, oui. Mais des câlins ?

Mon Dieu non. En fait, honnêtement, elle ne pouvait pas se rappeler la dernière fois où sa mère l'avait touchée… oh, non, peut-être qu'elle le pourrait, pensa Dar tranquillement. Oui… la première… non, la seconde fois qu'elle s'était cassé le bras… la mauvaise, quand les os sortaient de son bras, et avaient laissé les fines cicatrices droites que Kerry aimait toujours suivre du doigt.

 

Maman l'avait tenue cette fois-là, alors qu'elle essayait si fort de ne pas hurler.

 

Mais ensuite son père était venu et elle avait mordu sa lèvre pour garder les cris en elle, ses efforts récompensés par une petite tape sur la joue, et son approbation. " Ça c'est ma petite fille courageuse. "

 

Dar mâchouilla sa lèvre inférieure en y repensant. Ça avait été une dispute omniprésente entre eux, elle le savait… jusqu'à ce que sa mère abandonne, et lui permettre de suivre ses traces aussi loin qu'elle le pouvait.

 

Ça n'avait pas été facile à observer, elle s'en rendait compte. Elle n'avait jamais été une enfant facile, et son adolescence avait été une longue traînée de bagarres et de passages dans le bureau du proviseur, et de menace d'être virée de l'école. Un des proviseurs avait vraiment été déterminé à se débarrasser d'elle, mais une chose le bloquait vraiment.

 

Elle était une élève studieuse.

 

Ça avait dû les rendre dingues. Le tableau d'honneur, des stages avancés, les meilleures notes. Elle était entrée à la fac avec une bourse académique et avait frustré ses amis, le peu qu'elle avait, par sa capacité à passer de classe en classe sans avoir à étudier beaucoup, et avec peu de préparation.

 

Elle avait décroché son diplôme parmi les deux pour cent les mieux classés… mais à ce point de sa vie, elle s'en fichait. Elle avait jeté son diplôme dans un panier dans sa chambre chez ses parents, et elle avait passé un week-end entier à boire tellement qu'elle n'en avait plus le souvenir.

 

Puis elle était entrée dans l'informatique, et s'était trouvé un premier emploi qui payait assez pour couvrir les mensualités d'une voiture, mieux que son budget de nourriture de merde, et elle avait passé toutes ses heures de liberté sous l'eau, loin de tout.

 

Seule.

 

Kerry remua, bougeant un peu, puis releva la tête et leva les yeux. " Hé ! "

 

Dar soupira puis lui lança un regard affectueux. " Hmm ? "

 

" Pourquoi es-tu encore debout ? " La jeune blonde posa son menton sur la clavicule de Dar. " Tu veux du lait chaud ? " Ses rêves l'avaient réveillée avec un peu de malaise.

 

Un sourire tranquille alors que Dar lui massait légèrement le bras. " Non… je réfléchissais… c'est tout. "

 

" Mm… à quoi ? "

 

Dar hésita puis haussa les épaules, faisant un peu la moue. " Rien de vraiment concret… mes parents… un peu à l'école. " Elle écarta une boucle de cheveux errante des yeux de Kerry. " Rendors-toi… tu avais l'air si paisible. "

 

Kerry réfléchit à ses mots. Paisible. Oh oui, sauf ce rêve où je me réveille et je suis dans une pièce vide… et tu es partie. " Je n'aimais pas vraiment l'école ", dit-elle. " Je n'étais pas très douée… sauf les trucs comme l'anglais ", admit-elle. " J'appartenais à un tas de clubs… le Key Club, les Jeunes Républicains, ce genre de truc. "

 

Dar sourit. " Tu étais une Jeune Républicaine ? " demanda-t-elle. " Je pense que le seul club auquel j'ai adhéré, c'était… hum… " Elle réfléchit. " Un club de cheval ou un truc comme ça… j'étais dans un tas d'équipes sportives au lycée. "

 

