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LA FACE AVEUGLE DE L'AMOUR19

Page history last edited by Fausta88 14 years, 9 months ago

LA FACE AVEUGLE DE L'AMOUR

 

 

 

 

 

par Dreams

 

Traduction : Keegan (keegan@libertysurf.fr) et Emilie (happymeal@hotmail.fr)

 

 

Table des matières

 


 

38

 

" Bonjour, " salua Kris en entrant dans la cuisine.

 

Leigh ne leva pas les yeux lorsqu'elle murmura d'un air absent, " 'Jour. "

 

Kris s'aperçut que Leigh était occupée à écrire dans un cahier à spirales. " J'interromps ton moment 'journal intime' ? "

 

Leigh marmonna quelque chose que Kris ne comprit pas.

 

" D'accord, " acquiesça Kris. " Et en français, ça donnerait… ? "

 

Deux yeux bruns se détachèrent du papier pour en rencontrer d'autres, verts ceux-là. " Je fais une liste de carrières au cas où je n'arrive pas à être actrice, " expliqua-t-elle, baissant tristement les yeux. " Enfin, je devrais être réaliste. "

 

Ne sachant pas quoi répondre, Kris tourna son attention vers la cafetière. Leigh traversait parfois des moments de doutes et de remises en questions. Kris comprenait ce sentiment, mais connaissait la passion de Leigh, et ne pensait pas que celle-ci abandonnerait pour de bon. Une tasse de café à la main, elle s'assit à la table. " Qu'est-ce que tu as, jusqu'ici ? "

 

Leigh se redressa et s'éclaircit la voix. " Numéro un : travailler à Starbucks pour le restant de mes jours, " lut-elle, puis elle soupira et releva la tête. " C'est fini. "

 

" Et c'est quoi, tout ça ? " demanda Kris, désignant le reste de la liste sur le cahier.

 

" Les courses, " répondit Leigh en s'adossant, comme abattue. " Je me suis déconcentrée. "

 

Kris sourit, mais le cacha en portant la tasse à ses lèvres. " Tu ne devrais pas abandonner le métier d'actrice, alors, " suggéra-t-elle.

 

" J'ai besoin d'un agent, " dit soudain Leigh. " Ça m'aiderait vraiment. "

 

Kris se contenta de hocher la tête.

 

Leigh se tut un moment, en regardant la table. Enfin, elle leva les yeux et demanda, hésitante, " Ton amie travaille à Hollywood, non ? "

 

" La loueuse de vidéos ? "

 

" La californienne, " expliqua-t-elle, bien que cette remarque lui paraisse inutile. " La lesbienne, " ajouta-t-elle, pour être sûre.

 

Kris regarda de l'autre côté de la table, incertaine de la direction que prenait la conversation. " Ouais… " Confirma-t-elle lentement. " Pourquoi ? "

 

Les yeux de Leigh s'illuminèrent d'espoir. " Elle sait peut-être comment je pourrais trouver un bon agent, " dit-elle. " Enfin, elle pourrait peut-être me proposer quelqu'un. "

 

" Je ne sais pas si… "

 

" S'il te plaît, " l'interrompit Leigh. " Demande-lui. Au pire, elle répond qu'elle ne connaît personne, et je retourne à la case départ. " Ses yeux bruns cherchèrent ceux de Kris. " S'il te plaît. "

 

Kris fronça les sourcils, tiraillée entre l'envie d'aider Leigh, et la peur que Julia pense qu'elle se servait d'elle. Un coup d'œil vers le visage plein d'espoir de Leigh fit pencher la balance. " Ok. J'amènerai le sujet la prochaine fois que je lui parle, " accepta-t-elle. " Mais je ne peux rien promettre, " ajouta-t-elle rapidement.

 

Leigh se rua vers Kris et la prit dans ses bras. " Merci merci merci ! Tu ne sais pas combien ça représente pour moi. "

 

" Je ne peux rien te promettre, " répéta Kris, bien qu'elle s'accordât un sourire en serrant Leigh dans ses bras. L'enthousiasme de Leigh était contagieux. J'imagine que je vais devoir appeler Julia.

 

  • * *

 

Julianne n'était pas habituée à recevoir des paquets ne portant pas de nom de studio. Elle n'était pas non plus habituée à recevoir des paquets portant son vrai nom. Pour ces raisons (et d'autres qu'elle ne contrôlait pas) elle continuait d'observer le paquet fermé dans un mélange d'excitation et de peur qui l'écrasait comme jamais un carton ne l'avait fait.

 

" Contente-toi de l'ouvrir, " dit-elle à haute voix. Deux yeux bleus se plissèrent de concentration tandis qu'elle contemplait l'aspect brun et carré de l'objet. " Ce n'est pas comme si elle allait en sortir. " Elle se pencha en avant, prit la boîte sur la table basse et la déposa au sol. Le nom Kris Milano la narguait, écrit au marqueur indélébile, et Julianne se surprit à passer son doigt le long des lettres. " Tant de choses pour vivre simplement, " articula-t-elle avec un soupir.

 

Ses doigts commencèrent à retirer le scotch, mais la sonnerie du téléphone l'interrompit rapidement. Elle attrapa le combiné sur la table basse. " Franqui, " souffla-t-elle, impatiente.

 

" Euh, salut, est-ce que… euh, Julia ? "

 

Julianne se figea au son de la voix de Kris. Merde. " Salut ! Désolée, j'attendais un appel de mon… euh… " Elle observa son salon à la recherche d'un mensonge. N'en trouvant aucun, elle dit la première chose qui lui vint à l'esprit. " …de l'homme qui s'occupe de ma piscine, Frankie. Il doit m'appeler à propos… de produits chlorés. " Elle s'enfonça dans son canapé et ferma les yeux, secouant la tête à sa propre stupidité. " Comment vas-tu ? "

 

" Bien, " répondit Kris. " Et toi ? "

 

Mortifiée au-delà du possible. " Bien, " répondit-elle.

 

" Si tu attends un appel… "

 

" Non ! " dit rapidement Julianne. " C'est à ça que sert le répondeur. Um, que puis je faire pour toi ? "

 

" Je ne savais pas que tu avais une piscine, " dit Kris, au lieu de répondre.

 

Moi non plus. J'imagine que je vais devoir ajouter 'construire une piscine' sur ma liste de choses à faire. " C'est une petite en plastique, " se surprit-elle à dire, réalisant trop tard que son QI plongeait à chaque fois qu'elle ouvrait la bouche en présence de Kris.

 

" Et tu as besoin de chlore pour ça ? "

 

" On n'est jamais trop prudent, " répondit Julianne, puisque qu'elle ne paraissait pas encore assez stupide. " L'eau stagnante, et tout, ça pourrait attirer les insectes. "

 

Kris rit. " C'est marrant. "

 

Julianne rit aussi. Elle pense que je plaisante, ha ha… A l'aide. " Alors, que me vaut le plaisir de cet appel ? " demanda-t-elle en essayant de changer de sujet.

 

Kris s'arrêta et Julianne attendit patiemment une réponse. Enfin, Kris répondit, " À vrai dire, j'appelais pour te demander un service… "

 

Intéressée, Julianne se redressa. " Service ? "

 

" Ouais, " répondit Kris, apparemment très embarrassée. " Ca me gêne vraiment de demander ça. "

 

" Je t'écoute, " l'encouragea gentiment Julianne. Elle n'arrivait pas à deviner ce que Kris pouvait vouloir d'elle, mais était certaine que la requête serait immédiatement accomplie.

