TROPICAL STORM

 

Tempête tropicale

 

de Melissa Good

 

 

traductrice : Fryda

 

 

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Partie 11B

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Chapitre 93

 

Un autre rêve. Cette fois, l'eau était froide mais c'était bon sur sa peau surchauffée alors qu'elle retirait le vêtement capitonné épais qu'elle portait et se jetait dans la source. Ses bras lui faisaient mal mais c'était une bonne douleur et elle les étira, en brassant l'eau avec une énergie qu'elle ne se souvenait pas avoir eue récemment.

 

Elle tourna dans l'eau et nagea dans l'autre sens, sentant le froid sur son corps contraster avec la chaleur du soleil au-dessus de sa tête, et elle soupira de contentement purement animal. L'air de l'été était doux et le bourdonnement des cigales tout près reprit lorsqu'elle ralentit son mouvement et ferma les yeux, se laissant aller dans la paix de l'après-midi finissant et la connaissance qu'elle n'avait rien d'autre à faire ce jour-là que de finir sa nage et de rejoindre…

 

Elle se retourna en attendant quelqu'un qui courait et vit un large sourire et des cheveux brillants et clairs, alors qu'une silhouette familière plongeait des rochers dans l'eau près d'elle, la trempant d'une vague de liquide froid. Elle attendit, un sourire sur les lèvres, jusqu'à ce que l'autre femme fasse surface, puis elle balaya une brassée d'eau vers elle, la faisant s'étrangler d'outrage.

 

Il y avait de l'espièglerie dans ces yeux verts et une expression taquine, et elle plongea après elle sous l'eau claire et froide pour attraper une cheville lorsqu'elle tenta de s'échapper. Elle put entendre le couinement de protestation à travers l'eau lorsqu'elle tira en arrière et se trouva soudain submergée lorsqu'une forme musclée et longiligne renversa les directions et se lança avec force au-dessus d'elle.

 

L'instinct amena ses bras en l'air comme pour attraper et elle plaça son corps, reculant un peu mais maintenant la prise comme si ce n'était rien de plus qu'un sac de patates. Des bras autour de son cou et elle se sentit sourire en baissant les yeux vers le visage malicieux. Un sourire en retour, chaleureux et aimant et elle se tint à moitié hors de l'eau, la laissant s'écouler d'elles et sentant le soleil réchauffer la fraîcheur.

 

Elles s'embrassèrent, des lèvres chaudes contre le contact glacé de l'eau alors que le doux cri d'un faucon faisait écho au-dessus de leurs têtes, et elle était consciente d'un sentiment submergeant de bonheur qui semblait monter en spirale d'elle vers le ciel très bleu et l'oiseau qui volait en cercles. Il cria de nouveau lorsqu'il prit son envol.

 

Il retentit presque en même temps que le bruit strident du réveil, qui fit sortir Dar de son rêve dans la réalité de l'avant-aube, avec un hoquet. Elle tendit la main et frappa le réveil, le faisant taire puis elle reposa sa tête sur l'oreiller et laissa son cœur commencer à se calmer. Mon Dieu. Elle cligna plusieurs fois des yeux, puis les baissa vers l'arapède blonde serrée contre elle.

 

Il lui fallut un moment pour s'y habituer. Elle avait été seule si longtemps, que de se réveiller dans cette chaude étreinte était un choc, bien que plaisant, elle devait l'admettre. Elle était sur le dos et Kerry était posée contre son côté droit, la tête sur l'épaule de Dar et une ferme étreinte autour de son estomac. Cela semblait être une de ses positions préférées, nota la grande femme, alors qu'elle regardait la respiration monter et descendre à un rythme régulier.

 

Dar sentit un sourire faire son chemin sur son visage alors qu'elle touchait doucement du bout des doigts, la chevelure qui descendait en cascade sur sa poitrine, en les emmêlant avec une fascination paresseuse. Elle m'aime. La pensée fit le tour de son esprit, le nettoyant de la brume du sommeil. Elle l'a dit. Les autres ne l'avaient jamais fait… oh elles parlaient de sexe, et d'engagement… mais ne levaient jamais les yeux vers elle pour lui dire…

 

Est-ce que tu me trouves idiote ? Dar savoura la question avec un petit soupir. Non, je ne pense pas que c'était idiot. Qu'aurais-je donc dit… comment l'aurais-je exprimé si ça avait été moi ? Elle grogna dans un rire silencieux. Comme si j'avais pu le faire. J'avais tellement peur qu'elle ne s'éloigne. Dar jura contre sa propre insécurité. Je suis contente qu'elle ait plus de cran que moi… et mon Dieu, ce par quoi elle est passée. Sa colère remuait de nouveau en pensant à ce que son amie avait dû endurer.

 

Salauds… Comment pouvaient-ils faire ça à une gamine ? Elle secoua un peu la tête. Et cette merde de garde du corps…elle se demanda s'il avait juste brutalisé Kerry ou si… ses mains touchèrent la peau douce du bras de Kerry. L'avait-il violée ? Que Dieu lui vienne en aide s'il l'a fait et que je le rencontre jamais.

 

Dar frissonna un peu à la pulsation d'énergie sombre qui passa en elle. C'était une lame sauvage et violente qu'elle ne se laissait pas souvent ressentir, mais elle savait que c'était là, et ce à quoi sa colère l'amènerait si elle n'était pas prudente.

 

Et à regarder le visage pâle et innocent niché contre sa peau, elle savait qu'elle ne souhaitait pas être prudente.

 

Kerry choisit ce moment pour remuer, marmonnant un peu dans la poitrine de Dar avant de lever la tête et de regarder dans l'obscurité, ses yeux trouvant ceux de son amie. " Il fait noir. " Dit-elle en étouffant un bâillement. " Est-ce que tu t'en rends compte ? "

 

" Oui, oui. " Acquiesça sa compagne. " Ça l'est assurément… c'est le meilleur moment pour courir. " Même dans la lumière diffuse, elle put voir les sourcils clairs se lever d'un air désapprobateur. " Je me lève à cette heure-ci habituellement. "

 

Kerry lui lança un regard incrédule. " Dar, tu ne penses quand même pas aller courir dans le noir, n'est-ce pas ? Tu es blessée. " Protesta-t-elle.

