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partie Longestnight2B

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

Une Si Longue Nuit

 

par Melissa Good

 

Traduction : Fryda

(2006)

 

 

*********

Partie 2B

*********

 

Le son d’oiseaux de mer. Et le doux rugissement de l’océan, furent les deux choses qu’elle nota en premier, en même temps que la senteur légèrement épicée, légèrement salée de la vague.

 

Tout était paisible, et la surface sous ses pieds semblait être du sable doux et très clair, et elle s’y promena en direction de l’aube. La lumière autour d’elle était ce doux gris colombe du temps infini avant que le soleil ne se lève, et elle pouvait voir la teinte légère et couleur perle du corail du ciel au-dessus d’elle qui annonçait la lumière à venir.

 

Alors qu’elle s’approchait, la lumière changea, de couleur corail à un rose clair, et sembla provenir d’un point unique sur l’horizon proche, là où ses pas l’emmenaient.

 

Puis elle atteignit le point, et elle vit que c’était une ouverture rudimentairement dégagée, à travers laquelle la lumière rosée se déversait, l’appelant. Elle savait qu’elle devait la traverser… que la paix, et le repos se trouvaient de l’autre côté. Tout ce qu’elle devait faire, c’était d’aller là et d’entrer.

 

Un oiseau de mer cria, derrière elle, et elle se retourna pour écouter, reconnaissant quelque chose de familier dans son cri. Cela pouvait-il être son nom ?

 

Non… pas de la part de l’oiseau… cela venait de l’obscurité derrière elle, une noirceur d’encre qui absorbait la lumière, et qui semblait aspirer même la clarté du sable sous ses pieds. C’était un appel… un appel que son âme se devait d’écouter. Il l’attirait vers l’obscurité, et loin de la lumière, et elle s’arrêta un temps infini, pour l’absorber. Elle le voulait. En avait besoin.

 

Elle commença à courir vers là d’où elle venait, se hâtant sur le sable, de plus en plus vite, en direction du noir, et du froid, sentant l’absence de lumière soudainement l’enserrer, envoyant des frissons engourdis le long de son corps, et explosant avec un élancement acéré de douleur contre son crâne.

 

Mais l’appel ne cessa jamais. Et elle ne cessa jamais d’y répondre.

 

Un bras autour de sa poitrine, la pressant fort, et elle respira enfin, toussant l’eau boueuse de ses poumons et la laissant couler de sa bouche sur du sable dur et brun.

 

« Xena ! » La voix était maintenant réelle, et proche, et elle se força à ouvrir les yeux, sentant son corps secoué de frissons comme s’il tentait de se débarrasser de l’eau ingérée. Elle roula à demi sur le dos, laissant la gravité l’entraîner, et elle regarda dans les yeux épuisés de Gabrielle.

 

Qui se fermèrent en croisant son regard, et le barde s’effondra sur sa poitrine, sa propre forme secouée de sanglots. Sans savoir comment, elle réussit à faire obéir ses bras, et elle les mit autour du corps tremblant de Gabrielle. « Hé… » Sa voix était si rauque qu’elle ne la reconnut pas. « Qu’est-ce qui s’est passé ? »

 

Gabrielle prit une profonde inspiration tremblante, et se redressa un peu, puis reposa son poids sur un bras et caressa doucement le visage de Xena de sa main. « Je… je ne sais pas… » Dit-elle en reniflant. « J’étais… l’eau est arrivée, et la rive s’est effondrée… puis tout s’est obscurci pendant un instant… l’eau par-dessus ma tête… ensuite… je ne me rappelle plus de rien… je pense que je me suis évanouie… ce dont je me rappelle ensuite, c’est que j’étais sur la rive ici, et toi tu étais… » Elle s’interrompit et se frotta le visage, en secouant la tête. « Je ne pouvais pas… tu n’étais pas… oh dieux. »

 

« Chh… » Murmura Xena sonnée, sentant sa propre respiration laborieuse, et les crampes douloureuses causées par le froid. « C’est fini… c’est du passé. »

 

Un lent hochement de tête. « Il faut qu’on sorte d’ici. Je suis glacée. »

 

Xena sentit une léthargie engourdissante la submerger, et elle lutta pour concentrer ses pensées. Non… ça a été méchant, lui répondit paresseusement son esprit, mais c’était une bataille perdue d’avance et elle le savait.

 

Des mains entourèrent son visage et elle se força à rouvrir les yeux. « Xena… je ne peux pas… il faut que tu te lèves… s’il te plait ? Je sais que tu peux le faire. » Le visage du barde se tendit. « S’il te plait… pour moi ? »

 

Pour elle. Oui. Seule sa volonté força son corps à rouler sur le ventre et elle mit les mains sur la boue compacte, se repoussant avec une détermination farouche. Pour elle. Tout. La volonté seule, mais sans savoir comment elle fut debout, et sentit les bras de Gabrielle glisser autour d’elle dans un soutien tremblant. Pour elle…

 

Un bruit de bousculade, puis la sensation familière du pelage contre ses doigts. Gémissant. Les pattes contre ses cuisses, la faisant presque tomber. Arès… « Descends », réussit-elle à dire, sentant le loup se laisser tomber ; le regard un peu flou, elle le vit couvert de boue, mais autrement indemne a priori, à travers la pluie qui tombait toujours.

 

Elles réussirent, d’une manière ou d’une autre, à atteindre une saillie rocheuse, qui bloquait le vent, et était assez large pour les abriter de la pluie, et elles s’effondrèrent dessous, frissonnant de manière incontrôlée. Xena réussit à tirer un grand buisson déraciné vers elles, et il fit office de minuscule couverture, et Arès se blottit près d’elle, leur apportant une chaleur bienvenue malgré son pelage mouillé. « Bon garçon », murmura Xena, tout en adossant son corps douloureux contre l’arrière du surplomb, et elle entoura Gabrielle de ses bras tremblants.

 

Le barde se nicha silencieusement un peu plus près, et Xena sentit les sanglots étouffés tourmenter son corps. « C’est bon… » Murmura-t-elle au barde. « Doucement… doucement… »

 

« Je vais bien », réussit à dire Gabrielle, d’un ton tremblotant. « C’est juste… une réaction, je pense. »

 

Très lentement, la chaleur se fraya un chemin en elles, et Xena sentit le soulagement sur ses crampes aiguisées par le froid, mais pas la rudesse douloureuse qui faisait de sa respiration un martyre. Une partie en était, elle le savait, la… quasi… noyade. Bon sang, c’était tout près. Son esprit vagabonda sur ce dont elle se souvenait, et elle plissa le front. Et bien… j’y penserai plus tard. « Hé… » Murmura-t-elle d’une voix rauque. « Merci. »

 

Les yeux verts fatigués se levèrent vers elle. « De quoi ? »

 

Un demi-sourire. « De m’avoir sauvé la vie », dit-elle en soupirant. « Deux fois. » Elle ferma les yeux et laissa sa tête reposer à nouveau contre la roche. « C’est bien de t’avoir là… je ne tiens pas bien cette promesse de m’occuper de moi, non ? »

 

Gabrielle écarta doucement les cheveux noirs des yeux de sa compagne, et elle lui fit un léger sourire mélancolique. Je pense que je l’ai fait… songea-t-elle. « Non… pas vraiment, mon amour », murmura-t-elle. « Je pense qu’il faut que je m’occupe de toi alors, hein ? » Elle leva le regard vers les yeux brumeux de Xena, puis étudia sa silhouette meurtrie, tressaillant à la vue des écorchures dues aux débris de la rivière. « Merci… de m’être revenue, Xena. »

 

Un pincement. « Il fallait. » Une pause. « C’est différent cette fois-ci. » Elle déglutit et ferma les yeux. « Ça n’a pas dû… être… si près… »

 

Gabrielle la fixa. « Pourquoi ? » Demanda-t-elle doucement.