 

Kris inspira profondément. " Eh bien, en fait, c'est un service pour Leigh, " commença-t-elle, pour s'arrêter à nouveau. " N'hésite pas à m'arrêter et à refuser dès que tu le souhaites… "

 

" Continue. "

 

" Eh bien, comme tu le sais, c'est une actrice et elle essaye vraiment de percer, mais elle pense que ça serait beaucoup plus simple avec l'aide d'un agent, et je sais que tu travailles à Hollywood, alors j'ai pensé que tu connaîtrais peut-être quelqu'un. Je-je ne veux pas dire lui proposer un agent, simplement si tu connais quelqu'un qu'elle pourrait appeler, peut-être. Ou, tu sais, si tu as des conseils pour en trouver un ou… quelque chose. "

 

Julianne resta silencieuse un moment. Non pas parce qu'elle était offensée par la proposition, mais parce qu'elle cherchait le meilleur moyen d'apporter son aide sans se dévoiler. " Tu sais quoi, je vais voir ce que je peux faire et je te rappelle. "

 

" S'il te plaît, si ça t'embête, ne le fais pas, " ajouta rapidement Kris. " Je ne voulais vraiment pas te mettre sur la sellette et c'était probablement stupide de t'appeler et de te demander… "

 

" Kris, " l'interrompit Julianne, en riant légèrement. " Tout va bien. Ca n'est pas un problème. Je te rappelle ce soir et je te dirai ce que j'ai trouvé. D'accord ? "

 

" Ok, " répondit Kris, un peu plus calme. " Merci beaucoup. "

 

" De rien, " répondit Julianne. " A ce soir ? "

 

" On reparlera ce soir alors, " confirma Kris. " Au revoir. "

 

" Au revoir. " Julianne appuya sur le bouton 'off' du combiné et le regarda pensivement. En haussant les épaules, elle tapa un numéro de raccourci et attendit. " Eric ? C'est Julianne. J'ai besoin d'un service. "

 

  • * *

 

" Alors voilà la cause de ta folie, " commenta Adrian en regardant la photo dans sa main. Il cligna des yeux. " Eh bien, elle est magnifique, je te l'accorde, Jules. " Il regarda la photo suivante et leva un sourcil. " C'est qui le type ? "

 

" Ca doit être son ex, " répondit Julianne sans cacher son dégoût. " L'enfoiré, " ajouta-t-elle pour accentuer ce fait. " Si jamais je croise ce type, je te jure que je… "

 

Adrian se pencha, soudain intéressé par la conversation. " Tu feras quoi ? "

 

" Je lui botterai le cul, " Julianne répondit simplement.

 

" Quelle virilité, " la taquina Adrian en revenant aux photos. Lorsqu'il en eut assez, il les replaça sur la table basse et observa sa meilleure amie avec curiosité. " Alors, qu'est-ce que tu vas faire quand elle te demandera des photos de toi ? "

 

Julianne haussa les épaules. " J'y réfléchirai au moment venu. "

 

" Qu'est-ce qu'elle a envoyé d'autre ? " demanda Adrian en tirant plus près la boîte. Il jeta un coup d'œil à l'intérieur et en sortit un livre de cuisine. Il fronça les sourcils. " Un livre de cuisine ? "

 

" Je lui ai dit que j'aime cuisiner, " expliqua Julianne avec un sourire.

 

" Eh bien, au moins une chose de vrai, " confirma Adrian en plaçant le livre sur la table, à côté de la boîte.

 

" Hé, c'est pas comme si je lui mentais à propos de tout, " répliqua Julianne, blessée par l'implication.

 

" Ne me force pas à te rappeler ton idée de clowns tueurs de l'espace. "

 

Julianne fronça les sourcils. " C'était des robots-aliens. "

 

" Ca n'aide pas ton cas, " répondit Adrian. " Et de toute façon, je ne t'apprends rien. Si tu ne te sentais pas coupable de lui avoir menti, tu ne compenserais pas avec tous ces gestes de bonté. "

 

" Je ne… Ce n'est pas parce que je culpabilise. " Julianne ne parvint pas à croiser le regard d'Adrian. La vérité était qu'elle se sentait coupable, comment ne pas l'être ? Mais ce n'était pas tout. Si la culpabilité avait été le seul problème, Julianne aurait tout arrêté depuis un moment. Mais c'était tellement plus compliqué que ça. Elle ne savait tout simplement pas comment l'expliquer.

 

Adrian regarda Julianne pensivement une minute, puis récupéra les photos sur la table. Il prit une photo dans chaque main. " Faisons un petit test, " proposa-t-il. " Regarde ces deux images. "

 

Julianne haussa les épaules, mais obéit à la demande d'Adrian. " Il y a un but ? " demanda-t-elle.

 

" Il y a toujours un but dans ce que je fais, Julianne, tu devrais le savoir maintenant, " répondit-il. " Ok, alors quelle photo préfères-tu ? "

 

" C'est facile. Celle où elle est seule. "

 

" Et pourquoi ? "

 

" Parce que je n'ai pas à voir le sourire de cette enflure. "

 

Adrian hocha la tête. " Et si cet homme n'était pas une enflure ? S'il était l'homme le plus gentil du monde et qu'ils étaient le couple le plus heureux. Quelle image préfèrerais-tu, alors ? "

 

Julianne fronça les sourcils à la question. Que tentait de prouver Adrian ?

 

Il secoua la tête et reposa les images. " Ce n'est pas si dur, Julianne. Les deux questions ont la même réponse. Pourquoi, d'après toi ? "

 

" Puisque tu es celui qui a un doctorat en psychologie, pourquoi ne me le dirais-tu pas ? " dit Julianne.

 

" Je n'ai pas besoin de doctorat pour comprendre ta manière de penser, Julianne, " répondit Adrian. " Et la réponse est que tu es jalouse de la voir avec une autre personne. "

 

Julianne soupira. " S'il te plaît, ne recommence pas, " supplia-t-elle.

 

" Pourquoi ? "

 

" Parce que. "

 

" Parce que tu sais que j'ai raison. "

 

Julianne se leva et remit les objets dans la boîte. Enfin, elle soupira et regarda son meilleur ami. " Qu'est-ce que tu attends de moi ? "

 

" Je veux être sûr que tu ne plonges pas aveuglément dans cette histoire, " répondit-il. " Je ne t'ai jamais vu t'attacher comme ça à quelqu'un, Julianne, et ça me fait peur. Cette fille ne sait pas qui tu es. Si tu tombes amoureuse d'elle, qu'est-ce que tu feras ? "

 

Julianne souleva le colis et partit sans répondre.

 

Une fois dans sa chambre, Julianne ferma la porte et s'assit au bord du lit en posant la boîte sur le sol, devant elle. Elle regarda le téléphone un long moment avant de le décrocher et d'appeler.

 

" Allô ? "

 

Julianne se redressa. " Kris ? " dit-elle. " C'est Julia. "

 

" Oh salut, " l'accueillit Kris. " Je ne pensais pas que tu appellerais. "

 

" Surprise, alors, " plaisanta Julianne. " Ecoute, je vais t'envoyer un mail avec un numéro de téléphone que tu pourras donner à Leigh. Dis-lui d'entrer en contact avec Eric Moura et d'arranger une rencontre avec lui. "

 

" C'est un agent ? " demanda Kris.

