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hurricanewatch7B

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Avis de tempête

Hurricane Watch

 

 

par Missy Good

 

Traduction : Fryda

 

 

Pour les démentis, voir la première partie.

 

**********

Partie 7B

**********

Chapitre 68

 

L'eau chaude était absolument merveilleuse, décida Kerry, alors qu'elle gigotait pour laisser les jets frapper ses côtes, et qu'elle regardait Dar qui s'approchait en portant deux verres bien frais.

 

Ce n'est pas qu'elle remarquait particulièrement les verres, parce que ses yeux étaient complètement aveuglés par ses hormones, dû au fait que sa compagne se baladait dans le chalet totalement nue.

 

" Tiens. " La femme brune soupira, en lui tendant un verre, et elle s'assit, étirant ses longues jambes et sa tête reposant au bord de la baignoire. " Bon sang, ce que ça fait du bien. " Elle fit une pause, attendant une réponse, puis elle jeta un coup d'œil par-dessus à cause du silence. " Kerry ? "

 

" Désolée. " La jeune blonde prit une gorgée de champagne frais et l'avala. " Je réfléchissais. " Elle remua les orteils d'aise et soupira. " Je suppose que ça aurait pu être pire… on aurait pu aller skier. "

 

" Alors c'est sûrement moi qui serais rentrée dans un arbre ", dit Dar. " Comment va ton épaule ? " Elle regarda d'un air inquiet la partie bien musclée en question, examinant le bleu qui couvrait le bras de Kerry. " Tu es sûre de n'avoir mal nulle part ailleurs ? "

 

" Dar, je peux te poser une question ? " Kerry la regarda. " Comment quelqu'un d'aussi désintéressé de sa personne peut-il être aussi diablement intéressé à la mienne ? "

 

La grande femme s'interrompit et fit marche arrière en silence. " Désolée ", murmura-t-elle. " Je ne me rendais pas compte que je t'ennuyais. "

 

Kerry l'étudia, un peu perplexe. " Non… ça… ça n'a pas…ne m'ennuie pas, je ne m'attendais simplement pas à … ça… de ta part. "

 

Dar hocha un peu la tête, et prit une gorgée de sa boisson. Pour dire la vérité, elle savait elle-même à peine pourquoi elle se sentait aussi inquiète. La jeune femme allait apparemment bien, alors elle devrait laisser tomber et la laisser tranquille… après tout, c'est exactement ce qu'elle voudrait à la place de Kerry, non ?

 

Tout à fait. Elle détestait que les gens fassent des histoires autour d'elle, et voilà qu'elle…en faisait plus que n'importe quelle concierge d'immeuble. Pas étonnant que Kerry était ennuyée. Elle se détendit avec effort, et ferma les yeux, essayant de retrouver la bonne humeur qu'elle avait au déjeuner.

 

Elle fut surprise lorsqu'un corps chaud se cala autour d'elle sans prévenir, et ses yeux s'ouvrirent soudainement d'étonnement, pour voir deux yeux vert clair la regarder de très près. " Euh… salut… "

 

" Salut ", répondit Kerry avec une expression de calme excuse. " Désolée… j'ai pensé ça parce que tu détestes tellement que les gens soient autour de toi, que tu t'attends tout naturellement à ce que les autres se relèvent et prétendent que les blessures ouvertes du crâne ne sont que des égratignures. "

 

" Non ", reconnut tranquillement Dar. " Je ne m'attends pas à ça du tout. "

 

C'était une reddition calme et volontaire, elle le savait. " Bien… alors tu peux me prendre dans tes bras, s'il te plaît… je me sens vraiment comme du papier mâché… mes jambes me tuent, et mon dos tout entier a l'air de jouer de l'accordéon. " Kerry soupira. " Et quel genre de médicaments as-tu apporté qui pourrait y faire quelque chose ? "

 

Dar sentit un sourire curieux passer sur son visage, alors qu'elle posait son verre et entourait sa compagne de ses bras, puis la soulevait, la berçant doucement dans l'eau clapotante. " Laisse-moi m'occuper de la tension dans ton dos alors ", répliqua-t-elle, alors que la jeune blonde nichait sa tête contre l'une des épaules de Dar. " Mets simplement tes bras autour de ma… oui. " Elle étira doucement le corps de Kerry, travaillant sur les muscles tendus d'une main tout en la soutenant de l'autre. " J'ai du Percogesic… c'est un antalgique et un relaxant musculaire… qu'est-ce que tu en penses ? "

 

" Ça paraît génial ", marmonna Kerry. " Mais je me sens déjà bien mieux… je pense que tu es un super-médicament toi-même, Dar. " Elle se blottit un peu plus, absorbant la chaleur propre et teintée de chlore de l'eau, et la douceur encore plus chaleureuse de la peau dans laquelle elle se nichait.

 

Dar ressentit un soulagement sincère. " Et bien… j'en doute… ", blagua-t-elle. " La Sécurité Sociale ne m'approuverait certainement pas, ça c'est sûr… mais on va te sortir de là et te mettre un peu plus à l'aise, d'accord "

 

" OK ", approuva Kerry aimablement. " Qu… Dar ! " Elle s'aggrippa fermement alors qu'elle était soulevée hors du Jacuzzi. " Arrête ça… tu vas te faire mal au genou ! "

 

" Nan. " Dar sortit de la baignoire avec précaution. " Attrape cette serviette ", dit-elle, puis elle porta Kerry dans le chalet gentiment chauffé, et la posa sur le lit. Elle s'agenouilla en prenant la serviette. " Reste calme. Ça ne va pas te mordre. "

 

" Ma… ", bredouilla Kerry, puis elle se rendit, se détendant lentement alors que Dar la séchait doucement.

 

C'était remarquablement érotique, et elle avait beaucoup de mal à ne pas bouger les mains, alors que le tissu doux, presque rugueux de la serviette effleurait une peau devenue soudain sensible. Elle devait se retenir pour ne pas réagir, se retenir pour laisser Dar prendre totalement le contrôle.

 

Pour lui faire totalement confiance.

 

Sa respiration se ralentit, et la laissa prendre conscience de la présence toute proche de Dar, sentir la chaleur alors que sa peau encore humide effleurait la main de Kerry. Elle pouvait entendre le souffle léger, et les sons murmurants des cheveux de Dar alors qu'ils glissaient sur ses épaules nues. Elle pouvait la sentir, cette odeur inimitable, faiblement teintée de musc qui collait à la peau de son amante, et l'odeur de chlore de l'eau. Son monde s'immobilisa pendant un instant parfait.

 

Et puis des lèvres touchèrent les siennes, et la chaleur rugueuse de la serviette fut remplacée par des touchers connaisseurs qui tracèrent un chemin sur sa peau, apportant un frisson d'anticipation dans leur sillon. Elle ouvrit lentement les yeux pour voir ceux de Dar tournés vers elle, un sourire taquin sur les lèvres. Un long doigt se leva et se posa sur son nez. " Ne bouge pas ", lui dit doucement Dar en se levant et en allant vers leurs bagages, avant de revenir avec un flacon et une tasse d'eau. Elle s'agenouilla de nouveau et sortit deux cachets qu'elle tendit à Kerry. " Tiens. "

 

Kerry la fixa, hypnotisée. " J'en ai vraiment besoin ? " demanda-t-elle doucement. " Je n'ai plus mal. " Elle tendit la main et dépassant les cachets, elle la posa sur la joue de Dar. " C'est de toi que j'ai besoin. "

 

Dar posa le flacon sans la lâcher du regard, et se laissa descendre sur le lit ; étirant son corps près de celui de Kerry, elle posa la main sur son estomac. Elle sentit les muscles se contracter sous ses doigts, et elle regarda les yeux verts s'obscurcir au si léger toucher. " Très bien. " Elle se pencha et effleura de ses lèvres la douce courbe d'un sein. " Mais je ne peux pas te garantir que ça va être relaxant. " Elle remonta, sentant l'inspiration soudaine alors que Kerry ressentait la pression excitante. " Tu te sens d'attaque ? "

 

Elle laissa finalement ses mains faire, et elles cherchèrent la présence proche de Dar avec avidité, la tirant près de son corps grondant de plaisir.