 

" Non, je ne le suis pas. " Nia Dar. " Je vais bien… ça ne fait pas du tout mal ce matin. " Elle prit une profonde inspiration pour le démontrer. " Tu vois ? " C'était un peu tendre mais le sommeil avait beaucoup aidé et elle se sentait vraiement mieux. " En général je cours environ… hum… douze kilomètres le matin. " D'accord, c'était exagéré. Mais pas tant que ça.

 

Kerry posa la tête sur sa main et regarda la grande femme pensivement. " C'est dégoûtant. " Commenta-t-elle, puis elle glissa une main entre les boutons de la chemise de Dar et laissa ses doigts glisser sur la peau lisse. La chaleur de la veille avait diminué et le bleu ne semblait plus causer autant de douleur à sa victime après tout. " Hmmm… je ne sens pas de gonflement. Je présume que tu as raison. "

 

Dar cligna plusieurs fois des yeux, savourant le toucher amical des doigts de Kerry, qui bougeaient maintenant en cercles paresseux contre sa peau. Cela la détendait, elle s'en rendit compte et elle se retrouva à étouffer un bâillement en réaction. " Mm… arrête ça… tu me fais me rendormir. " Se plaignit-elle d'un air désabusé.

 

" Oh vraiment ? " Dit Kerry d'un air songeur avec un petit sourire narquois. " Bien, bien, bien… regarde-toi… c'est mieux qu'un hypnotiseur avec son pendule. " Elle fit des cercles plus larges et mordit sa lèvre d'amusement alors que les yeux bleus, à peine visibles dans la lumière de l'avant-aube, se refermaient. " Allons, Dar… laisse-toi aller… même si tu te sens bien, tu as pris un sacré coup hier soir. " Lui dit Kerry avec raison.

 

" Oui… je ne me fais pas peindre en chocolat tous les soirs. " Murmura Dar avec les coins de sa bouche redressés.

 

" Ce n'est PAS ce à quoi je pensais et tu le sais bien. " Kerry se mit à rire. " Lâche-toi un peu, Dar… nous avons une longue journée aujourd'hui. La délégation de Pittsburgh arrive à dix heures. " Dit-elle d'un ton convaincant, en souriant malicieusement lorsque son argument passa. " Par ailleurs, je suis vraiment à l'aise… " Elle se rapprocha, sentant la légère pression de la main de Dar sur son dos.

 

" Arrrgggg… juste un moment, alors. " Grommela Dar en se rendant.

 

" Que dis-tu de l'aube ? Ça te va ? " Répliqua Kerry sans s'arrêter de s'occuper d'elle un instant.

 

Pas de réponse et Kerry sourit au son de la respiration profonde et égale. " Personne au monde ne croirait ça, tu sais. " Murmura-t-elle doucement à la cadre assoupie. " Mais ne t'inquiète pas… je ne raconterai rien. " Elle se réinstalla avec aise et expira. Alors c'était ça d'être amoureuse. Elle regarda par la fenêtre vers les étoiles toujours présentes dans le ciel sudiste. J'aime bien ça, décida-t-elle en fermant les yeux.

 

La nuit dernière s'était révélée être une grande surprise. Elle savait qu'elle n'avait aucune intention de mentionner ce que Colleen appelait le mot avec un grand " A ", pas la nuit dernière, pas avant d'avoir quelques indices sur ce que Dar ressentait, mais…

 

Mais… elle avait eu un soupçon même sans aucun mot de la part de la grande femme. Il n'y avait pas besoin d'être Madame Soleil pour saisir la nervosité de Dar, ou l'intensité de ses sentiments. Kerry ouvrit les yeux et les leva vers le visage de la grande femme. Pour quelqu'un qui gardait autant de contrôle, tu n'as pas de prise sur les trucs fleur bleue, n'est-ce pas ? Elle laissa de nouveau ses paupières se fermer, contente d'avoir parlé à Dar… de choses. La réaction de la cadre avait été gratifiante, à tout le moins. Kerry laissa le sommeil commencer à l'emporter, fermant les yeux un peu plus et respirant à plein poumons l'odeur de linge propre et de sa compagne.

 

Puis elle les rouvrit. Mon Dieu, Kerry… tu as une maîtresse… peux-tu imaginer cela ? ? ? ? Les yeux verts regradèrent partout dans la pièce puis tombèrent sur le visage de Dar, paisiblement endormie. C'est agréable de savoir que tu as meilleur goût que le Président Clinton… elle étouffa un léger rire. Et si je n'avais pas de raison de rester ici avant, maintenant j'en ai assurément une.

 

Abandonner ceci… était hors de question. Et elle était prête à faire face à sa famille pour cette simple raison.

 

 

 

Chapitre 94

 

Le téléphone bourdonna. " Oui ? " Dar appuya sur le bouton du haut-parleur et continua à taper, les yeux passant attentivement sur la feuille de calcul. " Qu'y a-t-il ? "

 

" Dar… la sécurité en bas vient juste d'appeler, quelqu'un pour vous. " l'informa la voix de Maria. " C'est… Michelle Graver "

 

Oh merde. Dar passa mentalement ses options. Un client important, probablement en ville pour une courte visite, qui voulait probablement la coincer pour ce dîner. Oh merde. " Bien sûr… faites-la escorter. " Elle soupira bruyamment. Juste ce dont elle avait besoin après une telle journée. Deux sessions de présentation, une demi-douzaine de disputes, une situation vraiment mauvaise résolue surtout par du pur entêtement de sa part… bon sang, elle avait eu hâte de partir.

 

Elle entra un message. " J'ai des ennuis… Michelle est là. " Elle cliqua sur envoi puis revint un moment à sa feuille de calcul.