" Oh sûr… ça, c'est une surprise. " Kerry lui sourit, puis son expression changea. " Pas moi… je voulais jouer au softball, mais… " Elle s'interrompit au souvenir, puis soupira. " J'aurais sûrement été nulle de toutes les façons. " L'horreur de sa mère rien qu'à la pensée. " Je me suis retrouvée à jouer au golf. "

 

" Je suis sûre que tu n'aurais pas été nulle ", objecta Dar, doucement. " Tu as une bonne coordination œil- main… et un joli style à la course… tu aurais été bonne ", analysa-t-elle. " Je n'ai jamais eu de patience pour le golf… comment tu pouvais supporter ça ? "

 

Kerry la regarda en silence, puis elle laissa calmement passer une expiration. " Tu sais quoi, Dar ? " dit-elle doucement. " Tu veux savoir la première fois où on m'a dit que j'étais capable et intelligente ? " Elle n'avait aucune idée de pourquoi elle se lançait là-dedans, sauf que la nuit avait été propice aux vérités, et que ça, ça lui pesait.

 

Les yeux bleus la fixèrent avec étonnement. " Bien sûr. "

 

" Tu devrais le savoir ", lui dit la jeune blonde. " Tu me l'as écrit dans un mail. "

 

Dar la regarda avec un silence choqué.

 

" Et tu me connaissais à peine… tu venais de me rencontrer depuis… une demi-heure ? " Kerry bougea, posant la tête sur son poing. " Même les patrons d'Associated… je veux dire, bien sûr… on parlait toujours de moi comme d'une bosseuse… une fille sympa… toujours à l'heure … mais malgré ce qu'a dit Robert, la seule raison pour laquelle j'ai eu ce job, c'est parce que le gars qui l'avait avant moi est parti avec la femme du comptable au milieu de la nuit, et qu'ils avaient besoin de quelqu'un de très accessible, très rapidement. "

 

" Ce n'est pas vrai, Kerry… tu étais un excellent directeur… ton dossier personnel comportait les plus hautes recommandations ", argumenta Dar. " Tu as des grandes compétences, tu es très motivée, très intelligente, et… et… "

 

Kerry la fixa avec agitation.

 

" Et adorable ", termina Dar, à court de descriptifs professionnels. " Ne me dis pas que c'est la raison pour laquelle tu es venue travailler pour moi… parce que j'ai dit ce qui était évident ? ? ?"

 

Un léger soupir. " Ça a pu te paraître évident, mais ça ne l'était sûrement pas pour moi ", admit Kerry. " Je m'étais fait un petit mot dans la tête pour te remercier pour ça, à propos… je pense que tu as été la première personne dans ma vie qui ait su reconnaître ma valeur … et je ne me disais pas que j'étais une sorte de peluche sans cervelle qui a eu le job à cause de mon père ", dit-elle. " Même Robert, qui m'aimait bien… lorsqu'il m'a placée comme responsable, il m'a dit qu'il n'attendait pas grand-chose de moi… que je devrais simplement essayer de faire marcher les choses jusqu'à ce qu'il puisse trouver un vrai directeur. "

 

Dar la regarda, stupéfaite. " Tu es sérieuse ", murmura-t-elle.

 

Un lent mouvement de la tête. " Qu'est-ce que tu as vu en moi, Dar… que les autres n'ont pas vu ? " se demanda Kerry à voix haute.

 

Dar tendit la main et se frappa la tête. " D'accord, pour commencer, tu avais du cran ", lâcha-t-elle. " Et… et tu as su garder ton sang-froid dans une situation très stressante… et… tu as proposé des plans très bons, et très intelligents pour la reprise… et… et tu m'as dit d'aller au diable, pour l'amour de Dieu… tu sais combien de personnes ont fait ça et s'en sont sorties ? "

 

" Pas beaucoup, hein ? " Kerry absorbait coupablement le compliment comme une éponge.