 

« Pas comme… » Xena prit une inspiration. « Ça a dû être un rêve. Un océan… des oiseaux qui volaient partout… le lever du soleil… » Elle sentit la main de Gabrielle contre sa poitrine. « Dur à décrire. »

 

Tu n’as pas besoin. Gabrielle sentit une légèreté la submerger. J’y étais. Elle ouvrit la bouche pour parler, puis la referma lentement. Ce n’était pas le moment. « Il faut qu’on retourne à la grotte… tu as toutes ces écorchures… et on va avoir besoin du kit de soins. »

 

Un hochement de tête. « Je sais. » Xena prit une inspiration douloureuse. « Un petit moment. » Elle hésita et se força à ouvrir les yeux pour s’excuser. « Toi tu vas bien ? »

 

Gabrielle posa la tête sur l’épaule de la guerrière. « Tu t’es assurée qu’oui », dit-elle calmement, se souvenant s’être réveillée pour se retrouver toujours enserrée dans les bras protecteurs de la guerrière, et s’être tournée pour voir la forme immobile de Xena qui ne respirait pas, derrière elle. Elle avait réagi instinctivement, secouant brutalement la guerrière, mettant un bras autour de sa poitrine, poussant vers le haut de toutes ses forces, pour expulser l’eau de ses poumons, six, sept ? … fois avant qu’elle ne sente une légère réponse hoquetante sous ses bras douloureux. Ça avait été le son le plus merveilleux qu’elle ait jamais entendu.

 

Le silence s’éternisa, alors que la pluie finissait par lentement s’arrêter dehors, et le vent mourut, et la tempête cessa.

 

Gabrielle attendit que sa tunique soit enfin sèche ou presque avant de mettre une main sur l’épaule de Xena à contrecoeur. « Hé… » Appela-t-elle doucement, en regardant les yeux bleus cligner pour s’ouvrir et la regarder d’un air brumeux. « Il faut qu’on parte, mon amour. »

 

Un hochement de tête las. « Oui… d’accord », répondit Xena doucement, levant la main pour se masser les tempes. « Bon sang… » Elle lança un regard d’excuses à Gabrielle. « Désolée… je suis encore… un peu embrouillée. » Un peu embrouillée… hum… non. Je marche pas vraiment sur tous mes sabots là. « Je pense que mon cerveau a gelé. » Une mince tentative de plaisanter, qui lui valut un sourire de Gabrielle.

 

Le barde lui caressa la joue. « Ça je peux le dire », dit-elle en soupirant doucement, regardant sa compagne lutter pour garder les yeux ouverts. « Je te laisserais bien te reposer plus longtemps, mais… Xena, il fait toujours froid ici, et j’ai… » Elle garda le silence lorsque la guerrière prit une profonde inspiration, et fit un effort visible pour reprendre ses esprits. Peur de te laisser dormir comme ça… du moins jusqu’à ce qu’on trouve un endroit sûr.

 

« Non… tu as raison », lui dit Xena, en lui faisant signe de sortir de leur refuge. « Allons-y. » Elle tapota le dos du loup. « Vas-y, Arès. »

 

Gabrielle rampa dehors derrière le loup, posa la main sur le rocher en surplomb et redressa son dos avec un grognement, puis elle se retourna pour regarder sa compagne qui se tenait tranquillement derrière elle, s’appuyant contre la surface rendue glissante par la pluie. Le visage de la guerrière était pâle, même dans la lumière boueuse du soleil couchant qui passait à contrecoeur à travers les nuages qui s’amoncelaient lentement, et Gabrielle pouvait maintenant voir les coupures et les écorchures enflammées qui avaient tailladé la tunique en lin léger. « Tu as l’air mal en point, Xena », lâcha-t-elle, puis elle tressaillit. « Désolée. »

 

Cela lui valut un léger sourire désabusé de la part de la grande jeune femme brune. « Tu parles. » Elle tourna le visage vers le soleil couchant et se passa la main avec hésitation dans ses mèches mouillées. « Pourtant… »

 

« Tu as connu pire… » Finit Gabrielle pour elle, en s’avançant pour lui prendre le bras avec un sourire. « Allez viens toi. »

 

Il fit nuit avant qu’elles n’arrivent à la grotte, et Xena attendit dehors, retenant Gabrielle avant qu’elles n’entrent, sa tête sombre penchée d’un côté. « Arès… vas-y. » Elle poussa le loup du pied, et attendit qu’il entre dans la grotte, patientant de longues secondes avant de se détendre et de presser l’épaule du barde. « Ça devrait… aller. »

 

Le feu n’était plus que des braises, mais Xena avait rempli l’endroit de bois, et Gabrielle conduisit doucement sa compagne vers l’endroit où se trouvaient leurs affaires. « Reste tranquille… » Xena se tint là sans résistance, titubant un peu lorsqu’elle laissa le barde la déshabiller de sa tunique en lambeaux et pleine de boue. « Ouille. » Cette dernière tressaillit en voyant les écorchures à vif dans le dos de la guerrière. « Oh, Xena… »

 

« Oui », murmura doucement Xena. « Ça pique. » Elle prit le vêtement sec que Gabrielle avait jeté par-dessus son épaule et l’enfila lentement, alors que le barde soupirait. « Mais ce ne sont que des écorchures. »

 

Gabrielle mit les mains sur les bords de la longue chemise, les rapprochant sur la poitrine de sa compagne avant de serrer la ceinture autour de sa taille. « Viens… assieds-toi là. »

 

Xena obéit, et s’assit sur le couchage, les coudes posés sur ses genoux. Gabrielle s’accroupit près d’elle et prit son visage entre ses mains. « Xena ? »

 

Le regard de la guerrière était vitreux. « Oui. » Une inspiration profonde. C’est… méchant. Je ne peux pas… oh dieux.

 

« Mon amour, je sais que c’est dur… mais il faut que tu restes avec moi, d’accord ? » Murmura Gabrielle. « J’ai besoin que tu me dises ce que je dois faire… OK ? »

 

Un long silence, puis Xena finit par baisser le regard et étudier ses mains. « Donne-moi le kit de soins », dit-elle calmement. Pas… le choix. Dormir… c’est pas une bonne idée. Elle prit le petit sac en cuir que Gabrielle lui tendait, et farfouilla dedans, pour en retirer un choix de cinq herbes, en prit quelques pincées et les ajouta à un petit tas au creux de sa main. A la fin, elle hocha la tête et ferma le poing.

 

Gabrielle mit une main sur les siennes, et ouvrit gentiment les doigts. « Donne-moi ça… je vais te faire du thé, OK ? » Elle se leva et refit le feu, posa la bouilloire dessus aussitôt que les flammes chauffèrent la grotte. La chaleur était merveilleuse sur son corps, et elle resta à l’absorber pendant un moment, avant de tourner son regard vers Xena, qui fixait la lumière orange, une main caressant nonchalamment le pelage épais d’Arès. L’inquiétude poignante explosa de nouveau dans sa poitrine, en voyant le regard lointain de sa partenaire, et elle secoua une de leurs couvertures pour l’installer sur les épaules de Xena.