 

" Je présume que ça répond à ma question. " Dar eut un rire profond et succomba à la traction insistante, sentant la chaleur d'une connexion qui la tirait plus près, et encore, jusqu'à ce qu'elle puisse jurer que…

 

Qu'elles n'étaient que deux moitiés d'un tout.

 

Bien sûr que tu l'es, lui murmura son esprit, alors qu'elle se laissait aller et que sa passion la submergeait ; elle entendit un gloussement léger et connaisseur quelque part au plus profond de son esprit.

 

Chapitre 69

 

" Tu es calme, tu ne dis rien ", commenta Kerry, en jetant un coup d'œil à Dar qui montait l'escalier jusqu'à l'accueil. Ses mains étaient fermement enfoncées dans ses poches à cause de l'air froid et sa respiration faisait des petits nuages de vapeur.

 

Dar avait aussi caché ses mains, et elle reniflait un peu à cause du froid. " Je ne suis pas une personne bavarde habituellement ", répondit-elle doucement. " Je réfléchissais, c'est tout. " Elle tendit la main et tira la lourde porte pour l'ouvrir, puis elle pencha la tête pour indiquer à Kerry de la précéder.

 

" Tu fais toujours ça ", dit Kerry. " Ouvrir les portes. "

 

" Et bien… il faut bien, Kerry… sinon on se cogne dedans et on prend plein d'échardes sur le visage ", répondit la grande femme en riant. " Comment va ton épaule ? "

 

" Elle est un peu raide, mais ça va ", répondit Kerry. " En fait… " Elle rougit un peu et se rapprocha. " Mes fesses me font plus mal. "

 

Les yeux bleus brillèrent un peu. " Tu t'es probablement abîmée le coccyx. " Elle tapota doucement l'endroit. " Il va falloir que je te trouve un coussin au bureau pour une semaine ou deux. "

 

Elles allèrent à la salle à manger, déjà à moitié pleine de clients installés un peu partout aux tables. Une table près de la fenêtre était libre, et elles s'y installèrent, admirant la vue des derniers rayons de soleil par dessus le lac. La pièce était faiblement éclairée, des appliques étaient posées pour ressembler à des candélabres et à des torches, et elles irradiaient une lueur chaleureuse et rougeoyante plutôt qu'une lumière crue. Un feu craquait joyeusement au fond, et donnait une atmosphère rustique.

 

" Ça sent drôlement bon ici ", dit Kerry, alors que leur serveur arrivait, en portant un panier de biscuits fraîchement cuits et chauds, avec un bol de beurre doux. " C'est le bois qu'ils mettent dans le feu ? "

 

Dar regarda de ce côté, en piquant un biscuit à la levure avant de le casser en deux. " Hum… si c'est du noyer, alors oui. " Un minuscule sourire apparut. " Tu sais, ce truc de l'hiver, c'est pas si mal. " Elle tira sur son col. " Sauf que cette laine me rend dingue. "

 

Kerry se mit à rire. " Ben, ce pull te va vraiment bien… même s'il te chatouille le menton. " Le pull à col roulé, d'un bleu électrique riche et solide faisait ressortir la couleur de ses yeux comme rien d'autre au monde et entourait merveilleusement son visage angulaire.

 

Dar parut apprécier le compliment. " Toi aussi, tu es très jolie. " Elle lui rendit, en regardant l'association de couches de coton et de sweat-shirt. Le visage de Kerry avait pris une légère teinte colorée à cause du vent, et ses cheveux clairs étaient tirés en arrière en queue de cheval, avec quelques mèches qui s'échappaient autour de ses oreilles rosies.

 

Qui rosirent encore plus à ces mots, quelque chose que Dar trouva éminemment adorable. " Je suis contente que notre vol ne soit qu'à huit heures demain matin… ça nous laisse toute la journée ", dit-elle. " Tu vas m'apprendre à naviguer demain matin, hein ? "

 

" T'apprendre ? Dar, tu as été sur l'océan toute ta vie… qu'est-ce que tu veux dire par t'apprendre ? " protesta Kerry, en souriant pour remercier le serveur qui posait un verre de bière locale mousseuse devant elle, et un autre devant Dar.

 

" Hum… " Dar prit une gorgée et leva les sourcils. " C'est pas mauvais… hum… je peux naviguer sur n'importe quoi qui utilise des produits pétroliers, et je me suis même assise aux commandes de quelque chose qui utilise… " Elle s'interrompit, et remua la tête. " Une forme plus ésotérique de fuel, on dira… mais je n'ai jamais fait de la voile. "

 

" Vraiment ? " Kerry réfléchit à ça. " Esotérique ? Je ne… " Elle se souvint de la branche dans laquelle le père de Dar avait servi. " Oh… oh… je vois… bien… " Une pause. " Ils ne t'ont pas laissée diriger un sous-marin, si ? "

 

Dar leva un doigt vers ses lèvres. " Chhhuut… je n'avais pas de permis à l'époque. "

 

Kerry se couvrit les yeux. " Oh… je me sens soudain si… siiiiii… en sécurité… " Elle soupira.

 

" Je n'ai rien touché ", objecta Dar doucement. " Et je conduis bien, tu le sais. "

 

Leur conversation fut interrompue par l'entrée d'une famille nombreuse, qui prit une table pas très loin d'elle. Le père était plutôt âgé, aux cheveux gris et trapu, vêtu d'une chemise en coton et de pantalon de toile, et il ordonna aux trois enfants de s'asseoir pendant que sa femme prenait le serveur à part. Les enfants étaient tous minces et très bien habillés, et la mère portait, de manière incongrue, une étole en vison sur ses épaules.

 

Dar renifla en prenant une gorgée de sa bière, puis elle jeta un coup d'œil et vit l'expression pensive sur le visage de Kerry. Elle tendit la main et en couvrit celle de la jeune blonde, entourant légèrement les doigts. " Hé ! "

 

Les yeux verts se tournèrent vers elle, puis s'y fixèrent.

 

" Des souvenirs ? " devina Dar.

 

" Quelque chose comme ça ", reconnut doucement Kerry. " Lorsque nous étions plus jeunes, nous allions dans une retraite chrétienne dans la région nord du lac … c'était un peu comme ici, sauf que le but c'était d'enseigner la Bible, et comment fonder une famille. " Elle laissa passer un rire léger et amer. " Fonder une famille… quelle bonne blague… c'était juste une bonne excuse pour nous coller tous dans un endroit où on pouvait nous prêcher pendant une semaine… et nous reprocher nos péchés. "

 

Dar tressaillit. " Toutes les familles ne sont pas comme ça ", dit-elle à son amie, en pressant les doigts qui bougeaient nerveusement.

 

Kerry laissa tomber son regard sur leurs mains. " Je sais. " Elle leva les yeux. " Mais quand je vois des gamins comme ceux-là… " Elle tendit la tête vers la famille. " Je me demande toujours. "

 

Dar étudia les enfants calmement, notant les regards presque furtifs alors qu'ils regardaient autour d'eux. La fille la plus grande avait probablement autour de seize ans, et le plus jeune autour de dix, reconnut-elle. Alors qu'elle réfléchissait, la plus vieille se mit à regarder vers elle, et leurs yeux se croisèrent brièvement. La fille baissa immédiatement les yeux et une rougeur fit son chemin, évidente sur son visage.

 

Un sourcil brun se dressa, alors que Dar se rendait compte de ce qui avait provoqué cette réaction, puis elle réalisa que Kerry et elle se tenaient toujours la main. Ah. Elle pianota avec sa main libre sur la table. Bien, bien. " Alors. " Elle tira nonchalamment les phalanges de Kerry et les effleura de ses lèvres, puis les relâcha. " De quoi on parlait… de voile, non ? "

 

" Hum… " Kerry eut l'air un peu surprise. " Dar… tu sais, nous sommes en Caroline du Nord. "

 

Dar cligna des yeux. " Je le sais. "

 

Les yeux verts firent le tour de la pièce puis revinrent vers son visage. " Ils ne pendent pas les adultérins par ici ? "

 

Les sourcils bruns se froncèrent pendant un long moment. " Qu… oh. " Dar se repoussa dans sa chaise, interloquée. " Je… " Elle regarda autour d'elle un peu stupéfaite. " M… "

 

Kerry cacha un sourire derrière sa main. " Dar… Dar…. Détends-toi… je… ne voulais pas dire… " Elle se couvrit les yeux et sentit sa peau se réchauffer. " Je voulais juste… je voulais te charrier, c'est tout, pour quelqu'un qui n'aime pas trop les démonstrations publiques. " Elle regarda vers sa compagne avec hésitation. Le visage angulaire était très calme, alors que Dar encaissait les mots, puis une expression incroyable prit le dessus. " Dar ? "

 

" Je… " Dar lâcha un soupir. " Je ne pensais pas non plus que je le faisais. " Elle croisa les mains et les étudia. " Je suis désolée… je ne me rendais pas compte que ça te dérangeait. " Sa voix était ferme et nonchalante.