 

" Tu pourrais l'emmener chez Shorty pour le dîner. (sourire) " Répondit Kerry promptement. " Je parie qu'elle aurait de l'allure en ketchup. "

 

Dar rit pour elle-même. Shorty était le restaurant barbecue local, sur la route US 1 près de Dadeland. On y servait des côtelettes géniales et elle était en fait partiale vis-à-vis de leur nourriture, mais dire que c'était rustique n'était pas leur rendre justice. Au moins ils avaient mis l'air conditionné quelques années auparavant et ne dépendaient pas que des moustiquaires pour garder les insectes à l'extérieur. " Je pourrais aussi bien l'emmener chez McDonald's. " Pianota-t-elle en retour, puis elle leva les yeux lorsque la porte s'ouvrit pour révéler la silhouette ronde de Maria. " Oh… je pensais que c'était elle. "

 

" Non, non… " Maria s'avança et lui tendit un dossier. " C'est le contrat pour le nouveau client à New York. "

 

" Merci. " Dar lui sourit et prit le dossier, le mettant sur son bureau et se penchant en arrière alors qu'elle sauvegardait la feuille de calcul. " Bien… c'est fait… le premier trimestre de projections pour la croissance des infrastructures… nous allons être abattus si nous n'achetons pas plus de locaux. " Elle s'étira et fit craquer son cou, puis elle mit les mains derrière sa tête et laissa passer un soupir satisfait.

 

Maria la regarda. " Vous vous sentez bien, non ? " Demanda-t-elle, un peu étonnée de la différence visible dans sa chef.

 

Dar s'interrompit puis hocha finalement la tête. " Ouais… ça doit être tout ce repos. " Elle laissa un blanc. " Je n'ai pas eu un seul mal de tête depuis des semaines. "

 

" Tcha… c'est bien. " Maria lui sourit lorsque les yeux de la femme brune tombèrent sur la sculpture des dauphins et restèrent là.

 

Dar avait surpris tout le monde en étant de fort bonne humeur toute la journée, malgré quelques désastres et une lutte rude avec José. Maintenant, elle se balançait un peu d'avant en arrière lorsqu'elle entendit la porte de l'ascenseur s'ouvrir. " Voilà les ennuis, si je ne me trompe pas. " La cadre soupira, réfléchissant à ses options et prenant une inspiration.

 

Des talons aiguisés et en staccato sur le carrelage puis le garde de sécurité ouvrit la porte et Michelle Graver fit un pas pour le contourner, regardant le bureau avec appréciation. Elle finit par laisser ses yeux s'arrêter sur Dar, qui était toujours au fond de sa chaise, les mains croisées devant elle. " Bonjour, Dar. "

 

" Bon après-midi, Michelle… qu'est-ce qui vous amène dans le coin ? " S'enquit Dar avec civilité. " Je vous en prie… asseyez-vous. " Elle fit un geste vers l'un des sièges capitonnés devant son bureau. " Que puis-je pour vous ? " La femme rousse était habillée d'un tailleur en soie bien coupé, qui collait à sa silhouette, laissant peu de choses à l'imagination.

 

" Et bien, la réunion du conseil d'administration du tourisme de l'état cette semaine… vous savez que nous en faisons partie. " Déclara Michelle en s'asseyant avec grâce. " J'avais quelques heures de libre ce soir, je pensais que je pourrais m'arrêter et voir si je pouvais réclamer mon dû. " Ses yeux trouvèrent ceux de Dar et un sourire léger et fugace passa sur ses lèvres. " Si vous n'êtes pas trop… occupée. "

 

Une alarme légère résonna dans la tête de Dar. " Je n'ai rien de prévu. " Répliqua-t-elle avec précaution. " Y a-t-il un endroit que vous aimeriez essayer ? " Paresseusement elle jouait avec l'idée de dire à la femme qu'elle avait d'autres plans. Oh… désolée, Michelle… j'ai promis à Kerry d'aller au golf miniature avec elle… je déteste rater ce trou de l'énorme éléphant rose… vous comprenez, n'est-ce pas ?

 

" Et bien, nous sommes chez vous, Dar… pourquoi ne pas suggérer quelque chose ? " Michelle croisa ses jambes et s'appuya sur le bras de la chaise, un sourire prédateur sur le visage. " Vous connaissez sûrement tous les endroits sympathiques par ici. "

 

La grande femme réfléchit. " Vous êtes descendue dans quel hôtel ? "

 

Le sourire s'élargit de manière perceptible. " Le Hyatt, au centre ville. " Ronronna-t-elle.

 

" Vous aimez les fruits de mer ? " Demanda Dar poliment.

 

" Je les adore. " Répliqua Michelle.

 

Les yeux bleus la regardèrent avec méfiance. " Très bien… Monty en bas dans le Grove est un bon endroit pour ça… je pourrais passer vous chercher… disons à sept heures ? "

 

Un hochement de tête. " Ce serait parfait… je pourrais vous mettre au courant du plan de mise en œuvre… et nous pourrons… parler un peu. " Elle se leva, ayant obtenu ce qu'elle voulait, et elle redressa proprement sa veste. " Chambre 1243. " Elle laissa ses yeux traîner sur le corps de Dar, puis se retourna pour traverser la pièce et s'arrêter à la porte. " A tout à l'heure. "

 

Elle se glissa dehors et Dar fit une grimace. " Ça va être un gâchis de bons crabes. " Elle soupira. " D'un autre côté, peut-être que je pourrais faire en sorte que l'un d'eux la morde. "

 

 

 

Chapitre 95

 

Kerry ouvrit la porte et se glissa à l'intérieur, elle posa les sacs d'épicerie et donna un coup de pied au panneau derrière elle pour fermer. Un coup d'œil au réveil lui dit qu'il était bien plus de dix heures, et elle expira, ayant passé la soirée à faire toutes les choses auxquelles elle pouvait bien penser.

 

Ou inventer, pour le coup, tout ce qui gardait son esprit loin de l'endroit où était Dar, et d'avec qui elle était.

 

" La jalousie n'est pas une émotion plaisante. " Informa-t-elle les poissons. " Ne laisse personne te dire le contraire, Scully… c'est nul. " Marchant péniblement vers la cuisine, elle posa les sacs, mettant les choses froides dans le réfrigérateur. " Ce n'est pas que ça m'ennuie, vous savez… je sais que Dar ne l'aime pas. "

 

Scully et Mulder firent des bulles.