 

Cela lui valut une étincelle d’amusement dans ces yeux bleus clairs, et un demi sourire. « Merci maman. »

 

Gabrielle s’accroupit à nouveau. « Très drôle. » Mais elle sourit. « Xena… » Une inspiration. « Est-ce que tu es blessée quelque part… je veux dire, autres que les éraflures ? Tu es… je… »

 

Tu es en train de lui mettre une peur mortelle, Xena… il faut que tu te sortes de ça. « Non… non… » Dit-elle en soupirant. « L’eau… le froid… je ne sais pas… je me sens engourdie en quelque sorte. » De la tête, elle montra l’eau qui bouillait. « Ceci devrait m’aider. »

 

Gabrielle s’assit et se mit à infuser le thé ; elle prit un flacon de miel et leva un sourcil en direction de sa compagne. « Tu en veux ? »

 

Un hochement de tête. « Oui. » Xena mit la main à sa gorge. « Ça fait mal quand j’avale… c’est comme si j’avais hurlé. » Elle s’interrompit. « C’est le cas ? »

 

Gabrielle remua le thé pensivement. « Non… » Dit-elle lentement. « Pas que je me souvienne… » Mais alors… comment est-ce qu’on est sorti de dessous cet arbre ? « Tiens… » Elle entoura la tasse avec les mains de Xena, et s’assit près d’elle, guidant le mug vers les lèvres de la guerrière, la regardant prendre plusieurs longues gorgées. « Comment c’est ? » Elle mit la main sur le front de Xena et laissa passer un léger soupir de soulagement. « Tu es fraîche… pas de fièvre. »

 

Les herbes firent vite leur effet, et Xena sentit son cœur battre plus vite et la couleur revenir sur son visage, alors que son corps répondait aux stimulants. C’était dangereux… mais pas aussi dangereux que la léthargie rampante semblait l’être. « Mieux. » Elle hocha légèrement la tête, en prenant de nouveau quelques gorgées, et elle sentit son sang couler sauvagement sous sa peau.

 

Le brouillard se dissipa un peu, et elle tira la couverture sur ses épaules, sentant sa respiration s’accélérer, et un léger frisson passer sur sa peau. Il commença à faire fondre le noyau de glace qu’elle avait ressenti à l’intérieur depuis son réveil… ou quoi que ce soit… près de la rivière. Ça, et le feu tout près, et la présence toute proche de Gabrielle, sa main doucement enroulée sur le genou de Xena, le pouce du barde caressant paresseusement la peau douce, et traçant les courbes de ses muscles souples juste dessous.

 

Ça a dû être le froid… songea-t-elle. Et le choc de… s’approcher du bord, encore une fois. Au moins elle n’avait pas eu à faire tout le chemin… et sentir les flammes du Tartare la lécher, la douleur dans ses bras à la crucifixion, et l’agonie aveuglante de ses jambes brisées. Non… parce que Gabrielle l’avait sauvée… Elle leva les yeux vers le barde. « Hé, tu fais un sacré thé, mon barde. »

 

« Tu as l’air d’aller mieux », fit remarquer Gabrielle tranquillement, tout en levant la main pour frôler la joue de sa compagne de ses phalanges. « C’est quoi ce truc ? » Elle sentit un élan de soulagement en voyant la résolution dans ce regard, alors que la présence calme, presque fantomatique se solidifiait dans l’intelligence aiguisée de son âme-sœur.

 

Xena haussa légèrement les épaules, leva un bras et le posa, avec un bout de la couverture, autour du corps du barde. « Juste quelque chose pour donner un coup de fouet au corps. » Le brouillard s’éclaircit encore un peu, et elle sentit ses sens revenir dans un état presque normal. Elle posa la tasse, et se tourna vers Gabrielle, l’étudiant attentivement.

 

Elle vit les lentes larmes silencieuses couler le long du visage du barde, et elle leva des doigts inquisiteurs pour les effacer. « Gabrielle… que… tu es blessée ? » Elle mit la couverture de côté et commença anxieusement à vérifier si sa compagne portait des blessures. Comment ai-je pu la laisser…

 

Des mains couvrirent les siennes, et le barde se rapprocha, enfouissant son visage dans la poitrine vêtue de lin de Xena. « Que… » Confuse, elle caressa les cheveux clairs emmêlés avec douceur. « Gabrielle… qu’est-ce qui ne va pas ? »

 

« Je pensais t’avoir perdue à nouveau », reçut-elle en une réponse torturée. « Tu t’éloignais de moi. »

 

« Oh… dieux… Gabrielle. » Xena ferma les yeux de douleur. « Je ne… » Elle s’interrompit. Mais elle l’avait fait, non ? S’il n’y avait pas eu Gabrielle, elle serait de retour au Tartare à cet instant. De nouveau. Comment pouvait-elle avoir laissé sa vie s’en aller si facilement… sachant ce que ça signifiait pour son âme-sœur ? Quel genre d’inutile… « Je suis désolée. »

 

Gabrielle soupira. « Non… là tu es blessée, et je te tombe dessus comme un bébé… dieux… je ne sais pas ce qui m’a pris, Xena… » Elle prit une inspiration. « Je suis juste contente… que tu soies revenue. »

 

Le silence pendant un moment. « Bon sang si je sais pourquoi. » La voix de Xena était amère contre elle-même. « Tout ce que j’ai l’air de t’apporter, c’est de la douleur… tu serais mieux loin de moi… »

 

L’impact de la main du barde sur sa joue la laissa sans voix.

 

« Ne dis plus JAMAIS ça. » Les yeux verts brillaient férocement. « Ne le pense MÊME pas, tu m’entends ? ? ? » Gabrielle secoua la tête violemment. « Dieux… Xena, comment as-tu pu même… est-ce que tu… » Son regard se cloua sur celui choqué de Xena. « Peux-tu honnêtement me dire que tu penses que je serais mieux si je n’avais… jamais… » Son cœur se brisait… elle pouvait le sentir. Elle sut par la soudaine inspiration, que Xena le pouvait aussi, à travers leur lien. « Oh… non… s’il te plait… ne pense pas… que… tu ne peux pas… »

 

Des mains sur son visage, et elle pouvait maintenant sentir le cœur de Xena battre fortement contre la main qu’elle avait posée sur la poitrine de la guerrière. « Non… écoute-moi… »

 

Cette voix, qui allait droit au cœur de la guerrière. « Je ne crois pas que… je ne peux pas… je sais que tu n’aurais pas été… j’étais… » Une expiration. « Gabrielle… je suis tellement en colère contre moi-même… pour tout ce que je te fais traverser… je ne voulais pas dire… que je souhaitais n’avoir jamais… » Elle sentit les larmes dans ses propres yeux, et les ignora. « Comment pourrais-je ? » Son visage la piquait à l’endroit où le barde l’avait frappée. Elle ignora cela également, uniquement attentive au visage immobile devant elle. « Tu… as été… le seul miracle de ma vie. » Aussi simple que ça.

 

Des doigts tremblants effleurèrent sa joue, recueillant les larmes et traçant la marque rouge. « Tu as été la raison d’être de la mienne », murmura le barde. « J’ai deviné ça il y a un moment… nous avons tous un but dans la vie… et je n’en avais pas jusqu’à ce que je te rencontre. » Elle soupira et laissa sa main retomber sur le bras de Xena, massant la peau chaude à cet endroit. « Désolée de t’avoir frappée. »

 

« C’est bon… » Xena lui fit un sourire hésitant. « Je pense que je le méritais probablement. » Elle baissa les yeux. « C’était… une chose incroyablement stupide à dire. Mon cerveau… a dû être gelé. »

 

Gabrielle laissa sa tête reposer à nouveau sur l’épaule de sa compagne. « Xena ? »

 

« Mmmm ? » Murmura la guerrière, en s’adossant à nouveau à la roche tout en tirant le barde avec elle.