 

" L'un des meilleurs, " confirma Julianne. " Il sera à New York pendant quelques jours, Leigh doit l'appeler dès que possible. "

 

" Wow, " dit Kris dans un souffle. " Merci beaucoup, Julia. Je t'en dois une. "

 

" Ne t'en fais pas pour ça, " lui assura Julianne. " Et de toute façon, le paquet que tu m'as envoyé nous met à égalité. "

 

" Oh, tu l'as reçu ? " demanda Kris, excitée. " Tu as aimé ? "

 

Julianne sourit. " J'ai adoré, merci, " dit-elle. " C'était vraiment gentil de ta part. " Elle se pencha et sortit l'image de Kris seule. " Et j'ai vraiment aimé la peinture. Je vais l'accrocher avec les autres. "

 

" Les autres ? "

 

Julianne se figea un instant, oubliant que Kris n'était au courant que de la première. " Eh bien, j'ai d'autres tableaux, " mentit-elle. " D'autres artistes. "

 

" Oh, " dit Kris. " Eh bien je suis contente que tu aies aimé. Je suis désolée, les photos de moi sont un peu bêtes, mais je n'en ai pas de plus récentes. "

 

" Je te trouve belle, " se surprit Julianne à dire. Elle fut un instant embarrassée par son honnêteté soudaine, mais décida que c'était vrai. " Désolée. "

 

" Pour ? "

 

" D'être si brutalement honnête, " répondit Julianne.

 

Kris rit. " Je m'en remettrai, " lui assura-t-elle. " Et merci. "

 

" De rien. "

 

" Maintenant tu me dois une photo de toi, " dit Kris.

 

Julianne se sentit soupirer. " Je vais voir ce que je peux faire. "

 

" Ca marche, " accepta Kris.

 

" Bref, je dois y aller, " dit Julianne, soudain déprimée. " Je voulais juste te prévenir pour Leigh et te remercier pour le colis. "

 

" Merci beaucoup de faire ça pour moi, Julia, " répondit Kris. " Tu ne sais pas à quel point ça me touche. "

 

" Ca m'a fait plaisir, " lui confia Julianne. " Je t'appellerai plus tard. "

 

" Bye. "

 

Julianne raccrocha le téléphone et retomba sur le lit, l'image toujours dans sa main. Elle observa le visage souriant de Kris et soupira. Que faire ?

 

 

39

 

" Leigh ! " cria Kris depuis la cuisine. " Tu vas être en retard ! " N'obtenant pas de réponse, Kris fronça les sourcils et se dirigea vers la chambre de Leigh. Elle frappa doucement à la porte. " Leigh ? "

 

La porte s'ouvrit si rapidement que Kris en tomba presque. " Désolée, " s'excusa Leigh. " Je traverse une crise. "

 

Kris parcourut la pièce du regard et leva un sourcil. Des vêtements étaient éparpillés sur tout le sol. " Ton placard a éternué ? "

 

" Pire. Je ne sais pas quoi mettre, " répondit Leigh d'une voix paniquée. " Je n'ai jamais rencontré d'agent. Qu'est-ce que je dois porter ? On peut appeler Julia et lui demander ? "

 

" Ce que tu portes est bien, " lui assure Kris. " Et puis tu n'as plus le temps de te changer. Tu dois être là-bas dans vingt minutes. "

 

Leigh se tourna vers le miroir. " Tu as raison. Rater complètement le rendez-vous serait pire. Mais si je me montre, qu'il voit ce que je porte et qu'il s'en va ? "

 

" Ils ne sont pas si durs. "

 

" Comment le sais-tu ? " demanda Leigh. " Tout est une question de look. Devrais-je porter un plus grand décolleté ? Les hommes aiment les décolletés, non ? "

 

" Pas s'ils sont gay. "

 

Leigh regarda Kris avec des yeux ronds. " Il l'est ? Mon décolleté est trop profond ? Il va peut-être penser que je suis une putain. S'il était marié, et que sa femme venait, pensait qu'il la trompe avec moi, nous jette son verre au visage et s'enfuit ? Et avant que le rendez-vous n'ait commencé, il est déjà fini et il court après sa femme en criant 'Ce n'est pas ce que tu penses, chérie, je t'assure ! C'est la première fois que je la vois !' "

 

Kris posa la main sur le front de Leigh. " La bonne nouvelle c'est que tu n'as pas de fièvre. La mauvaise est que tu es folle. " Elle prit la main de Leigh et la traîna hors de la chambre. " Sois toi-même, oublie ta folie, et essaye de ne pas lui jeter de pop-corn s'il dit quelque chose qui ne te plait pas. "

 

Leigh attrapa son sac sur la table de cuisine pendant que Kris la poussait hors de l'appartement. " Souhaite-moi bonne chance. "

 

" Bonne chance, " dit Kris en poussant Leigh dans le hall. " Et maintenant, vas-y ! "

 

Leigh jeta ses bras autour de Kris. " Ca pourrait changer ma vie à tout jamais. "

 

" Seulement si tu t'enfuis avec lui, " répondit Kris en rendant l'étreinte, un sourire aux lèvres. Elle savait combien cet entretien comptait pour Leigh… mais si ça n'aboutissait à rien ?

 

Leigh brisa enfin l'étreinte et prit une profonde respiration. " Ok, je suis prête. " Elle se tourna et sortit dans le hall.

 

" Bonne chance ! " lui souhaita de nouveau Kris. Quand Leigh fut dans l'ascenseur, Kris entra dans l'appartement et s'appuya contre la porte. " S'il vous plaît, faites que ça marche, " pria-t-elle.

 

  • * *

 

" Qu'est-ce que tu as dit à Eric ? " demanda Adrian en engouffrant une cuillère de glace.

 

Julianne le regarda attaquer son Banana Split un moment, puis répondit, " Je lui ai dit que j'avais besoin qu'il rencontre cette fille et qu'il la laisse à un de ses collègues s'il ne voulait pas s'occuper d'elle. "

 

" Et il a dit ? "

 

Julianne haussa les épaules. " Quelque chose pas loin de 'Hein ?' " Elle haussa de nouveau les épaules et vola un peu de glace à Adrian. " J'ai dû le convaincre, mais il a accepté. Il parait qu'il devait aller à New York ce week-end de toute façon, alors il a du rajouter ça dans son emploi du temps. "

 

" C'est tout ? "

 

" Eh bien, j'ai du lui faire promettre sur son boulot en tant qu'agent qu'il ne parlerait pas de moi durant la rencontre avec Leigh. Et s'il elle parlait d'une Julia Frank, de prétendre qu'il n'a aucune idée de qui elle est. Je lui ai dit d'inventer quelque chose. C'est un agent, alors je pense qu'il sait bien mentir. "

 

Adrian rit. " Il a demandé pourquoi tout ce secret ? "

 

" Probablement, " répondit Julianne. Elle sourit. " Mais il était sûrement trop inquiet que je change d'avis sur ce film s'il m'énervait. "

 

" Ca doit être bien d'avoir autant de pouvoir, " commenta Adrian avec un sourire.

 

" Je ne peux rien faire de plus, " répondit-elle d'un ton inquiet. " C'est à Leigh de jouer, maintenant. "

 

" Tu penses qu'Eric va la prendre ? "

 

Julianne soupira et vola une autre cuillerée. " Je l'espère. "

 

" Ca ne sera pas bizarre pour toi ? Vous deux ayant le même agent ? "

 

Elle haussa les épaules. " Probablement. Mais ça rendrait Kris vraiment heureuse. " Julianne sourit à cette pensée.