 

" Pas UNE. " Dar se redressa et regarda sa compagne. " Ecoute… je reconnais le talent quand j'en vois… ça fait partie de mon boulot, Kerry… et crois-moi, mon compteur de talent a explosé quand je t'ai vue. " Elle soupira, intriguée. " Bon sang, Ker… tu pensais que je t'avais embauchée parce que j'avais le béguin pour toi ou quoi ? "

 

Un silence embarrassé tomba, alors que le regard de Kerry tombait sur le dessus de lit, le coup soudain porté à ses propres insécurités cachées revenant avec rancune. " Je… "

 

Dar sentit son cœur s'arrêter. " Tu n'as pas pensé ça ? " demanda-t-elle doucement. " Kerry ? Regarde-moi. "

 

Les yeux verts craintifs se levèrent lentement vers les siens.

 

" Kerry, je t'ai engagée parce que je pensais que tu serais un atout prodigieux pour moi… et une excellente adjointe ", lui dit doucement Dar. " Et j'avais vraiment, vraiment raison… qu'est-ce qui a pu te faire penser autrement ? " Elle se sentit un peu désorientée.

 

Le regard de Kerry plongea de nouveau. " Je… je ne sais pas ", confessa-t-elle doucement. " Peut-être parce que toute ma vie on m'a dit que c'est comme ça que ça marchait. " Son regard grimpa le long du corps immobile de Dar. " Tu n'obtiens pas les choses parce que tu bosse durement, ou parce que tu les mérites… tu les as parce que quelqu'un paye pour toi, ou parce que quelqu'un veut quelque chose de toi. "

 

Dar eut l'air affligée. " Kerry… "

 

" Je sais… " Kerry laissa retomber sa tête sur la peau de Dar. " Je sais… ma tête le sait, et mon Dieu… mon cœur sait que c'est différent, Dar… mais parfois, je regarde dans la glace et je ne peux pas m'empêcher de penser… pourquoi moi ? " Elle releva la tête. " C'est comme si j'étais dans un conte de fées… et un jour, la méchante sorcière va venir et bouger sa baguette, et je serai de retour à la maison… ou tu te fa… fatigueras de moi… ou… " Elle cligna des yeux, et des larmes frappèrent l'épaule de Dar. " Je ne peux pas m'en empêcher. "

 

Dar soupira de consternation, comprenant un peu plus de choses sur sa compagne. " Kerry… " Elle entoura la joue de la jeune femme de sa main, en voyant les larmes brillantes. " Je pensais vraiment ce que j'ai dit… et je te promets… je te promets que je serai toujours là pour toi… quoi qu'il arrive ", la rassura-t-elle. " Je ne te quitterai jamais. "

 

" Et si je merde au boulot ? " demanda Kerry. " Si je ne peux pas le faire ? "

 

" Ma chérie, je m'en tape ", lui dit la jeune brune. " Si tu veux démissionner, pour aller vendre des prédictions sur Internet depuis l'appartement, ça fait plus que m'aller… ça t'inquiète vraiment ? Tu fais un boulot fantastique. "

 

" Je ne veux pas te décevoir, jamais ", murmura Kerry.

 

Dar mit la tête blonde contre sa poitrine et l'étreignit. " Tu ne le feras pas. "

 

Kerry resta là un moment. " Désolée ", finit-elle par murmurer. " Je ne suis pas sûre de savoir d'où ce petit bout d'insécurité est venu. " Elle joua avec le bord de la chemise de nuit de Dar. " Au milieu de la nuit, en plus… "

 

" C'est pas grave. " Dar massa son dos en petits cercles, espérant que son cœur allait ralentir. " Nous sommes toutes les deux passées par de durs moments "

 

Kerry hocha la tête. " Je sais… ça rend tout ça difficile à croire, hein ? " Elle se remit doucement dans sa position, un bras enroulé autour du ventre de Dar.

 

" Oui, c'est vrai ", admit Dar, en l'entourant de ses deux bras pour l'attirer plus près. " Mais on s'en sortira. "

 

Kerry se détendit contre elle. " Ensemble ", ajouta-t-elle calmement.

 

" Toujours ", confirma Dar.

 

A suivre - 7ème partie

 

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