 

« Je peux te poser une question ? » Et tu ne te mettras pas en colère… ou bien…

 

« Bien sûr », répondit Xena. Oh oh… Elle sirota tranquillement son thé. « Tout ce que tu veux… tu le sais. »

 

Un long silence. « Quand tu as dit… juste là… que tu ne le croyais pas… tu as dit que tu ne pouvais pas, et que tu savais que je n’aurais pas été… »

 

« Ouais. » Xena sentit son pouls s’accélérer, lorsqu’elle se rendit compte de là où cette voie menait.

 

« Comment savais-tu ? » Gabrielle prit une profonde inspiration. « Je ne veux pas dire que… je sais que tu as raison… OK ? »

 

Il y a de meilleurs moments pour discuter de ça. L’esprit de Xena était douloureux. « Gabrielle… on peut… en parler demain… d’accord ? Je suis juste… la journée a été longue. »

 

Les yeux verts fixèrent attentivement les siens. « Très bien… mais… » Toujours un mais. « Tu le SAIS, n’est-ce pas… ce n’est pas juste quelque chose que tu penses ? »

 

La guerrière ferma les yeux, et laissa sa tête retomber sur la pierre froide, se souvenant. « Je le sais », confirma-t-elle, en rouvrant les yeux pour fixer calmement Gabrielle. « Demain… promis. »

 

Gabrielle hésita, puis hocha la tête, donnant une petite poussée sur l’épaule de Xena. « Allonge-toi. »

 

La guerrière obéit, posant la tête sur son manteau plié avec un sentiment de soulagement. Elle regarda le barde se changer pour passer une chemise soyeuse familière, et puis se blottir près de sa compagne, avant de tendre la main pour écarter doucement les cheveux de ses yeux.

 

« Tu dois avoir mal partout, mon amour… je ne pense pas… » Une main attrapa l’avant de sa chemise et tira fort, elle rit doucement, tirée plus près, et elle glissa un bras autour de la taille de Xena, puis posa la tête sur l’épaule de la guerrière, là où le battement du cœur était fort et clair.

 

« Alors ne pense pas », dit Xena doucement, en entourant le barde de ses bras. « Hé… on a oublié de dîner. » Une petite plaisanterie, et elle sentit le léger ricanement alors que Gabrielle bougeait légèrement et laissait sa main commencer une exploration lente et languide le long de l’estomac de la guerrière. « Je peux définitivement accepter de le rater », dit Xena en riant ironiquement.

 

Gabrielle sourit contre la senteur herbée douce et riche de la chemise en lin que Xena portait, et elle la poussa doucement dans le ventre. « Menteuse. » Elle laissa son doigt tracer des dessins familiers. « Rien que pour ça, tu auras un gros petit déjeuner. »

 

« Ah oui ? » La taquina Xena, en lui embrassant le dessus de la tête.

 

« Mmm… » Répondit le barde. « Oui. » Une pause. « Xena ? »

 

« Oui ? » Répondit la guerrière, en prenant une profonde inspiration avant de la relâcher.

 

« Tu vas aller bien ? » Une question plaintive pleine d’espoir.

 

Xena ferma les yeux et pencha la nuque, capturant les lèvres du barde dans un long baiser, ne brisant le contact que lorsqu’elle sentit le corps de Gabrielle s’arquer pour venir à sa rencontre. « Je me sens extrêmement bien », marmonna-t-elle en mordillant le dessous de la mâchoire de Gabrielle.

 

« Tu marques un point. » Le barde sourit et se blottit un peu plus, laissant ses yeux se fermer.

 

Mais sa compagne autour du feu devint deux yeux bleus devenus gris dans la lumière scintillante cramoisie, et qui ne se fermèrent que très, très tard.

 

****

 

Hercule sentit qu’il commençait à émerger de la lourde couverture de sommeil sous laquelle il était tombé, et devint vaguement conscient des sons et des odeurs autour de l’auberge. Le feu exhalait une subtile senteur de chêne, les couvertures dans lesquelles il était emmailloté sentaient le soleil et les herbes sèches, et il pouvait entendre les sons légers de l’activité dehors à travers les fenêtres bien closes.

 

Et… des bruits d’éclaboussures. Il recourba un sourcil mais garda les yeux fermés. Des éclaboussures et un léger fredonnement. Le genre de fredonnement faux de ténor, préoccupé, qui ne pouvait venir que de Iolaus, qui, bien que loyal, et drôle et courageux à l’excès, n’avait malheureusement pas l’oreille musicale.

 

Il ouvrit un œil et regarda avec précautions par-dessus les couvertures, pour voir son ami s’affairer joyeusement autour de la grande baignoire en bois, déplaçant des seaux d’eau fumante pour la verser à l’intérieur. Il avait enlevé sa veste et sa sur tunique, les ayant apparemment lavées, et il savourait à l’instant la chaleur du feu sur sa forme compacte et musclée.

 

« Qu’est-ce que tu fais ? » Demanda Hercule avec curiosité, décidé à ne pas bouger plus que ses lèvres et sa langue.

 

Iolaus lui jeta un coup d’œil, puis regarda le seau dans sa main, puis de nouveau son ami. « T’sais, je t’ai dit que tu aurais dû faire vérifier ta vue par ce guérisseur au dernier village, mon pote. » Le jeune homme blond secoua la tête et finit d’aller à la baignoire, pencha son seau et en renifla la fumée d’un air appréciateur.

 

Hercule eut conscience d’une senteur plaisante, épicée et musquée, qui chatouilla ses sens, et l’intrigua assez pour qu’il se redresse à demi sur ses coudes, regardant Iolaus avec intérêt. « C’est quoi cette odeur ? » Demanda-t-il puis il regarda la fenêtre. « Oooh… j’ai dormi combien de temps ? » L’obscurité de l’extérieur intensifiait la chaleur confortable de la chambre, et il résista au désir de se recoucher pour se laisser emporter à nouveau dans une brume ensommeillée.

 

Iolaus sourit. « Tu aimes bien ? » Il tira un autre seau et déversa son contenu chaud. « Toris m’a donné des herbes… il a dit que ce sont habituellement les filles qui parfument les bains par ici… » Les yeux clairs de Iolaus brillèrent. « Mais il garde ce truc pour ne pas finir par sentir la rose. »

 

Hercule rit. « Je vois ce qu’il veut dire. » Puis son expression devint plus neutre. « Tu n’as pas répondu à ma question. »

 

Le jeune homme leva les yeux. « Ben… je ne sais pas… plusieurs marques de chandelles… je pense… ils servent le dîner en bas… je pensais que tu apprécierais de prendre un bain avant. » Il leva les yeux avec un sourire éclatant. « Hé… j’ai appris un truc sympa. »

 

Le demi-dieu bâilla et se glissa de dessous les couvertures, se levant pour étirer lentement sa haute silhouette musclée. « T’es en train de me dire que je pue, Iolaus ? » Ceci dit avec un regard ironique dans la direction de son ami. « Qu’est-ce que tu as appris ? »

 

Iolaus mit les poings sur ses hanches et prit la pose. « Bon… d’abord, non tu pues pas… c’est TOI qui as dit que tu voulais prendre un bain, mon pote. » Il secoua la tête. « Ensuite… j’ai découvert que non seulement elles vont être unies… » Il s’interrompit. « Et, à propos, merci de m’en avoir parlé de ça aussi », marmonna-t-il au milieu. » Non seulement ça, mais le Solstice c’est… » Il s’interrompit pour produire son effet. « L’anniversaire de Xena. »

 

Hercule s’arrêta au milieu d’enlever sa chemise couleur fauve, et fixa son ami. « Sans blague ? » Il renifla de surprise. « Comment t’as trouvé ça ? Je lui ai demandé une fois… et bon sang, le regard tueur que j’ai reçu en échange. » Il retira toute sa chemise et l’étala sur le bout du lit, ignorant Iolaus qui prétendait ne pas regarder les marques rouges à vif et enflammée autour de son large cou. « Merci pour l’eau… au fait… tu as raison. J’ai besoin d’un bain. » Il fronça le nez et sourit.