 

Adrian la regarda un moment et secoua la tête. " Les femmes, " murmura-t-il. " Alors pourquoi tu n'as pas demandé à Eric d'envoyer un de ses collègues là-bas pour rencontrer Leigh ? "

 

" Parce que, même s'il m'énerve, Eric est l'un des meilleurs, " répondit Julianne. " Je ne confierais Leigh à personne d'autre. Si Eric en décide autrement, j'aurai au moins essayé. "

 

" Bien sûr. "

 

Julianne sourit. " Tu sais ce que je préfère à propos de Kris ? "

 

Adrian leva les yeux au ciel. " C'est parti, " marmonna-t-il. " Euh, voyons. Ses yeux, ses lèvres, la manière dont elle fronce les sourcils… ? "

 

" Hmm. " Julianne réfléchit. " Je ne l'ai jamais vu froncer les sourcils, mais elle a des yeux magnifiques. Et ses lèvres sont- " Elle s'arrêta et toussa. " C'est son accent. C'est ce mélange intéressant d'Espagnol et d'Anglais… et quelque chose d'autre. "

 

" Impressionnant la façon dont tu la fais passer pour une marque de café, " répondit sèchement Adrian.

 

" Tu crois au destin ? " demanda soudain Julianne.

 

Adrian regarda le ciel. " Mon Dieu, je promets d'annuler mon abonnement à Playboy si vous me rendez ma meilleure amie. Vous savez laquelle; grande, belle, qui ne s'intéresse pas vraiment aux autres. Je l'aimais bien. "

 

Julianne frappa le bras d'Adrian. " Je suis sérieuse. "

 

Il fronça les sourcils. " Comment sais-tu que je ne le suis pas ? "

 

" Parce que tu n'abandonnerais jamais ton abonnement à Playboy, " répondit-elle avec un sourire.

 

" Bon, tu m'as eu, " accepta Adrian. " Euh, le destin. Eh bien, je crois que c'est plutôt impressionnant que, sur toutes les personnes près desquelles tu aurais pu t'asseoir lors d'un festival de films indépendant, tu te sois assise près de moi. "

 

Julianne sourit. " C'est vrai. "

 

" Et sur tous les films que tu aurais pu insulter, tu aies choisi d'insulter le mien. "

 

Julianne se frotta le nez. " Je suis vraiment désolée pour ça. "

 

Adrian leva les yeux, pensif. " Qu'est-ce que tu avais dit ? Oh oui, 'Le type qui a produit ce film devrait se faire soigner.' "

 

" Ce film exposait comment les poulets faisaient de parfaits citoyens, " rétorqua Julianne.

 

" Et je le pense toujours, " répondit Adrian. " Bref, si tu n'avais pas insulté mon film, je t'aurais peut-être invitée à boire un café au lieu d'insulter tes films; je ne t'aurais peut-être jamais revue. "

 

" Alors tu crois au destin ? " demanda Julianne, apparemment déçue.

 

" Destin est nitsed épelé à l'envers. "

 

" Et ? "

 

Adrian captura le regard de Julianne. " Nitsed me rappelle que le 'destin' n'est que six lettres placées ensemble dans l'unique but d'exprimer un concept abstrait. "

 

" Tu dis ce qu'il te passe par la tête ou tu le penses vraiment ? " le questionna Julianne.

 

" Un peu des deux. "

 

" Eh bien, je crois au destin, " répondit Julianne.

 

" Et le destin va te guider jusqu'à ton âme sœur ? " essaya Adrian.

 

" En théorie. "

 

" Alors ton âme sœur est une femme hétéro de New York qui ne sait absolument pas qui tu es ? "

 

" Des choses plus bizarres se sont produites, " répondit Julianne.

 

" Comme ? "

 

" Toi et moi sommes devenus amis. "

 

  • * *

 

Kris zappait nerveusement les chaînes sans s'arrêter sur une en particulier. Elle n'avait pas changé d'activité depuis que Leigh était partie pour son rendez-vous. Ses yeux bougeaient avec les chaînes mais elle ne retenait aucune des images affichées face à elle.

 

Enfin, elle décida de s'arrêter sur une chaîne au hasard et de récupérer son ordinateur. Elle pouvait toujours passer le temps en écrivant un mail à Julia. C'était un passe-temps productif. Bien plus que de regarder un écran de télévision.

 

Kris eut le temps d'écrire, " Chère Julia, " lorsqu'elle entendit la porte s'ouvrir. Le message oublié, Kris sauta sur ses pieds et se rua vers Leigh. " Comment ça s'est passé ? " fut la première chose qu'elle dit.

 

Leigh entra dans l'appartement avec un immense sourire sur le visage. " Tu ne vas pas croire ce qu'il vient de se passer, " annonça-t-elle.

 

Kris agita ses mains, impatiente. " Continue ! "

 

" La patience est une vertu, jamais entendu parler de ça ? " plaisanta Leigh en s'affalant sur l'une des chaises de la cuisine. Elle attendit que Kris soit assise avant de continuer. " Ok, alors je suis allée au petit café où Eric voulait me rencontrer. "

 

" Eric ? "

 

" Il m'a dit de l'appeler comme ça, " expliqua fièrement Leigh. " Deux heures et nous en sommes déjà à nous appeler par nos prénoms. "

 

" Wow, " répondit Kris. " Et ensuite ? "

 

" Eh bien, " reprit Leigh. " J'y vais et je vois ce type bizarre avec des lunettes et des cheveux en pétard qui a l'air impatient et énervé. Et je me dis 'Oh merde, ça commence mal.' Mais je me remets et j'avance. Je me présente, lui donne mon dossier et j'attends; il ne regarde même pas mes références. Il me regarde ainsi que la photo. Jusque là, la seule chose qu'il ait dit c'est 'Salut, je suis Eric Moura.' Alors je suis assise là, essayant de comprendre si l'homme est fou ou si j'ai fait quelque chose de mal. Je n'aurais peut-être pas dû lui donner mon dossier.

 

" Bref, " continua Leigh. " J'attends qu'il dise quelque chose quand son téléphone sonne. Il s'excuse et s'isole à l'arrière du café. Je n'entends pas ce qu'il dit mais il a l'air énervé contre la personne à qui il parle. Et je le surprends en train de me regarder toutes les deux secondes. Il revient enfin à la table et s'excuse pour l'interruption.

 

" C'est là que les choses deviennent intéressantes, " annonça Leigh en se penchant légèrement en avant. " Alors, il me demande si j'ai déjà joué dans un film avant et je pense, 'pourquoi est-ce qu'il ne lit pas ce qu'il y a derrière la photo; tout est là.' Je ne voulais pas être grossière, alors je lui dis que j'ai tourné quelques publicités à petit budget pour des magasins locaux, mais que j'ai fait beaucoup de théâtre. Là, il se radosse, apparemment pensif. Je m'attends à ce qu'il se gratte le menton, mais non.

 

" Et puis il me demande si me montrer nue me pose problème… "

 

" Comme ça ? " demanda Kris, épouvantée.

 

" Comme ça, " confirma Leigh. " Je te le refais. " Elle s'éclaircit la voix et prit une voix profonde. " Vous montrer nue vous pose-t-il problème ? " Elle rit. " Je n'arrivais pas à savoir si je devais répondre à la question ou le gifler et partir. Je décide de suivre le mouvement. Alors je lui demande de quel genre de nudité il parle et il dit 'Cela vous gène-t-il d'être dénudée dans un film, et si oui, qu'est-ce qui est trop dénudé ? "

 

" Leigh s'il te plaît, dis moi que tu n'as pas été repérée pour un film porno, " supplia Kris, en se sentant soudain malade.

 

Leigh commença à rire. " Je sais, c'est ce que j'ai pensé aussi. Ecoute la suite. Alors je pense, 'Il flirte avec moi ? Il veut que je fasse de la pornographie ? A quoi il pense ?' Je lui dis que je ne suis pas particulièrement pudique tant que ça reste artistique. J'essayais d'expliquer aussi subtilement que possible que je ne ferais pas de porno. Il commence à rire, genre fou rire. Je n'arrive pas à savoir s'il rit à ce que je viens de dire ou si quelque chose le chatouille.