 

Mais Kerry avait appris quelque chose à propos de sa compagne pendant tous ces mois. Quelque fois elle disait ce qu'elle pensait que la personne à qui elle parlait voulait entendre, plutôt que ce qu'elle pensait au fond d'elle-même, et cela se voyait par des mouvements subtils dans ses gestes et ses mouvements le langage de son corps.

 

Comme quand les muscles de sa nuque se relâchaient, et que ses épaules tombaient un peu. Ce n'était pas un affaissement, mais Kerry pouvait le voir malgré tout. " N… non, ça ne me dérange pas… " Elle hésita, en choisissant ses mots avec précaution. " J'aime quand tu me touches… tu n'as aucune idée de comment je me sens spéciale. " Elle regarda la tête brune se lever, et les yeux bleus méfiants se tournèrent vers elle. " Je pense que je ne suis simplement pas habituée à être visible. "

 

" Visible ? " répéta Dar.

 

" Oui… Je hum… " Kerry remua les pouces. " Je me suis forgée une pratique pour attirer le moins d'attention sur moi que possible… c'était une sorte de réflexe de survie. "

 

" Oh. ", murmura la jeune femme brune. " Je n'avais jamais pensé à ça. " Elle joua avec son petit pain. " Je me suis toujours fichue de savoir si j'attirais l'attention ou pas. "

 

Kerry posa son menton sur sa main et fixa sa compagne à l'attraction magnétique. " Non. Oui… je parie que non ça ne m'étonne pas ", dit-elle d'un ton désabusé. " Mais ça va me prendre du temps pour surmonter ça. "

 

Dar se mordit la lèvre, avec l'air d'une gamine punie et privée de dessert. " Désolée… je… je ne… le faisais pas exprès, je voulais juste… " Bon sang, j'aurais dû me rendre compte… qu'est-ce qui ne va pas chez moi bon sang ? " Je vais essayer de surveiller mes mains à partir de maintenant. "

 

Kerry sentit un coup brutal la frapper dans la poitrine, à entendre le ton dégoûté d'elle-même dans la voix habituellement neutre de Dar.

 

Le dîner fut calme, et Kerry remarqua qu'aucune d'elle ne mangea beaucoup. Elle tira sur la fermeture-éclair de sa veste et suivit Dar qui se dirigeait vers l'avant de l'accueil, vers l'endroit où la course de foin se formait, un léger bruit de rires provenant de l'endroit où se trouvaient les gens qui attendaient. Une charrette de foin s'y trouvait, avec deux grands chevaux attelés, leurs yeux doux et placides regardant la foule avec plus ou moins d'intérêt.

 

La famille avait décidé de venir, ainsi que six ou sept autres couples, dont deux avec des enfants. Kerry sautilla un peu à cause du froid, tout en les regardant s'attrouper, attendant que l'ouvrier leur permette de grimper sur la charrette.

 

Dar se tenait calmement en arrière, les mains dans les poches, une expression d'intérêt poli sur le visage. Sa respiration provoquait un petit nuage de buée, et alors que Kerry gardait un œil discret sur elle, le nuage redoubla, alors qu'elle laissait passer un profond soupir.

 

" Très bien, les gars Ok, tout le monde… à bord… on veut aller au campement rapidement parce que le temps va pas se réchauffer. ", leur dit le conducteur chaleureux, en ôtant la chaîne pour baisser la barrière, puis il installa un petit escabeau. " Allez, on grimpe. "

 

Dar et Kerry furent le quatrième groupe à grimper dans la charrette de foin, et elles s'installèrent dans l'un des coins à l'avant, hors du chemin des gamins remuants qui se roulaient dans le foin, en éparpillant pas mal autour d'eux. Dar releva les genoux et mit le bras pour s'en protéger, posant le menton sur son avant-bras.

 

Elle réfléchissait à ce que Kerry avait dit, et elle se mit à regretter la présence des autres couples, qui étaient libres de s'étreindre et de s'embrasser sans crainte de réaction adverse. En fait, les deux couples plus âgés regardaient un couple de tourtereaux avec une expression indulgente sur le visage.

 

A ce moment-là, elle ressentit l'impression que quelque chose de très important lui avait été enlevé, et ça la rendait folle. Autant que l'assomption de Kerry qu'elle n'aimerait pas les manifestations en public. Autant que le froid qui asséchait sa gorge et lui donnait mal au crâne.

 

Elle croisa les bras sur sa poitrine et se pencha en arrière, se laissant glisser dans une mauvaise humeur totale, qu'elle voulait bien reconnaître elle-même. Une partie était dirigée contre elle-même, parce qu'elle aurait dû se rendre compte que Kerry ne se sentirait pas à l'aise d'annoncer leur relation sexuelle aux autres, surtout ici dans ce qu'elle considérait comme un bastion du conservatisme. Une autre partie, parce qu'elle ne s'était même pas rendue compte qu'elle le faisait, ce qui lui fit se morigéner intérieurement d'avoir été aussi concentrée sur elle-même.

 

Le froid la saisit, et elle baissa un peu la tête et le laissa l'envahir, se souvenant de la dernière fois où elle était venue ici.

 

Revivant la douleur, et rebâtissant ses défenses, déterminée à repartir et à ne jamais, plus jamais, laisser quelqu'un l'approcher suffisamment pour se sentir aussi mal.

 

Alors, qu'est-ce qu'elle faisait là, bon sang ?

 

Puis l'autre moitié la frappa sur la tête. Reprends-toi, Dar... elle ne t'a pas repoussée, elle t'a juste demandé un peu de temps pour s'ajuster. Alors calme-toi.

 

Bon, au moins c'était assez facile. Elle regarda d'un œil noir sa respiration visible, serrant les pieds lorsque la charrette démarra, et que les autres occupants se mirent à rire de ravissement. Les chevaux commencèrent à les emmener sur la route, leurs sabots faisant un dessin régulier dans l'air froid et immobile. Arrête donc de te comporter comme une enfant gâtée. Bon Dieu. Dar… qu'est-ce que dirait papa ? Il te botterait les fesses pour te conduire comme ça. " Jolie nuit, hein ? " Elle refoula sa mauvaise humeur et se tourna vers Kerry, choquée de l'effort que ça lui demandait de ne pas tendre la main pour écarter doucement les cheveux blonds sur son visage.

 

La mâchoire de Kerry bougeait et ses sourcils étaient froncés. Elle tourna la tête vers sa compagne avec un mouvement presque ralenti. " Oui, c'est vrai ", répondit-elle d'un air pensif. " Mais il fait froid. "

 

" Ouais. ", admit Dar doucement, en se frottant les bras de ses mains.

 

La jeune blonde étudia les occupants de la charrette, notant le duo roucoulant d'un regard spéculatif. Puis elle prit une inspiration et la relâcha. " Dar ? "

 

" Hmmm ? "

 

Kerry mâchouilla sa lèvre inférieure pendant quelques secondes. " Je l'ai surmonté. Ça m'est passé ", annonça-t-elle. " Je présume que le monde devra étendre son horizon. "

 

Les yeux bleus surpris la regardèrent. " Qu'est-ce que tu veux dire exactement ? "

 

La petite femme bougea puis rampa sur la courte distance qui les séparaient et s'enroula autour du corps de Dar, posant sa tête dans le creux de l'épaule de son amante avant de soupirer. " C'est assez explicite, ou bien il faut que je te suce la langue ? "

 

Dar sentit une éruption de chaleur, alors qu'une rougeur colorait sa peau, la réchauffant rapidement. " Euh… non… non… ça c'est bien… j'ai saisi l'idée. ", bredouilla-t-elle, prise au dépourvu par le soudain changement de comportement de Kerry. Elle passa les bras autour de la jeune blonde et se réinstalla, laissant la chaleur de leurs corps unis chasser le froid de l'air. " Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? "

 

Etonnant, comme une mauvaise humeur pouvait s'évanouir, emportée par le vent froid.