 

" Non, vraiment… elle ne l'aime pas… elle faisait les jeux de mots les plus amusants à son sujet en partant… bien que je pense que c'était surtout pour me remonter le moral. " Elle lança un regard malicieux vers les poissons. " J'essayais vraiment de ne pas ressembler à un monstre aux yeux verts (NDLT : the green eye monster, c'est comme ça que les anglophones surnomment la jalousie…), mais bien sûr… c'est vraiment dur pour moi, étant donné que j'ai les yeux verts, vous voyez ce que je veux dire ? "

 

Mulder fit une bulle. Scully s'approcha et l'embrassa sur les lèvres.

 

" Ooohhh… il y a au moins sept millions de fans sur l'Internet qui tueraient pour voir ça. "

 

Les Bandits Solitaires s'amenèrent lorsqu'elle diffusa un peu de nourriture dans l'aquarium. Elle s'appuya contre le bord en les regardant. " C'est le boulot, les gars. Rien de personnel. " Elle soupira. " Mais je ne peux pas m'empêcher de vouloir lui arracher ses sourcils roux et les lui faire manger avec une ventouse. " Elle se prit à souhaiter à moitié que Dar ait tout bonnement refusé le rendez-vous, même si elle savait qu'il était de la responsabilité de sa chef de maintenir des bonnes relations avec les nouveaux clients.

 

Mais est-ce que ça devait être ce genre de relations ? Kerry se sentait un peu malade à chaque fois qu'elle pensait à Michelle, à son hôtel de rêve, et à sa silhouette exotique. C'était un sentiment horrible qu'elle ne pouvait empêcher… et elle réfléchit brièvement à tout mettre de côté et aller se coucher.

 

Ce serait fini au matin.

 

N'est-ce pas ?

 

" Merde… allons, Kerry… reprends-toi… elle a refusé un dîner avec elle pour aller s'amuser dans le parc avec toi il y a quelques semaines… elle ne pouvait pas éviter ça… l'autre s'est pavanée dans son bureau et lui a pratiquement forcé la main. " Se dit-elle.

 

N'est-ce pas ? Avec un soupir, elle retourna à la cuisine et mit tout de côté, y compris le lait et le sirop au chocolat qu'elle avait achetés totalement sans en avoir conscience. Puis elle se changea et s'assit sur le divan, laissant ses doigts glisser sur le tissu et se souvenant de lundi.

 

Est-ce que ça n'était vraiment qu'il y a trois jours ? Ça paraissait plus loin.

 

Le réveil faisait son tic-tac dans le silence et elle pouvait entendre le léger bourdonnement du moteur de l'aquarium. La sonnerie du téléphone la surprit et elle sursauta, puis se leva et y alla. " Allô ? "

 

" Kerry… je suis contente de t'avoir. " La voix de sa mère résonnait dans le combiné. " Tu n'es pas souvent à la maison ces derniers temps, ma chérie… j'essaie depuis deux jours. "

 

Ouh… hmmm… je ferais mieux de me renseigner pour un transfert d'appel. Kerry tressaillit. " Désolée… je, hum… j'ai travaillé tard hier puis je suis allée à la gym… et nous sommes sortis ensuite. "

 

" Oh tu t'es inscrite à une salle de gym ? " La voix de sa mère avait l'air méfiant.

 

" C'est un prix spécial par la compagnie. " Lui dit Kerry. " Beaucoup d'entre nous l'ont fait… et je fais de l'aérobic… et de l'escalade… et… un peu d'autodéfense. " Elle rit légèrement. " C'est très amusant. "

 

Un moment de silence. " Et bien, je suis surprise que tu te mettes dans un tel truc au moment où tu vas partir, Kerry. " Déclara sa mère d'un ton désapprobateur. " Ce n'est pas ton genre. "

 

Une inspiration très, très profonde. " Maman, soyons raisonnables, d'accord ? Je ne peux pas laisser tomber ce travail et rentrer juste à cause d'un accident… c'est idiot. " Elle souhaita brièvement que Dar soit là ; elle avait besoin de la présence réconfortante de la grande femme. " C'est génial ici… c'est une si bonne occasion. "

 

" Ne sois pas bête. " Claqua sa mère. " Ton père te l'a dit… tu rentres à la maison et on n'en parle plus, Kerry… tout est arrangé. "

 

C'était presque comme si elle pouvait sentir des mains chaudes sur ses épaules, et une présence proche derrière lorsqu'elle se redressa un peu. " Non, je ne rentre pas, et si tu ne veux plus en entendre parler, c'est très bien, maman…mais j'ai la ferme intention de rester ici. " Lui dit Kerry fermement. " J'ai des amis ici et un emploi génial… je ne suis pas prête à lâcher ça. "

 

Un silence glacial. " Nous verrons ce que ton père a à dire à ce sujet. " Répliqua la voix avec colère. " Je ne peux pas croire que je t'entends dire ça… quelle ingratitude… de vivre là-bas te donne des idées horribles, et c'est la meilleure des raisons que je voie pour te ramener à la maison. "

 

Ça fit mal. " Je suis désolée que tu ressentes ça comme ça, maman… je ne voulais pas manquer de respect, à toi ou à papa, mais vous devez comprendre cela… " La ligne s'interrompit. Kerry soupira et raccrocha, laissant tomber le téléphone sur la table avec un bruit sourd. " Génial… super hyper méga génial.

 

 

 

Chapitre 96

 

Le restaurant était rempli aux trois-quarts et le doux cliquètement des couverts se battait avec la conversation basse et bourdonnante, alors que Dar penchait la tête, absorbant l'histoire que Michelle racontait au sujet de problèmes qu'ils avaient avec leurs serveurs. C'était triste. Dar avait compris quel était le problème depuis dix minutes mais elle ne voyait aucun intérêt à donner un cadeau à Michelle, si on considérait que les gens de son réseau avaient planché là-dessus pendant une semaine. " Vous pourriez passer un contrat avec nous pour que nous envoyions un analyste chez vous. " Offrit-elle avec un sourire franc.