 

« Sans blague », répondit Iolaus, puis il vit le regard blessé. « Oh… non… désolé… je voulais dire sans blague pour l’anniversaire. » Il rit un peu. « Sa mère me l’a dit… une femme sympa. » Il leva les yeux alors qu’Hercule enlevait son pantalon et ses bottes et se plongeait dans l’eau avec un grognement sincère. « Ils sont tous plutôt sympa ici… pas du tout ce à quoi je m’attendais. » Il retira un petit paquet de leurs affaires et déballa une barre de savon, qu’il lança nonchalamment à Hercule. « Tiens. »

 

Elle fut capturée en plein vol par une grande main. « Merci. »

 

Iolaus s’adossa de nouveau contre l’âtre et le regarda calmement. « Je pourrais demander du baume à Cyrène pour ton cou. »

 

Des yeux clairs lui rendirent son regard. « Oublie », répondit Hercule d’un ton bref. « Ça ira. »

 

Le jeune homme blond pinça les lèvres. « Juste une proposition », commenta-t-il, en regardant ses bottes, avec déjà un plan alternatif en tête. « Ces Amazones sont plutôt intéressantes aussi… tu te souviens que j’avais dit comme Xena était préoccupée avant de partir ? »

 

Hercule l’étudia avec méfiance. « Tu ne lâches pas si facilement d’habitude, Iolaus… quel plan farfelu tu es en train de concocter ? »

 

Iolaus s’approcha et posa ses bras nus sur le bois poli par des années d’utilisation. « Un plan ? Pas de plan… je vais juste en parler à Xena quand elle arrivera. » Il fit un large sourire à Hercule. « Tu pourras en discuter avec elle. » Il poussa une des larges épaules de son compagnon. « Et franchement, j’espère qu’elle te ligotera et te collera un cataplasme qui sent le bouc sur le cou pour une semaine. » Il fit un sourire supérieur à Hercule.

 

Celui-ci lui lança un regard noir. « Merci, mon pote. » Mais c’était une menace convaincante, et il le savait. Il pouvait rembarrer Iolaus… bien qu’il ait été tenace parce que la blessure durait. Xena, elle… n’accepterait pas un non ou même un peut-être comme réponse. « Tu es un vrai copain. »

 

Iolaus le regarda droit dans les yeux. « J’aime à le penser. »

 

Le demi-dieu baissa les yeux et joua avec la surface de l’eau pendant un moment, puis releva le regard. « Tu es… » Il soupira. « C’est juste que ça me fiche la trouille… » Il leva une main mouillée et toucha la brûlure. « Je n’ai jamais eu quelque chose qui… ne guérissait pas… avant… la plupart des choses ne m’affectent pas. » Il secoua sa tête fauve. « Peut-être que Xena saura quoi faire. » Puis il plissa le front. » Qu’est-ce que tu disais d’elle avant ça ? » Il commença à se frotter avec le savon, tressaillant lorsque la brûlure tira quand il essaya d’atteindre ses épaules.

 

« Tiens… laisse-moi faire ça », dit Iolaus en soupirant, prenant le savon des mains de son ami pour atteindre les endroits difficiles, prenant soin d’éviter la brûlure vivace. « Je suis sûre qu’elle va trouver quelque chose… c’est souvent le cas. » Il garda un ton joyeux dans sa voix. « Hé… Gabrielle a été kidnappée pendant qu’on était parti. »

 

Hercule tourna la tête, les deux sourcils grimpés au niveau de sa frange. « Quoi ? ? ? »

 

Iolaus lui raconta l’histoire pendant qu’il finissait de se laver, puis lui tendit une serviette en lin lorsqu’il sortit de la baignoire et se sécha, enroulant le tissu autour de sa taille musclée. « Par Zeus, c’est bon d’être propre, et sec, et d’avoir chaud pour changer », dit-il d’un ton désabusé, en allant vers ses affaires pour en retirer une chemise propre. Il s’arrêta au moment de passer le tissu par-dessus sa tête. « Est-ce qu’elles… »

 

« Je leur ai raconté », répondit Iolaus, sans lever les yeux de l’endroit où il fouillait pour prendre des vêtements propres dans ses propres affaires. « Ça changeait pas grand chose… elles savaient où allait Xena. » Il leva les yeux. « Et pourquoi. » Il fit un sourire à son ami. « C’est bon… elles voulaient juste savoir si tu allais bien… »

 

Hercule enfila la chemise et fixa le feu sans le voir pendant ce qui sembla une éternité à Iolaus. « Ouais », finit par dire le demi-dieu en soupirant. « Bon, c’est mieux que ça vienne de toi. » Il regarda vers Iolaus toujours agenouillé, et se figea, puis il s’avança et s’accroupit derrière le petit homme, lui attrapa les épaules et regarda son dos bronzé de près.

 

Iolaus jura silencieusement. Bon sang… comment j’ai pu oublier ça… « Qu’est-ce qu’il y a ? » Demanda-t-il d’un ton joyeux sans bouger.

 

« Où est-ce que tu as eu ça ? » Demanda calmement Hercule, en passant un pouce sur les cicatrices verticales qui couraient le long de la peau du jeune homme blond.

 

« Hum… » Iolaus hésita, fouillant sa cervelle pour une bonne excuse.

 

« C’est moi qui ai fait ça ? » Une question tendue et angoissée.

 

Parfois, Iolaus, se dit-il calmement, parfois, il faut savoir dire des choses comme un mensonge clément. « Toi ? ? ? Non. » Il se força à rire. « Non… sûrement pas… non… ce sont les gardes qui m’ont attrapé là-bas… ils m’ont amené au donjon. » Il se tourna à demi et fit un sourire à Hercule. « Je me suis pas baissé assez vite… tu me connais. »

 

Le profond soulagement sur le visage de son ami lui dit qu’il avait fait le bon choix. Et puis…. Ce n’est pas un mensonge… ça n’était pas lui, se dit-il. « Je te l’ai dit… tu ne m’as pas touché. » Non… la vérité totale. Il prit une inspiration pour se calmer. Son corps se souvenait encore, bien qu’il ait réussi à purger le souvenir de ses rêves. En grande partie.

 

« Que les dieux soient remerciés », dit Hercule en soupirant, le frappant sur l’épaule. « Allez… on y va. » Il passa un pantalon propre bleu foncé, puis s’assit pour mettre ses bottes qui lui arrivaient aux genoux, pendant que qu se changeait pour enfiler une chemise pourpre à longues manches et un pantalon gris.