 

Kerry réfléchit un peu à la question en regardant les gens autour d'elles. Après quelques premiers regards surpris, elles furent presque ignorées, ce qui lui allait bien. " Et bien. " Elle prit un brin de foin et le mâchouilla. " J'ai réfléchi à l'inconfort quand tout le monde me regardait et puis je l'ai comparé au confort assuré d'être blottie contre toi, et c'est ça qui a gagné. "

 

" Aussi simple que ça ? " demanda Dar, à moitié incrédule.

 

" En gros, oui ", répliqua Kerry. " Oh… il y avait plus que ça… et je me bats toujours avec ce truc… mais je me suis rendue compte que tu faisais ça depuis que nous… hum… "

 

" Oui. "

 

" Alors… pourquoi est-ce que ça aurait une importance, juste parce qu'on est dans un endroit étranger ? Je sais que j'ai blagué en disant qu'on pendait les gens… mais je me suis rendue compte que si quelqu'un avait un problème avec ça, tu lui botterais sûrement les fesses, alors… " Kerry haussa les épaules. " Que diable ? Je ne me suis jamais rebellée adolescente… il est peut-être temps. "

 

" Oh. "

 

" Peut-être que je pourrais me faire tatouer. "

 

" Euh… " Dar la regarda. " Ne sois pas trop dure avec moi, d'accord ? Et si on commençait avec un autocollant arc-en-ciel pour ton pare-chocs ? "

 

" Je ne sais pas, Dar… ", dit Kerry d'un air songeur. " Un chouette dessin d'artiste, autour de ton nom… juste sur mon… hum… " Elle baissa les yeux.

 

" Euh, Kerry… " Les yeux bleus se tournèrent vers leurs voisins, un des couples plus âgés qui les regardaient avec intérêt.

 

" épaule ", finit par dire la jeune blonde, avec une étincelle dans les yeux. " Je parie que ce gars au comptoir sait où je pourrais en trouver un par ici. "

 

" Très bien. " Dar lui lança un regard. " Maintenant, tu m'écoutes bien, Kerrison Stuart… je ne vais pas rester là sans rien faire pendant que tu te fais tatouer mon nom sur n'importe quelle partie de ton corps dans une arrière-boutique foireuse, tu m'entends ? "

 

Le nez de Kerry se fronça lorsqu'elle sourit. " On dirait ton père quand tu parles comme ça. " Elle la taquina. " Tu le ferais ? "

 

" Me faire tatouer ton nom ? " répliqua Dar.

 

La jeune blonde hocha la tête puis garda le silence.

 

Le visage anguleux devint sérieux, soudain intense alors que les regards de Dar et de Kerry se croisaient et se soutenaient. " Je l'ai déjà ", murmura-t-elle en touchant sa poitrine au-dessus du cœur d'un doigt. " Ecrit si profondément ici, que rien ne pourrait l'enlever. "

 

Kerry se contenta de la regarder, oubliant ceux qui les observaient, son regard s'adoucissant avec la soudaine brillance due aux larmes non versées. Elle commença à parler, puis secoua la tête et l'enfouit contre l'épaule de Dar.

 

Hmmm. La jeune femme brune posa sa joue sur les cheveux clairs de Kerry. Pas mal, pour une garce au cœur de pierre et sans pitié, non ?

 

Un peu plus loin, elle pouvait voir la lueur brillante du feu de camp, qui envoyait des étincelles craquantes vers les étoiles qui scintillaient au-dessus d'elles.

 

 

Chapitre 70

 

Dar flottait bienheureuse dans une poche de confort chaleureux, ses bras protecteurs enroulés autour du corps paisiblement endormi de Kerry. L'air au-dessus de la couverture était froid, mais elle n'avait aucune intention d'en sortir, du moins jusqu'à ce que le soleil prenne sur lui et ne sorte.

 

Mais c'était drôle. Elle aurait pu jurer qu'elles avaient laissé le chauffage allumé la veille au soir. Elle se risqua à ouvrir un œil et étudia le chalet. Une lumière gris neutre arrivait par la fenêtre, et tout était très, très calme. Trop calme, réalisa Dar, tout en regrettant le bruit mécanique léger mais à peine perceptible du climatiseur. Son regard glissa vers le réveil, qui montrait une heure désespérément matinale.

 

Génial. Elle mâchouilla sa lèvre pendant un moment, puis décida que le seul moyen d'avoir de la chaleur dans cet endroit, était de se lever et d'allumer le radiateur, puis de redémarrer le feu. Allons, Dar… secoue-toi… c'est Kerry qui a dû se lever hier, c'est ton tour, se dit-elle fermement, tout en se repoussant de la chaleur de Kerry, et elle fila de l'autre côté du lit. Merde. Le froid la fit frissonner et elle trotta rapidement vers son sac, allumant le radiateur en passant.

 

Elle en tira un sweat-shirt chaud et le passa au-dessus de sa tête, puis elle se frotta les bras. " Brr ", commenta-t-elle doucement. " Il fait un froid de canard. " Mais au moins il y avait un bon stock de bois, et elle en empila un peu dans l'âtre, se souvenant de la manière dont Kerry l'avait arrangé la veille. Elle mit la mousse dans les interstices, puis elle attrapa des allumettes qu'on leur avait données à l'accueil et en alluma quelques-unes, s'assurant que le feu prenait en divers endroits.

 

" Hé… pas si mal. " Elle s'assit devant l'âtre sur le tapis et se réchauffa les mains aux flammes naissantes, plutôt satisfaite d'elle-même. " D'accord… on a de la chaleur… il y a un pot dans lequel je peux faire chauffer de l'eau, et on a du café frais ", se dit-elle mentalement, en hochant doucement la tête. "Ça devrait aller. "

 

En allant vers l'évier pour prendre de l'eau, elle s'arrêta et se contenta de regarder Kerry dormir pendant un long moment. La jeune blonde était enroulée sur le côté, une main sous la tête et l'autre sur la couverture, et son visage était paisiblement détendu dans l'aube naissante. Sa respiration était lente et faisait bouger le tissu, et Dar sentit qu'elle respirait au même rythme, alors qu'elle s'appuyait sur la porte dans un silence pensif.

 

Marrant. Elle soupira et continua, prit l'eau et la ramena vers le foyer ; elle posa le pot sur une petite étagère faite pour ça de toute évidence. Un léger sifflement s'échappa lorsque les flammes s'évaporèrent vers l'extérieur, et elle s'installa dans la chaise confortable, posant ses pieds sous elle et fixant le feu.

 

La lumière joua avec un éclair brillant sur l'anneau dont la présence était encore inhabituelle autour de son doigt, et elle s'aperçut qu'elle le regardait, presque hypnotisée par son étincelle amicale. Elle frotta son pouce sur l'anneau intérieur et soupira, croyant difficilement ce qu'elle voyait.

 

Elle avait passé tellement de temps la dernière fois qu'elle était venue à regarder l'eau, et à se demander ce qu'elle avait bien pu faire au Bon Dieu pour se retrouver déçue à chaque fois quand il s'agissait de ses sentiments.

 

Et maintenant, voilà qu'elle était là, assise à se demander ce qu'elle avait pu faire de si bien au Bon Dieu pour mériter ça. Elle appuya la tête contre le dossier. Et il ne s'agissait pas que de la bague… c'était ce qu'il y avait derrière. C'était l'engagement qu'elle avait cherché toute sa vie.

 

C'était ce que ses parents avaient, et quelque chose qu'elle avait assumé que tous les autres avaient. Bon Dieu, si j'avais su combien c'est rare, peut-être que je serais entrée au couvent. Elle ferma les yeux. La dernière fois qu'elle était venue, elle avait pris la décision de laisser ses rêves derrière elle.

 

Cette fois… elle trouvait le soudain cadeau si écrasant qu'elle savait à peine quoi faire d'elle-même. Lentement, elle porta la bague à ses lèvres et les pressa, sentant une larme unique se dérouler le long de sa joue.