 

" Il arrête enfin de rire, me sourit et dit, 'Ils recherchent une rousse, à peu près votre taille et prête pour un film qui sera tourné en automne. Intéressée ? "

 

" Oh wow, " souffla Kris.

 

" Je sais! Mais j'étais toujours confuse à propos de cette histoire de nudité alors je lui demande en quoi consiste le rôle. Alors il m'explique qu'il y a quelques rôles à prendre et qu'une scène de sexe est prévue pour l'une des parties. Mais il ajoute que s'ils me choisissent, ça ne sera probablement pas pour ce rôle. J'imagine qu'il me testait pour voir jusqu'où j'étais prête à aller. "

 

" Et qu'est-ce que tu as répondu ? " demanda Kris.

 

" Eh bien, il m'a redemandé si j'étais intéressée et j'ai dit quelque chose comme 'carrément !' Il m'a donné le script d'une scène et m'a demandé de mémoriser les deux parties. L'audition est dans une semaine. "

 

Kris cria d'excitation et prit Leigh dans ses bras. " C'est incroyable ! "

 

" Je sais! " répondit Leigh en serrant Kris. " Dans une semaine je serai peut-être sur le chemin qui fera de moi une star. "

 

" Il faut fêter ça, " suggéra Kris.

 

" Très bonne idée, darling, " accepta Leigh, heureuse. " Mais avant tout, je veux appeler Julia en personne et la remercier comme elle n'a jamais été remerciée. "

 

  • * *

 

" Merci beaucoup, Miss Franqui, " annonça l'homme pour la énième fois en deux minutes. " Vous ne savez pas ce que cela représente pour ma fille. Elle adore votre série. "

 

Julianne lui sourit et griffonna rapidement sa signature sur le foulard que tenait l'homme. " Dites à votre fille que je la remercie. "

 

" Oh merci, merci " reprit-il avant de s'éloigner.

 

" Cet homme ne peut pas avoir de fille, " commenta Jan. " Il va probablement se masturber avec ce foulard. "

 

" Jan! " s'écrièrent Susan et Timothy Frank.

 

Jan leva les yeux de son plat de salade et haussa les épaules. " C'est vrai. Il en bavait presque. "

 

Julianne se tortilla dans son siège et essaya de se concentrer sur la nourriture face à elle. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi ses parents avaient insisté pour la rencontrer au dîner. Probablement pour que sa mère puisse maintenir l'image d'une famille heureuse. Julianne piqua un morceau de steak et l'engouffra dans sa bouche.

 

" Alors Julianne, comment avance ton agenda publicitaire ? " demanda sa mère.

 

" J'ai fait quelques photos et des interviews jusqu'ici, " répondit Julianne. " Je vais voyager dans quelques villes choisies dans une semaine. Une cinquantaine d'interviews par jours; marrant. "

 

" Tu es tellement ingrate, " lui dit Jan en secouant la tête de dégoût. " Quand je serai célèbre, j'adorerai donner des interviews. "

 

" Je te souhaite bien du bonheur, " répondit Julianne d'un ton absent.

 

Jan leva les yeux au ciel et revint à son dîner.

 

" Alors, quel est ton prochain projet ? " demanda Timothy à sa fille.

 

Eh bien au moins, ce maudit film sera bon à quelque chose. " Je vais jouer dans un autre film, " répondit-elle. Demande-moi de quoi il parle. Allez, demande. S'il te plaît. S'il te plaît. S'il te plaît.

 

Susan se pencha en avant. " Combien seras-tu payée pour celui-là ? "

 

" Beaucoup, " se contenta de répondre Julianne.

 

La curiosité de Jan l'emporta. " Et de quoi ça parle ? "

 

Julianne sourit presque mais le couvrit avec un verre d'eau. " Je joue une jeune femme qui… " Son portable interrompit le reste de son résumé. " Excusez-moi, " dit-elle à ses parents. " Franqui, " annonça-t-elle dans le téléphone.

 

" Salut Julianne, comment vas-tu ? "

 

Julianne reconnut immédiatement la voix d'Eric Moura. " Salut Eric, " l'accueillit-elle, heureuse de l'interruption. " Que puis-je pour toi ? "

 

" Naomi Mosier, la directrice de La Fin de l'Eté m'a demandé de te contacter, " expliqua Eric. " Elle aimerait que tu viennes à la prochaine audition. Ils veulent de l'aide avec le casting du rôle d'Emma. "

 

Julianne soupira. " Je vais te dire. Tu peux appeler Karen et lui dire où je dois être et quand, et si elle dit qu'elle peut le faire entrer dans mon planning, je le ferai. Si elle commence à te menacer, explique-lui gentiment que tu plaisantais. Puis rappelle Naomi Mosier et dis-lui que le planning de Julianne Franqui ne lui permettra pas d'être présente cette fois-ci. "

 

" Julianne, c'est très important que tu y sois, " insista Eric.

 

" Dis-le à Karen, " répondit Julianne, absente. " Au revoir, Eric. " Elle raccrocha avant qu'il n'ait le temps de répondre. Elle reposa le téléphone et secoua la tête. " Dans environ cinq minutes, mon assistante va m'appeler, " prédit Julianne, même si personne autour de la table ne lui prêtait attention.

 

Quatre minutes et demie plus tard, le portable sonna. Julianne sourit. " Vous voyez ? " demanda-t-elle à son audience inattentive. " Bonsoir Karen, " dit Julianne.

 

" Salut, Miss- euh je veux dire Julianne, " annonça Karen. " Le seul moyen de faire tenir l'audition est de reprogrammer tes interviews pour Samedi. "

 

Julianne réfléchit. " Reprogrammer pose problème ? "

 

" Eh bien, tu dois être à Miami Lundi matin et tu as des interviews toute la journée Dimanche, " explique Karen.

 

" Est-ce que j'ai des jours de congé ? "

 

" Pas avant quelques semaines. "

 

Julianne réfléchit un long moment et dit enfin, " Ok, appelle les gens du Samedi et vois si tu peux faire tenir quelques interviews dans mon planning de Dimanche. Et puis ce qu'il reste, programme-le pour Lundi matin. Appelle les gens de Miami, dis-leur que je serai en retard et promets-leur que je resterai là-bas jusqu'à ce qu'ils aient terminé leurs interviews. "

 

" Tu vas devenir folle, " avertit Karen.

 

" Je suis déjà folle, Karen, " répondit Julianne. " Rappelle-moi et laisse-moi savoir si tout s'est bien passé. "

 

" Je le ferai, " accepta Karen. " Bye. "

 

" Ça doit être nul d'être toi, " commenta sèchement Jan lorsque Julianne raccrocha.

 

Julianne sourit et concentra toute son attention sur la nourriture en face d'elle. " Ca pourrait être pire, " répondit-elle. " Je pourrais être toi. "

 

 

40

 

" C'est dommage qu'Adrian n'ait pas pu venir cette fois-ci, " commenta Karen depuis son siège, à côté de Julianne.

 

Julianne répondit par un grognement évasif et se concentra sur la vue offerte par le hublot. Elle avait trop de choses à l'esprit pour se soucier d'Adrian. D'abord et en premier, il y avait le problème de l'audition. Et s'ils voulaient qu'elle embrasse un tas de femmes différentes ?

 

Karen regardait l'actrice, inquiète. " Tout va bien ? " demanda-t-elle gentiment. " Julianne ? "

 

Julianne se tourna vers son assistante et se força à sourire. " Je n'aime pas voler, " expliqua-t-elle, piteuse, en détournant le regard.