 

« Jolie chemise », dit Hercule, puis il soupira et secoua la tête. « Iolaus, coiffe-toi… on dirait un nid d’écureuils. »

 

« Ah ah », répliqua le jeune homme blond sarcastiquement. « On peut pas tous avoir des cheveux parfaits comme quelqu’un dont je tairai le nom. » Il se passa les doigts dans ses cheveux indociles, et écarta les mains. « Allons-y, je meurs de faim. »

 

***

 

« Alors… est-ce que Solari vous envoie voir ce qui se passe avec nous ? » Dit Ephiny en riant, alors que qu secouait l’humidité de sa cape, et s’installait à côté de la Régente, faisant signe à Cait de l’imiter. « Pas que ce ne soit pas bon de vous voir toutes les deux, mais… »

 

Granella leur lança à elle et à Eponine un regard sévère, puis elle détacha la mallette en cuir de sa ceinture et la laissa tomber sur la table. « Tenez. » Elle la poussa vers elles. « Des notes, des missives, des pensées au hasard, deux ou trois listes de courses, un centaure dans un noyer, tout ce que vous voulez. » Elle s’adossa dans la chaise et soupira. « Et on a traversé le pire temps qu’on ait eu depuis une éternité. » Elle jeta un coup d’œil sur sa gauche. « Pas vrai, Cait ? »

 

« Mince ! » Dit la jeune fille blonde en soupirant. « C’était horrible. Et la rivière est en crue… on a vu tellement d’animaux noyés. » Elle leva les yeux et sourit. « Salut, Toris. »

 

« Salut. » Le grand homme brun les salua, se laissant tomber dans un siège en face d’Ephiny tout en posant ses avant-bras sur la table. Son regard croisa nonchalamment celui de Granella, puis s’éloigna tout aussi nonchalamment. Une légère rougeur colora la peau de l’Amazone mince, presque invisible dans la faible lumière dorée. « La pluie s’est arrêtée… on dirait que ça s’éclaircit. » Il secoua la tête. « On a un groupe de personnes qui ont été inondées et qui arrivent sur la route… ça a l’air plutôt mauvais en amont de la rivière. »

 

Une serveuse vint à leur table, les bras chargés de plats en bois et de bols, ainsi qu’une marmite fumante qu’elle laissa sur la table, avec une louche. « Et voilà… » Elle sourit jovialement, et posa plusieurs miches de pain chaud, un couteau enfoncé dans l’une d’elles.

 

Toris se leva et se frotta les mains. « Puis-je vous servir mesdames ? » Demanda-t-il, en prenant la louche et un bol.

 

Un silence.

 

« Oh, soyez pas susceptibles », dit Toris en levant les yeux au ciel. « Les Amazones. » Il soupira d’exaspération.

 

Ephiny lui tendit son bol avec un sourire. » Elle t’a appris à le dire, hein ? » Elle entendit le rire étouffé d’Eponine et poussa l’Amazone plus âgée dans la jambe. « Tu imites l’intonation et le sourcil à la perfection. »

 

Toris leva le sourcil et cligna des yeux dans sa direction. « Je n’ai aucune idée de ce que tu veux dire. » Il s’interrompit et servit un peu de ragoût dans son bol, puis il leva les yeux alors qu’Hercule et Iolaus se glissaient dans la foule des dîneurs et se dirigeaient vers eux. « Ça va nous faire un changement agréable », marmonna-t-il, en rendant son bol à Ephiny avant de servir Eponine. « Bonsoir… » Il salua les deux nouveaux venus. « Prenez place… joignez-vous au groupe. »

 

Ephiny fit les présentations de ceux qui ne s’étaient pas encore rencontrés, et elle se réadossa dans sa chaise, sirotant lentement un grand verre de bière odorante, tout en regardant l’interaction autour de la table ; elle cacha un sourire quand elle repéra que Iolaus utilisait un stratagème très habile de redirection tout en ajoutant un peu plus de ragoût dans le bol d’Hercule quand le demi-dieu était distrait par ailleurs. Ce n’était pas… songea Ephiny, que le grand homme aux cheveux couleur fauve ne semblait pas vraiment lui-même…Il sembla un peu timide au début, et elle n’était pas sûre que ce n’était pas son attitude naturelle, parce qu’il se trouvait dans un groupe d’étrangers, ou bien que ce soit dû à ses épreuves récentes.

 

Iolaus, faisant équipe avec une Cait enthousiaste, le fit cependant sortir de sa réserve, alors que la jeune Amazone mince le mitraillait de questions sur ses aventures qu’Ephiny était amenée à croire qu’il avait totalement oubliées. Il semblait très gentil, et pas du tout comme elle s’était attendue, étant donnée sa réputation.

 

Ce qui, assez étrangement, était exactement ce qu’Hercule pensait des Amazones.

 

Ils regardèrent tous dans la direction de la porte qui s’ouvrait et un petit groupe de villageois entrèrent en masse, conduisant à demi, portant à demi, une femme à l’air confus, qui pleurait d’épuisement, et tendait la main pour toucher la forme de deux enfants, doucement portés dans les bras de deux villageois.

 

Toris se leva et s’excusa, puis s’avança vers le groupe et fit un signe de tête au chef. « Ectris ?… Qu’est-ce qui se passe ? »

 

La femme leva les yeux vers lui et une expression curieuse traversa son visage.

 

« Pauvre fille », dit Ectris en soupirant. « Une crue, en amont à environ 30 lieues… leur chariot a été balayé à un gué et emporté. »

 

« On aurait été tués », hoqueta la femme. « Le chariot se dirigeait en aval vers les coins difficiles… je savais qu’on n’allait pas s’en sortir… mais… » Son regard se posa à nouveau sur Toris, puis se détourna brusquement et elle cligna des yeux en regardant la salle. « Mais une déesse de la rivière est arrivée… et nous a sauvés. »

 

Maintenant un grand groupe de villageois étaient agglutinés tout autour, et Toris sentit, plus qu’il ne vit, la présence massive d’Hercule près de son épaule. « Une déesse de la rivière ? » Demanda le demi-dieu, le front plissé. « Je ne pensais pas… »

 

Toris sourit et croisa les bras ; il regarda le sol puis leva les yeux. « Une déesse de la rivière. »

 

« Oui. » La femme hocha la tête, le fixant toujours du coin de l’œil. « Elle a sauté directement sur le chariot, et elle nous a attachés fermement à la rive… on est sorti et venu ici. »

 

« C’est incroyable », murmura Hercule.

 

Toris rit légèrement. « Non… pas vraiment… » Il regarda la femme, la clouant de son regard bleu clair. « Dis-moi… cette… déesse de la rivière… est-ce que, par hasard, elle… oh… me ressemblait ? »

 

Invité ainsi, la femme s’autorisa de le fixer franchement et longuement. « Oui », finit-elle par dire dans un souffle. « Je ne pourrai jamais oublier ces yeux. » Son visage se tendit d’angoisse et elle regarda autour d’elle. « Quel genre… d’endroit… c’est ici ? » Son regard s’agrandit et elle observa la silhouette massive d’hercule, puis les vêtements en cuir et les armes des Amazones.

 

Toris lui tapota le bras pour la réconforter. « Détends-toi. Tu es à Amphipolis, lui c’est Hercule, voici les Amazones, et ça n’était pas une déesse de la rivière, c’était ma sœur, Xena. »

 

« T… ta… ta… sss… » Les yeux de la femme firent le tour de sa tête et elle s’effondra, sauvé de l’écrasement au sol par la prise rapide de Toris, et le plongeon encore plus prompt d’Ectris.

 

« Oups », dit Toris en soupirant. « C’était un peu trop pour elle, je pense. » Il regarda Ectris et un autre villageois soulever la femme et l’emporter, suivis des deux hommes qui portaient les enfants. Le plus âgé des deux cligna des yeux en direction de Toris et lui fit un sourire hésitant.

 

« On pensait que c'étaient des déesses de la rivière… parce qu’elles ont disparu dans l’eau après nous avoir sauvés… et on ne les a plus revues », expliqua doucement le garçon.