 

Il n'y avait aucun doute que ça la foutait en l'air. Elle le savait… elle savait que ça allait lui rendre le boulot tel qu'elle l'avait pratiqué jusque là difficile au point de le rendre impossible. La douce et aimante influence de Kerry avait détruit ses barrières émotionnelles, faisant tomber des barricades glacées qu'elle avait dressées presque sans effort pendant des années, et maintenant, elle restait avec les mêmes responsabilités, les mêmes buts, mais sans la raison unique et froide qui lui permettait de les atteindre.

 

Elle aurait vraiment préféré que la démission soit acceptée. Surtout maintenant. Elle laissa ses yeux s'ouvrir, et cligna pour en ôter les larmes. Juste maintenant, elle sentait une urgence distincte à foutre en l'air sa maudite carrière, et à filer avec Kerry vers un endroit tranquille, un endroit petit et endormi, et peut-être ouvrir une petite boutique d'ordinateur où la chose la plus excitante qui pourrait arriver, serait quelqu'un avec un virus de secteur de démarrage.

 

Son regard trouva le visage de son amante. Mais ce n'était pas juste non plus pour Kerry. Elle venait de commencer et en plus, elle aimait Miami.

 

Dar soupira. Il faudrait qu'elle attende de voir comment les choses tourneraient, c'était tout. Peut-être qu'elle pourrait changer la façon dont elle faisait les choses.

 

Ouais. Peut-être qu'il allait pousser des crocs aux poules et qu'elles allaient se faire un steak à l'Hippopotamus.

 

Un grattement la sortit de sa rêverie, et elle leva les yeux pour voir le pot trembler sur l'étagère, de toute évidence bouillant. Dar se leva et le retira, en criant un peu lorsque le plastique chauffé lui piqua les doigts. " Aïe… " Elle le posa rapidement, puis prit deux tasses, et mit les filtres coniques dessus, ajoutant des grains du café odorant avant de verser l'eau par-dessus. Ça sentait super bon et elle renifla d'un air appréciateur, laissant les inquiétudes filer pour l'instant.

 

Pas besoin de s'inquiéter de ça maintenant, n'est-ce pas ?

 

Elle prépara le café avec beaucoup de crème et de sucre, puis elle prit la tasse de Kerry et retourna vers le lit, à présent doucement baigné de la lumière couleur pêche de l'aube matinale. Alors qu'elle s'approchait, les yeux verts endormis s'ouvrirent et clignèrent dans sa direction, emprisonnant la lumière dans leur profondeur et faisant ressortir les éclats dorés qui flottaient dans la couleur brumeuse. " Hé ", sortit Kerry doucement, la voix légèrement rauque de sommeil. Elle s'éclaircit la voix. " Qu'est-ce que tu fais debout ? "

 

Dar sourit et s'assit sur le lit, lui offrant la tasse. " On est censés être des durs à cuire à Miami, je protège notre réputation… je me suis levée pour allumer le radiateur ", admit-elle.

 

Kerry s'assit, croisant les jambes et accepta le café. Elle repoussa ses cheveux en bataille de son visage d'une main paresseuse tout en bâillant. " Mm. " Elle sirota la boisson. " Merci, Dar… j'apprécie vraiment ça. " Ses yeux glissèrent vers l'expression tranquillement pensive de sa compagne. " Où est le tien ? "

 

" Hmmm ? " Dar commença à parler puis sourit. " Oh… par-là… j'étais juste près du feu à attendre que l'eau chauffe. "

 

" Mm… ça a l'air pas mal. " Kerry glissa les jambes de dessous les couvertures et se leva, prenant les mains de Dar dans les siennes. " Viens… on y retourne. " Elle garda les longs doigts entre ses mains pendant qu'elles traversaient le chalet, et elle ne les lâcha pas pendant qu'elles s'asseyaient près du feu. " J'ai rêvé de toi. "

 

Dar inspira presque un peu de son café. " Hum… ah oui ? " répliqua-t-elle. " C'était bien ou mal ? "

 

Kerry gloussa en reprenant une gorgée de son café. " Oh… affreux… tu t'étais transformée en lapin géant aux yeux exorbités, et tu sautais partout, en bavant. " Elle regarda par-dessus pour voir les yeux bleus arrondis la regarder. " Je rigole. " Elle mit la main sur la jambe de Dar, la caressant doucement. " C'était un rêve merveilleux… ça n'avait pas trop de sens, mais tu y étais, et moi aussi… et un cheval blanc… et c'était l'été… et il y avait une très belle clairière … " Kerry soupira joyeusement. " Et on riait, on courait dans l'herbe, après le cheval. "

 

Dar sourit. " Ça a l'air marrant… on l'a attrapé ? "

 

" Oui. " Kerry leva leurs mains toujours jointes et embrassa les doigts de Dar. " Et on chevauchait ensemble, comme hier. "

 

Un pincement lui fit penser. " Comment vont les jambes ? " lui demanda Dar. " Toujours mal ? "

 

Kerry plia les cuisses et réfléchit. " Non… juste un peu… mais ça va. Mon épaule aussi ", ajouta-t-elle avant qu'on lui pose la question. " Viens… on prend vite une douche, et on s'habille… j'ai hâte d'être sur l'eau. "

 

" C'est comme si c'était fait. " Dar sourit. " Je peux prendre un panier de brioches et un Thermos… on pourrait prendre le petit déjeuner là-bas… qu'est-ce que tu en penses ? "

 

" Ça me plaît. " Kerry la relâcha et se leva, s'étirant avec volupté, puis elle poussa un petit cri de surprise lorsque Dar l'entoura pour l'étreindre. " Urp. " Elle se sentit soulevée. " Ouaouh. " Mais la prise maintenait doucement sa colonne, ce qui lui parut merveilleux, et elle mit les bras autour du cou de Dar avec un rire léger. Elle pouvait presque sentir l'émotion passer dans son amante, et elle soupira, alors que Dar la reposait finalement. " Bon sang, c'était super. "

 

Dar lui frotta le dos et lui embrassa doucement la tête. " Oui, ça l'était. " Elle joua avec les rayons du soleil, les laissant briller sur sa bague et envoyer des petits éclairs dans toute la pièce. " Allez… on y va. "

 

Chapitre 71

 

Le soleil se déversait sur les eaux bleues frissonnantes, sans un seul nuage à l'horizon, et assez chaud pour repousser la fraîcheur du vent qui traînait sur le lac. Kerry fit tourner le petit bateau d'une main experte, et fit gonfler les voiles, les propulsant sur les vagues, et amenant une fine bruine sur leur peau.

 

Dar était assise à la proue, allongée de tout son long sur un siège capitonné, et le visage tourné dans la brise alors qu'elles pourfendaient les vagues. " C'est génial ", dit-elle dans un soupir.

 

Kerry sourit en poussant la barre et elle vérifia la tension sur la voile. " Ça c'est sûr ", approuva-t-elle, le corps parcouru de vieux souvenirs des nombreuses heures passées sur le Lac Michigan dans des bateaux à peine plus grands que celui-là. " Le plus beau jour de ma jeune vie a été celui où j'ai été qualifiée dans un môle … et il n'y avait personne pour m'accompagner quand je suis sortie. "

 

Dar tendit la main et toucha la voile, tout en regardant les mouvements lents et précis de Kerry. " Tu sais t'y prendre ", dit-elle, en savourant la vue du visage fouetté par le vent de sa compagne. " Et tu as l'air vraiment mignonne. "

 

" Oh ça c'est sûr… j'ai probablement l'air d'un lévrier afghan avec la tête qui dépasse d'une voiture qui roule sur la US 1. " Kerry se mit à rire. " Mais je suis contente que le soleil soit plutôt fort… sinon il ferait vraiment froid. " Elle noua la voile, puis se mit en équilibre et enleva son sweat-shirt épais, ne gardant que son haut de rugby sur son jean. " Ouaouh… c'est mieux comme ça. "

 

Dar fit de même, et enleva son pull brun et le mit sous le siège, elle repoussa les manches de la chemise rouge vif qu'elle portait dessous. " Tu es prête pour le petit déjeuner ? " demanda-t-elle.