 

" Tu es nerveuse à cause de ce film ? " demanda Karen doucement.

 

Julianne se retourna, les sourcils froncés. " Qu'est-ce que tu sous-entends ? "

 

" Tu te crispes dès que quelqu'un en parle, " répondit Karen, essayant de ne pas prendre un air intéressé.

 

Julianne s'arrêta, indécise sur la marche à prendre.

 

Karen soupira. " Je suis désolée, " s'excusa-t-elle. " Je suis toujours… Je suis désolée. "

 

" Ca va, " lui assura Julianne. " Karen, après deux ans, tu as le droit de poser des questions. Je ne suis simplement pas sûre de la meilleure réponse. " Elle soupira. " Et oui, je suis nerveuse à l'idée de ce film. "

 

Karen se contenta de hocher la tête et détourna le regard.

 

Julianne, ne sachant que dire d'autre sur le sujet, garda le silence. Son attention fut attirée par ses pensées et ses inquiétudes. Il y avait plus que le film. A la base de toute son insécurité et sa peur reposait la chose qui la souciait le plus à propos de Kris. Le fait qu'elle n'ait aucune idée de comment s'occuper de cette situation lui rappelait sans cesse la tombe qu'elle avait elle-même creusée.

 

" Tu sais, " commença Karen, tirant Julianne de sa rêverie. " On dit que j'écoute bien… quand je ne parle pas, bien sûr. Alors, si tu veux parler de quoi que ce soit un jour… Je promets de ne pas l'afficher à la presse. Je signerai un nouveau contrat. "

 

Julianne sourit à son assistante. " Merci, Karen. Je te prendrai au mot un de ces jours. "

 

Karen lui retourna un sourire éclatant.

 

Julianne regarda à travers la vitre une fois de plus, observant les nuages à l'horizon. Sans réfléchir, elle dit " Tu crois au destin ? "

 

" Parfois, " répliqua immédiatement Karen. " Pourquoi ? "

 

" Sans raison, " répondit Julianne, son regard toujours tourné vers les nuages. " Sans aucune raison. "

 

  • * *

 

" Quel est le sujet de ce film ? " questionna Sari Serrano en passant le plat de poulet à Kris.

 

Kris le passa immédiatement à Leigh, sans prendre le temps de regarder les aliments.

 

Leigh attrapa le plat et se servit en poulet frit. " Je ne suis pas sûre, " répondit-elle. " Ils m'ont simplement donné quelques scènes à mémoriser, et je n'ai pas pu lire le script entier. "

 

Kris acquiesça. " Nous avons essayé de deviner à partir des indices donnés dans le dialogue, mais c'est très vague. " Elle haussa les épaules. " Mais nous sommes presque certaines que l'histoire se déroule dans les années 1900. "

 

" Ouais, ce n'est pas un truc de nos jours, " acquiesça Leigh, la bouche pleine de riz et de poulet.

 

Kris se concentra sur sa nourriture un moment, cherchant le courage de dire ce qu'elle voulait dire. Enfin, elle ouvrit la bouche. " J'ai parlé à William aujourd'hui. "

 

Sari leva les yeux de son assiette; Carlos se contenta de grogner.

 

Kris prit le grognement comme une invitation à continuer. " Il va très bien, " dit-elle d'un ton aussi neutre que possible. " Il a trouvé un travail. "

 

" Il est quoi, coiffeur ? " marmonna Dimitri.

 

Kris attendit qu'un de ses parents le reprenne. Elle fut choquée lorsque aucun des deux ne parla. Elle jeta un regard à Leigh qui haussa les épaules. Enervée, Kris dit, " Il a trouvé un travail dans une compagnie d'informatique à Manhattan. Ils vont l'aider à obtenir un diplôme en affaires. "

 

Silence.

 

Enfin, son père parla. " Sari, peux-tu me passer les pommes de terre ? "

 

Kris fronça les sourcils. Avaient-ils entendu ce qu'elle venait de dire ? S'en fichaient-ils ? Elle était tellement choquée et coléreuse qu'elle n'arrivait même plus à manger. Un instant plus tard, elle sentit la main de Leigh sur son bras. Elle se tourna vers sa meilleure amie qui sourit légèrement, en soutien. Kris prit une profonde inspiration et essaya de se concentrer sur son dîner. Du temps, se dit-elle. Ils ont simplement besoin de plus de temps.

 

Après quelques minutes de silence, Carlos reprit la parole. " Alors Leigh, à quelle heure est ton audition demain ? "

 

" A neuf heures du matin, " répondit Leigh. " Je ne suis pas sûre du temps que cela prendra. On m'a dit de prévoir de passer la journée là-bas. "

 

" Nerveuse ? " questionna gentiment Sari.

 

" Très, " confirma Leigh. " Je n'ai jamais été aussi nerveuse de ma vie. "

 

" Ca va aller, Leigh, " lui assura Dimitri. " Il suffira de te les imaginer nus. "

 

Leigh rit. " Merci, Di. "

 

Kris leva les yeux au ciel. Elle en voulait à son frère, et le fait qu'il soit gentil avec Leigh ne lui ferait pas oublier ce qu'il avait dit à propos de William. Elle le fixa du regard, espérant lui transmettre cette pensée. Il haussa brièvement les épaules et recommença à manger.

 

Après le dîner, Carlos et Dimitri sortirent louer un film, et les filles restèrent pour aider Sari dans la cuisine.

 

" Tu as eu des nouvelles de Nathan ? " questionna Sari.

 

Kris avait attendu cette question inévitable. " Non, " répondit-elle. " Et je ne pense pas en avoir à nouveau. "

 

Sari secoua la tête et passa une assiette à sécher à Kris. " Je ne sais pas ce qu'il t'a pris de refuser la demande en mariage de ce pauvre garçon. "

 

Kris garda le silence.

 

" Il est beau, riche et intelligent, " énonça Sari. " Que veux-tu de plus ? "

 

" Je ne l'aimais pas, " expliqua Kris. " Il est tout ça, mais il… " Kris s'arrêta. La dernière chose qu'elle voulait faire était de parler des évènements de la nuit du bal.

 

" Il quoi ? " demanda Sari.

 

Kris regarda rapidement Leigh qui s'occupait de débarrasser la table. Leigh arrêta son travail, anticipant la confession possible de Kris. " Il n'est simplement pas ce que je cherche. "

 

Leigh leva les yeux au ciel et retourna à son travail.

 

Sari soupira. " Eh bien j'espère que tu découvriras bientôt ce que tu cherches, " lui dit-elle. " Tu ne peux pas passer ta vie à briser le cœur de jeunes hommes. " Elle sourit légèrement à son propre commentaire.

 

Kris sourit également et se remit à essuyer les assiettes. Nathan n'était pas ce qu'elle voulait, c'était vrai. Mais que voulait-elle ?

 

  • * *

 

" Café ou thé ? " proposa Naomi Mosier.

 

Julianne réprima un bâillement. Karen avait raison: elle était folle. On était samedi matin, et Julianne était déjà prête à tomber de sommeil. " Café, s'il vous plaît, " répondit-elle. Et bien serré.

 

Naomi Mosier répéta la commande à son assistant et tourna son regard aimable vers Julianne. " Je suis vraiment heureuse que vous ayez pu venir, Mademoiselle Franqui. Je suis une de vos fans depuis un moment. "

 

" Merci, " répondit Julianne, souriant en remerciement. Jusqu'ici, Julianne n'arrivait pas à décider si elle appréciait ou non cette femme. Elle était plus jeune qu'elle ne l'aurait imaginé. Ou peut-être en avait-elle seulement l'air.