 

Les hommes partirent et ils se regardèrent les uns les autres. « C’est… étrange… qu’elles ne soient pas revenues voir si ces gens allaient bien », dit Toris, d’un ton hésitant.

 

Un autre silence. « Je suis sûre qu’elles vont bien », tenta Hercule. « Tu sais… Xena est vraiment douée pour s’occuper d’elle. »

 

Un silence plus long. « Si on va les chercher, et qu’elles vont bien, on va se faire botter les fesses », déclara Ephiny.

 

Ils regardèrent tous Hercule. « Oh non… ne me demandez pas de protéger tout le monde. » Le demi-dieu leva la main et la secoua. « Elle a un crochet du droit vraiment méchant. »

 

Un autre silence. « On pourrait dire… » Iolaus pianota sur la table. « Que… on faisait des courses ? »

 

Des têtes se tournèrent. « Des courses ? » Réussirent à sortir en duo Ephiny et Hercule.

 

« Ouais… » Iolaus sourit. « On allait tous faire des courses pour… des cadeaux d’anniversaire. Et… on a entendu dire que Potadeia a un bon marché. »

 

« Elle ne sera pas dupe une seconde », déclara Toris d’un ton affirmatif. « Mais… je me sentirais mieux si on allait juste vérifier un peu la rivière… juste pour s’assurer qu’elles n’ont pas… perdu leurs provisions… ou quoi que ce soit. »

 

Ephiny soupira. « Je le ferais. »

 

Hercule hocha la tête. « Comptez-moi. » Il se tourna vers Toris. « Comment tu sais que c’était elle, à propos ? »

 

Toris ne répondit pas tout de suite, distrait, puis leva les yeux. « Oh… et bien, les gens ont ce genre de regard ‘je sais que je t’ai vu quelque part’ quand ils me rencontrent pour la première fois s’ils l’ont rencontrée avant moi. » Il tourna son regard vers la porte maintenant fermée. « Elle s’en est bien amusée. »

 

Hercule l’étudia pensivement. « Tu lui ressembles vraiment. » Son visage prit un froncement curieux.

 

Ils retournèrent à la table et s’assirent. « Alors… » Iolaus prit une gorgée de bière. « Toris… raconte-nous quelques histoires sur ta sœur quand elle était gamine. »

 

Des sourires prudemment réfrénés firent le tour de la table. « Ouais… Tor, allez », dit Granella en riant, posant une main légère sur son bras, qui se trouvait près d’elle sur la table. « Je parie que tu en connais de vraiment marrantes. »

 

Toris sentit un frisson sur son bras au contact, et succomba presque, mais il prit plutôt une profonde inspiration. « Hum… je… j’ai beaucoup de souvenirs partagés de mon enfance. » Il leva les yeux et croisa leurs regards. « Mais… ma sœur n’aime pas qu’on en parle… et je respecte ça. »

 

Ephiny se pencha en avant. « Allez, Toris, Gabrielle le fait tout le temps. »

 

Des yeux clairs, bleu glacier la clouèrent dans un regard familier. « Ce sont des histoires différentes, et je ne suis pas Gabrielle. »

 

Hercule s’éclaircit la voix. « Je pense… » Il hésita. « C’est plus que de la simple curiosité, Toris, personne ne sait grand chose sur Xena, elle ne parle jamais d’elle ou de sa famille. On ne savait même pas que tu existais jusqu’à il y a peu. »

 

Il fut environné de regards reconnaissants.

 

Toris se cala dans sa chaise, apaisé. « Et bien… je ne raconterai pas d’histoires marrantes, mais je vous raconterai comment c’était… de grandir. » Il sourit un peu. « Avec une sœur plus jeune qui pouvait défier n’importe qui, n’importe quoi, et le faisait en règle générale.

 

Tout le monde se pencha en avant.

 

****

 

Gabrielle laissa ses sens reprendre lentement conscience de son environnement avant d’ouvrir les yeux. Elle pouvait sentir la roche humide de la grotte, et l’air sec et froid, qui signifiait que le temps s’était éclairci. Le feu était toujours chaud dans son dos, et elle pouvait entendre le battement régulier et solide du cœur de Xena sous son oreille, et sentir la respiration régulière qui soulevait le bras qu’elle avait passé sur l’estomac de sa compagne.

 

Il y a de bien pires moyens de se réveiller, songea-t-elle dans un brouillard, même si nous sommes dans une grotte perdue au milieu de nulle part. Elle laissa un œil s’ouvrir doucement, et se retrouva en train de regarder le profil de Xena, une vision qui apporta immédiatement un sourire involontaire sur ses lèvres. La guerrière avait la tête tournée légèrement d’un côté, avec des mèches errantes de cheveux noirs qui tombaient sur son oreille et se mêlaient aux cheveux blonds roux de Gabrielle. Le barde prit une profonde inspiration et la relâcha, repoussant les souvenirs de la veille au milieu des terreurs fantomatiques éventuelles qui ne faisaient surface que dans ses rêves.

 

Elle savait qu’elle devrait se dégager de ce nid délicieusement chaud et aller remuer le feu, puis de mettre de l’eau à chauffer au cas où Xena aurait besoin de plus de quoi que ce soit qu’elle avait pris la veille. Cette pensée la fit frémir, et au même moment, elle sentit le bras enroulé autour de son dos se resserrer, et elle leva les yeux.

 

Un regard bleu acéré la regardait, surmonté d’un sourcil noir interrogateur doucement dressé. « Tu vas bien ? » La voix de Xena était un peu rauque, mais pas tendue comme la veille au soir, et il n’y avait pas de flou dans son regard.

 

Gabrielle sourit. « Très bien, merci. » Elle étudia sa compagne. « Et toi ? »

 

Le sourcil se recourba, en même temps que la lèvre de Xena du même côté. « Je me sens comme si on m’avait traînée dans une rivière pleine de rochers, en crue, avec rien d’autre qu’une chemise, mais autrement… » Elle leva les yeux et regarda l’ouverture. « On dirait que la journée est plus belle. »

 

Le barde ne lâcha pas le visage de Xena des yeux. « Oui, on dirait. » Puis elle rit un peu, et pencha la tête contre l’épaule de la guerrière. « Dieux, Xena… on ne peut même pas faire une ballade tranquille et agréable à Potadeia, hein ? »

 

Elle sentit les muscles de Xena se contracter légèrement lorsque celle-ci rit. « J’y pensais justement… écoute, on ferait bien de rester discrète sur cette petite aventure… » Elle lança un regard ironique à Gabrielle. « Ou bien on n'a pas fini d'en entendre parler. »

 

« Et ce n’est pas de ma faute cette fois ! » S’exclama gabrielle. « Tu ne peux pas me le coller, Oh Princesse Guerrière, qui saute dans les rivières tourbillonnantes pour sauver des malheureux réfugiés. » Elle chatouilla le ventre de Xena et cela lui valut un vrai rire, un son surpris, léger et heureux qui toucha le barde de façon inattendue au plus profond d’elle-même.