 

" Tu parles… j'ai une de ces faims ", lui dit Kerry en approchant le bateau de l'une des petites îles dont le grand lac était parsemé. " Je pense qu'on peut s'abriter du côté sous le vent de ce coin là, jusqu'à ce qu'on soit prêtes à repartir. " Elle étudia le vent. " Il va falloir que je… mais c'est bon… on a tout le temps du monde, non ? "

 

Les mots amenèrent un sourire sur le visage de Dar. " Si. " Elle se rapprocha de l'endroit où Kerry était assise, et elle partagea en deux un muffin aux myrtilles tout frais, en offrant un morceau à la jeune blonde. " Tiens… prends un bout de ça. "

 

" Mmm… " Kerry le captura entre ses dents et le mâcha. " Oooh… tu en as d'autres ? "

 

" J'en ai ", l'informa Dar. " Et j'ai ceux avec les noix que tu aimes bien… et j'ai du pain à la farine de maïs. "

 

La jeune blonde s'arrêta de mâcher. " Du pain à la farine de maïs ? Je ne comprends pas. "

 

" Nordiste ", dit Dar en grognant. " Tiens. " Elle prit une tranche minuscule de pain et y étala du beurre doux et sucré. Puis elle versa un peu de miel par-dessus, et en cassa un morceau, et elle le mit dans la bouche ouverte de Kerry qui attendait. " Essaie ça. "

 

Kerry ferma la bouche et mâcha. " Mmm… " Ça avait une texture plus rugueuse que le muffin et le beurre et le miel faisait un contrepoint sympathique au goût terreux du maïs. " Oh… j'aime bien ça… maintenant je sais pourquoi le Sud a perdu la guerre de Sécession… ils étaient trop occupés à cuisiner. "

 

Dar rit par pur réflexe. " Je ne pense pas que ce soit la vraie raison… mais c'est vrai que nous aimons la bonne bouffe dans le Sud. " Elle alla vers le siège capitonné pendant que Kerry manœuvrait avec art autour de l'une des petites îles, bloquant le vent. Elle descendit la voile et jeta la petite ancre, puis elle se tortilla vers l'endroit où se trouvait Dar, s'appuyant contre elle alors qu'elles tanguaient doucement sur les vagues.

 

Kerry laissa son regard errer vers les cieux au-dessus d'elle, observant un faucon faire des cercles d'un air paresseux. Dar était appuyée près d'elle, prenant des bouchées de leurs bonnes choses et les fourrant dans la bouche de Kerry en partageant de bonne grâce. " Mon Dieu… la semaine a été si longue ", dit la jeune blonde. " Je ne peux pas croire que cela ne fait qu'une semaine que nous sommes revenues de notre voyage en l'Enfer. "

 

" Ben oui. " Dar lui enfourna un autre morceau de pain. " Je suis contente qu'on ait eu quelques jours par ici pour nous détendre. " Elle s'interrompit. " Enfin, on peut dire ça. " Elle gloussa. " A part une chute de cheval ou deux. " Elle sortit une grande bouteille Thermos et dévissa le bouchon, libérant une odeur forte de chocolat.

 

Kerry accepta la tasse de chocolat chaud et donna un léger baiser à Dar. " Ça a été merveilleux… malgré le cheval. " Elle fixa les yeux bleus. " Il faudra qu'on revienne quand on aura plus de temps. " Elles étaient assises au fond du bateau, leurs têtes appuyées sur le dossier du siège et Dar bougea, glissant un bras autour de Kerry pour la rapprocher.

 

Kerry posa la tasse et se tourna à demi, glissant les mains sur la chemise de Dar et enroulant ses doigts dans le tissu, alors que ses lèvres rencontraient volontiers celles qui les cherchaient. Elle se goûtèrent pendant un moment sans respirer, puis elles se reculèrent un peu, alors que Dar tendait la main et caressait le visage de Kerry. " Comme j'aimerais qu'on n'ait pas à rentrer. "

 

Kerry étudia son visage, évaluant l'annonce. " Tu le penses. "

 

Le regard bleu tomba. " Oui. " Dar soupira alors qu'elle regardait l'eau qui faisait des rides. " J'essaie de trouver quelque chose qui me donne envie de rentrer au bureau lundi, et je n'y arrive pas ", confessa-t-elle. " Je ne sais pas si je peux retourner au boulot comme d'habitude. "

 

Kerry pencha sa tête blonde d'un côté. " Dar… je ne comprends pas… je pensais que tu avais arrangé les choses avec Les… il est arrivé autre chose ? " Elle mit une main inquiète sur le bras de sa compagne.

 

Un rire léger. " En quelque sorte. " Les lèvres de Dar se tordirent dans un sourire ironique. " Nous sommes arrivées ", dit-elle doucement. " Je ne pense pas pouvoir mettre ça de côté, alors que je dois encore être la garce de la compagnie. " Elle leva les yeux vers Kerry avec honnêteté. " Il y a ces choses que j'ai faites… que je ne pourrais plus faire maintenant… je ne pourrais plus les faire et te regarder dans les yeux à la fin de la journée. "

 

Kerry se sentit un peu choquée. Elle ne s'était pas attendue à ça, ne l'avait même pas imaginé, vraiment. " Dar… tu ne le sais pas ça… je veux dire… on a à peine eu l'occasion de… "

 

" Je le sais parfaitement, au contraire. " La jeune femme brune l'interrompit doucement. " Je le savais cet après-midi là à Disneyland. " Elle prit la main de Kerry. " Parce que je n'aurais pas vendu mon âme pour un contrat… simplement parce que tu étais là. "

 

Une lente inspiration. Une expiration. " Oh. "

 

" Oui ", murmura Dar. " Ce que tu penses de moi m'importe, Kerry… je n'ai jamais eu à m'inquiéter de ça avant. " Elle enroula ses doigts avec ceux de sa compagne. " Je ne peux pas faire les choses à l'ancienne. "

 

Kerry essaya de relancer son esprit dans l'action. " Trouve un autre moyen alors ", proposa-t-elle doucement. " Nous pouvons le faire… toi et moi. "

 

Une longue pause, alors que le faucon criait au-dessus de leurs têtes, solitaire et royal.

 

Dar finit par cligner des yeux. " Peut-être ", murmura-t-elle. " On verra bien. " Elle sourit. " Ce n'est qu'un autre défi, n'est-ce pas ? "

 

Kerry hocha la tête, profondément soulagée. " C'est ça. " Elle frotta la main de Dar contre son visage. " En parlant de défis, tu es prête à apprendre à naviguer ? "

 

Un sourire élargit le visage de Dar. " Oui. " Elle posa affectueusement la main sur la joue de Kerry. " Apprends-moi. "

 

Chapitre 72

 

" Pfuii ! " Kerry ajusta la sangle de la mallette de son portable et tendit sa valise au préposé pendant que Dar penchait la tête pour écouter son collègue, qui traitait leurs cartes d'embarquement. " On a le temps de prendre un café, Dar… ça te dit ? "

 

La jeune femme brune jeta un coup d'œil par-dessus son épaule et sourit. " Tu parles. " Elle accepta la carte que lui tendait le préposé et rejoignit sa compagne, remontant un peu la fermeture-éclair de sa veste pendant qu'elles prenaient le couloir qui menait à la porte. " Je crois qu'on s'en va juste à temps… tu as vu ces nuages ? "

 

Kerry regarda du côté d'où elles venaient, où des nuages bas et gris obscurcissaient le soleil, et elle hocha la tête. " Ouais… je pense que t'as raison, part'naire. " Elle tapota le dos de Dar. " A moins que je ne me trompe vraiment, tu vas rater une tempête de neige. "

 

Les oreilles de Dar pointèrent. " Une tempête de neige ? " Elle sourit et cogna l'épaule de Kerry avec son coude. " Ce ne serait pas une si mauvaise idée… j'ai toujours voulu faire une bataille de boules de neige ? " Elle laissa passer un soupir, et s'interrompit avant qu'elles ne pénètrent dans le terminal. " peut-être la prochaine fois. "

 

" Tu veux faire une bataille de boules de neige ? C'est bon pour moi. " Kerry sourit, les yeux plissés. Elle mit la main dans le creux du coude de Dar et l'emmena à l'intérieur, évitant une voiturette en marche alors qu'elles allaient vers le poste de sécurité. " Oups… c'est l'heure de la Gestapo. " Elle relâcha Dar et posa la mallette de son portable et son sac à main sur le tapis, puis elle retira sa veste d'un coup d'épaule et l'y ajouta, avec son téléphone mobile et son bipeur. Puis elle traversa le portique de sécurité et sourit à la garde de sécurité, puis elle alla rechercher ses affaires.