 

Naomi hocha la tête, repoussant une mèche de ses courts cheveux blonds derrière son oreille. " Vous avez lu le script, n'est-ce pas ? "

 

Julianne hocha la tête.

 

" Ok, j'aurai besoin de vous seulement pour le rôle d'Emma, " expliqua la directrice. " Nous avons réduit les candidates à quelques femmes et il y en a quelques unes que nous n'avons encore jamais rencontrées. Je suis sûre que vous l'avez déjà fait. "

 

Julianne hocha à nouveau la tête.

 

" Des questions ? " demanda Naomi.

 

Julianne commença à secouer la tête, puis réalisa qu'il serait préférable qu'elle prononce un mot. " Non, " fut le mot qu'elle prononça.

 

Naomi sourit. " Dure nuit ? "

 

" Dur mois, " dit Julianne en rendant le sourire. " Quelle scène allons-nous jouer ? "

 

" J'aimerais en essayer deux, " répondit Naomi. " Celle où Emma et Elizabeth se rencontrent, et une plus loin dans l'histoire. Peut-être celle où elles s'embrassent pour la première fois, si ça vous va ? "

 

Julianne était certaine d'avoir considérablement pali au cours des dernières secondes. " D'accord, " dit-elle, bien que la réponse lui parut forcée.

 

Naomi étudia Julianne un moment et ouvrait la bouche pour dire quelque chose lorsque la porte s'ouvrit.

 

" Quelqu'un veut du café ? " demanda Jeremy Stills, l'assistant de Naomi.

 

Julianne accepta la tasse, reconnaissante, et avala une longue gorgée. La caféine était une merveilleuse invention.

 

Lorsque Jeremy ressortit, Naomi dit, " Eric m'a dit que vous aviez hésité à accepter le rôle. "

 

Julianne tourna son regard vers la directrice.

 

" Y avait-il une raison particulière ? " interrogea Naomi.

 

Julianne termina son café et posa la tasse sur le bureau. " Je n'était pas sûre que ce rôle serait bénéfique pour ma carrière. "

 

Naomi hocha la tête. " Alors pourquoi avez-vous accepté ? "

 

Julianne rencontra le regard de la directrice. " J'aime les défis, " fut sa réponse.

 

La réponse lui convenant, Naomi sourit. Julianne commençait à apprécier ce sourire. " Prête ? " demanda-t-elle en se levant.

 

" Comme toujours, " répondit doucement Julianne, se levant à son tour. Elle suivit la directrice dans le couloir.

 

Karen était au téléphone et raccrocha rapidement lorsqu'elle vit Julianne. " Tout va bien ? " demanda-t-elle en suivant Julianne.

 

Julianne hocha la tête. " Génial. "

 

" Tu es un peu pâle, " chuchota Karen.

 

" C'est le temps de New York, " expliqua Julianne. " Je vais bien, j'attends simplement que la caféine fasse effet. "

 

Karen sourit. " Laisse-moi savoir si tu as besoin d'une autre dose. "

 

" Avec grand plaisir, " lui assura Julianne.

 

Naomi ouvrit une porte, et Julianne entra derrière la directrice. Trois rangées de chaises de chaque côté d'une allée centrale occupaient la pièce. L'un des côtés était occupé par des femmes ayant toute la même apparence; l'autre par un couple de businessmen et quelques individus habillés de façon décontractée. Tout le monde se tut à l'instant où Naomi et Julianne entrèrent dans la salle.

 

Naomi conduisit Julianne sur le côté de la salle, avec les businessmen. " Julianne Franqui, je vous présente Ed Barring et Martha Jacobs, nos précieux producteurs. "

 

Julianne sourit et serra leurs mains. " Heureuse de vous rencontrer, " dit-elle aux deux.

 

Naomi se déplaça vers les personnes plus décontractées. " Et voici Rhea McKee, mon assistante directrice; et Jordan Silver, notre directeur de casting. "

 

Les civilités furent à nouveau échangées.

 

On entendit un bas murmure à l'instant où Julianne Franqui fut repérée.

 

" Prenez un siège, Julianne, " lui dit Naomi.

 

Julianne laissa Karen s'asseoir en première et prit le siège d'à côté. Elle avait compris qu'elle devrait se relever plus souvent que Karen.

 

Naomi s'avança au centre de la pièce et se présenta au petit groupe d'actrices anxieuses. " Aujourd'hui, nous auditionnons pour les rôles d'Emma, Janna et Kim, " expliqua la directrice. " Celles auditionnant pour Janna et Kim joueront ensemble, et échangeront probablement les rôles. Celles auditionnant pour Emma joueront avec Julianne Franqui. "

 

Julianne pouvait deviner que bon nombre de femmes l'observaient, mais elle garda son regard fixé sur Naomi.

 

" Nous auditionnerons d'abord pour les rôles de Janna et Kim, " continua Naomi. " Si j'appelle vos noms, vous devrez venir sur la scène. Les autres attendront ici jusqu'à ce que vous soyez appelées. Des questions ? "

 

Personne ne leva la main.

 

Julianne soupira. La journée prévoyait d'être longue.

 

" Jean Hannon et Leigh Radlin, " appela Naomi.

 

Julianne se figea. Elle sentit le sang quitter son visage. C'est pas possible. Elle jeta un coup d'œil au groupe de femmes et vit Leigh se frayer un chemin jusqu'à la scène. Oh. Mon. Dieu.

 

" Tout va bien ? " demanda Karen, soudain préoccupée. " On dirait que tu vas t'évanouir. "

 

Julianne cligna des yeux, puis parvint à regarder Karen suffisamment longtemps pour dire, " Excuse-moi, " avant de se ruer hors de la salle. Une fois dans le couloir, elle s'empara de son portable et tapa un numéro.

 

" Vous avez joint le bureau d'Eric Moura, " commença le répondeur, " laissez un… "

 

Julianne raccrocha le téléphone et essaya un autre numéro. " Décroche s'il te plaît, " supplia-t-elle.

 

" J'écoute. " La voix d'Adrian retentit.

 

" Adrian, " dit Julianne. " J'ai un problème. "

 

" Que se passe-t-il ? "

 

" Devine qui auditionne pour mon film, " dit-elle.

 

" Brad Pitt ? " essaya Adrian. " Tu t'es décidée à être hétéro ? "

 

" La meilleure amie de Kris, " l'informa Julianne.

 

" La jolie rousse ? "

 

" Celle-là même, " confirma Julianne.

 

" De toutes les fois où je ne peux pas venir à New York avec toi, " dit Adrian. " Je rate toujours le plus drôle. Alors, c'est avec elle que tu devras sortir ? Parce que ça serait génial. "

 

" Adrian ! " pleurnicha Julianne. " Qu'est-ce que je fais ? "

 

" Tsk-tsk, Julianne. Tu sais pourtant que tu ne peux pas compter sur moi pour résoudre tous tes problèmes. "

 

" Aïe. Tu es viré du poste de meilleur ami, " dit-elle avant de raccrocher. Puis elle se frappa le combiné contre le front et prit une profonde inspiration. Je dois seulement rester calme, continuer l'audition, et faire semblant de ne pas savoir qui elle est. Je suis actrice. Je peux le faire. Elle prit une autre inspiration et retourna dans la salle.

 

Naomi donnait les instructions aux deux femmes. Julianne se rassit près de Karen.

 

" Ca va ? " demanda Karen.