 

« Gabrielle ! Qu’est-ce que j’aurais pu faire d’autre… les laisser partir ? » Protesta la guerrière, toujours en riant. « Je me demande ce qui leur est arrivé… on a vu le chariot en revenant ici. » Elle s’interrompit comme le barde ne répondait pas, et elle baissa les yeux, passant ses doigts dans les cheveux clairs du barde qui cachait à demi le visage de celle-ci. « Gabrielle ? »

 

« Hum… désolée. » Le barde s’excuse en levant les yeux, un doux sourire aux lèvres. « Je… je … je n’ai pas l’habitude de t’entendre rire ainsi très souvent, et j’étais… oh, oublie. » Elle rit un peu. « Est-ce que je t’ai déjà dit, Xena… que simplement d’être avec toi me rend vraiment heureuse ? » Elle baissa le regard sur la chemise en lin de Xena, et laissa ses doigts voyager paresseusement sur les côtes de la guerrière. « Tu es vraiment une part indispensable de ma vie. »

 

Une main descendit doucement pour entourer sa joue, et lever son visage pour qu’elle puisse voir l’expression tranquille dans les yeux de Xena. « Je pense que tu sais que pour moi c’est deux fois pareil, n’est-ce pas ? » Son regard prit une tonalité nostalgique. « Ce que tu as choisi de faire hier… »

 

Gabrielle sourit un peu. « Tu as vraiment été surprise ? »

 

Une lueur de compréhension dans les yeux bleus. « Non… mais… »

 

Le barde leva la main et mit le bout de ses doigts sur les lèvres de Xena. « Pas de mais. » Ses yeux brillèrent. « En plus… j’avais hâte de te montrer les Champs. » Une joie tranquille commença à monter en elle, en voyant l’expression nouée de confusion se former sur le front de sa compagne. Elle ne sait pas… elle ne s’est pas rendue compte… oh dieux… ça va être la meilleure partie.

 

« Gabrielle », dit Xena en soupirant, sentant un nœud se former dans sa gorge. « Je ne pense pas… que tu le feras jamais, mon amour. » Je ne peux pas la laisser penser qu’il y a une possibilité… ce n’est pas juste pour elle.

 

Le barde se redressa sur un coude, et savoura l’instant. « Tu te souviens de ce rêve que tu as fait hier ? »

 

Le front de la guerrière se contracta. « Qu’est-ce qu’elle… où… oh… « Oui… mais Gabrielle, qu’est-ce que ça a à voir avec… »

 

« Une plage… à l’aube, l’odeur de l’océan, la lumière claire du corail… les cris des oiseaux… » Souffla Gabrielle, un sourire plissant son visage jusqu’à ses yeux. « Du sable clair, très fin… »

 

Je ne me souviens pas avoir été aussi précise, songea Xena. « Hum… oui, mais comment… »

 

« Xena, ça n’était pas un rêve », murmura le barde. « Je connais cet endroit… j’y suis allée… une fois. » Elle s’interrompit. « En Thessalie. »

 

Xena se figea, la fixant, oubliant de respirer. Elle ne peut pas être en train de dire ce que je pense que j’ai entendu. Pas possible. Ce n’est pas possible… je sais bougrement bien que ce n’est pas possible. Mais les yeux verts brillaient vers elle avec une connaissance douce et assurée.

 

« Il y avait un endroit brillant… un passage… » Dit Gabrielle dans un souffle. « Et derrière ça, Xena… ce sont les Champs… je le sais… je suis passée au travers. » Elle rit à la vue de l’expression absolument stupéfaite du visage choqué de sa compagne. « Joyeux anniversaire. » Ces mots prononcés avec un sourire joyeux et espiègle, alors qu’elle penchait la tête pour l’embrasser.

 

Est-ce que ça pouvait… non… comment ça aurait pu ? L’esprit de Xena tourna à cent à l’heure. Après toutes les choses horribles, dégoûtantes, diaboliques que j’ai faites… ce que j’étais… ce n’est pas possible… pas possible… Mais les mots anciens d’une âme sage volèrent dans son esprit.

 

Tout le monde pense que la haine est la plus puissante des émotions, Xena… parce qu’elle donne la force, et le feu, et la volonté d’exécuter pratiquement tout. Et ils pensent que l’amour rend faible… parce qu’il draine votre énergie, et tourne votre esprit vers les choses douces et aimables.

 

Mais… je vais te dire ceci, l’amour rend possibles des choses que la haine ne rendra jamais… parce qu’il t’inspire vers la grandeur, et donne une raison de vivre bien plus forte que n’importe quoi d’autre dans ta vie.

 

Comment cela se pourrait-il ? Son esprit protestait toujours. Je ne suis pas si différente… je suis toujours une tueuse… toujours… pleine de toute cette noirceur… toujours… l’Elue d’Arès.

 

« C’est ce pour quoi tu l’utilises qui compte. » Les mots de Gabrielle firent écho. « Si tu l’utilise pour battre le mal, c’est tout ce qui compte, Xena »

 

Peut-être.

 

« Tu étais le mal… tu connais le mal… maintenant tu peux l’utiliser pour combattre le mal. » Le jugement de M’Lila tournoya autour d’elle comme des papillons de nuit dans le crépuscule.

 

Peut-être.

 

Elle leva les yeux vers le regard patiemment attentif de Gabrielle, et, très lentement, elle sentit un sourire se former sur ses lèvres. Auquel celui de sa partenaire fit immédiatement miroir. « C’est vrai ? » Demanda-t-elle interrogative.

 

Le barde traça délicatement son visage d’un doigt tremblant. « Oui, c’est vrai », affirma-t-elle doucement. « Tu vois ? Je t’avais dit que tu étais coincée avec moi. »

 

Pour toujours. Les mots prirent soudain une nouvelle signification. Sa vie également, glissant sur une échelle éthérée du négatif au positif. « Je… je… dieux… »

 

Gabrielle se mit à rire. « Oui, c’est vrai… ouahhh ! ! ! ! ! » Elle s’agrippa lorsqu’elle fut soudainement soulevée et se sentit ensuite jetée dans les airs avec une aisance stupéfiante. « Hé ! ! ! ! » Son discours fut interrompu lorsque des bras puissants la rattrapèrent, et elle sentit la pulsion de joie qui parvenait de leur lien, et qui l’envoya bouler aux confins de l’étourdissement. Elle leva les yeux et se retrouva capturée dans un flamboiement de bleu foncé et elle rendit son sourire éclatant à Xena. « Pas que, je te le dis, j’ai envie de refaire ce tour bientôt. »

 

Xena rit et ferma les yeux, inspirant la joie qui les entourait comme une couverture. De l’énergie la parcourut, faisant frissonner sa peau, et elle rouvrit les yeux, et bondit vers l’entrée de la grotte, où la riche lumière du soleil se déversait, transformant le rocher gris ardoise en argent verdoyant. Elles regardèrent la vallée de la rivière, où l’eau en crue reflétait le soleil en miroir comme des fléchettes, et la végétation brisée était étalée au hasard.

 

En dessous, un cerf mordillait timidement quelques pousses, et au-dessus, un faucon prit son envol, ses plumes sombres contrastant avec le ciel bleu sans nuage.

 

« Belle journée », commenta Xena, en souriant follement, regardant un Arès qui sautillait joyeusement.

 

Gabrielle ne répondit pas, elle se contenta de glisser les bras autour du cou de Xena et l’étreignit de toutes ses forces. Elles restèrent ainsi quelques minutes, puis Xena laissa passer un soupir heureux, et posa son menton sur la tête du barde. « Tu as faim ? »

 

Les yeux verts la regardèrent au-dessus d’un sourire lumineux. « Bien sûr… et toi ? » Gabrielle se pencha et baissa la tête. « Je t’ai entendu grogner là. »

 

« Ouaip », acquiesça joyeusement Xena. « Qu’est-ce qui te ferait plaisir ? » Ses yeux brillaient d’une joie espiègle. Elle posa doucement le barde sur le sol, mais garda un bras autour de ses épaules. « Hmm ? »

 

« Toi. » Gabrielle lui sourit comme un petit diable. « Mais je prendrai ce qu’on a en réserve. » Elle tira légèrement Xena. « Viens… »

 

 

***********

 

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