 

" Excusez-moi, il faut que vous ouvriez ceci ", déclara la jeune femme derrière la table, en tenant fermement le portable de Kerry.

 

Kerry soupira. " Bien sûr. " Elle tira sur la fermeture de la mallette et l'ouvrit, exposant le dessus gris de son ordinateur. Elle était consciente de la présence toute proche de Dar, alors qu'on demandait également à la grande femme d'ouvrir son sac. " Pourquoi est-ce qu'on nous laisse tranquilles à Miami ? " marmonna-t-elle entre ses dents.

 

Dar rit doucement en ouvrant la mallette.

 

" Vous pouvez les allumer, s'il vous plaît ? " demanda la femme implacablement.

 

Les yeux bleus et verts se croisèrent avec une exaspération désabusée. " Bien sûr. " Dar mit en marche puis tendit la main et démarra celui de Kerry. " J'ai un flipper là-dessus si ça vous intéresse ", dit-elle à la garde.

 

La femme la regarda avec froideur. " Merci. Vous pouvez allumer vos téléphones et vos bipeurs, s'il vous plaît ? "

 

Un sourcil noir se dressa. " Il ne vaudrait mieux pas ", dit Dar d'une voix traînante.

 

" Si, madame, il vaudrait mieux, à moins que vous ne préfériez le faire dans les bureaux de la sécurité ", répondit la garde.

 

Dar haussa les épaules et alluma les appareils, puis elle compta jusqu'à dix entre ses dents. A six, les deux bipeurs se mirent en marche, et les deux téléphones commencèrent à biper, indiquant des messages vocaux.

 

La garde se recula du bureau avec une expression effrayée.

 

" Je vous l'avais dit. " Dar soupira, prit son bipeur et y jeta un coup d'œil. " Bon sang… il doit y avoir trois douzaines de pages sur ce truc idiot. "

 

" Beurk ! " Kerry prit le sien et appuya sur le bouton. " Oh… bon sang, je suis contente de n'être que ton assistante. je n'en ai que deux douzaines. " Elle secoua la tête. " … ils ne savaient pas qu'on était ensemble ou quoi ? " Elle jeta un coup d'œil vers la garde, qui avait été rejointe par deux autres. " Nous avons pris deux jours de vacances", expliqua-t-elle. " Notre bureau a tendance à paniquer. "

 

Dar marmonnait et jurait entre ses dents alors qu'elle passait les pages en revue, puis elle leva les yeux vers les gardes silencieux. " Oh, pour l'amour de Dieu, ce sont des bipeurs, pas des grenades. " Elle sortit sa carte d'identité d'une des poches de son portable et la jeta vers eux. " Tenez. " Elle remit sa veste puis plongea son téléphone dans une poche, et reprit sa carte d'identité. " Excusez-moi. " Elle commença à se diriger vers la porte, toujours en marmonnant.

 

Kerry se trouva face à eux. " Hum… la semaine a été longue ", expliqua-t-elle en refermant sa mallette avant de la mettre sur son épaule. " Je peux ? " Elle tendit la main et on lui rendit son bipeur. " Merci… bonne journée. "

 

Elle sortit, résistant à l'envie de regarder par-dessus son épaule, et elle se dépêcha de rattraper Dar. " Hé… attends un peu. "

 

Les longues enjambées se raccourcirent et ralentirent, et Dar jeta un coup d'œil vers elle alors qu'elle arrivait près d'elle. " Imbéciles. "

 

" Allons, Dar… ils font juste leur boulot ", lui dit Kerry en la réprimandant. " C'est pour la sécurité de tous. "

 

Dar leva son bipeur. " Je parlais d'eux. " Elle le lança en l'air puis le rattrapa et l'enfourna dans sa poche à nouveau. " Voilà la porte… tu veux bien les garder ? " Elle montra les portables. " Je vais chercher du café. " Elle installa Kerry dans un siège capitonné près de la fenêtre, puis posa son portable. " Je reviens tout de suite. "

 

" Attrape aussi un journal ", demanda Kerry en s'appuyant et elle regarda sa compagne s'éloigner. Un sourire s'épanouit sur son visage alors qu'elle appréciait le petit rythme dans la marche de Dar, trop léger pour être un balancement, mais néanmoins reconnaissable. Elle portait des jeans usés et délavés noirs avec ses baskets hautes, et Kerry se surprit à souhaiter que la compagnie autorise les vêtements de tous les jours au bureau.

 

Ce n'est pas que Dar n'avait pas bonne allure dans un tailleur, oh non… au contraire, pensa la jeune blonde. Surtout celui en lin noir avec le chemisier en soie argenté… non, il n'y avait pas grand-chose que sa compagne pouvait mettre de côté au rayon vêtements, mais elle avait le sentiment que Dar était plus à l'aise comme ça.

 

Comme toi, ma grande. Kerry étira ses jambes et les croisa aux chevilles, regardant ses chaussures de randonnée marron avec ironie. Elle portait son jean le plus confortable, passé et léger, presque blanc à force de lavages, avec des petits points d'usure autour des genoux, et des boutons en cuivre avec les lettres effacées. Sa chemise épaisse en coton chaud était bien enfoncée, et elle croisa les bras sur sa poitrine, laissant la tête reposer contre la vitre fraîche de la fenêtre.

 

Elles avaient passé un bon week-end, décida-t-elle. Malgré les accrocs ? et les petits moments de doute, ça les avait rapprochées, et avait éclairci les choses entre elles. Elles en étaient sorties reposées, et plutôt bien détendues, et… Kerry remua les doigts et regarda la bague sur sa main. " Et plutôt bien engagées l'une envers l'autre, je pense. " Elle prit un moment pour permettre à la joie qu'elle ressentait de remonter à la surface, faisant frissonner sa peau.

 

" Kerry ? " La voix hésitante de Dar la sortit de son état rêveur.

 

" Euh… désolée. " Elle se redressa et prit la tasse que sa compagne lui tendait. " Je… hum… réfléchissais. "

 

" Oui, oui. " Dar se laissa tomber dans la chaise près d'elle. " Je ne vais pas te demander sur quoi… mais vu l'expression que tu avais, j'espère que ce n'était pas au café. " Elle lui tendit le journal demandé. " Tiens… c'est l'édition de USA Today de demain. "

 

Kerry la prit et la posa sur ses genoux, puis elle lança un regard à Dar par-dessus la fumée de sa tasse. " Ce n'était pas au café ", admit-elle, en prenant une gorgée. " J'ai cette petite balle de bonheur en moi, et je jouais simplement avec. "

 

Dar mordit le bord de sa tasse et ses cils battirent de surprise. " C'est une façon intéressante de dire ça. " Elle rit. " Très poétique. "

 

Les yeux verts brillèrent. " Je t'ai dit que tu provoquais ça en moi, non ? "

 

Sa compagne sourit franchement. " Marrant… pourquoi est-ce que je provoque le pire dans tout le monde sauf en toi ? " Elle s'appuya sur l'accoudoir et pressa son épaule contre celle de Kerry, en jetant un coup d'œil au journal. " Quelque chose d'intéressant ? "

 

Kerry feuilleta le journal alors que Dar se détendait, fermant les yeux et prenant des gorgées lentes de son café.

 

" Hé, Dar ? "

 

" Mm ? "

 

" C'est quoi, un DSI ? "

 

Dar regarda le plafond couleur popcorn pensivement. " Directeur des Systèmes d'Information… c'est quelqu'un qui est au conseil d'administration d'une compagnie… qui prépare la stratégie d'entreprise pour les systèmes d'informations (SI), qui met les politiques stratégiques en place, ce genre de truc. " Elle sirota une gorgée du café moka. " Pourquoi ? "

 

" On n'en avait pas ", fit remarquer Kerry.