 

Michelle joua avec sa fourchette et le regarda de dessous des cils légèrement couvert d'une teinte dorée. " Vous voulez dire que vous n'êtes pas capable de résoudre le problème vous-même ? Et bien Dar… je suis déçue. "

 

Dar réfléchit à répondre vivement au sujet des services et du fait qu'ils se payent, puis elle se mit simplement à sourire. " Oh… je ne peux pas résoudre les problèmes de tout le monde… mais je suis sûre que l'un de nos ingénieurs pourrait arranger ça. " Elle prit une gorgée du champagne que Michelle avait insisté pour commander, puis elle piqua un morceau de saumon et regarda dehors. La marina le long de laquelle se trouvait le restaurant était pleine de lumières clignotantes, des bateaux allaient et venaient à quai. Une fête battait son plein sur l'un d'eux, avec des barbus en shorts en jean et des femmes avec des hauts courts qui échangeaient des bières. Elle lutta contre l'envie de déboutonner son propre col et soupira intérieurement. " J'ai entendu dire le département des infrastructures… vos circuits fonctionnent. "

 

" Et bien… ça c'est une bonne nouvelle. " Michelle avait apparemment décidé de lâcher un peu. " Ça leur a pris assez longtemps. " Une critique.

 

Deux semaines pour un circuit T3 important, ce n'était pas long, mais Dar refusa d'argumenter là-dessus. " Le problème c'était votre accès, en fait… les gens du téléphone m'ont dit qu'il leur avait fallu six jours pour accéder à votre salle de commutation. " Elle eut un regard plaisant vers Michelle. " Difficile de terminer les circuits si vous n'avez pas d'accès aux locaux. "

 

Un sourire pincé en réponse. " Nous sommes très sérieux avec la sécurité. " Répondit-elle. " Tout comme vous… nous ne laissons pas les gens se balader dans nos bâtiments anonymement. "

 

Dar rit. " Allons, Michelle… deux techniciens en uniforme de la Southern Bell avec leur camion célèbre… est-ce que c'est anonyme ? " Elle mordilla un autre morceau de saumon en regardant innocemment la femme plus petite, qui décimait proprement une assiette pleine de crevettes farcies.

 

Graver ne répondit pas pendant un moment alors qu'elle avalait. " N'importe qui peut prendre un des ces stupides casques, et une chemise… nous ne prenons pas de risques. " Informa-t-elle Dar. " Bon… dites-moi, Dar… qu'est-ce qui amène quelqu'un d'aussi expérimenté que vous à prendre une novice pour assistante ? "

 

Ça arriva de côté et frappa sans prévenir. Mais Dar n'avait pas passé des années dans les conseils d'administration à perfectionner ses réactions pour rien. Elle prit une fourchette de pomme de terre et réfléchit sérieusement à la question. Pourquoi, Michelle… parce que c'est une jolie fille et que je suis tombée follement amoureuse d'elle dès que je l'ai vue, bien sûr.

 

Non, non… Dar… tu ne peux pas le dire comme ça à cette emmerdeuse. " Et bien… elle faisait partie d'un compte-client que nous avons consolidé il n'y a pas longtemps… et je pensais qu'elle avait un bon potentiel, alors j'ai tenté le coup avec elle. " Répondit-elle d'un ton égal. " Ça a payé…elle a envoyé un courrier à vos gens de l'Intranet pour leur dire comment faire mieux pour sécuriser votre réseau… considérant qu'elle était capable d'entrer dans vos routeurs principaux en passant votre protection électronique. " Une autre fourchette de pomme de terre suivit et elle mâcha innocemment alors que Michelle avalait apparemment de travers et prenait en hâte une gorgée d'eau. " Elle est bonne, et elle apprend vite… pourquoi ? "

 

" C'est juste une question. " Michelle s'éclaircit la voix. " En fait, elle a été plutôt impressionnante… c'est la fille de Kevin Stuart ? "

 

Dar hocha la tête. " Hmmhmm. "

 

Michelle sourit d'un air narquois. " C'est malin de votre part… ce n'est pas un ami de votre société. " Ronronna-t-elle. " Je sens un motif caché, là-dedans. "

 

C'est sûr que tu le sens… ce n'est simplement pas celui auquel tu penses, Michelle. " Pas vraiment… bien que ça pourrait devenir un atout. " Répondit Dar en balayant l'argument.

 

" Je suis sûre qu'elle a beaucoup… d'atouts. " Michelle lui sourit. " Mais assez parlé d'elle… dites-m'en plus sur vous, Dar. "

 

C'était comme si le dîner avait duré au moins trois semaines, se dit Dar, lorsqu'elles quittèrent finalement le restaurant pour l'air frais de la nuit. Elle en prit une bouffée puis s'avança alors que le valet amenait la Lexus. Elle attendit que Michelle s'installe puis elle se glissa dans le siège du conducteur, le reculant un peu pour l'adapter à sa haute taille.

 

" C'est agréable. " Michelle passa un doigt sur la surface en cuir. " Ce n'est pas ce que je vous voyais conduire, mais c'est agréable. "

 

Dar refoula une réponse et démarra la voiture. " Merci… je l'aime bien. " Elle passa la vitesse de la Lexus et tourna à droite sur Bayshore Drive, en direction de l'autoroute pour ramener Michelle à son hôtel.

 

Elle savait ce que Michelle mijotait. Ça avait été évident depuis le moment où elle était allée la chercher, lorsqu'elle avait mis un doigt sur la veste de Dar et l'avait complimentée sur son parfum. Et elle sentait visiblement que Dar était partante.

 

Dieu sait qu'elle l'avait été auparavant, et avec des gens moins attirants que Michelle Graver, qui avait belle allure, de l'expérience, qui était très sensuelle et certainement plus sûre d'elle que la douce et incertaine Kerry.