 

Julianne hocha la tête. " Je viens de me souvenir que je devais passer un coup de fil. " Elle écouta Naomi un moment puis se pencha vers Karen. " Qui est cette femme rousse ? "

 

" Leigh Radlin, " répondit Karen. " Elle n'a rien fait de particulier. C'est tout ce que je sais d'elle pour le moment. "

 

" Hmm, " commenta Julianne, tournant de nouveau son attention vers les femmes auditionnant. Elle reconnut la scène à l'instant où fut prononcé la première phrase du dialogue. Julianne ne l'admettrait jamais, mais elle avait relu le script tellement de fois qu'elle avait mémorisé presque toute l'œuvre.

 

Julianne réalisa rapidement que Kris n'avait pas menti sur les capacités de Leigh. La jeune femme était douée, très douée. Un regard au reste de la foule lui confirma qu'elle n'était pas la seule à le penser. Le cœur de Julianne était partagé entre diverses émotions. Dans quoi me suis-je fourrée, se demanda-t-elle.

 

Lorsque la scène prit fin, Naomi prit la parole. " Merci beaucoup, " dit-elle. " Jean, bon travail. Nous te recontacterons. Leigh, nous aimerions que vous restiez et que vous jouiez le rôle d'Emma. "

 

Ca ne pourrait pas être pire, pense Julianne. Elle eut presque l'idée de feindre un mal d'estomac, tout pour se sortir de cette situation.

 

Naomi se tourna pour la regarder. " Prête ? " questionna-t-elle.

 

Il n'y a pas de mots pour exprimer à quel point je ne suis pas prête. Julianne força un sourire confiant et se leva. Mon Dieu, s'il vous plaît sortez-moi de là, pria-t-elle en s'approchant de la scène.

 

" Je n'ai pas préparé cette scène, " disait Leigh.

 

Naomi hocha la tête et lui passa quelques pages du script. " Faites de votre mieux, " dit-elle.

 

Un portable sonna quelque part dans la salle et Julianne pria pour que ce soit le sien. Malheureusement, ce fut celui de Naomi. La directrice s'excusa et quitta la pièce.

 

Julianne n'arrivait pas à décider si elle devait retourner s'asseoir ou rester debout. Elle finit par choisir la dernière option. Elle risqua un regard vers Leigh qui lisait le script, apparemment très agitée. " Pourriez-vous me dire quelle est cette scène ? " se surprit-elle à demander.

 

Leigh leva les yeux, la question la troublant, à première vue.

 

" La scène ? " essaya à nouveau Julianne.

 

" Oh, " dit Leigh avant de donner rapidement les pages à Julianne. " Désolée. "

 

Un survol rapide du dialogue confirma les soupçons de Julianne. Qu'ai-je fait pour mériter ça ? Elle rendit le script à Leigh. " Merci, " dit-elle.

 

" De rien, " dit Leigh avant de se replonger dans le script. Un instant plus tard, elle releva les yeux. " Je ne savais pas que c'était un… un… "

 

" Film lesbien ? " proposa Julianne.

 

Leigh hocha la tête.

 

" Si vous voulez fuir, je peux leur dire que vous avez la grippe, " dit Julianne.

 

Leigh sourit. " J'apprécie, " dit-elle. " Mais je pense que je vais le faire. "

 

" Si ça peut aider, vous étiez très bien dans la première scène, " se surprit à dire Julianne.

 

Leigh ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais Naomi choisit cet instant pour revenir. " Désolée, " s'excusa la directrice. " On peut y retourner ? "

 

Julianne et Leigh hochèrent la tête.

 

" Bien, " dit Naomi en s'asseyant. " C'est la scène où Emma et Elizabeth s'embrassent pour la première fois. Les deux personnages sont pris entre plusieurs émotions, essayez de vous en souvenir. Leigh, nous savons que vous n'avez jamais lu la scène, alors faites de votre mieux. Julianne, vous connaissez la scène ? "

 

Comme le dos de ma main. " Oui, " se contenta-t-elle de dire.

 

Naomi lui sourit à nouveau. " Bien. " Elle échangea quelques mots avec l'assistante directrice et hocha la tête. Elle se tourna ensuite vers la scène. " Des questions ? Non ? Ok… action. "

 

Julianne se glissa immédiatement dans le personnage, mais trouva cela bizarre. Elle n'avait jamais essayé cette scène avec qui que ce soit. " Qu'est-ce que tu fais ici ? "

 

" J'ai eu ton message, " répondit Leigh, elle aussi dans son rôle. " J'avais peur que tu sois déjà partie. "

 

Julianne s'assura d'éviter son regard et garda le silence.

 

" Je suis désolée de n'avoir pu venir plus tôt, " s'excusa Leigh en s'approchant. " J'ai été… retardée. "

 

Julianne se contenta de hocher la tête en essayant de contrôler ses émotions. Elle savait que son personnage était en colère mais refusait de le montrer. " Qu'est-ce qui t'a retardé ? " demanda-t-elle enfin.

 

Leigh s'arrêta à mi-chemin. Elle ne répondit pas.

 

Julianne se tourna vers elle, les larmes lui brûlant les yeux. " Tu vas te marier avec lui, n'est-ce pas ? "

 

Leigh ne détourna pas le regard. " Je le dois, " répondit-elle doucement. " Et tu le sais. "

 

Julianne laissa une larme glisser le long de sa joue. " Ca ne veut pas dire que je dois l'accepter, " répliqua-t-elle, essayant de paraître plus confiante qu'elle ne l'était.

 

" Liz, " dit Leigh, s'approchant et essuyant la larme.

 

Julianne s'éloigna.

 

" Pourquoi voulais-tu me voir ? " interrogea Leigh en reculant, sa voix emplie de douleur. Lorsque Julianne ne répondit pas, elle s'approcha à nouveau. " Liz ? " Aucune réponse ne se faisant, Leigh annonça, " Je devrais y aller. "

 

Julianne l'observa s'éloigner quelques secondes et dit enfin, "Emma, attends."

 

Leigh se tourna lentement et Julianne traversa l'espace les séparant. Avant qu'elles ne puissent comprendre ce qu'il se passait, leurs lèvres étaient pressées l'une contre l'autre.

 

" Coupez ! " s'exclama Naomi depuis son siège.

 

Julianne s'éloigna immédiatement. Elle était certaine de rougir des pieds à la tête.

 

" Excellent travail, " annonça Naomi.

 

Julianne se concentra sur la directrice, évitant le regard de Leigh à tout prix. Elle était presque sûre que Leigh était tout aussi embarrassée par la situation.

 

" Leigh, merci d'être venue, " disait Naomi. " Nous vous rappellerons. "

 

Leigh remercia tout le monde, Julianne y compris, et sortit en hâte.

 

Julianne la regarda partir avec un mélange de déception et de soulagement. Elle ne parvenait pas à décider lequel était le mieux. Elle se dirigea vers son siège.

 

" Qu'en pensez-vous ? " questionna Naomi lorsque Julianne la dépassa.

 

" Elle est très bonne, " répondit Julianne, honnête.

 

" Je suis d'accord, " confirma Naomi. Elle tourna son attention vers le reste de l'équipe et discuta de quelques choses avec eux avant d'envoyer les deux actrices suivantes.

 

Julianne s'assit, anxieuse et plus qu'un peu nauséeuse. Karen ne dit rien et Julianne lui en fut reconnaissante. J'aurais dû me faire passer pour malade ce matin, décida-t-elle. Rien n'aurait pu me préparer à embrasser la meilleure amie de Kris. Elle soupira et s'enfonça légèrement dans son siège. Je n'ai pas fini d'en entendre parler.

 

 

**********

 

 

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