 

" Nan… Les a mariné ça pendant deux ans… depuis que le dernier a baissé les bras d'un air dégoûté et a mis les voiles… il faut qu'il lâche du contrôle pour ça et il ne peut pas le supporter. " Dar croisa ses chevilles. " Ça a marché pour moi parce que ça vire une couche de management plutôt inutile. "

 

" Mm. " Kerry se glissa plus près, et mit le bras autour des épaules de Dar, plaçant le journal devant ses yeux à demi fermés.

 

" Qu'est-ce que c'est que ça… " Le front de Dar se plissa. " Oh… merde, il a enfin trouvé quelqu'un ? Bon sang… qui est-ce qu'il a embringué là-dedans ? " Le titre disait que leur compagnie avait nommé un DSI.

 

" Toi. "

 

Dar devint absolument immobile, les yeux écarquillés et fixes pendant un long moment, avant de se redresser brutalement et d'attraper le journal, penchant la tête pour lire le texte. Sa mâchoire tomba et elle inspira et expira plusieurs fois avant que des mots intelligibles ne sortent de sa bouche. " Ce fils de pute… je vais le tuer ", réussit-elle à grincer.

 

" Dar, ma chérie… la réponse habituelle à une promotion c'est 'merci', non ? " murmura Kerry en massant doucement son dos. " Pas 'espèce de fils de pute, je vais te tuer'. " Elle regarda les narines de Dar s'écarter et les muscles de sa mâchoire se tendre. " Hé… ? "

 

Les yeux bleus se tournèrent pour croiser les siens. " Il est cuit. "

 

Kerry lui toucha la joue. " Pourquoi ? Si quelqu'un mérite bien ça, c'est toi, Dar… nous le savons toutes les deux. " Elle frotta la peau doucement. " Pourquoi es-tu si ennuyée ? "

 

" Il m'a promis que rien ne changerait ", grogna Dar. " Salaud. "

 

" Dar… " Kerry se rapprocha, accrochant son regard. " Est-ce que tu ne me disais pas ce matin que tu ne voulais pas retourner aux mêmes trucs ? Ça te donne une chance de changer les choses d'en haut. "

 

Les longues mains s'accrochèrent aux accoudoirs avec une force convulsive, alors que le regard de Dar se tournait vers l'intérieur, pensif. Son corps se détendit enfin, et elle prit une profonde inspiration, tournant de nouveau son regard vers Kerry. " S'il pense que je vais déménager au Texas, il se fourre le doigt dans l'œil. "

 

Kerry sentit la tension la quitter. " Je suis prête à parier que tu n'auras même pas besoin de changer de bureau, Dar… il a juste vu un moyen de régler un problème, et c'était toi. " Elle fit un sourire à sa compagne. " Il te donne la responsabilité de tout, et de tout le monde, n'est-ce pas ? "

 

Les yeux bleu clair clignèrent, pensifs.

 

" Je me demande juste pourquoi il ne l'a pas fait avant. " Kerry soupira.

 

Lentement, un sourire commença à tordre les lèvres de Dar. " Il savait que personne ne pouvait me remplacer à mon poste aux Opérations avant ", dit-elle d'une voix traînante, en mettant le doigt sur le bout du nez de Kerry.

 

" Oh non… non. Je ne suis pas… hum… " Kerry leva la main. " Non… Dar, je ne suis là que depuis quelques mois… non, je… non… Dar… non… arrête de me regarder comme ça. "

 

Un sourcil noir se leva interrogatif.

 

" Dar, ne sois pas bête… je ne peux pas tenir ton poste. ", gémit Kerry doucement.

 

" Non. " Le regard de Dar était maintenant acéré, et critique, et il rappela fortement à Kerry le jugement froid qu'elle avait reçu ce tout premier jour. " Tu ne peux pas faire les choses comme je les faisais… mais je parie que tu peux trouver un moyen de le faire à ta façon. "

 

" Je ne peux pas… "

 

" Alors je ne peux pas accepter ceci ", déclara Dar tranquillement. " Parce que tu es la seule personne en qui j'ai confiance pour me remplacer. "

 

Kerry perdit le souffle. " Dar, ce n'est pas juste. "

 

" Non… c'est vrai ", répliqua sa compagne. " La vie ne l'est pas toujours. "

 

Elles se regardèrent en silence. Dar soupira. " Réfléchis-y au moins ", demanda-t-elle doucement. " S'il te plaît ? "

 

Kerry regarda ses chaussures, shootant un peu la moquette, puis elle leva les yeux. " Très bien… je vais y réfléchir. " Elle mordilla sa lèvre inférieure. " Donne-moi un jour ou deux, hein ? "

 

Dar eut l'air de vouloir discuter mais elle hocha la tête. " OK… prends ton temps. " Elle se réinstalla dans sa chaise et secoua la tête. " Je vais le tuer. "

 

Kerry fit la moue. " Moi aussi ", marmonna-t-elle.

 

Lentement, elles se tournèrent et se regardèrent sérieusement. Puis Dar commença à rire, et après un moment, Kerry se joignit à elle. Elles s'arrêtèrent ensemble, puis recommencèrent, jusqu'à ce que Kerry enfouisse son visage dans l'épaule de Dar, et entoure son bras d'une main, incapable de s'arrêter de rire.

 

" J'ai une idée. " Dar leva les pieds et mit un bras autour de ses genoux. " Pourquoi est-ce qu'on ne changerait pas nos billets pour aller à Plano, et débarquer dans la maison avec des haches en caoutchouc ? "

 

Kerry la regarda. " Tu es vraiment une sale gosse, hein ? " Elle rit.

 

Un sourire diabolique et sexy lui répondit. " C'est TOI… qui provoque ça en MOI ", lui dit Dar, en secouant un long doigt vers elle. Elle leva les yeux alors que l'hôtesse s'éclaircissait la voix et prenait son micro. " Ah… on dirait qu'il est l'heure. "

 

Kerry finit son café et se leva, pliant les bras et tressaillant alors que son épaule se remettait en place. " Ouille. " Elle tendit la main vers son portable mais il lui fut enlevé, et une main chaude lui toucha le dos. " Dar, je peux porter mes bagages. "

 

" Oui, je le sais ", lui dit Dar à voix basse. " Mais c'est un privilège pour moi de le faire. "

 

" Ah, je vois ", dit Kerry d'un ton songeur, se laissant emmener doucement vers la rampe. " Un privilège ", murmura-t-elle très doucement, presque entre ses dents, alors qu'elle tendait sa carte d'embarquement à l'agent qui souriait. " Merci. "

 

Elle reprit le talon de sa carte et entra dans le long tunnel d'embarquement, en même temps que quelques passagers à la traîne pour le vol de nuit. Elle se glissa dans un siège près d'un hublot dans la première rangée de l'avion, et regarda Dar mettre leurs bagages dans les compartiments, puis s'asseoir près d'elle, les mains reposant sur ses cuisses.

 

" Je suis contente de rentrer. " La grande femme soupira.

 

" Comment va ton genou ? " demanda Kerry en s'appuyant sur la console de séparation. " J'ai remarqué que tu ne boitais plus. "

 

Dar hocha un peu la tête. " Ça va… ça ne me fait plus mal… il était juste un peu raide ce matin, mais ça va vraiment mieux maintenant. " Elle regarda l'articulation, cachée sous le tissu délavé. " On verra bien demain quand je courrai, je pense. "

 

Un sourcil blond se dressa. " Et si ça fait mal ? " Elle savait que ça ne servait à rien de discuter pour le footing.

 

Dar prit une inspiration pour répondre, puis vit les yeux verts intenses qui la regardaient. " Je peux m'inquiéter de moi, tu le sais. "

 

Un sourire. " Je sais… " Kerry plissa le nez. " Mais c'est mon privilège de le faire, aussi ", dit-elle à sa compagne. " Ça marche dans les deux sens, Dar… nous sommes responsables l'une de l'autre, ok ? "

 

" Ok. " Dar se blottit dans le siège en cuir et accepta un verre de vin du steward le passant à Kerry puis en prenant un pour elle. Elle prit une gorgée et la fit rouler dans sa bouche un moment avant de l'avaler.

 

Quelqu'un d'autre était responsable d'elle. Quelle pensée étrange. Ça faisait très très longtemps que quelqu'un avait bien voulu le faire.

 

Mais vous savez quoi… Dar y réfléchit sérieusement. Je pense que j'aime cette idée.

 

A suivre - 8ème partie 

 

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