 

Kerry avait dit, avec une main chaude sur son bras lorsqu'elles s'étaient séparées dans le parking : " Dar, amuse-toi bien… ne te retiens pas si tu ne le veux pas. " Elle avait même souri. Alors c'était bon, non ? Kerry comprenait que c'était juste pour le travail… qu'elle n'aimait pas vraiment Michelle, c'était juste… le boulot.

 

Kerry comprenait. Ce n'était pas comme si ça voulait dire quelque chose et ce serait un moment rapide et agréable. Michelle partirait contente et il n'y aurait pas de mal.

 

Elle avança devant le Hyatt et gara la Lexus, se tournant à demi vers Michelle lorsque la femme la regarda avec une spéculation chaleureuse. " Nous y sommes. "

 

Un sourire arriva sur le visage de Michelle. " Vous montez ? " Sa voix était basse et assurée. " J'aimerais continuer notre conversation. "

 

Dar inspira pour répondre puis sursauta lorsque son téléphone mobile sonna. Elle le tira et l'ouvrit, en lançant un regard d'excuse à Michelle. " Oui ? "

 

" Dar… c'est Mark… nous avons un gros problème. " La voix du chef du GSI ronfla dans son oreille.

 

C'était l'excuse parfaite. Ça la déchargeait et ne laissait pas rejetée une Michelle qui regardait avec intérêt. " Attends, Mark. " Elle coupa le son du téléphone et se tourna vers la femme. " Pour autant que j'apprécie l'offre, Michelle… et c'est vrai… j'ai peu d'avoir à la décliner. "

 

Un sourcil parfaitement taillé fit une courbe. " Des problèmes ? " Elle montra le téléphone.

 

Dar croisa son regard. " Non… mais je suis avec quelqu'un et ce n'est pas mon style. " Bon sang, ça faisait du bien de le dire. Elle soupira intérieurement lorsque le visage de Michelle se raidit dans une fureur cachée.

 

Elle claqua la portière derrière elle et Dar s'appuya en arrière, sachant qu'elle venait de se causer un tas d'ennuis.

 

C'était étonnant comme ça faisait du bien. " OK ? Mark… qu'est-ce qui se passe ? " Elle lança la Lexus et s'éloigna de l'imposant bâtiment sombre.

 

 

 

Chapitre 97

 

Kerry arriva à peine à la porte lorsque le téléphone sonna pour la quatrième fois, ses patins glissant sur les dalles de l'entrée, et l'envoyant plonger dans la pièce. " Mon Dieu ! " Cria-t-elle alors que son corps trempé de sueur cognait le bord du divan, et elle attrapa l'instrument qui sonnait. " Yow ! " elle atterrit sur les fesses et perdit le téléphone, puis elle rampa vers lui le capturant finalement. " Allô ? " Elle grogna dans l'appareil en essayant de reprendre sa respiration.

 

Une pause. " Salut. " Une voix basse et vibrante lui répondit, un peu intriguée.

 

Chaque once de tension s'en alla soudain en Kerry, la laissant sur le sol comme une lavette humide et chaude. " Hé… désolée. " A l'arrière elle pouvait entendre de la musique qui jouait légèrement, à part ça, là où était Dar, c'était très calme. Elle regarda sa montre. Vingt-trois heures. Hmm. Son esprit s'allégea, après avoir été dans au fond toute la soirée. Je présume que ça n'a pas marché. Elle sentit un sourire tirer ses lèvres. Quel dommage.

 

" Tu vas bien ? " demanda doucement Dar.

 

" Je suis trempée, épuisée, furieuse et maintenant j'ai mal aux fesses. " Répliqua Kerry. " Autrement, je vais bien. Et toi ? Comment s'est passé le dîner ? "

 

Un rire léger. " Plutôt mal… je pense que j'ai fichu en l'air une relation de clientèle très importante. " La cadre soupira. " Pourquoi es-tu furieuse, sans mentionner trempée et épuisée ? "

 

Kerry croisa ses chevilles alourdies et regarda le plafond blanc pop-corn. " Oh… et bien, je faisais du patin. " Expliqua-t-elle. " Ma mère a appelé… je lui ai en quelque sorte annoncé que je ne rentrais pas… elle m'a raccroché au nez. "

 

" Ah. " Murmura Dar. " Désolée. "

 

" Pas moi. " Répliqua Kerry. " Mais ça m'a vraiment fichue en colère … et je… " Elle hésita. J'étais déjà bien tendue… non, elle n'a pas besoin de savoir ça. " J'ai décidé de faire sortir l'énergie en patinant. "

 

" Mm… je vois. Tu as l'air fatigué. " Commenta Dar. " Je devrais… hum… te laisser dormir. "

 

Un silence momentané. Kerry roula sur le ventre et mit le téléphone contre son oreille. " Où es-tu ? "

 

Un petit bruit de clic lorsque Dar laissa passer un rire. " Dehors, dans ton parking. " Admit-elle.

 

" Dar ! " Kerry sentit un rire arriver, et sa mauvaise humeur s'évanouit. " Viens ici… Mon Dieu… ne sois pas idiote… tu peux m'aider. Je pense que je me suis cassée le derrière. " Elle entendit le bruit solide de la portière qui se fermait à travers la porte à moitié ouverte, puis le doux pas rythmé qu'elle reconnut comme celui de Dar. Elle se tourna et regarda la porte s'ouvrir et la tête sombre passa d'un air inquisiteur. " Salut. " Elle remua un pied avec un patin vers la grande femme.

 

Dar mit ses mains sur les hanches et baissa les yeux vers elle, un léger sourire joueur sur ses lèvres. " Tu vas toujours faire du patin à moitié nue ? " Demanda-t-elle en clignant des yeux d'un air appréciateur vers le short court et le T-shirt coupé. " Tu pourrais me persuader d'essayer si c'est le cas. "

 

" Ah, ah, ah. " Kerry lui tira la langue. " Non… je ne le fais pas… mais tout le reste est à la lessive… je ne sais pas pourquoi, mais je n'ai pas encore eu le temps de la faire cette semaine. " Une pause. " Pas encore. "

 

La femme brune jeta sa veste et rejoignit Kerry sur le sol, s'étirant à son côté et posant sa tête sur une main. Elle avait échangé son tailleur pour un jean et une chemise en coton et elle avait l'air détendu et un peu décoiffé.

 

Juste comme Kerry l'aimait. Elle sourit. " Alors… est-ce que Michelle va t'envoyer Picsou ou quoi ? "

 

Dar haussa les épaules. " Elle pourrait… je verrai… je ferais mieux d'envoyer une note à la comptabilité pour les avertir qu'elle va probablement être la pire des garces… " Elle garda le silence et regarda les clés dans sa main. " C'est dommage, mais… "

 

Kerry roula sur elle-même et lui fit face. " Mais quoi ? Dar, excuse-moi de dire ça, mais c'est une truie. " La jeune blonde fronça les sourcils. " Elle te courait après comme… comme… "

 

" Une chatte en chaleur ? " Demanda Dar avec un pincement espiègle des lèvres. " C'est peut-être le syndrome de la petite dont on parle tant. "

 

" Hé ! " Kerry lui lança un regard. " Les petits n'ont pas de syndrome. " Protesta-t-elle. " Nous sommes simplement furieux parce que nous ne pouvons pas atteindre les placards de la cuisine. "

 

Dar rit de bon cœur. " De toute façon… tu es plus grande qu'elle. "

 

Kerry réfléchit. " Oui, c'est vrai… en y repensant… Je savais qu'il y avait quelque chose qui me plaisait en elle. "

 

" Tu es bien plus jolie qu'elle, aussi. " Continua la grande femme, sa voix s'adoucissant. " A l'extérieur, et très certainement à l'intérieur. "

 

Sa compagne rougit et baissa les yeux. " Merci. " Répliqua-t-elle doucement. " Je suis contente que tu le penses. "

 

Dar l'étudia pendant un moment. " Ta mère a été plutôt rude, hein ? " Elle tendit la main et couvrit celle de Kerry. " Désolée que tu aies dû passer par-là… je sais que c'est dur. "

 

Kerry regarda la main sur la sienne et laissa un peu ses doigts explorer la surface. " Dar… je n'allais pas dire ça mais… tu sais, l'une des choses qui va mal entre mes parents et moi, c'est que nous ne communiquons jamais… et je ne veux pas commencer comme ça avec toi. " Elle leva les yeux. " Je suis vraiment contente que tu ne sois pas allée avec elle ce soir. Ça me dérangeait vraiment."

 

Les yeux bleus clignèrent. " C'est vrai ? " Les mots étaient doux. " Je suis contente que tu me l'aies dit. " Dar leva leurs mains jointes et les effleura de ses lèvres. " J'étais un peu… surprise… lorsque tu m'as dit d'y aller…ça me donnait l'impression de… " Elle s'arrêta et secoua la tête. " D'être presque déçue. " Admit-elle.

 

" Oh. " Kerry y réfléchit. " Vraiment ? "

 

Dar hocha la tête. " Vraiment. "

 

" Hmm… je… " Kerry se mordit la lèvre. " Je pensais que je ne devrais pas faire dans le genre… hum… 'ne la touche pas !'… je veux dire que nous aurions pu finir chez Jerry Springer (NDLT : il s'agit d'un talk-show - où les gens viennent étaler leurs problèmes et se battre en public, très prisé aux Etat-Unis, et même en FranceJ). "

 

Un sourire espiègle vint sur les lèvres de Dar. " Kerry, laisse-moi te dire quelque chose… j'aurais payé cher pour te voir lui frapper les mains… la prochaine fois que quelqu'un me force à sortir, tu viens avec moi. " Un arrêt. " Alors… qu'est-ce qui s'est passé avec ta mère ? " Elle croisa les yeux verts surpris. " Tu détestes parler d'eux, n'est-ce pas ? "

 

Kerry soupira. " Oui, c'est vrai… " Elle lança un regard désabusé vers Dar. " Je souhaiterais pouvoir oublier que je les ai parfois. "

 

Le téléphone sonna et Kerry sursauta presque de frayeur parce qu'il se trouvait sur son estomac. " Mon Dieu… " Elle le prit et appuya sur le bouton pour répondre. " Allô ? "

 

" Salut, sœurette. " La voix d'Angela paraissait à moitié entre la nervosité et l'amusement.

 

" Oh… salut, Angela. " Elle articula 'ma sœur' pour Dar. " Laisse-moi deviner… je suis le sujet de conversation ce soir. "

 

Dar roula sur elle-même et posa sa tête sur le ventre de Kerry, les yeux sur le visage de la jeune femme.

 

" Oh mon Dieu, Ker… que diable leur as-tu fait ? Maman nous fait une crise au milieu de la cuisine… tu n'es pas enceinte, hein ? "

 

Dar leva la tête et poussa du bout du doigt la surface sur laquelle elle se reposait, faisant doucement rire Kerry. " Nan. " Murmura-t-elle.

 

" Non… " Kerry tendit la main et chatouilla le nez de Dar. " Je suis juste heureuse là où je suis et je ne veux pas rentrer au Michigan… est-ce que c'est un crime ? " Elle expira. " Bon sang, Angie… j'ai ce travail génial et tous mes amis… c'était un stupide accident d'avion pour l'amour de Dieu. "

 

Un soupir. " Ker, ce n'est pas drôle, d'accord ? Tu sais comme il est. "

 

Kerry sentit un sursaut familier dans sa poitrine. " Ouais, je sais. " Répondit-elle doucement. " Comment ça va ? "

 

" Pas trop mal. " Répondit calmement sa sœur. " La routine... la routine… Richard est sorti avec ses copains… je suis ici… tu sais comment c'est. " Elle s'interrompit. " Tu me manques… mais honnêtement, Ker… je comprends que tu veuilles rester loin d'ici. "

 

" Et bien, je te verrai la semaine prochaine, je présume. " Répliqua Kerry. " S'ils ne m'empêchent pas d'entrer, cela dit… peut-être qu'ils se seront calmés d'ici là. "

 

" J'en doute… mais je serai contente de te voir de toutes les façons… s'ils sont durs avec toi tu peux rester chez nous. " L'informa Angela. " Comment ça va pour toi ? Tu as trouvé quelqu'un… hum… je veux dire… et bien, tu sais. "

 

Kerry savait. Elle avait parlé à Angela la dernière fois qu'elle était rentrée des choses qu'elle avait découvertes à son sujet. Sa jeune sœur avait bien mieux accepté qu'elle ne le pensait, et c'était l'une des choses qui lui manquait de la maison. " Oui. " Elle emmêla ses doigts avec ceux de Dar. " J'ai trouvé quelqu'un… en fait. "

 

" Ah… " Angela soupira. " Alors ça n'a pas vraiment à voir avec ton boulot, n'est-ce pas ? "

 

Kerry se mit doucement à rire. " D'une certaine manière… si. " Admit-elle. " Je t'en parlerai quand je viendrai… c'est une longue histoire. "

 

" Apporte des photos. " Lui dit sa sœur. " Je veux m'assurer que ma sœur ne court pas avec une tueuse sacrificielle folle de chèvres Latino. "

 

Les yeux de Dar s'agrandirent pendant qu'elle écoutait, et elle leva la tête outragée. " Tueuse de chèvres ? ? ? " Articula-t-elle.

 

" Shh. " Kerry mit une main sur ses lèvres. " Non pour les deux, Angie. " L'assura-t-elle. " Honnêtement. "

 

Une pause embarrassée. " Es-tu seule ? " Demanda Angela avec hésitation.

 

Kerry laissa une inspiration s'échapper de ses poumons. " Non. "

 

" Oh. " Une réponse embarrassée. " Et bien, je devrais te laisser aller alors… tu dois être… hum… occupée. "

 

Les yeux bleus et verts se croisèrent puis se baissèrent. " Je reviens juste de faire du patin en fait… " Kerry s'éclaircit la voix. " Nous étions assises là à parler… mais… écoute ce que disent les parents de moi, OK ? Je préfèrerais savoir si je vais vers l'Enfer la semaine prochaine. "

 

Angela soupira. " D'accord… je peux le faire… tu fais attention à toi, Kerry… d'accord ? "

 

" Oui… toi aussi, Angie… à la semaine prochaine. " Lui dit sa sœur. " Bonne nuit… "

 

Elle raccrocha et laissa le téléphone sur le sol. " Ma sœur. "

 

Dar réfléchit à ça. " Elle a l'air sympa… tu es sûre que vous n'avez pas été trouvées ? "

 

Kerry grogna doucement. " Ça m'est venu à l'esprit, crois-moi. " Elle tendit la main et ébouriffa les cheveux noirs de Dar. " Tu veux du lait chocolaté ? Il m'a suivie depuis le magasin aujourd'hui. "

 

" Bien sûr. " La grande femme se leva et tendit une main vers elle. " Viens… je crois que c'est l'heure de l'Amoureux des Crocodiles. " Elle attrapa le bras de Kerry et la mit debout, en souriant parce que les patins amenaient sa petite compagne cinq centimètres plus haut que d'habitude. " Mm… bonne place. " Elle se pencha un peu en avant et embrassa les lèvres qui attendaient, sentant les mains de Kerry glisser et venir se reposer contre sa ceinture.

 

" Oh génial… " Kerry s'amusa à ancrer ses doigts dans la boucle et à se tirer plus près. " Je suis destinée à rester clouée sur des patins pour le restant de mes jours. " Dar enroula ses bras autour d'elle et elle laissa son corps se détendre avec contentement contre celui de sa compagne.

 

" Tueur de chèvres ? Quelle genre d'histoires as-tu racontées à ta sœur ? " Souffla Dar dans son oreille. " Tu ne l'as pas effrayée avec ce truc sur la Santeria et la Chupacabra, n'est-ce pas ? "

 

Kerry laissa sa tête reposer contre l'épaule de Dar. " Non… elle n'arrête pas de regarder des vieux épisodes de Miami Vice sur le câble. " Une pause pendant qu'elles s'absorbaient en silence. " Que fais-tu pour Thanksgiving ? "

 

" Tu pourrais m'inviter chez tes parents ? " La taquina Dar, regardant une expression nostalgique passer sur le visage de Kerry. " Je suis invitée chez Gérald Easton… c'est un bon ami et une sorte d'oncle depuis que je suis gamine. "

 

Kerry la tapota doucement. " Bien… je suis contente… je déteste penser que tu es seule… c'est à Washington, n'est-ce pas ? "

 

Un hochement de tête. " Au Maryland, en fait… juste à la frontière… il m'a promis d'autres feuilles que des vertes et une chance pour un peu de neige. "

 

" Mm. " Kerry lui mordilla la mâchoire. " Tu prends ton téléphone portable, n'est-ce pas ? "

 

Dar se pencha en arrière et l'étudia sérieusement. " Si tu as des problèmes avec tes parents… tu m'appelles, Kerry… je serai là, d'accord ? " Elle s'interrompit. " Téléphone portable… oh merde… ça me rappelle. Il faut que je me connecte. Mark m'a interrompue au bon moment alors que je ramenais Michelle et il m'a dit que nous avions une intrusion dans la sécurité. "

 

" Beurk… " Kerry s'assit sur le divan et commença à détacher ses patins. " Est-ce qu'il les a attrapés ? "

 

" Oui. Mais ils ont envoyé un paquet dans le réseau… il le traçait pendant qu'il me parlait. Il allait le suivre et trouver d'où il venait. "

 

" Mets-toi à l'aise. " Kerry fit un geste vers le bureau. " Je vais chercher du lait et des cookies… " Elle se leva et s'appuya contre le dos de Dar en la regardant démarrer une session. " Et mettre le Mec aux Crocodiles. " Elle reçut un baiser doux et insistant en récompense et elle ferma les yeux alors que Dar se tournait pour continuer la pression. Va te faire voir, Michelle… j'espère que tu passes la nuit avec ton oreiller et une baguette de pain

 

La soirée s'annonçait bien..

 

A suivre - Partie 12 

 

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